Télécharger Le Mag

publicité
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
S o m m a i r e
4
Le Mot du Rabbin
■ Le juif et la noix
Jacky Milewski
5
6
7
8
10
12
Le Mot du Président
■ Charly Bronner
L’Edito du Rédacteur en chef
20
■ Conférence-débat MEJAF
■ Exposition de peinture : Alain Mimouni
■ Fête de fin d’année du Talmud Torah
Fêtes de Tichri
21
24
■ Seli’hote de la veille de Roch Hachana
Jacky Milewski
13
■ Les écrans et les solennités d’automne
15
Claude Riveline
■ Invité(e)s, soyez les bienvenu(e)s !
Jean-Jacques Wahl
Directeur de la publication :
Charly Bronner
Rédacteur en chef :
Marc Kogel
Secrétaire de rédaction :
Joëlle Dayan
Réalisation, régie et impression :
SAB-Print
contact : Pascal Karsenti
01 30 25 25 57
Conception graphique :
Christelle Martinez
A.C.T.I.
31 rue Montevideo - 75116 Paris
Tél. 01 45 04 66 73
Fax 01 40 72 83 76
[email protected]
www.montevideo31.com
« Il revient à chacun de vérifier
si les prestations de cacherout
proposées par les annonceurs
sont conformes à ses propres
exigences ».
■ Un portrait d’Abraham Ibn Ezra
Judith Kogel
■ Marc Kogel
Actualités culturelles
Histoire
25
26
27
28
Politique
■ Byzance à Ankara : le conflit entre islamistes
en Turquie Pierre Lazar
Economie
■ L’expulsion des juifs : cause du sous-développement
économique Anthony Gribe
Commentaires
■ A propos de... Sivan Rahav Meir Marc Kogel
Cinquante ans après
■ Des paroles aux actes Rabbin Jean Schwartz
Humour
■ La page d’Avidan Avidan Kogel
Hommage
■ Adieu mon Maître, mon plus-qu’ami
Michaël de Saint-Chéron
29
Carnet de famille
■ Naissances, bar mitzvah, mariages, décès…
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
3
L e
M o t
D U
R a b b i n
Le juif et la noix
■ Jacky Milewski
A
Roch Hachana, on a l’usage
de ne pas manger de noix.
L’une des raisons invoquées
dans le Choul’han Aroukh (Ora’h
‘Haïm 583, 2, Roma) pour justifier cette habitude est que le mot
égoze, noix a la même valeur
numérique que le mot ‘hète qui
désigne une faute. En réalité, la
valeur numérique des deux termes
n’est pas équivalente puisque égoze vaut 17
et ‘hète, 18. Cette différence rend encore plus
parlante l’usage de ne pas manger de noix :
le Judaïsme est une exigence morale. L’élément qui se rapproche de la faute, même si
lui-même ne constitue pas la faute, est déjà
appelé à être exclu de la vie.
Le Choul’han Aroukh (Ora’h ‘Haïm 611, 2,
Roma) rapporte que les enfants ont l’habitude de jouer avec des noix, le jour de
Kippour. Kippour est donc lié à la noix. Il nous
faut comprendre le sens de cet usage.
Il existe différents types de noix : la noix belle
à l’intérieur et à l’extérieur, la noix belle à l’extérieur mais pourrie à l’intérieur et la noix
belle à l’intérieur mais souillée à l’extérieur.
Roch Hachana correspond à la noix abîmée
à l’intérieur alors que Kippour est lié à la noix
souillée à l’extérieur.
Roch Hachana est le temps du travail intérieur, du dialogue de soi avec soi sur soi. Le
Talmud (Roch Hachana 26a) suggère bien
que la sonnerie du chofar convoque le souvenir de la conscience. De fait, la sonnerie
du chofar renvoie à la pénétration dans le
Saint des saints, l’intérieur de l’intérieur.
La mémoire est l’un des espaces les plus
intérieurs de la conscience. Le texte de la
haphtara du premier jour de Roch Hachana
évoque ‘Hanna qui parlait à son cœur (I Sam
1). Roch Hachana est le temps du questionnement intérieur. On y découvre une noix,
peut-être belle à l’extérieur mais abimée à
l’intérieur. On ne peut pas la manger.
A Kippour, les données sont modifiées. L’âme
a commencé à se manifester grâce au travail intérieur. Elle apparait discrètement. Elle
a encore du mal à se frayer un chemin. Un
verset du Cantique des cantiques (6, 11)
compare Israël à une noix. Le Midrach Chir
hachirim Rabba explique cette comparaison :
« De même que si une noix tombe dans la
saleté, tu peux la ramasser, la rincer, la laver,
la nettoyer et la manger, de même Israël se
salit, toute l’année durant, en fautant, et le
jour de Kippour peut lui permettre de parvenir au pardon ». Kippour est le temps de
l’élaboration du lien entre la vie intérieure et
la vie extérieure. La noix y est lavée.
La coquille de la noix, les sillons qui y sont
tracés, les deux hémisphères, évoquent le cerveau humain. D’ailleurs, le Talmud (‘Haguiga
15b), se basant sur le verset du Cantique des
cantiques précité, explique que c’est le talmid
’hakham, l’érudit, le cérébral qui est comparé
à la noix.
A Roch Hachana, le juif est comme l’enfant
qui n’est pas encore évolué intellectuellement.
Il veut parler à son père mais il ne parvient
qu’à produire des sons, simples ou saccadés,
qui ressemblent à des pleurs, comme un
enfant simple et humble, qui aime et qui fait
confiance mais qui ne sait pas exprimer cet
amour et cette confiance. L’enfant ne joue pas
avec des noix à Roch Hachana.
A Kippour, le juif, l’enfant a évolué. C’est à
Kippour que les secondes Tables de la Loi
ont été données. L’homme est capable de
comprendre, de saisir, de réagir intellectuellement, de s’engager. A Kippour, le juif accepte
d’apprendre et d’étudier, de marcher sur les
sillons de l’esprit, tracés par nos ancêtres.
Kippour est le jour de la noix.
Tel est le cheminement qui lie le premier au
dernier des Jours Redoutables.
[L’usage à l’époque de la Michna était de
jeter des noix sur les mariés. L’explication
de cette coutume est la suivante : égoze a
pour valeur numérique 17, valeur proche de
‘hète, la faute qui est de 18, ainsi que du mot
tov, bien. Au jour de leur mariage, les mariés
voient toutes leurs fautes effacées. Le jour
de mariage est comme Kippour puisque les
mariés y jeûnent, récitent le vidouy à Min’ha
et le ‘hatane porte le kitel (cf. Séfer taamé
haminhaguim p. 402)]. C’est alors un nouvel
éclairage qui est jeté sur l’opinion de Rabbi
Méir selon laquelle le volume minimal du
cédrat de Souccoth doit être équivalent à
une noix (cf. Souca 34b)... ■
4
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
L e
M o t
L
D U
p r é s i d e n t
es travaux de réhabilitation du centre
Edmond Weil sont à présent entièrement terminés avec, comme cerise sur
le gâteau, un système de climatisation. Nos
salons de réception et toutes nos salles en
étage ont été rénovés et sont donc prêts à
accueillir nos élèves du Talmud Torah, les
classes d’oulpan, tous les enseignements
et conférences et autres activités que nous
vous proposerons tout au long de l’année.
2) Figures de Moïse au XXe siècle par Franklin Rausky,
3) Juifs et Musulmans à travers l’histoire
par Joëlle Allouche Benayoun.
En cette nouvelle année, l’Institut Elie
Wiesel propose de dispenser dans l’antenne de l’ouest parisien (Centre Edmond
Weil) 3 cycles de cours :
1) Talmud et psychologie positive par Guila
Kessous,
A cet effet, l’ACTI éditera une brochure
propre à notre Centre contenant ces enseignements avec dates et horaires. Cette
liste n’étant pas exhaustive, d’autres cours
pourront nous être proposés au cours de
l’année. J’ai confiance que ce programme
Ces cycles d’études seront précédés d’une
leçon introductive de Monsieur Franklin
Rausky dont le thème sera : « d’Abraham
à Job : les personnages bibliques célébrés
par Elie Wiesel ».
■ Charly Bronner
d’études suscitera un vif intérêt
au sein de notre communauté et
bien au-delà.
Avec toutes les activités culturelles, éducatives et autres que
nous vous proposerons dans
notre nouveau centre Edmond
Weil, je nourris beaucoup d’ambition pour notre communauté.
Je vous adresse mes vœux de félicité, de
bonne santé et de prospérité et à l’ACTI le
rayonnement auquel elle peut légitimement
prétendre. ■
S.A.B Print
VENTE d’espaces publicitaires
La Régie Publicitaire de Montévidéo 31
recherche Commercial(e) expérimenté(e)
Contacter : Pascal KARSENTI
Tél. : 06 07 52 93 55 - 01 30 25 25 57 | Mail : [email protected]
Avec toutes les activités culturelles,
éducatives et autres que nous vous
proposerons dans notre nouveau centre
Edmond Weil, je nourris beaucoup
d’ambition pour notre communauté.
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
5
L ’ é d i t o du r é d a ct e u r e n ch e f
■ Marc Kogel
M
es vœux pour 5777
Que cette année soit pour
chacun d’entre nous,
meilleure que la précédente.
Mais pour cela ne comptons
pas que sur les autres et donnons l’exemple en réduisant la
médisance et en augmentant
notre engagement communautaire, présence à l’office
en semaine afin d’assurer le
minyan, inscription aux activités culturelles ou sportives programmées au centre
Edmond Weil, participation aux cours et
conférences.
Nous avons besoin de toutes les bonnes
volontés pour que nos institutions fonctionnent sans à coup, et au delà des
activités de loisirs pour que l’Action
Sociale, la Tsedaka, la Hevra Kadisha
puissent faire face à leurs obligations
toute l’année. Faisons tous ensemble
de 5777 l’année du militantisme communautaire.
Comment on fabrique l’information :
Ruben Salvadori est photographe et
anthropologue, et il s’intéresse à ce qui est
hors cadre dans les photos des reporters.
Il a fait un travail à Jérusalem Est et photographie les grappes de photographes
qui attendent patiemment qu’on leur
fabrique les images dont leurs journaux
sont avides, et pour cela ils commandent
auprès de jeunes palestiniens des mises
en scène qu’ils vont ensuite vendre à
leurs journaux : je vous recommande de
voir ce petit documentaire fort instructif
https://vimeo.com/29280708
La guerre de l’été 2016
Cette année, ce n’est ni la guerre au
Liban, ni celle de Gaza qui a fait la une
des journaux, mais les attentats commis
par les islamistes, dans le monde et aussi
en France. Citons en juin l’assassinat d’un
couple de policiers à Magnanville, puis le
14 juillet le triste attentat de Nice, et l’assassinat d’un prêtre dans une église près
de Rouen. Et voici que la France au mois
d’août s’est passionnée pour une question
de vêtement de plage...
Les médias étrangers ne comprennent pas
en quoi un simple vêtement, peut provoquer tant de passion, même les journaux
israéliens prompts à condamner la presse
française quand elle s’autorise à parler de
la paix en Israël, n’hésitent pas à donner
leur point de vue, confondant un peu vite
la tsniout qui est dans le monde juif, un
choix individuel tout à fait respectable,
avec l’imposition par les hommes d’un
vêtement qui risque de n’être plus du
tout optionnel, mais bien la règle obligatoire, quand on voit l’évolution de la mode
vestimentaire dans certains quartiers de
la proche banlieue parisienne. En Israël,
sauf exception, juifs et arabes ne vivent
pas dans les mêmes villes, les mêmes
quartiers ni dans les mêmes immeubles,
et leurs enfants ne fréquentent pas les
mêmes écoles, certes ils se croisent dans
les lieux publiques, mais sans se fréquenter. Par conséquent, les situations ne sont
pas superposables, ce qui présente ici une
dimension purement religieuse peut revêtir ailleurs, dans un contexte d’attentats
meurtriers, une dimension prosélyte et
politique malvenue.
2015
Le cormoran et la dame
Me promenant un soir du mois d’août sur
une plage de Normandie, à l’heure où les
plaisanciers sont repartis, j’aperçois un
grand oiseau immobile sur le sable. Alors
que je m’approche, il ne s’envole pas ; est-il
malade ou blessé ? Sur ce, une dame qui a
vu la scène arrive d’un air décidé et cherche
à se saisir de l’oiseau en lui bloquant le bec
avec une main, mais l’oiseau se débat et lui
pince violemment la main. Ni une ni deux,
elle retire sa robe, la jette sur l’oiseau, lui
entoure le bec, le saisit d’une main et de
l’autre elle lui bloque les ailes et l’emporte
ainsi vers le poste de secours...
