SYSTEME NEUROSENSORIEL ET PSYCHIATRIE – Pharmacologie des antipsychotiques & Pharmacologie des régulateurs de l'humeur 09.01.2014 NYKOLYSZYN Charlotte L3 SNP Pr MICALLEF (Je cite : « médecin pharmacologue, nul n'est parfait »...) Relecteur 7 6 pages Pharmacologie des antipsychotiques & Pharmacologie des régulateurs de l'humeur Plan A. Antipsychotiques I. Introduction II. Antipsychotiques de 1ère génération III. Antipsychotiques de 2ère génération IV. Utilisation pratique B. Régulateurs de l'humeur (cours du 10.01) A. Antipsychotiques I. Introduction Découverte en 1952 de la chlorpromazine. En 1955, deux psychiatres parisiens, Delay et Denicker, donnent le nom de « neuroleptique » à toute molécule douée de 5 critères : • Création d'un état d'indifférence psychomotrice • Efficacité vis à vis des états d'excitation et d'agitation • Réduction progressive des troubles psychotiques aigus et chroniques • Production de syndromes extra-pyramidaux et végétatifs (= principal effet secondaire !) • Effets sous-corticaux dominants Cette définition est très française puisqu'on n'utilise pas le terme de « neuroleptique » ailleurs dans le monde. Puis, découverte de molécules : • Ne possédant que partiellement ces critères • Ayant peu/pas de retentissement extra-pyramidal → antipsychotiques atypiques ou de 2ème génération Ces nouvelles molécules conservent des points communs avec les antipsychotiques de 1ère génération (neuroleptiques): • Antagonistes des récepteurs dopaminergiques D2 • Action sur d'autres récepteurs (effets thérapeutiques, effets indésirables) Attention : ne pas se laisser avoir par le vocabulaire !!! Tous ces médicaments agissent au niveau du même récepteur de façon antagoniste : D2 ! Très rarement, les médicaments agissent de façon strictement sélective. 1/6 SYSTEME NEUROSENSORIEL ET PSYCHIATRIE – Pharmacologie des antipsychotiques & Pharmacologie des régulateurs de l'humeur La sélectivité n'existe pas en pharmacologie (quoi qu'en disent les visiteurs médicaux, doctissimo, Gala, etc...). Des effets secondaires émergent par action sur d'autres récepteurs. Certains peuvent être intéressants, d'autres non. Classification des antipsychotiques : • • 1ère génération : ou conventionnels ou typiques = neuroleptiques (NLP) Molécule référence : halopéridol (DCI) 2ème génération : ou atypiques ou « antipsychotiques » Molécule référence : clozapine II. Antipsychotiques de 1ère génération a) Mécanismes d'action ➢ Effets antidopaminergiques : (/!\ La dopamine intervient à plusieurs niveaux = plusieurs types d'effets) • Blocage post-synaptique de la voie nigro-striée à l'origine des effets extra-pyramidaux • Blocage de la voie tubéro-infundibulaire à l'origine des effets endocriniens • Blocage de la voie méso-cortico-limbique à l'origine des effets antipsychotiques ➢ Blocage des récepteurs α-adrénergiques ➢ Action atropinique ➢ Action anti-histaminique H1 : effets sédatifs, prise de poids b) Effets thérapeutiques Ces molécules ont 3 principaux effets permettant de traiter les psychoses : • Anti-productif : actions sur les symptômes positifs : délires, hallucinations acoustiques... • Désinhibiteur : action sur les symptômes négatifs des formes catatoniques de psychose • Sédatif : utile pour agir les manifestations anxieuses ou sur l'agitation C'est en jouant sur les doses qu'on obtient des médicaments qui agissent plus sur tel ou tel aspect. Certaines molécules ont aussi une action préférentielle. Classification clinique en fonction de leurs effets prédominants : • NLP sédatif : angoisse, agitation Lévopromazine • NLP anti-productif : hallucination, délire Halopéridol • NLP dits désinhibiteurs : symptômes déficitaires Amisulpride Ces médicaments ne sont pas utilisés que pour la psychose. Ex : Quand les patients cassent tout aux urgences... Oui, la prof a failli mourir aux urgences à cause d'un patient qui croyait « être dans un œuf de procréation» et cassait donc le mur « pour que l'oeuf éclose »... 