Le traitement des dépressions mixtes

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L’Encéphale (2013) 39, S179-S184
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
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Le traitement des dépressions mixtes
Treatment of depressive mixed states
M. Duboisa*, D. Dassaa, R. Belzeauxb, E. Fakrab, M. Cermolacceb,
N. Corréardb, A. Kaladjianc, J.-M. Azorinb
aPôle
psychiatrie centre, Hôpital de la Conception, 147 boulevard Baille, 13005 Marseille, France
psychiatrie adultes, Solaris, Hôpital Sainte-Marguerite, 13274 Marseille Cedex09, France
cPôle de psychiatrie des adultes, CHU Robert-Debré, Avenue du Général-Koenig, 51092 Reims cedex, France
bSHU
MOTS CLÉS
État mixte ;
Trouble bipolaire ;
Thymorégulateurs ;
Antidépresseurs ;
Risque suicidaire
Résumé L’état mixte est une modalité d’expression fréquente des troubles de l’humeur,
dont la description clinique a été abordée depuis plusieurs siècles mais n’a été Ànement
explorée que depuis quelques années. Plusieurs auteurs proposent de redéÀnir ses critères
diagnostiques aÀn de mener une stratégie thérapeutique adaptée.
Les recommandations actuelles, proposent de traiter la dépression mixte comme un état
mixte quelle que soit la polarité dominante, et par conséquent selon les règles de prise
en charge thérapeutique de l’état maniaque. Ainsi les traitements thymorégulateurs
et antipsychotiques sont indiqués et ont fait la preuve de leur efÀcacité. Le lithium,
longtemps controversé, présente un intérêt thérapeutique certain, notamment dans la
prévention du risque suicidaire.
La composante dépressive de l’état mixte, même si elle est marquée, ne doit pas faire
l’objet d’une prescription d’antidépresseurs, au risque d’aggraver les composantes
d’irritabilité, d’impulsivité et d’augmenter le risque de passage à l’acte suicidaire.
Par ailleurs, l’électroconvulsivothérapie représente une véritable alternative
thérapeutique ; les psychothérapies ont leur place dans la prévention de la rechute et
dans le cadre de la psychoéducation, mais pas en phase aiguë.
EnÀn, une évaluation précise et une prise en charge adaptée du risque suicidaire doivent
être une préoccupation constante du clinicien.
© L’Encéphale, Paris, 2013. Tous droits réservés.
*Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (M. Dubois).
© L’Encéphale, Paris, 2013. Tous droits réservés.
S180
KEYWORDS
Mixed state;
Bipolar disorder;
Mood stabilisers;
Antidepressants;
Suicide attempt
M. Dubois, et al.
Summary Mixed states are a frequent mood state characterized by the mixture
of manic and depressive symptoms. Their clinical description has been studied for
centuries but has known a renewal of interest recently. Several authors intend to
redeÀne its diagnostic criteria to develop an appropriate therapeutic strategy.
Current recommendations suggest to treat mixed depression as a mixed state
whatever the dominant polarity is, and therefore according to the rules of
therapeutic management of the manic state. Mood stabilizers and antipsychotic
medications are indicated and have proven their effectiveness. Lithium, which was
considered controversial, now appears to have some therapeutic value, especially in
the prevention of suicidal behavior.
The depressive component of mixed states, even pronounced, should not be an
argument for a prescription of antidepressants, at the risk of aggravating clinical
components such as irritability and impulsivity and increasing the danger of suicide
attempt.
Furthermore, electroconvulsivetherapy represents a real alternative ; psychotherapies
have their place in relapse prevention and psychoeducation, but not during acute
phases.
Finally, an accurate assessment and appropriate management of suicide risk should
be a constant concern for the clinicians.
© L’Encéphale, Paris, 2013. All rights reserved.
Introduction
« Ainsi, il y a des symptômes jumeaux, qui sont compagnons
constants, Manie et Mélancholie, et qui se succèdent l’un
à l’autre de manière double et alternée ; ou qui prennent
l’un la place de l’autre, comme la Áamme et la fumée d’un
même feu » Brouchier, 1659 [1].