Il arrive que l’impudeur soit vertueuse. ■
6
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
Actu a l i t é s cultu r e ll e s
Conférence-débat M E J A F
« Etre juif et français en Europe :
quel avenir ? Quels projets ?
L
a Maison d’Etudes Juives au Féminin
(MEJAF), fondée par Madame Joëlle
Bernheim, a organisé mercredi 8 juin
dans les locaux du Centre Edmond Weil une
conférence à deux voix sur le thème « Etre
juif et français en Europe : quel avenir ? Quels
projets ? » avec le Grand Rabbin Gilles Bernheim et Alexandre Adler.
Après une présentation de la MEJAF, de
son fonctionnement et de ses projets, par
Madame Joëlle Bernheim et par sa présidente Martine Nataf, et devant plus d’une
centaine de personnes
présentes venues soutenir cette très belle
cause, le débat de très
haute tenue, profond
et posé, a permis aux
deux orateurs d’analyser notamment la nature de l’antisémitisme
européen, les conditions pour penser l’avenir
des juifs en Europe, et les facteurs permettant
de continuer à espérer. Le débat s’est poursuivi par un échange dense et constructif avec
la salle avant que la soirée ne s’achève dans
la chaleur et la convivialité autour d’un buffet
somptueux. ■
Voici le lien qui permet de visualiser la
vidéo de la conférence.
https://youtu.be/UHN0fA96gC0
Actu a l i t é s cultu r e ll e s
Exposition : Alain Mimouni ,
son œuvre picturale
A
lain Mimouni est un artiste peintre
sculpteur né à paris en 1967. à la
base principalement biblique ; il
s’oriente aujourd’hui vers des thèmes
plus contemporains et actuels, tels que le
sport, la vie, l’argent, la crise, mais aussi
l’american spirit, et bien évidemment la
chance – d’où son intitulé « lucky » – qui
est une spontanéité qui joue un rôle, non
des moindres, dans la vie où sans chance
tout est plus difficile et avec du hasard
tout peut changer.
Très jeune il a parcouru le monde en quête
d’images et d’émotions qui se retrouvent
au centre des ses œuvres. En effet, sa
peinture et ses œuvres ont toutes une
signification et un sens masqué et interprétable via la mise en œuvre de son
travail.
Sur des fonds extrêmement travaillés, son
travail est à la croisée de la peinture et
de la sculpture, alliant, dans une secrète
alchimie, la précision des formes et des
couleurs. Sa technique lui permet de
mélanger des matériaux comme le béton,
la pierre ou le bois, le tout en trompe l’œil,
toujours avec un touché réel.
Il varie notamment sa façon de travailler ces matériaux et ces textures, qui est
l’unes de ses façons principales de se
démarquer. En effet, il réalise ses œuvres
tant sur de la toile que sur du plexiglass,
8
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
ou bien encore de l’aluminium qu’il
ondule.
Son choix des matières est un choix
réfléchi au regard de l’œuvre qu’il effectue. Beaucoup de réflexions encadrent sa
manière de procéder. Par exemple, pour
le thème de la vie, l’ondulation sera une
manière de donner du mouvement à son
art pour représenter les hauts et les bas
de celle-ci. ■
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
9
Actu a l i t é s cultu r e ll e s
Fête de fin d’année
d u Ta l m u d To r a h
C
ette année, les
enfants se sont
dépassés, puisque
petits et grands ont tenu
à préparer des petites
pièces ou des lectures
de manière à faire de
cette fête un spectacle
pour la plus grande joie
des parents. Un grand
merci à Mme Shapiro
et aux Morot pour la préparation
de cette fête.
Les prix ont été distribués aux
enfants présents par le Rabbin
Milewski.
Nous espérons revoir tous les
enfants à la rentrée et pouvoir
compter sur des effectifs plus importants encore
cette année. ■
10
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
11
F ê t e s d e T i ch r i
Seli’hote de la veille
de Roch Hachana
SELI’HA 37
« Maître, quand, au matin, Tu Te
souviendras de l’humanité,
Ne juge pas avec stricte justice,
Si Tu dresses l’âme contre le corps,
Ils seraient repoussés et ne sauraient
se lever,
L’homme peut-il être méritant lors du
jugement ?
A-t-il dans sa main un acte qui puisse
le justifier ?
La semence de laquelle il est créé est
une goutte nauséabonde,
Son ennemi est caché en lui depuis le
temps de sa naissance,
Dissimulé, tel un piège à ses pieds,
Il l’incite chaque jour à la destruction,
à le faire trébucher,
Depuis le jour où il a conscience des
choses,
Il place son âme dans sa paume pour
rapporter son pain,
Rassasié, toute sa vie, d’épuisement, de
colère et de douleur,
Jusqu’à son retour à la poussière, il ne
trouve pas de repos,
Tourne-Toi, Maître, vers la tristesse de
cet esprit,
Observe la brisure de son cœur,
Tu es proche des lointains,
Désirant le repentir des méchants,
D.ieu qui Se suffit à Lui-même, dévoileToi pour ceux qui Te recherchent,
Déclare à ceux qui Te réclament : « Me
voici »,
Qu’il soit annoncé à ceux qui invoquent
Ton Nom : « J’ai pardonné »,
Justifie par le jugement le peuple qui
affirme Ton unité,
Réduis au silence le laid personnage
pour qu’il n’accuse pas,
Enflamme-Toi contre celui qui incrimine
pour qu’il cesse ses attaques,
Etablis pour nous un avocat,
Aux rebelles, fais entendre « j’ai trouvé
l’expiation »,
Nous avons jeté à Toi notre fardeau,
12
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
De grâce, assure-nous la subsistance,
Accepte pour nous notre prière,
Accède avec miséricorde à notre désir et
notre demande,
En Toi, nous avons placé notre confiance,
Que Ta miséricorde nous précède rapidement,
Toi qui es fort et puissant, Ton Nom,
nous n’avons pas oublié,
De grâce, pour l’éternité, ne nous oubliepas ».
De Rabbi Yts’hak haKohen (on ignore tout
de ce Rabbi si ce n’est qu’il est antérieur
à l’année 4996).
« Déclare à ceux qui Te réclament : “Me
voici (hinéni)” » : ce vers sonne en écho
au passage de la Torah lu le second jour
de Roch Hachana où D.ieu interpelle Avraham et celui-ci répond : « Me voici ! »,
expression qui traduit une totale disposition en vue d’accomplir la demande de
D.ieu. La demande est réciproque.
SELI’HA 38
« Maître, quand Tu jugeras l’hommevers,
Souviens-Toi, dans Ta colère, de la grâce
et de la consolation,
Dans Ton estimation, quand Tu juges
pour réprimander les coupables ;
Le fauteur involontaire et le stupide,
innocente-les et justifie-les,
Dispense bonté et bien aux coupables ;
N’étends pas le conflit à l’extrême ;
Les indigents en bonnes actions et les
manquants de capacité,
Appellent vers Toi, dévoile-Toi à eux ;
Nous voici devant Toi grandement
coupables,
Nous sommes honteux d’ouvrir la
bouche pour parler et prier,
L’humain pourrait-il se justifier devant
D.ieu ?
L’homme pourrait-il se montrer pur à la
face de Celui qui l’a créé ?
■ Jacky Milewski
Des fautes en lui, de l’iniquité en son
sein,
Empli de péchés, plein de rébellion,
Compte et justice au Roi des rois,
Il est destiné à rendre quand surgira
le passage [la mort],
La marque du sceau est gravée dans
sa main,
A son visage, sa méchanceté s’exprimera,
La poutre de bois montrera et témoignera,
Du mur de pierre, elle interpellera et
hurlera,
L’homme jugé baissera la tête et sera
humilié,
Se tenant devant Toi, néant, il est
considéré,
De grâce, agrée l’œuvre de Tes mains,
Observe la brisure, protège-le pour qu’il
ne tombe dans la géhenne,
Tes serviteurs trouveront aujourd’hui la
grâce,
Purifie-les par Ta proximité, désire-les
comme aux premiers temps,
Et comme la neige, blanchis les fautes
de la rose ».
De Rabbi Elia bar Chemaya.
L’homme laisse des traces, invisibles,
imperceptibles, écrites de sa propre main
(« La marque du sceau est gravée dans
sa main »). Chaque homme est à son
insu un écrivain qui raconte sa vie et ses
agissements. C’est ce livre qu’il lira plus
tard, dans le temps qui n’a pas de fin, c’est
ce livre qui le répugnera ou l’emplira de
satisfaction. ■
Les écrans et
les solennités d’automne
C
onnexions et relations.
Bientôt, chacun aura, à son poignet, un écran qui lui donnera, outre
l’heure, le téléphone, la télévision, Internet, sa tension artérielle et le nombre
de pas qu’il a parcourus depuis la veille.
Fabuleux ! Chacun pourra ainsi connaître
tout sur tous et sur toutes choses.
Comme aboutissement d’une humanité
qui souffrait d’ignorance et de solitude,
le progrès est apparemment féerique.
Mais est-ce bien sûr ? En ce qui
concerne l’ignorance, ce n’est pas
douteux, dans la mesure où l’on a des
questions. Mais en ce qui concerne la
solitude, bien que nous soyons potentiellement connectés à toute la terre, il est
facile de montrer que notre solitude s’est
globalement aggravée, et que la numérisation nous enferme dans une solitude
malsaine face à nos écrans, solitude que
viennent heureusement briser, pour les
Juifs, le shabbat et les fêtes, en particulier
les solennités d’automne, Roch Hachana,
Yom Kippour et Souccoth. J’y vois aussi
un lien avec la Tour de Babel et, grâce au
talentueux neurologue Lionel Naccache,
avec l’épilepsie. Ces rapprochements
énigmatiques vont s’éclairer, à la lumière
d’une réflexion sur la différence entre
connexion et relation.
Connexions et relations.
Considérons deux questions que je
pourrais poser à mon épouse. Première
question : quelle heure est-il ? Deuxième question : est-ce que tu m’aimes
comme avant ? Il est clair que le rapport
que ce début de dialogue va instituer
entre nous ne sera pas du tout de même
nature. Dans le premier cas, je connaîtrai
l’heure, sans plus. Mais dans le second
cas, un petit drame s’amorce, car elle se
demande pourquoi je pose cette question, elle se dit que quelle que soit sa
réponse (oui ou non), j’enchaînerai sur
autre chose, et cet échange va nous
modifier tous les deux, il faut espérer
en bien. Mais pour connaître l’heure, je
pourrais aussi bien consulter un écran,
auquel cas ma solitude restera intacte,
alors que si j’interroge ma femme, une
minuscule relation humaine s’est amorcée. Mais rien à voir avec le second
dialogue, qui illustre une relation. Le premier ressemble à une simple connexion.
Il est frappant d’observer le temps
que nous passons aujourd’hui, de la
petite enfance à l’âge le plus avancé,
à contempler des écrans. Outre la télévision, dans les cours de récréation, les
repas familiaux, les réunions de travail
et même à l’Assemblée Nationale, chacun regarde un DVD, consulte ses mails,
reçoit et envoie des SMS, emmuré dans
un rapport à des textes et à des images
et coupé de ses camarades, commensaux ou collègues, pourtant présents
tout près de lui. Les emails ressemblent
à des lettres, et d’ailleurs les remplacent
de plus en plus, mais ils sont si rapides
à rédiger et à expédier que la plupart
des destinataires sont ensevelis sous
des avalanches de messages auxquels
ils n’ont guère le temps de répondre,
dans l’hypothèse où ils les lisent. Ces
communications abondantes et fébriles
réduisent les relations humaines à des
connexions de plus en plus anonymes.
Autrement dit, si toute relation commence, certes, par une connexion,
l’excès de connexions empiète sur les
relations au point, à la limite, de les
abolir. Un ouvrage américain, best-seller des années 80, l’a dit avec une force
particulière.