2/6 SYSTEME NEUROSENSORIEL ET PSYCHIATRIE – Pharmacologie des antipsychotiques & Pharmacologie des régulateurs de l'humeur Le maniement de ces médicaments n'est pas aisé. Il y a une étroite relation entre affinité pour les récepteurs, propriétés pharmacodynamiques et effets indésirables +++. On a une marge très étroite. Il faut trouver une dose qui occupe assez les récepteurs pour avoir un effet assez long mais pas trop élevée pour éviter le syndrome extra-pyramidal. On tâtonne un peu au début (puisqu’on ne peut pas faire passer un PETscan à tous les patients pour voir le nombre de récepteurs). c) Effets secondaires ➢ Endocriniens et métaboliques : Prise de poids (à cause des antiH1), troubles sexuels, gynécomastie – galactorrhée, dysménorrhées... Il faut analyser ces effets à la lumière des caractéristiques de la pathologie psychotique. Les psychotiques sont dans le déni de la maladie et de l'ensemble de leur corps. Lorsqu'on propose le traitement, les patients vont souvent être récalcitrants, puisqu'ils ne perçoivent pas leur atteinte. Les effets secondaires peuvent alimenter leur délire et n'aident pas à la prise en charge du patient. Ex : Certains psychotiques se prennent pour femmes alors que ce sont des hommes, pour des hommes alors que ce sont des femmes, ou pour les deux... Si une gynécomastie apparaît chez un homme psychotique qui croit être une femme...et bah ça l'aide pas... ➢ Neurologiques : Réversibles : Syndrome extra-pyramidal (akinésie, rigidité, tremblement), dyskinésies aiguës. C'est en jouant sur les doses qu'on peut éviter ces effets. Irréversibles : Dyskinésies tardives après 6 mois de traitement ou souvent après plusieurs années. Cette atteinte est surtout bucco-linguo-facial +++ , c'est le rabbit syndrom = mâchonnement comme un lapin (très sexy). ➢ Syndrome malin des anti-psychotiques : Rare mais important à connaître (mortalité : 20%) On n'en connaît pas la cause, à part l'exposition à l'antipsychotique. • Tableau clinique : Hyperthermie+++ (fièvre >39°C), déshydratation, syndrome extra-pyramidal Signes neurovégétatifs : sueurs, hyper-sialorrhée, tachycardie, labilité tensionnelle Confusion mentale Coma, voire évolution fatale Biologie : Hyperleucocytose importante, élévation des CPK à des taux très importants • Prise en charge : Urgence vitale : arrêt de l'antipsychotique +++, transfert en réanimation, traitements symptomatiques ➢ Effets digestifs : Constipation (parfois jusqu'à l'occlusion), sécheresse buccale, rarement des hépatites ➢ Symptômes ophtalmologiques : Troubles de l’accommodation, augmentation de la pression intra oculaire 3/6 SYSTEME NEUROSENSORIEL ET PSYCHIATRIE – Pharmacologie des antipsychotiques & Pharmacologie des régulateurs de l'humeur ➢ Autres effets secondaires : Hypotension orthostatique surtout au début du traitement, sédation – somnolence, allongement du QT (ECG+++), Convulsions L'allongement du QT explique la mort subite de certains patients sous traitement : attention à faire un ECG avant de mettre le patient sous traitement, puis un après, pour pouvoir comparer les 2 ! III. Antipsychotiques de 2ème génération a) Mécanismes d'action Ils sont dits neuroleptiques atypiques car ils se distinguent des autres par leur profil de liaison privilégiant d'autres récepteurs que les seuls récepteurs D2. Ils sont antagonistes D2 mais aussi D3, D4, 5HT2 ou 5HT3 (sérotonine). Les laboratoires ont annoncé « moins d'effets latéraux neurologiques ». Produits : • Clozapine : LEPONEX® • Rispéridone : RISPERDAL® • Olanzapine : ZYPREXA® Il y a aussi un quatrième produit, un peu atypique par son mécanisme d'action : l'aribiprazol. Certes il agit au niveau des D2 mais c'est un agoniste partiel ! Ce médicament est intéressant parce que son mode d'action clinique va être lié à l'environnement dopaminergique dans lequel