Innovative Ideas, Real Business Janvier 2015 3
Pour les entreprises, la baisse des prix du pétrole est une bonne nouvelle. Elle présente des avantages, tant du
point de vue des coûts que des recettes : la baisse du prix de l'énergie leur permet en effet de produire à moindre
coût, de gonfler leur marge bénéficiaire et d'accroître leur rentabilité. Par ailleurs, l'augmentation du revenu
disponible du consommateur peut doper les ventes globales, avec à la clé un second renfort du bénéfice
d'exploitation. Tous les secteurs ne profitent pas de la même manière de l'aubaine : ceux dont le processus de
production est plus tributaire du pétrole brut (chimie et transport par exemple) ont plus à y gagner que les autres.
Les investisseurs obligataires et les candidats emprunteurs tirent aussi parti des baisses de prix. Comme nous
l'avons déjà dit, la baisse du prix du pétrole endigue l'inflation générale : on s'attend à ce que l'inflation totale
atteigne le degré zéro sur l'ensemble de l'année. On pourrait même enregistrer une vraie déflation au cours des
premiers mois. Cette tendance va totalement à l'inverse de la politique de la BCE, qui a fixé l'objectif inflationniste
proche mais en dessous des 2 % par an. La plongée du prix du pétrole éloigne donc l'inflation réelle de l'ambition
affichée par la BCE. Cette dernière sera donc plus encline qu'auparavant à mettre tous les moyens en œuvre pour
réaliser son objectif. Concrètement, on peut encore tabler sur une baisse du taux (sur toutes les classes d'actifs).
Dans ce contexte, les détenteurs d'obligations dégagent une plus-value complémentaire. Les candidats
emprunteurs qui souhaitent par exemple faire construire, pourront mener leurs projets à bien à moindre coût (la
part de revenu disponible après déduction de la charge d'emprunt sera plus importante et devrait encore doper
davantage la consommation). Les taux bas conduisent à leur tour à un affaiblissement de l'euro par rapport au
dollar, ce qui peut donner un coup de fouet aux exportations et relancer la croissance économique.
Tout le monde y trouverait-il son compte ?
Ce serait trop beau. Les segments et les entreprises du secteur pétrolier, et pas nécessairement le raffinage, et les
entreprises de services du secteur pourraient voir leurs revenus s'amenuiser. Ils investiront et engageront moins.
L'économie paiera donc les pots cassés. Les détenteurs d'actions d'entreprises de ce secteur percevront aussi
l'onde de choc sur la valeur de leur portefeuille.
Les pouvoirs publics ressentiront dans un premier temps une influence négative, vu la baisse des recettes TVA sur
les produits pétroliers. La Fédération pétrolière belge estime le manque à gagner à 220 millions d'euros pour 2015.
Ce n'est pas de bon augure pour le budget de l'État. Heureusement, pour ses dépenses, l'État profite de la baisse
du prix de l'énergie. La baisse des taux est aussi une bonne chose pour la dette publique. Ces deux effets
compensent même le manque à gagner. On peut donc dire que l'État en sort lui aussi gagnant.
En résumé, la baisse du prix du pétrole est un ballon d'oxygène qui tombe à point nommé pour notre économie en
cette période de croissance lente, et ce malgré le spectre de la déflation.