« Se distraire à en mourir1 »
Cet essai entreprend de démontrer que
la télévision, compte-tenu du fait qu’elle
est économiquement contrainte d’attirer
le plus grand nombre possible de téléspectateurs, ne peut livrer que des
message agréables, amusants, qui
retiennent par le plaisir qu’ils procurent
et ne demandent aucun effort. Il la met
■ Claude Riveline
en regard des livres, qui ont constitué
dans les siècles antérieurs l’essentiel de
l’accès à l’information, et qui, à l’inverse,
obligent les lecteurs à un travail puissamment structurant. Dans une contrée
majoritairement protestante comme les
USA, la lecture de la Bible a toujours
été une obligation quotidienne dans les
familles. De même, en terre catholique
comme la France, c’est l’Eglise qui a
assuré depuis Charlemagne l’enseignement de la lecture. Par contraste, on est
effrayé de mesurer le nombre d’heures
que passent les personnes, et en particulier les enfants d’aujourd’hui, devant
la télévision, auxquelles il faut ajouter
toutes les autres séductions des écrans,
comme le fait brièvement Neil Postman
lui-même à la fin de son ouvrage. Mais
au temps où il l’a rédigé, les téléphones
portables et autres i-phones venaient à
peine d’apparaître, ce qui donne à son
réquisitoire une pertinence considérablement renforcée aujourd’hui.
En résumé, les écrans affaiblissent
jusqu’à les abolir les relations avec
autrui, et la passivité à laquelle ils nous
poussent en arrivent à affaiblir jusqu’aux
relations que nous avons avec nousmêmes. Cette atrophie des relations fait
penser au mythe biblique de la tour de
Babel.
La langue de la Tour.
Le chapitre XI de la Genèse commence par ces mots : « Toute la terre
avait les mêmes mots et des paroles semblables ». J’ai formulé jadis2 l’hypothèse
que cette langue unique était composée, comme la langue des connexions
numériques, de deux mots seulement :
zéro et un. Les contemporains de la Tour,
nous dit le texte, se sont accordés pour
atteindre le ciel, à la manière de nos
modernes gouvernements qui n’ont à
➤➤➤
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
13
F ê t e s d e T i ch r i
➤➤➤
offrir comme perspectives à leurs peuples
qu’une croissance économique indéfinie.
Le Créateur n’a pas condamné cette
entreprise, qui pourtant Le défiait, parce
que la paix régnait entre les hommes.
Mais c’était une paix sans dialogues, une
paix d’esclaves. Alors Il créa la diversité
des langues, afin que chacun prenne
conscience de la diversité des identités.
Il fallut alors déployer des efforts pour
communiquer, et les connexions se transformèrent en relations.
Mais encore faut-il que les interlocuteurs aient le temps de s’écouter et de
se répondre. Après tout, les mails, bien
que codés en zéros et uns, véhiculent des
messages potentiellement aussi riches
que les paroles de toujours. Oui mais il
y en a trop par unités de temps. C’est
là qu’intervient la brillante intuition du
professeur Naccache.
L’épilepsie mondiale
Dans son dernier essai3, le professeur
Naccache part de la remarque que l’activité normale du cerveau est matérialisée
par des transports d’électricité entre
les neurones. L’épilepsie consiste en
une multiplication anarchique de telles
communications, qui fait que le sujet est
atteint de symptômes violents et qu’il
peut perdre toute conscience. L’auteur
propose un parallèle avec la multiplication des réseaux sociaux, qui véhiculent
une telle quantité de messages que
ceux-ci s’appauvrissent, s’uniformisent
et suscitent des aberrations comme des
affaissements culturels ou des fanatismes religieux. Face à ces risques de
totalitarisme planétaire, il appelle de ses
vœux une riche cohabitation entre des
singularités traditionnelles soigneusement entretenues et de mondialisations
raisonnables, sur des objets qui s’y
prêtent et qui n’appauvrissent pas les
identités.
La tradition juive répond de manière
admirable à de telles préoccupations.
Les convocations d’automne,
festivals de relations.
Face à cette éclipse des relations
induite par les écrans, les fêtes juives
d’automne, Roch Hachana, Yom Kippour
et Souccoth peuvent être interprétées
comme des invitations à approfondir
14
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
toutes sortes de relations, relations à
l’Histoire à Roch Hachana, relations à
soi-même à Yom Kippour, relations à
autrui à Souccoth.
Le son du chofar à Roch Hachana
vient nous rappeler que cette sonnerie a
accompagné tous les grands épisodes de
l’histoire de l’humanité tels que l’évoque
la Bible, depuis la création de l’homme
jusqu’à Abraham, du don de la Tora à la
destruction des Temples de Jérusalem,
et accompagnera le retour des exilés, la
venue du Messie et la résurrection des
morts.
La fête de Kippour est consacrée à
la remise à jour des relations avec soimême, ce qu’illustrent notamment les
diverses significations de l’expression :
ve-initem et ’nafchoteh’em , d’où l’on
déduit le jeûne de vingt-cinq heures, et
que l’on peut traduire par « vous vous
infligerez une ascèse » pour rentrer en
vous-même, « vous répondrez » aux
questions ainsi posées, et « vous chanterez » sous l’effet de cette renaissance.
La fête de Souccoth, quant à elle, a
le double aspect d’un retour aux relations avec la nature et d’un retour aux
relations avec nos semblables, notamment les 70 nations, qui viendront, nous
assure la tradition, offrir chacune un taureau au Temple de Jérusalem reconstruit
aux temps messianiques.
Cet approfondissement de toutes
relations ne signifie aucunement que
le peuple juif tourne le dos aux progrès
qu’induisent les connexions, bien au
contraire.
Conclusion : la conception juive
du monothéisme.
Les contributions des juifs, en particulier du moderne Etat d’Israël, à la science
et la technique modernes, en particulier
dans toutes les branches actuelles de la
numérisation, sont d’une importance
sans commune mesure avec leur démographie. Ils sont donc très compétents et
très actifs pour promouvoir les bienfaits
pratiques que ne cessent d’apporter
les connexions. Mais l’observance des
mitsvoth, nous venons de le voir, les
contraint heureusement à sauvegarder
ce que le monde des relations apporte
comme remèdes aux dangers de déshumanisation que ces progrès comportent.
Cet équilibre entre les valeurs de la
rationalité et celles de la vie morale est
cohérent avec le cœur du monothéisme
juif tel que l’exprime la formule du
Chema Israël. Ce verset proclame en effet
que la manifestation du Divin comme
Créateur de l’univers, et Son humble
présence, par exemple au Buisson Ardent
et sur le Mont Sinaï en relation avec les
hommes, sont des manifestations d’une
seule et même essence. Réponse parfaite
aux menaces que le progrès sans limite
des écrans sans âme font peser sur l’humanité. ■
1. Se distraire à en mourir, Neil,
Portman. Préface de Michel Rocard.
PLURIEL. Edition originale USA 1985.
2. « Le modèle de l’Occident »
XVIIe colloque des intellectuels juifs
de langue française. PUF 1977, p.21.
3. Lionel Naccache. L’homme
raiseau-nable. Du microcosme cérébral
au macrocosme social. Odile Jacob.
2015.
Invité(e)s, soyez
les bienvenu(e)s !
L
a fête de Souccoth est probablement
celle qui a donné naissance au plus grand
nombre de minhagim. Le minhag, coutume, habitude, manière de se conduire, est,
dans le droit hébraïque, soucieux de rigueur,
une catégorie atypique. Elle recouvre aussi
bien des usages assimilés à des mitzvot que
des habitudes locales dont l’origine n’est pas
toujours évidente et qui sont plus ou moins
contraignantes. Dans les limites de cet article,
nous n’avons pas la prétention d’examiner la
complexité du minhag et nous contenterons de
nous attacher à l’un d’entre eux, qui non seulement s’est maintenu au cours des siècles, mais
connaît même actuellement un rayonnement
surprenant, celui des oushpizin.
■ J e a n - J a c q u e s Wa h l
Oushpizin, que signifie cette dénomination ?
C’est un mot araméen qui apparaît déjà dans
le Talmud (1) mais qui est en réalité une aramisation du latin hospes que l’on reconnaît
en français dans les mots hôte, hôtel, hôpital,
hospitalité.Autant de dérivés que l’on retrouve
en hébreu jusqu’à l’expression moderne
meoushpaz, hospitalisé.
du Moyen-âge dans les cercles cabalistiques
inspirés d’un passage du Zohar qui commente
le verset
« vous
habiterez sept jours dans les cabanes » (Lev.
23,42) dans ces termes : « Tandis que l’homme
réside dans cette demeure (la souccah) la présence divine étend ses ailes sur lui. Abraham
accompagné de cinq Tzadikim (Justes) et du
roi David demeure avec lui » (2)
Mais revenons à nos oushpizin, en l’occurrence
nos invités, nos hôtes. Ils apparaissent à la fin
Telle est l’origine de cette coutume. Reste à
convenir des cinq Justes qui escortent Abraham
Montréal vers 1950
L’utilisation des signes du Zodiaque est fréquente dans l’iconographie juive dès l’antiquité. On remarquera, entre autres, la représentation du signe
des “gémelles” et ‘illustration naïve du kotel (GFC Trust).
➤➤➤
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
15
F ê t e s d e T i ch r i
➤➤➤
Jérusalem vers 1900
Ordre des oushpizin selon la tradition ashkénaze. À l’origine lithographie pour indiquer le mizrach à laquelle a été ajouté l’accueil des oushpizin.
(GFC Trust)
et David. Le Zohar mentionne Isaac et Jacob,
mais ne désigne pas les trois autres. Très vite
Moïse et Aaron s’imposent, reste à coopter
le dernier. C’est finalement Joseph qualifié de
Tzadik dans le midrach qui complète la cohorte
ce qui nous donne la liste suivante « Abraham,
Isaac, Jacob, Joseph, Moïse, Aaron, et David »
du moins pour l’ordre suivi par les ashkénazim
tandis que les sépharadim et la plupart des
hassidim placent Joseph et David en dernier.
Comment expliquer cette divergence ? Nous
avons vu que cette tradition est née dans le
milieu cabalistique où chaque personnage s’est
vu attribuer une séphira (3) (émanation de la
puissance divine pour faire simple !) et le premier classement suit celui qui est généralement
attribué aux séphirot. Quant à la variante qui
place Joseph et David en dernière position on
peut y voir une allusion à la perspective messianique où le Messie fils de David sera précédé
du Messie fils de Joseph. D’autres nomenclatures où Joseph était remplacé par Pinhas ou
16
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
par Salomon sont attestées mais n’ont pas été
retenues.
Reste à comprendre comment une tradition
née dans un milieu spécifique, fondée sur des
notions mystiques, a pu se propager à travers
le monde juif. La raison essentielle est probablement l’accent mis sur la convivialité. Accueillir
chaque jour un nouveau convive, fut-il virtuel,
permet d’éviter ce qui pourrait apparaître
comme répétitif, routinier, dans la célébration
des sept jours de fête. Mais surtout la réception des invités a donné lieu à toutes sortes de
pratiques qui l’ont étoffée.
La première est l’approfondissement du contenu
ésotérique qui a trouvé sa place dans les communautés sensibles à ce courant. On y a insisté
sur la nécessité de profiter de ces jours de fêtes
où le travail était prohibé ou pour le moins limité,
pour renforcer l’étude du Zohar et d’autres
textes mystiques. On trouve un témoignage de
cette tendance dans un recueil contemporain des
usages de la communauté de Boukhara qui rapporte : « aujourd’hui encore on lit chaque soir des
passages du Zohar sur un air traditionnel, lecture
qui dure assez longtemps et dont en général on
ne comprend pas le sens mais la mélodie émouvante est très appréciée des auditeurs » !
Chez les partisans d’un judaïsme plus rationnel c’est l’étude de textes talmudiques ayant
les différents oushpizin comme sujet qui a été
privilégiée pour occuper ces heures de loisir. (4)
Mais la consigne de consacrer beaucoup de
temps à l’étude n’aurait probablement pas suffi
à pérenniser ce minhag si elle ne s’était pas
accompagnée d’actes moins contraignants !
Il y eut d’abord l’usage d’accueillir chaque soir
avant de s’asseoir dans la soucca les oushpizin
par de joyeuses formules de bienvenue que
l’on retrouve dans certains sidourim : « Entrez
hôtes suprêmes (éliyonim) et saints, entrez vous
asseoir à l’ombre de la foi (betzèl haémouna) »
puis est proclamé le nom de celui qui ce jour
précède les autres. Car contrairement à une
idée répandue ce n’est pas l’un des tzadikim
qui est censé apparaître chaque jour mais l’ensemble des 7 personnages tandis qu’à tour de
rôle ils se relaient pour guider le groupe.
