FI 7 – 25 septembre 2007 – page 8
Il était aussi caractérisé par l’absence de circuits intégrés, par
une mémoire vive ferrite, et une mémoire morte câblée et
gravée.
Suite à cette innovation, Bill Hewlett a chargé ses ingé-
nieurs d’en développer une version 10 fois plus petite (gabarit
d’un paquet de cigarettes taille royale), 10 fois plus légère
(255g au lieu de 18kg) et 10 fois moins chère ($395 au lieu
de $4900), et il ajouta encore qu’elle devait tenir dans la
poche d’une chemise. La HP-35 a relevé cet ambitieux défi,
tout en intégrant en première mondiale virgule flottante et
fonctions transcendantales (trigonométriques, logarithmi-
ques et exponentielles).
Pour parvenir à une telle prouesse, il fallait vraiment
faire preuve de génie, et c’est pourquoi nous souhaitons vous
présenter un certain nombre de solutions originales qui ont
présidé la genèse de cette formidable machine, précurseur
d’une légendaire lignée de calculatrices, assurant gloire, pres-
tige et fortune à la firme. Mais l’autre défi était de contrer les
Japonais sur le terrain des calculatrices à 4 opérations, qu’ils
monopolisaient mondialement.
Alors que l’ambitieux Bill Hewlett souhaitait vendre
10’000 exemplaires durant la première année, ses conseillers
commerciaux ont tenté de l’en dissuader, argumentant qu’un
instrument de calcul coûtant 20 fois le prix d’une règle à
calcul n’aurait aucune chance d’atteindre un tel objectif.
L’histoire a donné raison au premier, car 100’000 unités
ont été écoulées durant la première année, et au total 300’000
au cours des 3.5 ans de sa production.
Il faut se rappeler qu’à cette époque, une vulgaire cal-
culatrice 4 opérations était vendue en Suisse 444.- chez
InterDiscount !
La HP-35, initialement commercialisée à $395, avec un
taux de change de 3.9 CHF/$, était proposée en Suisse aux
alentours de 2000.- CHF.
La première caractéristique exclusive d’une calculatrice
HP était son mode d’introduction breveté des opérandes,
baptisé notation polonaise inverse, suite à l’invention en 1920
de la syntaxe postfixée par le Polonais Jan Lukasiewicz. Mais
en réalité, la description appliquée à l’informatique, qui est
due à l’Australien Charles Hamblin, a été publiée en 1957.
T
Z
Y
X
t
z
y
x
ENTER
y / x
T
Z
Y
X
t
z
y
x
y + x y - x
y . x
+ - x /
Les 2 principaux mouvements de la pile opérationnelle, à savoir
l'entrée d'un opérande, suivi d'une des 4 opérations
L’architecture interne de la gamme des calculatrices HP
n’a quasiment pas varié jusqu’à l’avènement de la HP-18C
en 1986, à tel point que la calculatrice financière HP-12C,
apparue en 1981 et actuellement toujours commercialisée (à
un tarif prohibitif), possède encore la même architecture que
la HP-35, à savoir une pile opérationnelle de 4 registres de
10 digits (56 bits chacun). Celle-ci détient le record histori-
que de longévité de produit et d’unités vendues par HP.
architecture
La HP-35 est fondamentalement caractérisée par une
représentation numérique BCD (Binaire Codé Décimal),
avec une mantisse de 10 chiffres significatifs et exposant
à 2 chiffres, et toutes les données sont mémorisées dans la
désormais célèbre pile opérationnelle, constituée de 4 re-
gistres à décalage, plus un registre mémoire indépendant
pour y déposer par exemple une constante. Deux registres
généraux, invisibles à l’utilisateur, sont affectés aux résultats
intermédiaires durant les opérations de calcul, et aux for-
matages et masquage des nombres durant l’affichage. Le jeu
d’instructions comporte 54 instructions distinctes codées sur
10 bits, les 8 premiers bits des instructions de branchement
étant réservés à l’adresse.
Le matériel est plus surprenant, car avec ce processeur
entièrement sériel, aussi bien l’adressage et l’accès aux ins-
tructions du microprogramme que les mouvements et les
calculs sur les registres s’effectuent toujours sur une seule
ligne. Les chemins de circulation des instructions et des
données étant totalement séparés, ce processeur respecte le
modèle de Harvard.
La sérialisation de tous les transferts d’informations
entraîne un temps de cycle très élevé de 280µs, alors qu’en
comparaison, le premier microprocesseur monolithique de
l’histoire, le Intel 4004, avait un temps de cycle de 10µs
seulement.
À y regarder de plus près, le processeur spécialisé d’HP
s’avère pourtant plus efficace, en évitant les lectures & écri-
tures en mémoire pour chaque chiffre à traiter, puisque les
registres sont exclusivement manipulés comme des registres
à décalage. Le temps de cycle est alors dicté par la circula-
tion complète du contenu d’un registre, soit l’équivalent
de 14 chiffres (10 pour la mantisse, 2 pour l’exposant et 2
pour les signes).
Avec une horloge à 200 kHz, en découlent un bit time de
5µs, un digit time de 20µs, et un word time de 280µs.
Afin d’optimiser la propagation de la retenue addition-
nelle, les registres sont naturellement exclusivement décalés
de gauche à droite, le chiffre le moins significatif défilant
en premier en direction de l’unité arithmétique et logique.
Inhérente à cette architecture sérielle, l’instruction lue et dé-
codée durant un cycle complet du processeur, ne sera traitée
que durant le cycle suivant. Toutefois, ce décalage temporel
n’affecte heureusement pas la rapidité de la machine.
suite de la Première Page
La saga HP-35