L’état mixte est une modalité d’expression fréquente
des troubles de l’humeur, dont la description clinique a été
abordée depuis plusieurs siècles mais n’a été Ànement explorée que depuis quelques années. Le repérage clinique reste
difÀcile et la prise en charge thérapeutique en découlant
est spéciÀque.
La difÀculté à « cerner » les états mixtes se retrouve à
travers les multiples dénominations dont ils ont fait l’objet :
mélancolie anxieuse, mélancolie agitée, manie dysphorique,
dépression agitée, etc.
Kraepelin [2] le premier conceptualisait les états mixtes
comme des états transitionnels entre manie et mélancolie ; il
en donne tout de même une déÀnition en les individualisant
clairement au sein de la nosographie en tant qu’entités
cliniques singulières. Il propose une vision dimensionnelle
autour de trois axes : la pensée, l’humeur et l’activité
psychomotrice.
Les deux formes cliniques d’état mixte que Kraepelin
décrit le plus Ànement sont la manie anxieuse et la dépression agitée, qui fut reprise par Jaspers sous le terme de
« mélancolie mixte ».
La prévalence des états mixtes et de la dépression mixte
varie fortement selon les auteurs et les critères diagnostiques utilisés. Ainsi, Goodwin et Jamison [1] retiennent
une prévalence de 28 % de patients atteints ; la fréquence
atteint même 50 % chez d’autres auteurs.
Une reconnaissance claire de la symptomatologie de
la dépression mixte est donc nécessaire aÀn de guider la
stratégie thérapeutique et permettre une prise en charge
adaptée de ces patients, tant sur le plan pharmacologique
que psychothérapeutique.
Dépression agitée : unipolaire
ou bipolaire ?
La nosologie de la « dépression agitée » ne semble pas
résolue par une approche catégorielle telle que proposée
dans les classiÀcations internationales. En effet, dans le
DSM IV-TR (American Psychiatric Association, 2000), les
troubles de l’humeur sont divisés en troubles bipolaires et
troubles dépressifs. L’élément séparant ces catégories est la
présence d’un épisode maniaque ou hypomaniaque, présent
dans les troubles bipolaire mais absent dans les troubles
dépressifs (Tableau 1) [3].
La validité diagnostique de la dépression agitée (déÀnie
par un épisode dépressif majeur associé à des manifestations
d’agitation psychomotrice) dans les classiÀcations classiques
des troubles de l’humeur est peu claire. Dans le DSM IV-TR
et dans la CIM-10 (Organisation Mondiale de la santé, 1992),
l’épisode dépressif majeur avec agitation psychomotrice
est présent dans les troubles dépressifs unipolaires et bipolaires, sans distinction de sous-types ou spéciÀcités. Aucune
différence n’est faite entre dépression agitée et dépression
ralentie dans ces deux systèmes.
Si, comme le préconisent Henry et al. [4], on se place
d’un point de vue dimensionnel, les limites entre les différents états deviennent plus Áoues. Ainsi, Akiskal et al.
(2005) [5] suggèrent que les dépressions agitées ou excitées
Le traitement des dépressions mixtes
S181
Tableau 1 ClassiÀcation des troubles dépressifs selon le DSM IV-TR.
Major depressive disorder
Dysthymic disorder
No history of mania or hypomania
+
+
MDE
+
+/-
Depressive symptoms not meeting MDE criteria
+/-
+
Duration
At least 2 weeks
At least 2 years
MDE = major depressive episode. + = present. - = absent.
doivent être considérées comme des états mixtes. Cette
distinction apparait d’autant plus importante qu’elle guide
la stratégie thérapeutique ; en effet, l’augmentation des
idées ou comportements suicidaires chez des patients traités
par antidépresseurs en monothérapie ou en association
pourrait être attribuée à la présence et/ou la majoration
d’une activation psychomotrice présente de manière basale
dans la dépression agitée.
Ces résultats conÀrment les travaux de Koukopoulos et al.
(1999) [6], allant déjà dans ce sens et préconisant que toutes
les formes de dépression agitée entrent dans le cadre nosologique des états mixtes et doivent être traitées comme telles.