Que viennent faire ces visiteurs ? Leur rôle est
éclectique, ils viennent témoigner de la présence divine, qu’ils concrétisent en quelque
sorte. Mais ils viennent aussi s’assurer que la
conduite de ceux qui les reçoivent est conforme
à ce qu’on attend d’eux pendant la fête. Si tel
n’est pas le cas ils n’hésitent pas à se retirer s’ils
se trouvent dans une assemblée où la prescription biblique « tu te réjouiras pendant ta
fête » (Deut. 16,14)
n’est pas
respectée et où prédomine tristesse ou colère.
Mais la plus grande faute est de ne pas observer ce qui est le cœur de l’exigence liée au
séjour dans la soucca, celle de l’hospitalité en
particulier vis-à-vis du pauvre. Ce n’est pas par
hasard qu’Abraham, figure emblématique de
l’hospitalité a été choisi pour prendre la tête des
oushpizin. Déjà dans le Zohar l’accent est mis
sans équivoque sur cette obligation. « Si l’on ne
donne pas au pauvre ce qui lui revient, Abraham quitte la table et s’écrie, citant le verset
du livre des Nombres (16,26) « Eloignez-vous
des tentes de ces méchants hommes, et ne
touchez à rien de ce qui leur appartient » et
ses compagnons se lèvent et le suivent » (5).
Pour éviter une telle humiliation les communautés ont institué des règles précises. Dans
certaines ont s’efforçait d’avoir 7 pauvres à
chaque repas, dans d’autres il convenait d’en
recevoir au moins un, dans d’autres encore,
on se retrouvait le soir pour partager un repas
dans la soucca d’une personne dont le prénom
correspondait à celui de l’oushpiz du jour et
à défaut de pouvoir recevoir à sa table, par
manque de place, le nécessiteux, on veillait à
lui remettre de quoi acheter des vivres.
Mais la richesse du minhag ne s’arrête pas
là. Elle se concrétise aussi dans une autre
coutume : la décoration de la soucca liée à
la recommandation de hidour mitzvah, l’embellissement de toute mitzvah. Comme en
témoignent les illustrations de ces pages des
vœux de bienvenue aux oushpizin sont accrochées aux murs comme le sont souvent les
portraits des Patriarches. Et à ceux qui s’étonnerait d’une interprétation complaisante du
deuxième commandement (interdiction de la
représentation) les rabbins ont répondu par
un verset du prophète Isaïe (30,20) « tes yeux
verront ceux qui t’enseignent ».
Montréal 1947
L’influence mystique se manifeste par la représentation du troisième Temple tel qu’il est décrit dans les chapitres 40 à 48 du livre d’Ézéchiel.
(GFC Trust)
➤➤➤
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
17
F ê t e s d e T i ch r i
➤➤➤
Plus confidentielle, l’habitude d’allumer chaque
jour 7 bougies en l’honneur des oushpizin
est mentionnée dans plusieurs ouvrages du
16e siècle. À notre époque où règne à juste
titre le principe de précaution on peut sûrement
s’abstenir de suivre cette recommandation et
pourquoi ne pas lui substituer l’allumage de
7 ampoules !?
Mais la coutume la plus répandue et la plus
visible a été l’introduction dans la soucca
d’une petite table recouverte d’une élégante
nappe, ou le plus souvent d’un fauteuil qui
est lui aussi, recouvert de tissu sur lequel on
ne s’assoit pas mais où l’on place des livres
de prières ou de textes sacrés. Dans certaines
communautés pour souligner son caractère
symbolique ce fauteuil n’est pas posé à terre
Allemagne 1855
Tradition ashkénaze. Papier découpé. Cette technique répandue pour des tableaux destinés à décorer les maisons et très rare pour la soucca
en raison des intempéries d’automne. On notera d’ailleurs les traces de pluie. (GFC Trust)
18
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
mais suspendu au plafond de la soucca. Un
siège vide qui attend son invité, la comparaison avec la coupe destinée au prophète Elie
le soir du Séder, est incontestable et si certains
appelaient ce meuble « chaise des ouchpizin »
il a vite reçu le titre de « chaise d’Eliyaou » renforçant le lien entre la fête de Souccoth et celle
de Pessah qui se manifeste par leur durée et
date respectives (au 15 du mois hébraïque)
mais surtout par la relation naturelle entre la
sortie d’Égypte et le séjour dans le désert et en
l’occurrence par l’injonction « que celui qui a
faim vienne et mange ».
qu’il est connu que les Patriarches sont évoqués
dans la soucca, les Matriaches le sont aussi,
ensemble ils apporteront grâce et miséricorde
sur Israël ». (6) Il déduit cette exigence du verset :
Signe des temps, il y a une vingtaine d’années
est apparue la notion des oushpizot, équivalent
féminin des oushpizin. C’est ainsi que dans de
nombreuses souccot israéliennes sont invitées
Sarah, Rebecca, Rachel, Léa, Myriam, Esther
et Déborah (il existe des variantes) à rejoindre
les Tzadikim. Ceux qui y verraient une manifestation du féminisme de certains courants
modernistes marginaux seront surpris de
découvrir sous la plume de Sholom Rokeah
(1779-1855) qui fut le premier Rebbe de Belz
le passage suivant : « … de la même manière
On voit à travers ces exemples comment un
minhag qui n’est mentionné ni dans le Talmud
ni dans le shoulhan aroukh et qui aurait pu
comme tant d’autres disparaître ou rester confidentiel a su se rénover, se diversifier, enrichir sa
signification pour être adopté par la majorité
des communautés juives.
« Vous demeurerez pendant sept jours sous
des tentes ; tous les autochtones en Israël
demeureront sous des tentes » (Lev. 23,42) et
considère que l’expression « tous les autochtones » implique aussi bien les femmes que
les hommes.
En Israël comme dans les écoles juives de
diaspora jardinières d’enfants et enseignants
ont pris conscience du potentiel pédagogique
des oushpizin pour transmettre les valeurs qui
y sont attachées. Le thème est devenu l’un de
ceux qui est enseigné à l’approche du mois de
Tichri ce qui devrait assurer aux invité(e)s d’être
longtemps encore les bienvenu(e)s. ■
Un grand merci à William (Bill) Gross qui avec
sa générosité habituelle a bien voulu nous
transmettre et nous autoriser à publier les
illustrations des tableaux provenant de sa collection personnelle.
Notes à l’intention de ceux qui souhaitent
approfondir le sujet :
1. Yoma 12a
2. Zohar Emor, 103-104
3. Sept Justes bibliques sont considérés
comme l’incarnation des séphiroth de
Atzilout : Abraham - Miséricorde (‘Hésèd)
Isaac - Force (Guevoura), Jacob-Beauté
(Tiférèt),Moïse - Victoire (Nétza’h), Aaron Gloire (Hod), Joseph - Fondation (Yessod),
David - Royaume (Mal’hout)
4. Abraham : Kidoushin chap.4 - Isaac :
Zevachim chap.5 - Jacob : ‘Houlin chap.7
- Moïse : Avoth chap.5 - Aaron : Midoth
chap.5 - Joseph : Sotah chap.1 - David :
Taanit chap.2
5. Zohar Emor 104a
6. Midbar Kodesh
Cluj (Roumanie) vers 1930
Tradition hassidique. Lithographie. Le choix des illustrations est souvent original tel la représentation du sacrifice d’Isaac et pour Joseph les entrepôts
où était conservé le blé. (GFC Trust)
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
19
H i st o i r e
Un portrait d’Abraham Ibn Ezra
I
l y a six mois environ, une de mes collègues, Patricia Stirnemann, spécialiste des
manuscrits enluminés m’a posé quelques
questions à propos d’une image insolite
qu’elle avait repérée dans le Psautier, dit de
Blanche de Castille (Paris, Bibliothèque de
l’Arsenal, ms 1186).
Ce tableau évoque une scène peu banale, la
traduction d’un ouvrage d’astronomie, d’hébreu en latin, en présence d’un savant juif.
Au centre, un homme portant, semble-t-il, un
couvre-chef, tient un astrolabe et une règle ;
c’est le plus âgé et le plus important en raison de sa position, à la
fois centrale et légèrement surélevée. Il est entouré de deux clercs
tonsurés : sur la droite de l’image,
un homme d’âge mûr, qui porte
une longue tunique semblable à
celle des maîtres, des chanoines
et des érudits, est assis sur le
même banc ; il présente un livre
ouvert où l’on peut distinguer des
ébauches de lettres hébraïques
– on retrouve des « lettres » identiques dans le Livre des Psaumes
qui apparaît dans le même
manuscrit, f. 30v ; à gauche, un
jeune clerc, copie la traduction
latine – il est glabre et porte une
tunique tombant à mi-mollet qui
découvre ses chausses, une particularité signalant qu’il s’agit d’un
clerc séculier.
Chacun des détails du tableau
est un indice qui nous permet
de recueillir des informations sur
les différents personnages. Le
savant juif est un astrologue et un mathématicien, les nombreuses étoiles dans le ciel
complètent l’indication donnée par l’astrolabe, utilisé pour déterminer la position des
astres. La présence de fleurs de lys souligne
le contexte royal.
Qui peut- bien être ce savant juif ? Où et
quand cet événement a-t-il eu lieu ?
Le Psautier ne comporte aucune indication
de date. Cependant, P. Stirnemann pense
qu’il a été produit à Paris ou à Soissons, peu
20
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
après 1218, année de la mort tragique du
fils aîné de Blanche de Castille, Philippe. Ce
dernier y est représenté, le visage triste, dans
une miniature décorant le calendrier qui
ouvre le manuscrit (f. 4r). La scène a donc
forcément eut lieu avant. Ce qui frappe
également dans ce manuscrit, ce sont les
nombreuses décorations qui font référence
à la cour d’Angleterre, et notamment aux
armoiries d’Aliénor d’Aquitaine et Henri II,
les grands-parents de Blanche de Castille
pour qui le manuscrit fut produit.
Au XIIe siècle, en France du nord, peu de juifs
lisaient et comprenaient le latin ; ils lisaient
et écrivaient en hébreu mais ils parlaient le
vieux français qui était la langue vernaculaire
du pays où ils habitaient ; quand ils voulaient
écrire du français, ils utilisaient fréquemment
des caractères hébreux, à l’instar de Rashi qui
a inséré de nombreux mots en vieux français
dans ses commentaires bibliques et talmudiques. La situation était un peu différente
dans les autres pays latins, les érudits juifs
qui habitaient l’Italie, l’Espagne et le Portugal
■ Judith Kogel
et parlaient donc les langues de ces pays, ne
pouvaient pas ne pas comprendre le latin qui
y ressemblait beaucoup.
C’était notamment le cas d’Abraham Ibn
Ezra dont on sait qu’il a dicté la traduction
latine d’un de ses ouvrages, Keli ha-nehoshet, à un scribe qui le mentionne dans le
texte latin lui-même : comme Abraham notre
maître « magister noster » qui
expliquait la disposition des astrolabes, que nous avons consignée.
Érudit et curieux de tout, Abraham
Ibn Ezra était poète, exégète,
grammairien, philosophe, mathématicien et astronome. Né en
1089 à Tudèle, capitale de la
Navarre, il s’est formé à Cordoue où il a reçu une éducation
religieuse et scientifique dans la
plus pure tradition d’Al-Andalus.
On suppose qu’il a ensuite vécu
en Espagne et au Maghreb de
sa plume de poète. En 1140, il
arrive en Europe chrétienne et
les premiers de ses ouvrages
qui nous sont parvenus datent
de cette époque. C’est à Rome,
étape initiale d’une vie de savant
itinérant, qu’il se fait connaître
sur la scène littéraire, alors qu’il
a déjà 50 ans. Il séjourne ensuite
en Provence (1148-1153) et en
France du nord (1154-1156),
avant de rejoindre l’Angleterre
en 1158. Il ne cesse d’enseigner
et d’écrire abondamment sur des sujets très
variés. Deux chercheurs, Gad Freudenthal et
Shlomo Sela, ont reconstitué assez précisément le trajet d’Abraham Ibn Ezra, de Rome
jusqu’en Angleterre, en recueillant dans les
manuscrits qui les avaient conservées, les
indications de lieu et de date que l’auteur
renseignait au moment où il rédigeait ses
ouvrages. On citera, à titre d’exemple, les
mots par lesquels Abraham Ibn Ezra a introduit son responsum, Iggeret ha-shabbat :
« Ce fut au cours de l’année 4919, au milieu
de la nuit du vendredi, 14e jour du mois de
Tevet [7 décembre 1158], alors que je me
trouvais, moi Abraham l’espagnol Ibn Ezra,
dans une des villes de l’ile que l’on nomme
qese ha-ares [traduction littérale pour Angleterre] … ».
