De la lettre à l'Esprit, par le Verbe et le Sens
Écrire ?
Le poète est celui, dit l'étymologiste,
Qui fait, et donc qui crée, étant ainsi facteur !
Et ce dernier apporte un message, en acteur
Du mouvement de vie en lequel on existe…
Lorsque naît un poème, arrive la question
Taraudant le poète : « Au monde, à quoi ça rime ?
Et l'ambiguïté de la formulation
Fait alors apparaître une tension qu'exprime
Aussi bien l'essentiel que la similitude
Des sons qui sont issus de ses vieilles études…
Il serait indécent, pour un amant des vers
Qu'on ne confiât point sa dépouille à ces vers
Qui rendent à la terre, avec application,
Ce qui offrait support à son inspiration.
Faut-il vraiment prolonger l'existence
De cette humanité masochiste et sadique
En recherchant, par la voi( ) poétique
A corriger ses défauts par des stances ?
Musique
Un vers doit être dit, et, mieux, être scandé,
Afin que par son rythme, et aussi par sa rime,
Son esprit se révèle et nous fasse ascender
Vers le discernement, et la beauté en prime.
Rime et rythme sont musique
Concourant à l'harmonie
Que construit la symphonie
Des vers de l'art poétique.
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Lorsque je cherche un mot pour créer l'harmonie
D'un vers bien balancé, ne visé-je à vibrer
Avec mon Créateur, dissipant l'atonie
Et, ainsi méditant, tendant à calibrer
Et le sens, et la rime, en un rythme divin
Qui met en mon vécu un somptueux levain?
"De la musique avant toute chose
Et pour cela préfère l'impair".
Verlaine l'a dit mais, pour la cause
De l'humanité il eût pu, père
D'un original art poétique
Faire un grand principe politique
Où la MESURE avant toute chose
Aurait enfin su gérer les doses
De bien, de mal, et de l'inaction
A comparer à la réaction…
Une fois les mots assemblés
Sur le papier sont sclérosés.
On peut pourtant les diffuser,
Ce qui les rend alors râblés.
Mots
N'est-ce pas dans les mots qu'est mise la substance
Que l'on peut dévoiler en la répercutant
Pour que les attentifs retirent de ces stances
Un enrichissement tout d'abord rebutant ?
Décrypter pour leur cœur le sens de chaque terme,
Serait-ce le travail qui conduira, à terme,
Le monde à retrouver un chemin moins ardu
Que celui où, ces temps, le bon sens est tordu ?
Baptiser une chose est, dans son existence,
Introduire du fixe, et la réduire, ainsi,
À être trop image en troublant son essence.
Mais peut-on se passer de ce facteur, ici ?
Si l'on trouvait les mots exacts
Décrivant la réalité,
N'y aurait-il égalité
Entre elle et eux ? Par quel impact
Agirions-nous sur son futur ?
Que deviendrait notre aventure ?
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Lorsque l'on crée un mot, on enrichit le monde.
Son ambiguïté, occasion de partage,
N'offre-t-elle aux humains la peine et l'avantage
De devoir écouter l'univers qu'il émonde ?
Le mot est, pour l'humain, ce qui porte l'Esprit.
Forme et fond, à la fois, on en paye le prix
Par les imprécisions que, toujours, il comporte,
Forçant à échanger pour dégager nos portes.
Sens
N'y a-t-il pas raison
À voir que dans les mots,
Il n'est pas que des maux,
Mais qu’ils vous sont maison
Pour abriter le sens
Qui est, de tout, l’essence.
Est-ce dans le cerveau que sont stockés les mots,
Les images, les bruits que nous restituons ?
Savons-nous si ce lieu où nous les situons
N'est pas qu'un transmetteur à instincts animaux ?
Un mot n'a d'intérêt que vu dans son contexte
Qui, s'il est ignoré, offre ainsi le prétexte
Pour tordre le prochain, rarement pour l'aider.
Comment donc, par l'Esprit, le faire précéder ?
Vivre ou vibrer, riche exemple de thèmes
Dont l'interprétation, en un poème,
Permet substitution, car de leur sens
Réel, du fond, ils préservent l'essence.
Le nom d'une entité
Reçu à sa naissance
Est une identité !
Mais est-il son essence ?
Quel prisme est-il placé dans le mot dont on use
Pour décrire l'humain dans ses emportements ?
Tout terme offre une image, et ainsi il abuse
Auditeur et auteur, souvent inconsciemment !
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Lorsque, par un outil, on transforme un système,
C'est en fait qu'on lui parle, et cette opération,
Qu'on peut assimiler au lancer d'un poème,
Montre qu'on a trouvé sa langue pour l'action.
Ne nous battons-nous pas, d'abord, sur des paroles,
Ou sur des opinions, et très peu sur des faits ?
Ne pourrait-on, plutôt, confier à Éole,
Le soin de dissiper, de ces mots, les méfaits ?
On ne voit le réel que tel qu'on le décrit
On ne se base alors que sur une apparence
Qu'on ne sait dépasser ! Ah ! quelle outrecuidance!
Ne peut-on s'affranchir du figé de l'écrit ?
Finalement, la vérité,
N'est-elle, à la réalité,
Ce qu'est la carte au territoire,
Un guide parfois dérisoire
Ou un symbole intimidant
De nos illusions dépendant?
Esprit
Un texte n'a valeur que lorsqu'on le traduit
Par l'action de son sens admis de bonne foi,
Améliorée encor chaque fois qu'elle induit
Échange auteur-lecteur, par le geste et la voix !
Que cela plaise ou non, les mots ont deux contextes :
Celui du récepteur, et du lanceur du texte.
Une adhésion au fond devient ainsi miracle
Qui se produit parfois, et les mène au pinacle,
Construisant une action réellement commune
Où l'âme, de ce fait, en les deux est comme Une…
Le message des dieux est mieux saisi par l'homme,
Quand celui-ci se tait, acceptant la souplesse
Dont la phrase et ses mots ne rendent pas la somme
De l'intention qu'y met la divine tendresse.
Concours de poésie 2016 De la lettre à l'esprit P. Santschi le 20.6.16 page 4 / 5
Ne devrait-on, bien plus, revisiter Bourdieu ?
N'a-t-il vu, comme Jean, que le mot était Dieu ?
Et son nom, en lui-même, n'est-il révélateur
Que l'esprit lie bourde et divin locuteur ?
Tournant autour du Verbe, enjeu de toute lutte,
Il désigne, acéré, les abus et les buts.
S'accrocher à un texte utile au bon vieux temps,
Mais qui, lu de nos jours, dégrade le message,
N'est-ce scléroser Dieu, ainsi Le limitant,
Et par là refuser d'évoluer en sage ?
Si la parole est Dieu et si Dieu est amour
Quand nous nous exprimons, usant de notre mour,
Veillons à nous montrer digne de cet outil
En ne livrant ainsi qu'un message abouti.
Certes, c'est traduction ; mais de devoir traduire
Force notre mental et notre âme à conduire.
Au début est le Verbe,
Le Verbe est avec Dieu,
Et le Verbe, c'est Dieu.
Il nourrit, mieux que l'herbe ;
Il n'est pas substantif,
Il est, pour tout, actif.
Pays de Vaud, le 20.6.2016
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