Stratégies thérapeutiques
Recommandations actuelles
Le traitement de la dépression bipolaire et de la dépression
mixte requiert à la fois la résolution de la symptomatologie
aigue et l’installation d’une humeur stable.
La problématique principale réside dans le fait que les
traitements de la dépression mixte ont été développés
et ont prouvé leur efÀcacité pour d’autres « états ». En
effet, l’ensemble des études de validation et mise sur le
marché des antidépresseurs ont centré leurs résultats sur des
patients souffrant d’un syndrome dépressif sans comorbidités
associées, et n’explorent pas les effets de ces molécules
dans le cadre spéciÀque de la dépression bipolaire ou des
états mixtes. De même, les thymorégulateurs tirent leur
validité scientiÀque d’études dont les sujets souffrent de
symptomatologie maniaque.
Ainsi, le traitement des dépressions mixtes prend ses
racines dans une pratique empirique mais dont certaines
recommandations peuvent être extraites.
Il semble maintenant validé que la dépression mixte doit
être considérée comme faisant partie du spectre des états
mixtes, au même titre que la manie mixte. Dans ce cadre,
les stratégies thérapeutiques réservées aux états mixtes
sont en fait superposables aux stratégies thérapeutiques de
l’épisode maniaque. En ce sens, les antidépresseurs sont à
proscrire dans l’état mixte et à fortiori la dépression mixte,
quelle que soit la sévérité de la dimension symptomatique
dépressive qui l’accompagne [7].
Néanmoins, si on considère l’état mixte comme un
marqueur de gravité de l’état maniaque, son traitement
est complexe et repose souvent sur une polythérapie.
Traitement pharmacologique
Sels de lithium
Classiquement, une particularité pharmacologique des états
mixtes était leur fable réponse à un traitement par monothérapie au lithium [8,9,10]. Les résultats d’une étude de
Swann et al. en 1986 sont en faveur d’un taux de répondeurs
au traitement par lithium plus faible lorsque des symptômes
dépressifs sont associés aux symptômes maniaques. De plus,
ces épisodes semblent nécessiter l’emploi d’un nombre supérieur de traitements par rapport aux manifestations purement
dépressives ou maniaques des troubles bipolaires [11].
Plus récemment, l’intérêt thérapeutique du lithium a
été rediscuté. En effet, des données sur les autres effets
bénéÀques du lithium tels que la prévention du risque suicidaire et les effets neuromodulateurs en font un traitement
de première ligne dans toutes les expressions cliniques du
trouble de l’humeur bipolaire [12].
Divalproate de sodium
Le divalproate a une efÀcacité sur les symptômes maniaques
des états mixtes, vraisemblablement supérieure à celle
du lithium [13]. En outre, il pourrait également avoir une
action sur les symptômes dépressifs de ce type d’épisode.
Néanmoins, la British Association of Psychopharmacology
émet des réserves sur la supériorité du divalproate sur le
lithium dans le cas particulier des états mixtes. Elle précise
que le divalproate ne se serait montré supérieur au lithium
que pour les cas de manie dysphorique avec irritabilité.
Elle recommande donc l’arrêt de tout traitement antidépresseur et la prescription soit de sels de lithium, soit de
divalproate [14,15].
S182
Carbamazépine
Initialement décrite comme une bonne alternative au lithium
ou au divalproate dans le traitement des états mixtes, l’intêret de la carbamazépine a été remis en cause par certains
auteurs dans cette indication. Post et al [16] ont démontré
une bonne efÀcacité antimaniaque mais une faible efÀcacité
sur les symptômes dépressifs des états mixtes, suggérant des
mécanismes d’action différents.
A contrario, Dilsaver et al. [17] démontrent une efÀcacité signiÀcative de la carbamazépine sur les symptômes
dépressifs de l’état mixte, permettant une diminution de
73 % des scores à l’échelle de dépression de Hamilton chez
36 patients et permettant une rémission symptomatique
chez 27 d’entre eux.
Cependant, au regard du fort effet inducteur enzymatique
de la molécule, des précautions particulières sont à prendre
en cas de prescription de carbamazépine, particulièrement
en cas d’association à un autre traitement à métabolisme
hépatique. Cette limitation peut rendre l’utilisation de la
carbamazépine complexe compte tenu de l’indication de
polythérapie thymorégulatrice dans la prise en charge des
états mixtes.