Ainsi, on sait que le Tractatus de astrolabio fut dicté en 1154, à Rouen ; le Liber de
rationibus tabularum II a été écrit en 1154,
à Angers ; le Liber de nativitatibus en 1154,
à Rouen également, etc. Ce dernier ouvrage
a joué un rôle très important car il a fait
connaître à l’Occident latin, la « doctrine
des nativités » et le « système d’horoscopie continue des nativités », développés en
Grèce et en Perse puis adaptés en arabe, une
langue qu’Ibn Ezra maîtrisait parfaitement. La
doctrine de nativités fait des prédictions cou-
vrant toute la vie de l’individu, en comparant
l’horoscope de sa naissance à ceux établis
pour chacun de ses anniversaires. Si l’image
représente effectivement Abraham Ibn Ezra
traduisant un de ses ouvrages, elle évoque
un événement qui a eu lieu dans un contexte
anglo-normand (Rouen et Angers), puisque
la Normandie faisait partie du royaume Plantagenêt qui allait de l’Ecosse aux Pyrénées.
Ce que nous savons, par ailleurs, c’est que
le savant Adélard de Bath (1080-1152), qui
connaissait les textes scientifiques arabes,
avait dédicacé son ouvrage sur l’astronomie
et les mathématiques au futur roi d’Angleterre, Henri Plantagenêt. Il est dès lors
vraisemblable que la réputation de l’érudit
Abraham Ibn Ezra, qui se trouvait dans l’empire angevin, soit parvenue jusqu’à Henri II et
que la cour d’Angleterre ait souhaité profiter
de son enseignement. Ce serait possiblement
dans ce cadre qu’il aurait franchi la Manche.
Le souvenir de cet épisode a été immortalisé cinquante plus tard dans un magnifique
ouvrage destiné à Blanche de Castille, la petitefille d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri II. ■
Pour de plus amples informations :
• Gad Freudenthal et Shlomo Sela,
« Abraham Ibn Ezra’s Scholarly Writings:
A Chronological Listing », Aleph: Historical Studies in Science and Judaism 6
(2006), p. 13-55.
• Shlomo Sela, Abraham Ibn Ezra and
the Rise of Medieval Hebrew Science,
Brill, 2003.
• En hébreu : http://www.daat.ac.il/
encyclopedia/value.asp?id1=2038 qui
renvoie à d’autres sites.
Politique
Byzance à Ankara : le conflit
e n t r e i s l a m i s t e s e n Tu r q u i e
R
écemment, un de mes amis de la kehilla
Etz Hahayim d’Istanbul1 me faisait la
remarque suivante à propos de la tentative du coup d’état du 15 juillet : « Nous ne
savons pas où nous allons, et nous ne savons
même pas ce qui s’est passé. À part cela, les
choses continuent comme d’habitude dans la
communauté ». Le journal de l’ensemble de
la petite communauté de Turquie (18 000 personnes), Shalom, avait dans son numéros du
20 juillet violemment condamné la tentative
de coup d’Etat ; une semaine plus tard, plus
question de parler des évènements douloureux et de leurs tragiques conséquences qui se
déroulaient alors. Le journal titrait sur l’accord
de réconciliation entre Israël et la Turquie. Les
juifs d’Istanbul, traditionnellement peu engagés dans la politique, observent, pour l’instant
tout au moins, en spectateurs, la vaste campagne de répression et d’arrestations qui
secoue la Turquie depuis plus de deux mois.
Dans les paragraphes qui suivent, je voudrais
essayer de commenter la réflexion de mon ami
qui me paraît tout à fait pertinente.
Dans l’Orient compliqué, que ce soit
à Istanbul ou à Ankara, on n’est jamais
très loin de Byzance ; rien en politique n’est
transparent. Depuis toujours, les théories de la
conspiration vont bon train. Un terme consacré
en Turquie, « l’État profond », fait référence à
des structures souterraines où se trouverait
la réalité du pouvoir politique, les institutions
officielles, le gouvernement, le parlement,
n’étant qu’à la surface des choses. Il n’y a pas
si longtemps, « l’État profond » évoquait soit
la police secrète, des confréries ottomanes, la
CIA ou une coalition de généraux.Aujourd’hui,
le président Erdogan affirme que le coup d’état
avorté était l’œuvre d’une « structure parallèle », une organisation religieuse, à la tête de
laquelle se trouve Fetullah Gülen, un imam
■ Pierre Lazar
exilé aux Etats-Unis depuis la fin des années
1990. Fetullah Gülen dément formellement
avoir quoi que ce soit à voir avec la tentative
de putsch militaire qu’il a condamné, dans
une tribune du journal Le Monde également,
et avec les sympathisants du mouvement qui
auraient trempé dans la conjuration. Dans les
déclarations qui ont été faites durant la nuit
du 15 juillet, les putschistes parlaient le langage des forces laïques, celle des généraux
Kémalistes (du nom de Mustapha Kemal dit
Atatürk). Sans doute était-ce pour donner le
change ; il semble en effet que l’opinion en
Turquie soit persuadée que le coup était préparé par les « Gülenistes ». À cette conviction,
s’en ajoutent d’autres beaucoup plus problématiques, qui relèvent de la théorie du complot
pure et simple, comme par exemple le fait que
➤➤➤
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
21
Politique
➤➤➤
Gülen aurait préparé le coup avec l’aide de
la CIA, les États-Unis souhaitant voir l’imam
de Pennsylvanie prendre le pouvoir à la place
d’Erdogan ; la preuve en serait le manque
d’empressement du président Obama, ainsi
que des dirigeants européens, à soutenir son
homologue turc après le putsch avorté.
En France et ailleurs en Occident, par
contre, beaucoup de gens sont sceptiques ;
ils découvrent, pour la plupart, Fetullah
Gülen dont ils n’avaient pratiquement jamais
entendu parler, et sont surpris qu’un personnage aussi peu visible ait pu concentrer tant
de pouvoirs dans des secteurs aussi divers que
la justice, la police, l’éducation et l’armée. C’est
une situation difficile à comprendre, notamment pour les Français dont le personnel
politique est désespérément le même depuis
30 ans. Dans un tel contexte, on conçoit que
beaucoup pensent qu’Erdogan aurait facilité
ou même simulé un putsch de manière à justifier les arrestations de ses opposants. S’il est
vrai qu’il a sauté sur l’occasion providentielle
qui s’offrait à lui pour neutraliser toute opposition, il me parait peu probable qu’Erdogan
ait lui-même provoqué la tentative de coup
d’état. En effet, il prenait un grand risque à
laisser faire une opération qui aurait facilement
pu échapper à son contrôle – il suffit de voir la
violence de la nuit du 15 juillet. Ensuite, durant
cette nuit, il s’est retrouvé étonnamment seul
et vulnérable. Les putschistes ayant pris le
contrôle de la télévision officielle, il fut réduit
à communiquer de manière surréaliste sur la
chaîne de télévision CNN turc, qu’il avait toujours vouée aux gémonies et même menacée
de fermeture : on le voyait parler en direct sur
son smartphone que la journaliste de la chaine
turco-américaine présentait aux cameras de la
télévision. On imagine que s’il avait orchestré
le coup, Erdogan, habituellement très sûr de
lui, aurait trouvé un moyen plus glorieux de
communiquer. Enfin, l’échec du coup tient
beaucoup à la mobilisation populaire ainsi
que l’appel des mosquées à sortir dans la rue
et à bloquer les tanks des putschistes, quelque
chose qu’il était à la fois difficile de prévoir et
surtout, d’orchestrer à l’avance. Si l’on exclut
la possibilité d’un coup d’état monté par le
pouvoir, peut-on néanmoins considérer qu’il a
été préparé par les partisans de Fetullah Gülen
ou encore mieux par Gülen lui-même ?
Avant d’essayer de répondre à cette
question, il nous faut retourner vers le début
22
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
des années 1970, au moment où a commencé
l’islamisme turc. Deux courants se sont développés principalement. Le courant dit de
l’islam politique, représenté alors par Necmettin Erbakan, un antisémite virulent et mentor
du jeune Recept Tayip Erdogan (Erdogan).
Erdogan, a commencé sa carrière politique
en tant que leader des jeunes étudiants du
mouvement dirigé par Erbakan, puis est rapidement devenu maire d’Istanbul toujours dans
le cadre du parti d’Erbakan. À côté de l’islam
politique, Fetullah Gülen, alors prédicateur islamiste, a créé un nouveau courant de pensée
qui mettait l’accent sur la transformation de
la société par l’éducation et la société civile.
Dans ses nombreuses écoles, il a encouragé
l’enseignement des matières profanes, en
particulier des sciences, en même temps que
l’enseignement religieux. On estime le nombre
des établissements se réclamant de son mouvement à un millier à travers le monde (il y
aurait deux écoles Gülénistes à Strasbourg). Le
mouvement de Fetullah Gülen ressemble donc
dans un premier temps, à celui des jésuites ou
de l’Opus Dei. C’est en tous cas, comme cela,
qu’il a longtemps été présenté dans les pays
occidentaux.
Gülen a progressivement développé
des liens avec des leaders de la communauté juive en Turquie et aux États-Unis.
Dès l997, Abraham Foxman, le dirigeant de
l’Anti Defamation League a déclaré qu’il était
« un homme modéré aux vues raisonnables
et capable de mener l’Islam dans la bonne
direction ». Il semble qu’il a pu rencontrer le
pape Jean-Paul II en 1998, grâce à l’aide des
juifs américains. Les juifs turcs, étaient dans
un premier temps plus réservés, sans doute
parce qu’ils connaissaient les nombreux textes
et interventions antisémites que Gülen avait
faites dans les années 19702.Toutefois, vers la
fin de la première décennie des années 2000,
les portes parole de la communauté juive ont
rejoint le chœur des admirateurs, et ont rendu
hommage au rôle des Gülenistes dans la lutte
contre les antisémites3. Ainsi, bien que son
mouvement ait pour but ultime la réislamisation de la Turquie, Gülen est devenu, en partie
grâce aux juifs, un islamiste acceptable.
Fetullah Gulen est-il un maître du
double langage, ou peut-on parler de
conversion qui serait intervenue depuis son
arrivée aux États-Unis4 ? Comme toujours
dans ce genre de cas, il est bien difficile de
faire la part des choses. Encore faut-il définir ce
qu’on appelle « conversion ». Parle-t-on d’une
conversion sincère ou d’une conversion de circonstances ? Paris ne vaut-il pas une messe ?
Il me semble évident, qu’en fin politique, Fetullah Gülen, a très vite compris qu’il fallait mettre
en sourdine les thèmes antisémites, porteurs
en Turquie mais beaucoup plus embarrassants
dans le contexte américain. D’autant plus qu’il
s’est trouvé devant une occasion unique de
pouvoir utiliser la force du lobby juif auprès
du monde politique américain, les deux étant
désespérément en quête d’un islam modéré. Il
est même possible que le soutien du lobby juif
américain n’a pu que renforcer sa croyance en
un pouvoir occulte des juifs.
Mais derrière l’apparence de tolérance,
des ex-Gülenistes décrivent une organisation strictement hiérarchisée, une obsession du
secret et une stratégie d’infiltration dans toutes
les administrations du pays, particulièrement
dans la justice et dans la police5. L’emprise
du mouvement s’est renforcée avec l’arrivée
au pouvoir d’Erdogan, qui ne disposait pas,
en 2003, de cadres en nombre suffisant et
se trouvait face à une administration encore
largement kémaliste, donc hostile. Le mouvement Gülen a offert le soutien de ses cadres
au sein de l’administration en échange du
renforcement de ses propres positions dans
l’administration, la police, la justice et l’armée,
et l’augmentation du nombre de ses écoles.
