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tients, mais un suivi prolongé est indiqué en raison du
risque de récidives, d’évolution vers une hypothyroïdie et
de persistance de l’orbitopathie, avec phases d’aggrava-
tion indépendantes de la fonction thyroïdienne. Le traite-
ment par antithyroïdiens de synthèse est prescrit en géné-
ral pour douze à dix-huit mois, puis un arrêt progressif du
traitement peut être tenté.
Hypothyroïdie
Face à une hypothyroïdie avérée non réversible, une
substitution par
lévothyroxine
à vie est nécessaire. La dose
substitutive est estimée selon le poids corporel : 1,6 mg/kg
par jour, c’est-à-dire environ 100 mg/jour pour une femme
de poids moyen et 125 mg/jour pour un homme de poids
moyen. En l’absence de cardiopathie ischémique et avant
l’âge de 60 ans, le traitement est débuté par l’introduction
d’une demi-dose puis quatre à six semaines plus tard par la
dose complète. En cas de
cardiopathie ischémique
ou
au-delà
de l’âge de 60 ans
, introduire un traitement à doses progres-
sives, au début à 12,5-25 mg/jour en augmentant par paliers
à intervalles de deux à trois semaines.
Le contrôle de la réponse au traitement est indiqué trois
mois après son introduction et quatre à six semaines après
chaque modification de dose. L’objectif à moyen et long
termes est de normaliser la TSH.
Par la suite, la TSH est contrôlée annuellement, plus fré-
quemment en cas de grossesse, de prise d’œstrogènes ou
de variation pondérale importante (modification des besoins
en thyroxine). Il est indiqué d’éviter une TSH l 0,4 mU/l,
en raison des risques possibles d’ostéoporose et de fibril-
lation auriculaire. Il convient également d’être attentif aux
interactions médicamenteuses. L’absorption de la thyroxine
est diminuée par les sels de calcium, le fer, l’hydroxyde
d’aluminium et la cholestyramine. Le métabolisme de la
thyroxine est augmenté par la phénytoïne, la carbamazé-
pine, le phénobarbital et la rifampicine. La consultation chez
un spécialiste est nécessaire en cas de grossesse, de non-
réponse ou d’intolérance au traitement, de suspicion d’une
origine centrale ou de comorbidités telles qu’ischémie
myocardique non traitée.
Lors
d’hypothyroïdie infraclinique
, les bénéfices et les in-
convénients du traitement sont controversés. La décision
de traiter dépend du taux de TSH, des possibles symp-
tômes cliniques et d’éventuelles complications métaboli-
ques comme les dyslipidémies. Dans ce cas, des doses
proches des doses substitutives sont utilisées (75-100 mg/
jour) afin de pouvoir observer si le traitement a un effet
favo rable sur les symptômes ayant motivé le traitement,
sans induire d’hyperthyroïdie iatrogène (TSH 0,5-1,5).
conclusion
Les dysthyroïdies sont rencontrées fréquemment par le
médecin de premier recours. Hormis certaines situations
particulières comme les dysfonctions thyroïdiennes sévè-
res et la grossesse, les affections thyroïdiennes peuvent
être prises en charge par le médecin de premier recours.
Les indications au traitement en cas de dysfonctions thy-
roïdiennes infracliniques restent controversées en l’absen-
ce de grandes études randomisées. Il est toutefois conseillé
de soumettre les options stratégiques diagnostiques et thé-
rapeutiques à un médecin spécialiste en endocrinologie,
notamment dans l’hyperthyroïdie.
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Tableau 4. Effets secondaires des traitements de
l’hyperthyroïdie
Antithyroïdiens de synthèse
• Fièvre, rash, urticaire, arthalgies (5% des cas)
• Agranulocytose, hépatotoxicité (très rarement)
N.B. : une surveillance biologique n’est pas conseillée, mais en cas de
fièvre ou maux de gorge, une agranulocytose doit être systématiquement
recherchée sans délai.
Iode radioactif (I131)
• Evolution fréquente vers une hypothyroïdie
• Risque d’aggravation d’une orbitopathie lors de maladie de Basedow
et tabagisme
• Accentuation de l’hyperthyroïdie dans les suites immédiates du traitement
Chirurgie (rares)
• Lésion du nerf récurrent
• Hypoparathyroïdie avec hypocalcémie sévère
• Hémorragie postopératoire, cicatrice chéloïdienne, adhérences
• Hypothyroïdie (situation recherchée)
Implications pratiques
Le risque de crise thyrotoxique existe en cas d’administration
de contraste iodé ou d’amiodarone, principalement chez des
personnes atteintes d’un goitre multinodulaire
Lors d’hypothyroïdie d’origine autoimmune, l’administration
d’hormones thyroïdiennes peut précipiter une insuffisance
surrénalienne concomitante en crise addisonnienne
Toute atteinte thyroïdienne chez une femme enceinte doit
amener à demander un avis spécialisé
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