Antipsychotiques atypiques
Plusieurs essais thérapeutiques ont tenté de démontrer
l’intérêt des antipsychotiques atypiques dans le traitement
des états mixtes. Baker et al. [18] ont montré à l’issue d’une
étude contre placebo que l’olanzapine était à la fois efÀcace
sur les symptômes maniaques et les symptômes dépressifs.
Par ailleurs, l’amélioration de la symptomatologie maniaque
est apparue équivalente chez les sujets mixtes et les sujets
maniaques, la présence de caractéristiques dépressives
n’interférant pas sur l’évolution.
De la même manière, la risperidone a fait la preuve
de son utilité sur une population de bipolaires maniaques,
mixtes ou déprimés, toujours en association avec au moins
un traitement thymorégulateur [19].
Les autres antipsychotiques disponibles actuellement
(aripiprazole, quetiapine) semblent avoir le même proÀl
d’efÀcacité que ceux cités précédemment. La clozapine
reste également une alternative thérapeutique de choix
après échec des traitements usuels [20]. Toutefois, la
difÀculté d’associer d’autres thérapeutiques, le risque
de complications hématologiques et la surveillance que
nécessite son emploi rendent l’utilisation de la clozapine
peu fréquente dans cette indication [21].
Électroconvulsivothérapie (ECT)
La littérature actuelle ne rassemble que peu d’études
traitant de l’intérêt thérapeutique des ECT dans le cadre
spéciÀque de la dépression mixte.
M. Dubois, et al.
Selon Small et al. [22] les patients présentant une
symptomatologie mixte présentent une meilleure réponse à
l’ECT que ceux présentant une manie pure. D’autres auteurs
rapportent que l’ECT est un traitement efÀcace des états
mixtes mais que la durée d’hospitalisation et le nombre de
séances nécessaires sont plus importants que dans les autres
indications [23].
Si les ECT apparaissent comme un traitement efÀcace des
épisodes mixtes, la relative complexité de leur prescription
n’en fait pas un traitement de première intention mais
une alternative de choix en cas d’urgence ou d’échec des
traitements médicamenteux [21].
Traitement non médicamenteux
L’intervention psychothérapeutique ne présente pas
d’intérêt thérapeutique majeur pendant la phase aiguë
des dépressions mixtes. En effet, le défaut d’insight et/ou
l’opposition aux soins en phase processuelle rendent difÀcile
une prise en charge psychothérapeutique, en particulier
d’inspiration cognitivo-comportementale. La proposition
d’une thérapie de soutien reste toujours indiquée.
En revanche, la prise en charge en psychothérapie
présente un intérêt majeur en phase intercritique, dans le
cadre de la prévention de la rechute. Au sein des différentes
orientations, la thérapie centrée sur la famille ainsi que la
psychoéducation en groupe ont démontré une diminution
de 35 % du taux de rechute chez les patients ayant pu en
bénéÀcier [24].
Dépression mixte et antidépresseurs
Généralités
Les stratégies thérapeutiques concernant les dépressions
mixtes dépendent largement du cadre de lecture de la
symptomatologie aigue. Si l’on suit le postulat antérieurement exposé selon lequel la dépression mixte est une
part intégrante des états mixtes, au même titre que la
manie mixte, les antidépresseurs sont déconseillés dans
cette indication. Les données de la littérature montrent
que les antidépresseurs contribuent à déclencher, à aggraver
ou à chroniciser ces états thymiques particuliers. Fait plus
préoccupant encore, les antidépresseurs utilisés au cours de
l’état mixte contribuent à majorer nettement le risque de
passage à l’acte suicidaire.
Pourtant, l’usage des antidépresseurs dans la dépression
mixte demeure une pratique largement répandue en France.
Le contraste entre les recommandations issues de la
littérature médicale et la pratique psychiatrique de terrain interroge et suscite une réÁexion autour des enjeux
diagnostiques, thérapeutiques et pronostiques de l’état
mixte [7].