Toutefois, après plusieurs années
d’entente cordiale, les relations se sont progressivement dégradées. En 2010, au moment
de l’arraisonnement du Mavi Marmara par
Tsahal, Gülen a critiqué la position officielle en
se déclarant contre le projet d’acheminement
de l’aide humanitaire à Gaza sans l’assentiment des autorités israéliennes. Une autre
fois, comme Israël, il critique la nomination du
chef des services secrets, jugé trop proche de
l’Iran. Certains analystes politiques y voient
l’influence d’Israël6. Gülen s’oppose enfin
au projet de présidentialisation du régime,
voulue par Erdogan. L’alliance entre Gülen
et Erdogan est rompue en 2013 lorsque les
médias Gülenistes prennent fait et cause pour
les manifestants qui s’opposent à la transformation en centre commercial du parc de Gezi,
un des rares espaces verts subsistant au centre
d’Istanbul7. Erdogan riposte en interdisant les
cours de préparation à l’université contrôlés
par les Gülénistes. Suivent alors une série d’at-
taques et de contre-attaques où les proches
d’Erdogan, y compris un de ses fils, se trouvent
accusés de corruption, notamment dans des
cas de trafic de pétrole avec l’Iran. Erdogan,
de son côté, multiplie les mutations de fonctionnaires de la police et de la justice jugés
trop proches du « mouvement » et modifie les
règles concernant l’administration judiciaire. La
guerre entre islamistes se poursuit en 2014
et 2015 avec l’arrestation, par des policiers
partisans de Gülen, de plusieurs convois de
camions chargés d’armes à destination de la
Syrie. Enfin, en décembre 2015, le gouvernement fait arrêter des dirigeants Gülenistes et
délivre un mandat d’arrêt international contre
Fetullah Gülen.
On comprend maintenant que les accusations selon lesquelles le « mouvement »
serait à l’origine de la tentative de coup d’état
ne sont pas purement fantaisistes, bien qu’en
l’absence de preuves tangibles il soit difficile
de se faire une opinion. La plupart des gens en
Turquie, y compris les membres de la communauté juive à qui j’ai pu parler, sont persuadés
que cette tentative était bien l’œuvre du mouvement Gülen. Pour certains, le coup d’état a
été préparé par un groupe de Gülenistes dissidents et quelques autres comploteurs ayant
des motifs divers, sans que Fetullah Gülen
lui-même ait été au courant8. Il ne semble
pas, par contre, que les autorités américaines
aient été convaincues par les preuves que leur
aurait apportées le gouvernement turc dans
leur demande d’extradition de Fetullah Gülen.
Il est clair, cependant, comme on a pu le voir,
que la liquidation du parti Güleniste, était un
objectif d’Erdogan, bien avant cette tentative
de coup d’état, et il semble, par ailleurs, qu’un
certain nombre de militaires liés au « mouvement » étaient sur le point d’être limogés.
Quelles que soient les ambiguïtés de
Fetullah Gülen et quel que soit le sort
de son mouvement, le fait qu’il apparaisse
aujourd’hui comme l’adversaire principal
d’Erdogan, montre que les contre-pouvoirs
laïcs qui avaient existé pendant si longtemps,
ceux des kémalistes, de l’armée et de la rue,
à l’exception peut-être du mouvement kurde,
ont pratiquement disparu. Les énormes
purges en cours depuis la fin juillet dans la
police, l’éducation, la justice signifient-elles
la fin d’une justice indépendante et le déclin
d’un système éducatif ouvert qui semblait
se développer dans quelques universités ?
Quelles seront les conséquences des purges
dans l’armée après celles déjà considérables
des années 2012 et 2013 ? Dans une interview au journal « die Welt am Sonntag », Dani
Rodrik présente deux scénarios pour l’avenir
de la Turquie. Le meilleur scénario possible,
selon lui, est l’évolution vers un modèle de
type Malaysien, économiquement prospère et
culturellement conservateur, certainement pas
une démocratie et un régime peu tolérant pour
les minorités9. Il pourrait également y avoir un
scénario pessimiste, celui d’une guerre civile
entre les différents groupes ethniques, Sunnites, Alawites et Kurdes. La Turquie suivrait
alors le sort de ses voisins moyen-orientaux.
La Turquie est un pays où ont vécu pendant des siècles de nombreux groupes
ethniques et des minorités religieuses.
Sous l’empire Ottoman, les communautés
religieuses jouissaient d’une certaine autonomie, dans les limites toutefois de la charia et
notamment du statut de dhimmi. Depuis la
création de la République Turque par Atatürk
en 1923, les minorités, et notamment les
chrétiens et les Juifs, jouissent d’une égalité
de droits. Toutefois, on sait ce qu’il est arrivé
aux Arméniens. Les juifs, quant à eux, qui ont
pour beaucoup été formés dans les écoles
de l’Alliance Israélite Universelle, avaient mis
beaucoup d’espoir dans l’émergence d’une
république laïque inspirée du modèle français. Malheureusement, ils ont vite été déçus,
subissant dès 1934 d’importantes émeutes
antijuives qui ont mené à l’exil (vers Istanbul)
pratiquement toute la population juive de la
région des Dardanelles et de la Thrace. Durant
la deuxième guerre mondiale, sans être inquiétés comme en Europe, ils ont néanmoins subi
des politiques discriminatoires, notamment
dans le domaine de la conscription militaire et
de la fiscalité. Un impôt sur le capital fut introduit en 1942 en principe pour lutter contre les
profiteurs de guerre et le marché noir, mais en
pratique il ne fut appliqué qu’aux seuls juifs
et avec des taux d’imposition arbitraires et
exorbitants. Beaucoup de juifs furent ruinés
et ceux qui ne pouvaient pas payer furent
déportés dans des camps de travail dans l’est
de l’Anatolie. Les prisonniers ne furent libérés
qu’en 1943 après qu’un article du New York
Times ait dénoncé ces pratiques. Il n’est donc
pas étonnant, qu’à la fin de l’année 1948, la
moitié de la population juive de Turquie soit
partie pour Israël. Aujourd’hui, il reste moins
de 18 000 juifs sur près de 80 millions d’habitants, tandis qu’en 1927, il y avait 80 000
juifs sur une population de 13,5 millions d’habitants.Avec la montée du pouvoir islamiste, et
surtout les derniers évènements, l’émigration
juive s’est accélérée. Il serait illusoire de penser
qu’elle va s’arrêter là. ■
1. Voir mon article dans Montevideo31 de septembre 2011.
2. Un court extrait suffira pour comprendre qu’il ne s’agit pas là de textes antisémites « modérés » si tant est que l’expression ait un sens : « Mise à part leur incurable hostilité à l’Islam
et aux Musulmans, les juifs, qui regardent avec mépris leur propres prophètes dont ils ont tué
nombre d’entre eux, vont terminer dans la position de nazis et chercheront un endroit pour se
cacher aux quatre coins de la terre ». Ma traduction depuis l’anglais de la traduction du texte
turc par Pinar Dogan et Dani Rodrik : Fetullah Gülen, the Jews and hypocrisy. Blog ”Bayloz
Davasi ve Gerceler’. 5 avril 2012. Dani Rodrik, né à Istanbul dans une famille sépharade est un
professeur d’économie à Harvard. Un des meilleurs économistes actuels, on parle de lui pour le
prix Nobel.
3. D’après le livre remarquable de Nicolas Cheviron et de Jean-François Pérouse : Erdogan,
nouveau père de la Turquie, éditions François Bourin, 2016.
4. C’est l’opinion, semble-t-il du grand-rabbin de Turquie Ishak Haleva. Voir Efrat Aviv, opus
cite. Il convient de remarquer, toutefois, que les dirigeants de la communauté juive en Turquie
ont eu souvent pour politique de refuser d’admettre de manière publique l’importance de
l’antisémitisme en Turquie. D’une manière caractéristique, un de mes amis qui ne voulait pas se
prononcer sur l’antisémitisme de Fetullah Gulen, m’a dit qu’il était très clair par contre que le
numéro deux du « mouvement » était un antisémite virulent.
5. Voir Nicolas Cheviron et Francois Pérouse, op. cité.
6. Pour ajouter à la confusion, le journal Zaman, principal organe de la presse Gülen, a généralement adopté une ligne très dure, islamiste, contre Israël.
7. Voir mon article dans Montevideo31 sur ce sujet en 2013.
8. Voir : Is Fetullah Gülen behind Turkey’s coup? 22 juillet 2016. Et aussi : Is the US behind
Fetullah Gülen, 30 juillet 2016. Dani Rodrik weblog.rodrik.typepad.com
9. Dani Rodrick : « Ein Eu-Betritt der Turkei schliesse ich aus ». Die Welt am Sonntag. 1er août
2016.
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
23
économie
L’expulsion des j ui fs : c aus e
d u sous-déve l oppem ent éc onomi q u e
P
our les communautés juives européennes, le Moyen-âge a été
synonyme de discrimination, de persécution et parfois d’expulsion. Des villes
et parfois des pays entiers ont interdit leur
territoire aux juifs, poussant ceux-ci à l’immigration (cf. carte).
Une étude1 récente du professeur Luigi
Pascali, économiste à l’Université de
Warwick et à l’Université Pompeu Fabra
de Barcelone, établit un lien de causalité
entre le fait d’avoir chassé les Juifs au
Moyen-Âge et le fait d’avoir une prospérité économique plus faible aujourd’hui. Il
démontre en effet que les villes italiennes
qui ont toléré la présence des communautés juives et leur ont permis de s’épanouir
ont connu un développement économique
plus marqué, dont les effets se font encore
ressentir aujourd’hui.
Son analyse repose sur l’observation de
l’accroissement des disparités écono-
miques entre le nord et le sud de l’Italie,
à partir du XVIe siècle, et en particulier
à partir du moment où le Royaume de
Naples passe sous le contrôle des rois
d’Espagne, dont la politique vis-à-vis
des juifs reposait sur un choix simple :
la conversion au christianisme ou l’exil.
A l’inverse, le nord de l’Italie, longtemps
dominé par le Royaume de France et par
des cités Etats indépendantes, était beaucoup plus accueillant pour les juifs.
A cette même époque, plusieurs édits
ecclésiastiques interdirent aux chrétiens
la pratique du prêt à intérêt, qui devint
de facto un domaine de « compétence »
juive.
Ceci explique la naissance de l’industrie
bancaire dans le nord de l’Italie. Or, ainsi
que le démontre Pascali, la densité des
banques au niveau local a un effet positif
sur la productivité de l’économie locale. Le
développement des banques au nord de
■ Anthony Gribe
l’Italie a constitué le moteur de la croissance économique de la Renaissance.
La thèse du Professeur Pascali va encore
plus loin dans la mesure où il évalue l’impact sur le développement économique de
la présence, ou non, d’une communauté
juive pour chaque ville d’Italie. Il en tire la
conclusion que, si le Royaume espagnol
de Naples n’avait pas expulsé les juifs du
sud de l’Italie, le Produit Intérieur Brut
(PIB) de cette région serait aujourd’hui
supérieur de 7 %. Il explique en outre
que l’expulsion des juifs d’Italie du sud
au XVIe siècle explique a minima 10 % de
l’écart du PIB entre Italie du nord et Italie
du sud en 2016.
Si son étude repose uniquement sur le cas
de l’Italie, il estime que des conclusions
identiques pourraient s’appliquer pour les
autres pays européens
qui expulsèrent des
juifs. ■
1. Luigi Pascali,
The Review of
Economics and
Statistics, Mars
2016, Vol. 98, Pages
140-158.
24
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
Commentaires
à propos de ...
Sivan Rahav Meir
■ Marc Kogel
tion des préoccupations de sa génération et
du moment, ce qui rend son commentaire
vivant et stimulant.
Après vous avoir présenté Avivah
Gottlieb Zornberg dans notre numéro
précédent, je poursuis ma recherche
de commentaires originaux en
hébreu, mais cette fois, c’est d’une
journaliste dont je vais vous entretenir.
S
ivan Rahav Meir anime une émission d’information sur la chaine TV
Aroutz 2, écrit dans Yediot Aharonot
et on peut écouter son cours de parachat
hashavouah au Hechal Shlomo le mercredi
soir ou à Tel Aviv le dimanche soir.
Bien sûr, elle s’exprime et écrit en Ivrit,
mais sa diction, son style et son vocabulaire sont faciles à comprendre. Et on peut
se rattraper en lisant l’essentiel de ses
commentaires sur le site http://leeba.org.
il/artist
Elle introduit son propos le plus souvent en
rapportant des commentaires traditionnels,
en les interprétant à la lumière du sionisme
religieux. Tout en citant de nombreux
rabbins de la mouvance sioniste, ses commentaires sont émaillés de faits issus de
l’actualité de la semaine, moins pour donner un sens moderne à des textes anciens,
que pour faire passer de l’émotion et frapper l’imagination de ses auditeurs quand
ils lisent les récits bibliques, sans y prêter
suffisamment d’attention.