il agit. Dans la schizophrénie, on peut avoir à la fois des signes positifs et négatifs (repli sur soi etc...). Vraisemblablement, des zones du cerveau sont riches en dopamine (effets +) et d'autres ne le sont pas (effets -). Ce médicament est séduisant dans ce type de pathologie parce qu'il va dans un environnement riche en dopamine être antagoniste pour améliorer les symptômes positifs, tandis que dans un environnement hypodopaminergique il aura un effet agoniste améliorant la transmission dopaminergique. C'est actuellement la seul molécule à avoir cette spécificité. b) Effets thérapeutiques • • • Profil d'action sur les symptômes positifs, identique aux effets des NLP Profil d'action aussi sur les symptômes négatifs : contact social, repli sur soi, difficulté à percevoir les émotions... « Meilleur profil de tolérance »... Soi disant ! (Ce que Micallef a ponctué d'un magnifique « ambiance tour de pise ! »... A méditer !) c) Effets secondaires ➢ Agranulocytose avec la Clozapine uniquement Prescription initiale hospitalière réservée aux spécialistes psychiatres et neurologues. On effectue une NF leucocytaire toutes les semaines pendant 18 semaines, puis 1/mois (carnet de suivi du patient). C'est une molécule très efficace qu'on a tendance à réserver aux schizophrènes difficiles à traiter, à cause de cet effet indésirable. 4/6 SYSTEME NEUROSENSORIEL ET PSYCHIATRIE – Pharmacologie des antipsychotiques & Pharmacologie des régulateurs de l'humeur ➢ Effet citrouille (= Micallef VS laboratoire pharmaceutique) On nous a vendu les 2ème génération comme ayant beaucoup moins d'effets extra-pyramidaux. En fait tout résidait dans la dose. Dans la « vraie vie », les psychiatres ont « la main généreuse » et augmentent les doses : on a alors autant d'effets extra-pyramidaux qu'avec les NLP ! De plus, il y a d'autres effets indésirables non vu chez les 1ère génération (Sacré citrouille...) : obésité, diabète, dyslipidémie → augmentation de facteurs de risque cardiovasculaires. Or les patients psychotiques sont en général en plus de très gros fumeurs. Les traitements ne sont donc pas anodins d'un point de vue cardio-métabolique. Il faut bien suivre ces patients ! IV. Utilisation pratique Les antipsychotiques sont surtout prescrits dans la psychose (schizophrénie +++). Ces médicaments ont incontestablement amélioré la prise en charge extra-hospitalière et extra-asilaire de ces patients. A condition de bien poser le diagnostic, de faire un traitement au long cours, et pas seulement médicamenteux. Il faut une prise de façon quotidienne par voie orale. Dans le développement pharmacologique de ces molécules (utile pour les patients difficiles), on a mis au point une forme à action prolongée : disponible en forme injectable (IM) à raison de une injection tous les 15 ou 21 jours selon la molécule, en relais de la forme orale (une fois que la forme orale a montré son efficacité et qu'on a trouvé la dose adaptée au patient). Cela permet d'améliorer l'observance. La crainte que l'on a est l'apparition du syndrome malin des neuroleptiques : on ne peut pas arrêter le traitement (une fois que l'injection a été faite, le médicament est dans le corps du patient pour plusieurs semaines !), il n'y a pas d'antidote ! Il faut effectuer une surveillance psychiatrique et somatique. Certaines de ces molécules sont aussi utilisées dans d'autres indications : • • • • • Vomissements (halopéridol) Episodes dépressifs majeurs en association avec un antidépresseur (quand on a peur que les patients passent à l'acte) : cyamémazine Troubles psychotiques de la maladie de Parkinson : clozapine Agressivité persistante dans l'Alzheimer modéré à sévère : risperidone (courte durée) Troubles bipolaires : aripiprazole, risperidone, olanzapine 5/6 SYSTEME NEUROSENSORIEL ET PSYCHIATRIE – Pharmacologie des antipsychotiques & Pharmacologie des régulateurs de l'humeur 6/6