Le traitement des dépressions mixtes
Vietnam, que le risque de comportement suicidaire sous
antidépresseur seul était considérable puisqu’il approchait
les 25 %. Le risque de comportement suicidaire sous thymorégulateur seul était nettement plus faible (3,5 %) et le
risque sous association thymorégulateur + antidépresseur
était intermédiaire (10 %) (Fig. 1).
Cette étude remet donc sérieusement en question l’idée
selon laquelle l’effet d’augmentation du risque de conduite
suicidaire sous antidépresseur est totalement atténué par la
cothérapie avec un thymorégulateur, fût-ce le lithium [5].
Rate (Events/100 Patient Years)
30
25
20
15
10
Conclusion
5
0
S183
MS MONO (3785) MS+AD (2954)
AD ALONE (1250)
Treatment Period (Months)
Severe Events
All Events
For All Events: MS+AD-vs-MS MONO Chi-squared = 8.71 (df = 1),
p = 0.003; MS+AD-vs-AD ALONE Chi-square = 12.15 (df = 1),
p = 0.0005; MS MONO-vs-AD ALONE Chi-square = 29.87 (df = 1),
p < 0.0001.
Figure 1 Comportement suicidaire chez des patients bipolaires
vétérans traités par thymorégulateur et/ou antidépresseur (N=405).
Antidépresseurs et risque suicidaire
La question du risque suicidaire chez les patients souffrant
d’un trouble bipolaire est une question de santé publique,
puisque on estime qu’environ un patient bipolaire sur six
décède par suicide.
Balazs et al. [25], retrouvent une très forte proportion
de patients présentant une dépression mixte parmi les suicidants (jusqu’à 70,8 %). L’impact des antidépresseurs sur le
risque suicidaire chez le patient bipolaire reste une question
controversée, faute de données scientiÀques sufÀsamment
solides. Mc Elroy et al. [26], malgré des limitations sur le plan
méthodologique, estiment qu’il existe un corpus de données
sufÀsant pour montrer l’association forte entre état mixte,
suicidalité et prise d’antidépresseurs en monothérapie. Les
auteurs recommandent donc de ne pas traiter un patient
présentant un état mixte par antidépresseurs seuls.
Ainsi, ces recommandations rejoignent celles d’Akiskal
et Benazzi qui soutiennent que toute dépression agitée
peut masquer un état mixte et contre-indiquent de manière
formelle l’emploi d’antidépresseurs [5], d’autant plus que
l’irritabilité et l’agitation psychomotrice caractéristiques
de la symptomatologie mixte sont des prédicteurs forts de
passage à l’acte suicidaire. Dans ce cadre, si un traitement
antidépresseur doit malgré tout être instauré, il est prudent
de le faire en association avec le lithium, dont l’impact est
reconnu sur la diminution du risque suicidaire [26].
A contrario, Yerevanian et al. [27] montrent, dans
une étude portant sur 400 patients bipolaires vétérans du
La dépression mixte est une entité clinique particulière
et peu explorée qui nécessite une déÀnition précise et
de redéÀnir ses critères diagnostiques aÀn de mener une
stratégie thérapeutique adaptée.
Les recommandations actuelles, même si elles restent
mouvantes, proposent de traiter la dépression mixte comme
un état mixte sans considération de la polarité dépressive,
et par conséquent selon les règles de prise en charge thérapeutique de l’état maniaque.
La composante dépressive de l’état mixte, même si elle
est marquée, ne doit pas faire l’objet d’une prescription
d’antidépresseurs, au risque d’aggraver les composantes
d’irritabilité, d’impulsivité et d’augmenter le risque de
passage à l’acte auto-agressif.
Par ailleurs, l’électroconvulsivothérapie représente
une véritable alternative thérapeutique ; les traitements
psychothérapeutiques ont leur place dans la prise en charge
de la dépression mixte, mais plutôt dans le cadre de la
prévention de la rechute qu’en cas d’accès aigu.
EnÀn, une évaluation précise et une prise en charge
adaptée du risque suicidaire doivent être une préoccupation
constante du clinicien.
Liens d’intérêts
Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt pour cet
article.
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