En excellente communicatrice, elle utilise
abondamment des anecdotes personnelles
dont elle émaille ses propos, autant pour
capter l’attention que créer une complicité
avec son auditoire.
Son féminisme sans être militant et revendicatif, part de l’évidence du texte ; ainsi
rapporte-t-elle par exemple dans son
commentaire sur Balak : il est dit que la
génération sortie d’Egypte a été condamnée à mourir dans le désert, après la
faute des explorateurs qui ont médit de
la terre d’Israël, mais il faut noter que les
explorateurs envoyés par Moïse étaient
tous des hommes, par conséquent seuls
les hommes ont été punis, les femmes
ont survécu. Ainsi Rahav Meir en déduit
que la génération de Josué est composée
d’hommes jeunes et de femmes de tous
âges, dont les veuves de ceux qui sont
sortis d’Egypte. De là, il n’y a qu’un pas
pour supposer que si Moïse avait envoyé
des femmes comme explorateurs, la catastrophe aurait pu être évitée !
Sa formation de journaliste lui fait aborder
des sujets accessibles au grand public et
elle cherche à expliquer le texte en fonc-
Comme sioniste convaincue, elle parle avec
passion et enthousiasme de tout ce qui est
en rapport avec le pays d’Israël. Sur le plan
de la communication, le ton emphatique et
le débit rapide de sa voix font que l’on ne
s’ennuie pas au cours des 50 minutes que
dure son intervention. Et si vous suivez les
vidéos de ses interventions, vous observerez également son « body langage » qui
est saisissant.
Les thèmes abordés sont simples à
comprendre, on est loin de l’approche
universitaire et sophistiquée d’une Aviva
Gottlieb Zornberg, ou des commentaires
profonds, universels et imprégnés de
culture occidentale du Grand Rabbin Jonathan Sacks.
Les centres d’intérêts principaux de Rahav
Meir, me semblent participer à une critique
de la société israélienne actuelle. Ainsi les
thèmes récurrents de ses interventions
tournent souvent autour du problème de
leadership, qu’est-ce qui fait qu’un leader
soit « inspiré » ? Comment un véritable
leader doit se comporter ? Autant dire que
les leaders politiques font souvent figure de
contre-exemple !
Son commentaire trouve un large écho
en Israël et un public nombreux se presse
à ses cours et lit le compte rendu de ses
interventions.
Je vous encourage, pour ma part, à vous
faire votre propre opinion. Vous pouvez
consulter les cours de parachat hashavoua
de Sivan Rahav Meir sous forme textuelle
condensée sur le site leeba.org, ou en
version complète sous forme d’enregistrement sonore téléchargeable ou vidéo
consultable sur youtube. ■
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
25
Cinquante ans après
Des paroles aux actes
Par le Rabbin Jean Schwartz
En janvier 1965, le Trait d’Union publiait un billet de Jean Schwartz,
rabbin de la Communauté Ohel Avraham, qui exprime son scepticisme
et ses doutes quant à la volonté du nouveau rabbin de la rue Pavée
d’accepter l’unité de la cacherout parisienne sous l’égide du Tribunal
rabbinique de Paris… ce que l’avenir devait confirmer.
C
oup sur coup, en l’espace d’une seule
année, deux rabbins éminents ont été
ravis à leurs familles et à leurs Communautés, les rabbins Rubinstein et Stern.
Leur disparition a affecté leurs familles, mais
également – au-delà – l’ensemble de la Communauté Traditionaliste de Paris. Aussi,
est-ce avec une grande satisfaction que
nous avons appris la nomination à la tête
de synagogue de la rue Pavée du rabbin
Rottenberg d’Anvers. Ainsi se trouvait
être obturée l’une des deux grandes
brèches si tragiquement ouvertes dans
les flancs du traditionalisme.
26
domaine de la cacherout surtout, afin de pouvoir répondre à toutes les demandes d’une
population juive qui va en s’accroissant et qui
comprend à l’heure actuelle plus de 100 000
consommateurs de viande cachère. « C’est là
dit-il, une masse de frères que l’on n’a pas le
L’installation du rabbin Rottenberg à la
tête de sa Communauté a été l’occasion d’une manifestation importante à
laquelle assistèrent des représentants –
rabbins et laïques – des Communautés
traditionalistes de Paris, de province et
aussi de l’étranger. Comme il se doit,
des discours ont été prononcés par le
président de la Communauté, le consul
d’Israël, M. Zvi Locker, le grand rabbin
Jaïs, les rabbins Horowitz de Strasbourg
et Munk de Paris, puis par le rabbin
Rottenberg. On peut dire que, mis à part
le Président de la Communauté, qui précisa que leur rabbin était reconnu par un
certain nombre d’autres Communautés
« orthodoxes » qui voyaient en celui-ci
« leur chef religieux (mara deatra), président
d’un Tribunal rabbinique s’occupant des
questions de cacherout, de mariages et de
divorces », tous les autres orateurs prônèrent
l’union et la collaboration avec toutes les
bonnes volontés.
droit de négliger et qui ont droit à toute notre
sollicitude dans tous les domaines, mais dont
il nous faut surtout maintenir et renforcer les
liens avec la Communauté, sinon nous aurons
la grande responsabilité de leur assimilation
et leur perte irrémédiable ».
A juste titre, le grand rabbin de Paris insista
sur l’effort immense et les réalisations étendues du Tribunal rabbinique de Paris, dans le
Le rabbin Horowitz, chef du Tribunal rabbinique de Strasbourg, se basant sur une
« expérience de 18 ans dans une Commu-
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
■ Tr a i t d ’ U n i o n 19 6 5
nauté occidentale », exhorte le récipiendaire
à la collaboration avec ceux qui « n’ont peutêtre pas tout-à-fait la même optique, mais qui
néanmoins travaillent dans le même sens que
nous. Nos rangs doivent être renforcés, mais
non sur le compte des autres. Nous devons
apporter un complément, mais non nous
élever en abaissant les autres. Chaque
bougie de ‘Hanouca s’ajoute à la précédente pour renforcer la lumière, mais
ne prend pas la place de celle qui brûlait
avant elle ». C’est dans le même sens
que parla le rabbin Munk. Et le rabbin
Rottenberg lui-même précisa : « qu’il ne
vient que pour ajouter son effort à celui
déjà fourni par d’autres qui travaillent
dans le même domaine, que pour apporter son aide et son soutien à tous ceux
qui œuvrent pour insuffler l’amour de la
Torah et d’Israël dans la Communauté ».
En sortant d’une telle manifestation, on
ne pouvait que se sentir réconforté : lo
almann Yisraël : La Communauté d’Israël
ne manque pas de grands hommes…
Ce furent effectivement de belles et
touchantes paroles. Comme on voudrait
rester sous leur charme, une fois sorti de
la synagogue !
On ne peut, en effet, ne pas admirer – et
il est bon qu’une fois on le dise publiquement
– tout le travail anonyme et désintéressé
accompli par le Tribunal rabbinique de Paris
dans le domaine de la cacherout. Sans ménager aucun effort, personnel ou financier, ne
prenant en considération avant toutes choses,
que les besoins religieux d’une population
juive, D-ieu merci fort importante, il a mis sur
pied une organisation solidement structurée,
absolument impeccable au point de vue reli-
gieux, pouvant donner satisfaction aux plus
exigeants, de façon à ce que chacun, avec
le plus de facilité possible, puisse respecter
les lois alimentaires. Certes, il ne se cache
pas qu’il y a encore beaucoup à faire dans
ce domaine, qu’il lui faut étendre le champ
de ses activités, disperser les points de vente,
contrôler un plus grand nombre de produits,
en faire importer pour Pessa’h, faire disparaître les abus, agir sur le prix, etc. Aussi est-ce
avec satisfaction qu’il accueille les appuis,
les aides de toutes les bonnes volontés qui
veulent travailler « épaule contre épaule »,
dans le même sens que lui pour étendre le
domaine de ses réalisations.
De la sorte, le Tribunal rabbinique de Paris – et
c’est en témoin de l’extérieur que nous l’affirmons – mène la seule politique religieuse qui
puisse garantir l’avenir. Elle doit être considérée, en effet, comme périmée définitivement
la politique du « chtibel », de ces embryons de
Communautés, désirant – pour des raisons de
prérogatives et d’honneur surannées – avoir
chacun sa propre « organisation », sa propre
hiérarchie, son Tribunal rabbinique, sa cacherout, sa surveillance, etc. User nos forces de la
sorte, c’est en réalité moins agir en faveur de
quelques fidèles, que contre la Communauté
dans son ensemble. Les rabbins n’ont plus le
droit religieux et moral de se contenter d’assurer le salut et les besoins religieux d’une
poignée de Juifs et de se désintéresser des
nécessités de l’ensemble de la Communauté.
Ce n’est plus leur nom qui compte, ni même
celui de leur propre Communauté, mais celui
de la grande Communauté juive, les sefardim
comme les ashkenazim, aussi exigeants les
uns que les autres sur ce terrain et qui ne
pardonneraient pas à leurs dirigeants de les
avoir négligés en bloc, au profit de quelques
particuliers. Le « clal », la masse, doit avoir la
priorité dans nos préoccupations, même au
détriment, s’il y a lieu, des prérogatives de
telle ou telle autre Communauté particulière,
dans quelque domaine que ce soit.
… Mais en réalité, n’avons-nous pas l’air
d’enfoncer des portes ouvertes ? Les paroles
entendues de la bouche de tant de chefs
spirituels ne sont-elles pas garantes de leur
volonté délibérée et inébranlable d’union et
de coopération au service de la grande Communauté dans son ensemble ? Prononcées en
une telle circonstance, devant l’Arche sainte,
en présence d’une multitude de responsables
communautaires et de fidèles, ne reflètentelles pas, sans aucun doute possible, le fond
de leur pensée ? Seuls de mauvais esprits
pourraient supposer le contraire. Aussi,
demain, nous en sommes sûrs, la Communauté juive de Paris, dans sa totalité, ne
connaîtra qu’un Tribunal rabbinique, une seule
cacherout, un seul « he’hchère », comme elle
ne connaît qu’une seule Torah. ■
Humour
La page d’Avidan
■ Résumé des fêtes de Tichri : si tu pries
bien, à Soukkot, le Ciel cédrat.
■ J’avoue, après avoir posé des jours de
congés pour toutes les fêtes de Tichri, je
me force un peu pour me « réjouir dans
les fêtes ».
■ Les 40 jours de selihot pour les séfarades,
c’est juste un bon prétexte pour s’épargner
le stress matinal de la rentrée scolaire.
■ La meilleure choule à Kippour, c’est
celle qui finit le plus tôt.
■ Vu le nombre d’attaques terroristes
en ce moment, on devrait peut-être être
dispensé de grenade à Roch Hachana ?
■ Dans l’immensité de l’univers, il a fallu
que les terroristes naissent sur la même
planète que nous...
■ J’aurais pas aimé être à la place de
Dieu quand Élie Wiesel est arrivé devant
Lui.
■ La seule façon discrète que j’ai trouvée
pour me débarrasser des travaux manuels
faits par mes enfants, c’est de déménager.
■ Mes dernières vacances étaient
géniales. Mes beaux-parents étaient là,
j’ai donc pu me plaindre tout le temps.
■ L’opéra, c’est vraiment pas un gâteau
que j’apprécie. La preuve, c’est qu’à la
3e part, j’en ai un peu marre.
■ Plus fier et plus susceptible que le
corse, j’ai nommé le juif marocain.
■ Je ne dis pas qu’il pleut trop, je dis seulement que j’ai un mikve dans ma cave.
■ A force de s’attaquer aux flics, aux
homosexuels et aux juifs, on va finir par
croire que les terroristes en ont même
après les gens normaux !
■ Au foot, notre revanche sur l’antisémitisme, c’est le match Allemagne - Pologne.
On sera content quel que soit le perdant.
■ Avidan Kogel
■
Proverbe ashkénaze : le judaïsme se
transmet par l’amer.
■ Est ce que l’eau de la Seine, cette
année, c’est un bon cru ?
■ L’agence juive devrait porter plainte
contre la politique israélienne pour publicité négative.
■ Peut-on manger de la viande avec des
dents de lait ?
■ J’ai envie de dire à certains rabbins :
« merci de bien vouloir laisser la halakha
comme vous l’avez trouvée en arrivant ».
