La coexistence de Cordoue Elle se répand en traits de feu, de Bagdad à l'Espagne. En moins d'un siècle, les cavaliers aux étendards verts submergent les rivages du sud méditerranéen, recouvrent les populations christianisées et dominées par Byzance, islamisent les Berbères, déferlent sur l'Espagne catholique, montent jusqu'à Trieste, atteignent Poitiers (où Charles Martel les arrête en 732), et viennent battre les portes de Vienne. L'Islam triomphant connaîtra alors une période féconde au cours de laquelle les cultures juive etmusulmane s'enrichiront mutuellement. Au ixe siècle, à Bagdad, des penseurs juifs qui écrivent en arabe fondent une école philosophique et scientifique. Plus tard, au r siècle, c'est l'Andalousie qui vivra un « âge d'or ». En 929 se produit l'un des faits majeurs de l'histoire médiévale • l'émir Abdel Rahman III est proclamé calife de Cordoue. Cette coexistence étonnante entre médecins juifs — comme Hasdaï ben Isaac ben Shaprout —, évêques chrétiens et califes musulmans va durer un siècle. Maïmonide, le célèbre « médecin de Cordoue », philosophe et théologien juif, devra pourtant quitter Cordoue. Il se réfugie à Fès, la Palestine et Le Caire où il devient le médecin attitré de la cour des Fatimides. Il écrit dix-huit traités de médecine, une immense compilation du Talmud, et le « Guide des égarés », un essai philosophique où il cherche à concilier la foi et la raison. Sa réputation nous fait oublier bien d'autres grands penseurs juifs comme ce Salomon Ibn Gabirol, qui vécut à Saragosse vers l'an 1045 et commentera longuement Aristote pour ses contemporains. Certes, cette longue période de coexistence harmonieuse entre juifs, chrétiens et musulmans en pays d'Islam connaîtra quelques flambées de violence. Elle est pourtant le symbole d'une paix relative, à un moment où la persécution contre les juifs se déchaîne dans l'Europe médiévale. Et l'Espagne restera longtemps considérée comme un pays peuplé de Juifs et de Maures. conqui doubî. sion 1967: Guerre des ShrJours. Les Egyptiens ont fui dans le désert 2. — La prophétie de Mahomet 11 faudra pourtant attendre quelques siècles pour que cette opposition prenne une forme religieuse. Dans les déserts d'Arabie, en 612, se révèle un prophète. Muhammad (Mahomet), comme autrefois Abraham, prêche le monothéisme et lutte contre les divinités qu'adorent les habitants de La Mecque. Il se pourrait alors que la nouvelle prophétie, monothéiste, se rapproche du judaïsme déjà connu en Arabie, ou même du christianisme dont Mahomet a peu entendu parler puisque les chrétiens sont surtout, pour lui, ces Abyssins, mercenaires pauvres et méprisés des bas quartiers de La Mecque. Mais entre Mahomet et les mekkois, le conflit se révèle très vite inégal. Le nouveau Prophète doit lui aussi s'exiler. Il se réfugie dans une oasis du nord, Médine, avec une poignée de ses fidèles. A Médine, étape des caravanes, vit une importante communauté juive. Le bouillant Mahomet perturbe l'équilibre économique de la ville. Après un an et demi de tensions, Mahomet et ses cômpagnons entrent en lutte ouverte avec les JuifS de Médine. Le Prophète, qui s'était d'abord tourné vers les « gens du Livre » pour appuyer sa prédiction, décide l'épreuve de force. Plus question ',pour lui d'affronter une nouvelle hégire, un nouvel exil. Il se souvient alors d'Ismaël, le fils d'Abraham, et se refère explicitement à lui. Il retourne l'exclusion et en appelle à un Abraham originel : e Pourquoi chicanez-vous au sujet d'Abraham alors que la Thora et l'Evangile n'ont été révélés qu'après lui... Abraham n'a été ni juif ni chrétien » (Coran, III, 66, 68). S'affirmant seul héritier véritable, il enracine sa prédiction dans unecommunauté arabe et, fait important, décide de changer la qui bla, le pôle de la prière. Désormais, les musulmans, pour prier, se tourneront vers La Mecque et non plus vers Jérusalem. L'islam est devenu une religion autonome, la religion des nomades et des Bédouins, qu'il faut répandre par le fer et la guerre. Effrayés, les Juifs de Médine quittent la ville, tribu après tribu. La conquête arabo-musulmane va pouvoir commencer: 'est qu'entre-temps la reconquista a été menée d'une main de fer par Isabelle la Catholique et son époux Ferdinand. Les Juifs, puis les « Maures » musulmans, sont expulsés d'Espagne. Ils s'installent au Maghreb et à Constinople. On trouve encore quelques vizirs ou hauts fonctionnaires juifs dans l'Egypte fatimide, un Juif portugais, Joseph Nassi, « duc de Noxos et des Cyclades », banquier à Constantinople. Mais le temps de la tolérance s'efface. Au Proche-Orient, juifs et musulmans vivent différemment la période coloniale. Et les deux Guerres mondiales consacrent la rupture entre des communautés juives tentées par le sionisme et des musulmans déroutés par le'dèpeçage de l'Empire ottoman. S. - Un Etat juif en Pakstine •- La suite de l'histoire est trop cOnnue et trop - complexe pour être racontée. On peut tout juste évoquer dès images, des temps forts, des repères . qui frappent dans ces années de guerres ininterrompues de 1947 à nos jours. 29 novembre 1947. Sur la place Mograbi, à Tel-Aviv, une clameur de joie retentit. Un speaker lit dans un porte-voix une dépêche de RadioPalestine : l'ONU vient de voter, URSS et 24-30 OCTOBRE 1991/85 -1