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
27
Hommage
Adieu mon Maître,
mon plus-qu’ami
A
voir été l’ami, le disciple d’Elie Wiesel trente-quatre ans durant, fut une
chance, une grâce. C’est aujourd’hui
un devoir de témoigner pour le témoin
inlassable qu’il fut. Trente-quatre années
de dialogue, de rencontres, scellées par
sept livres comme les sept sceaux de
l’Apocalypse et d’abord comme les sept
jours de la Création selon la Torah. Sept
livres et deux colloques surtout celui de
Cerisy-la-Salle en juillet 1995, où il vint
pour célébrer le Shabbat avec nous tous.
Il chanta pour nous seuls les chants de
son enfance à Sighet et à la cour du Rabbi
de Wizsnitz. Inoubliable Shabbat partagé
avec ce chantre de la Mémoire juive que
nous aimions, que j’aimais.
Je rouvre son dernier livre paru de son
vivant Cœur ouvert (Flammarion), qui
fait en moi écho à La nuit. Un écho lourd,
douloureux, mais cette douleur wieselienne n’en est pas moins un hymne à la
Vie. Certains voient l’œuvre d’Elie comme
une lamentation, une tragédie sans fin,
celle du peule juif.
Je la regarde, moi, avant tout et même
au fond de l’horreur de la Shoah et des
autres tragédies dont il parlait, comme
lui seul pouvait le faire, comme une façon
de dire la louange non pas la louange de
la mort et de la barbarie, non bien sûr !
La louange devant la Vie qui perdure, la
louange pour la mémoire, qui est une
autre forme de la vie. Mais aussi, au fond
■ Michaël de Saint-Chéron
de toute œuvre d’Elie Wiesel je lis la célébration et le chant.
Dans Cœur ouvert, Elie Wiesel parlait en
quatre-vingts pages, de son fils Elisha, de
Marion, mais aussi de ses petits-enfants
Elijah et Shira – avec une tendresse rare.
C’est à travers Elisha leur père, qu’il tisse
son récit. Elisha, qui porte aussi le nom
de son grand-père Shlomo, assassiné
à Buchenwald sous les yeux d’Elie en
1945, c’est la vie qui continue et continuera au-delà d’Elie Wiesel bien sûr. C’est
l’assurance d’une survie pas seulement
physiologique naturellement mais surtout
spirituelle, psychologique. Le regard que
Wiesel porte sur sa seconde survie, autant
que sur le jeune garçon de Sighet qu’il
fut, le rescapé, l’écrivain, l’enseignant,
le père et le grand-père, l’homme tout
court, se fait plus proche qu’auparavant,
plus proche encore que dans La nuit. Cette
épure, nous en trouvons le sens secret, le
sens profond, dans le chant qu’il évoque
et invoque, au cœur de son texte, Ani
Maamin. Non pas le chant traditionnel,
mais le nigoun qu’il reçut d’un miraculé
d’un ghetto de Pologne en 1943 (mais
ce miraculé d’un jour réchappa-t-il à la
guerre ?), qu’il ne vit qu’une seule fois,
« Shabbat Shira », à la cour du Rabbi de
Wizsnitz. Je l’entendis chanter par Elie
Wiesel deux fois, notamment lors de ce
quasi « miraculeux » colloque de Cerisy
donc, et qu’il bénit de ses nigounim au
dîner de ce Shabbat Houquat, qu’il présida, et une autre fois au Centre Rachi, à
Paris, il y a déjà trente ans.
Ce chant d’espérance infinie du peuple juif
prend dans ce nigoun des accents jamais
atteints portés par le sentiment à la fois
insignifiant et invulnérable d’appartenir
au « petit reste d’Israël » - et ce que cela
pouvait signifier au printemps 1943 ! ■
Michaël de Saint-Cheron est notamment
l’auteur de Entretiens avec Elie Wiesel
1983-2000 suivi de Wiesel ce méconnu,
Parole et silence, 2008.
La rédaction remercie tous les annonceurs
qui permettent à notre bulletin de s’autofinancer.
Nous demandons à nos lecteurs de les privilégier dans leurs achats.
Pour figurer comme annonceur, il suffit de prendre contact avec notre régie publicitaire :
S.A.B Print Régie Publicitaire : 23, rue d’Anjou 75008 Paris
Pascal KARSENTI : 06 07 52 93 55
Tél. : 01 30 25 25 57 | [email protected] | Fax : 01 34 10 48 85
28
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
Carnet montévidéo
NAISSANCES
■ Ida et Ophir sont heureux de vous
annoncer la naissance de leur petite
sœur Léonore.
Mazal Tov aux parents Elsa et Avidan
Kogel ainsi qu’aux familles Barros et
Kogel.
Rachel et Henri Garih laissent à
Gabrielle, Jake, Livnat et Joseph la joie
d’annoncer la naissance de leur petit
frère Emmett le 28 avril 2016
■
Nous avons la joie d’annoncer la
naissance de Eva au foyer de Laura et
Grégory Sayag.
Un grand mazal tov aux parents, aux
grands parents Sylvie et Elie Moryoussef,
Hélène et Claude Sayag.
■
■ Nous
avons la joie d’annoncer la naissance de Stella le 30 avril 2016 au foyer
de Yoan et Jessica Maman.
Un grand Mazal Tov à ses parents, ainsi
qu’à ses grand-parents, nos amis Guy et
Gilberte Lopater, Marc Maman et Nicole
Haddad.
Nous avons la joie d’annoncer la naissance d’Arthur le 18 juillet 2016 au foyer
de Jonathan et Johanna Lopater.
Un grand Mazel Tov à ses parents, ainsi
qu’à ses grand-parents, nos amis Guy et
Gilberte Lopater, Charly et Sylvie Oks.
■
Un grand mazal tov à M. et Mme
Luciano Sebeo à l’occasion de la naissance de leur petit-fils Elie Yechaya
Sebeo à New York.
Toutes nos félicitations également aux
parents M. et Mme Joseph Olivier Sebeo.
■
Victor Lazare Zimeray a célébré
sa Bar mitsva le jeudi 12 mai 2016. Le
Chabbat a eu lieu le 15 mai (Parachat
Kedochim).
Un grand mazal tov à M. et Mme
François Zimeray ainsi qu’à Mme Dorotea Beyersdorf.
■
Nous souhaitons un grand mazal
tov aux familles Milewski et Botbol
pour la Bar mitsva d’Ariel-Mordékhaï,
célébré parachat Ekev.
Félicitations à notre Rabbin et à son
épouse.
■
■ Caroline, Alexis, Clara et Arthur
Sarberg ont la joie de vous faire part de
la Bar Mitsva de leur fils et frère Thomas
(Aaron) qui s’est tenue le 8 septembre
en notre synagogue.
Félicitations aux parents, enfants, grands
parents Charles Craunot, Daniel et
Blanca Sarberg.
Une pensée toute particulière pour sa
grand mère Jacqueline Craunot z’l et son
arrière grand mère Fryda Reicher z’l.
■ Yonathan Elbaz, fils de Judith et
Uri Elbaz, petit fils de Arlette et Jacques
Garih a célébré sa bar mitzva le 2 juillet
2016 en Israël.
Maayan, Daniel, Eylon et Benjamin sont
fiers de leur grand frère.
■ Evelyne et Alain Ziegler, ainsi que leurs
“mahatounem” Claire et Alain Alter, ont
le bonheur de vous annoncer le mariage
de leurs enfants Laura Alter et Gary
Ziegler. Le mariage a été célébré dans
la région de Toulouse le 1er Elloul 5776
(4 septembre 2016).
■ Le 28 aout 2016 a eu lieu le mariage
de Candice Laufer avec Jonathan
Adwocat.
Toutes nos félicitations aux mariés, à
leurs parents Michèle et Didier Laufer,
aux grand-parents, M. et Mme Amsellem
et notre amie Jeannette Laufer.
DéCèS
Mme Sylvie Lichnewski, épouse
d’Alain Lichnewski et fille de M. et Mme
Guy Granat.
■
Mme Rahma Benichou, mère de
Jacqueline Meyer.
■
MARIAGES
Nous avons le plaisir de vous faire
part du mariage de Tsilla Kogel et
David Isaac Haziza qui a été célébré
le 13 juillet.
Un grand Mazal Tov aux familles Kogel,
Rozen, Haziza, Sztabowicz et Rouche.
■
■ Kathy et Elie Chamma, Isabelle et
Richard Berger, Mme Chamma, Mme
Fareau ont la joie de vous annoncer
le mariage de leurs enfants et petits
enfants Salomé et Yaacov Berger le
14 juillet 2016.
Le mariage de Sandrine Hanau et
David Soussan a eu lieu le 13 septembre à Paris.
Mazal Tov aux mariés et à leurs parents
Corinne et Roger Hanau ; Joelle et Raymond Soussan.
■
BAR MITSVA
Mazal tov aux parents du marié, Hélène
et Michel Braun ainsi qu’aux parents de
la mariée, Paule et Avi Zlotnik.
■ Nous avons le plaisir de vous faire part
du mariage de Nathaniel Braun et
Diane Zlotnik qui a eu lieu le 28 août
dernier.
Nous adressons nos très sincères
condoléances à leurs familles.
Nous invitons les personnes n’ayant pas
d’e-mail et qui souhaitent être prévenues
des événements communautaires par téléphone,
de se manifester auprès
du secrétariat au 01 45
04 66 73.
« Ce journal contient des
textes sacrés, merci de
ne pas le jeter. Il doit être
mis à la Gueniza ».
A.C.T.I. • septembre 2016/5777 • Numéro 34
29
L’aide à autrui : une « mitsva »
qui l’emporte sur tout autre !
Rabbi Meïr de Premishlane (1780-1850) consacrait une partie importante de son temps à faire
le tour des communautés juives de Pologne afin de collecter des fonds pour les pauvres. Un fidèle
s’en étonna : son rôle de responsable communautaire, l’étude de la Thora ne le dispensaient-ils
pas de cette tâche ingrate, purement matérielle ?
Le Rabbi lui répondit : « Lors d’un rêve, j’ai assisté à une séance du tribunal céleste. Un érudit
s’y est présenté, désireux d’être admis au paradis. Il fut interrogé sur sa science, sur ses efforts
à l’étude mais surtout sur sa motivation : son étude avait-elle été “lechem chamaïm”, totalement
désintéressée ?
Puis un ‘hazan (un ministre-officiant) a comparu. A lui aussi fut demandé si sa prière était pure
de tout intérêt particulier, de toute vanité d’artiste.
Enfin se présenta un juif réputé pour sa générosité. Il eut accès sans difficulté au paradis : peu
importait si sa générosité était intéressée, par goût des honneurs ou celui de se faire valoir,
l’essentiel était qu’il avait redonné vie à des malheureux. Depuis ce rêve, conclut le Rabbi, j’ai
compris que la Tsedaka, les dons aux pauvres était la clef du paradis. »
De même que la Thora commence par un acte de générosité divine (Dieu habille ceux qui sont
nus), elle se termine par un acte de générosité (Dieu accompagne Moïse à sa dernière demeure).
Pour le judaïsme, la solidarité, l’aide aux démunis est à la base de son existence. Le Rav
Yerou’ham LEVOVITZ de Mir expliquait que le concept de charité a précédé, dans la création
du monde, l’existence des pauvres. Car un monde sans compassion et sans générosité, où il n’y
aurait pas de solidarité, serait imparfait, composé de robots, sans relations humaines entre eux.
« Le pauvre fait plus pour le riche, que celui-ci ne fait pour le pauvre ».
Le Talmud enseigne « Celui qui se détourne de la Tsedaka, c’est comme s’il niait l’existence
de Dieu ». En effet, Dieu dit dans la Genèse : « Faisons l’homme à notre ressemblance » (1,26).
Le midrach interroge : pourquoi cette forme plurielle ? Parce que D. propose aux hommes un
partenariat : « Faisons l’homme ensemble : je lui donne la vie et vous lui apporterez, si nécessaire, sa subsistance ».
Rav Assi a dit : « Le commandement de ‘Hessed, d’entraide communautaire, égale l’ensemble
des autres commandements ».
C’est pourquoi, depuis des millénaires, les communautés juives ont créé des structures de bienfaisance solide, sur lesquelles s’appuie l’ensemble de la vie juive.
Lorsque, pour certains, s’estompent la foi et les traditions, la solidarité et la générosité sont les
garants d’un judaïsme vivant !
Gabriel VADNAI
Délégué général aux donations et aux legs
de la Fondation CASIP-COJASOR
Téléchargement