Les temps forts de l’ASCO®-GU 2013 dossier thématique Actualités sur le cancer du rein Update on kidney cancer S. Oudard* » Un risque cardiovasculaire chez les patients néphrectomisés doit A cardiovascular risk in patients nephrectomized must be taken into account in the presurgical check-up. être pris en compte dans le bilan préchirurgical. sont négatifs en termes de survie sans progression (SSP). La médiane de SSP est de 10,1 mois pour l’axitinib versus 6,5 mois pour le sorafénib (HR = 0,77 ; IC95 : 0,56-1,05 ; p = 0,038). Malgré les résultats négatifs en phase III avec l’axitinib, l’étude de phase II de titration des doses rapporte des taux de réponse pour l’axitinib de 48 % et une médiane de SSP de 14,6 mois. » Deux inhibiteurs de tyrosine kinase (ITK) de deuxième génération, le pazopanib et le tivozanib, ont montré leur intérêt en termes d’efficacité et surtout de tolérance. » Confirmation des résultats intéressants avec l’anti-PD1 (nivolumab) et attente de la finalisation de l’étude de phase III comparant le nivolumab à l’évérolimus après ITK. highlights P o i nt s f o rt s » Les résultats de l’étude AGILE 1051 comparant l’axitinib au sorafénib Mots-clés : Axitinib − Titration des doses − Nivolumab − Nouveaux ITK. 14 Two second-generation TKI, pazopanib and tivozanib, have shown their interest in terms of efficiency and especially tolerance. Confirmation of interesting results with anti-PD1 (nivolumab) and pending the completion of the phase III study comparing everolimus versus nivolumab post TKIs. Keywords: Axitinib − Dose titration − Nivolumab − New TKIs. Actualité moléculaire *Service de cancérologie médicale, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris. The results of the AGILE 1051 study comparing axitinib versus sorafenib are negative in terms of PFS. The median PFS was 10.1 months for axitinib versus 6.5 months for sorafenib (HR = 0.77; CI95: 0.56 to 1.05; p = 0.038). Despite the negative results in phase III axitinib study, the phase II dose titration reported response rates for axitinib of 48% and a median PFS of 14.6 months. Le pronostic des patients souffrant d’un cancer du rein se fonde aujourd’hui, dans le cas d’une maladie localisée, sur le stade TNM, la taille de la tumeur, le grade de Fuhrman et la nécrose tumorale, et, dans le cas d’une maladie métastatique, sur les critères de Motzer ou, plus récemment, de Heng. Un certain nombre de gènes de prédisposition au cancer du rein ont été mis en évidence, comme le gène du VHL, par exemple. D’autres gènes sont impliqués dans le cancer du rein à cellules claires, comme le PBRM1 (polybromo 1), muté dans 41 % des cas, le SETD2, le KDM6A (UTX), ou le KDM5C (JARIDIC). À partir d’une série de 145 patients néphrectomisés, l’équipe de J. Brugarolas (1) a identifié un nouveau gène, le BAP1 (BRCA1-associated protein-1), muté dans 15 % des cas dans les carcinomes à cellules claires. Les mutations de BAP1 et de PBRM1 sont mutuellement exclusives, et les mutations de BAP1 sont plutôt retrouvées chez les patients avec un grade de Fuhrman élevé, contrairement à celles de PBRM1. Les patients ayant une mutation de BAP1 ont une survie de 4,6 ans, versus 10,6 ans pour ceux ayant une mutation de PBRM1, résultat confirmé sur une série de validation (n = 327). Les rares patients (1 à 2 %) qui ont les 2 mutations sur les 2 gènes ont le pronostic le plus défavorable (2,1 ans). Ces résultats établissent la base d’une classification pronostique utilisant ces données moléculaires pour le suivi des sujets et les stratégies thérapeutiques. La recherche de biomarqueurs, et en particulier celle de biomarqueurs prédictifs de la réponse aux antiangiogéniques, est une des clés du succès et doit constituer une priorité. Consultation d’oncogénétique Un à 4 % des cancers du rein sont héréditaires. Il n’existe pas de règles définies pour adresser un patient en consultation d’oncogénétique. Une analyse de la SEER Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2013 Actualités sur le cancer du rein (Surveillance and Epidemiology and End Results) et de la base de données des patients atteints d’un cancer du rein héréditaire a été présentée par l’équipe du National Cancer Institute de Bethesda (2). L’âge a été comparé au sexe, à la race, à l’histologie et à la présence d’un syndrome héréditaire. L’âge médian au moment du diagnostic de cancer du rein est de 64 ans. Le dixième percentile de la population générale est de 46 ans. L’âge médian des 608 patients ayant un cancer du rein héréditaire est de 37 ans. En l’absence de symptômes dans les familles à risque, l’âge de la détection et de la consultation d’oncogénétique devrait être inférieur à 46 ans. Surveillance des petites masses rénales La chirurgie est le traitement habituel des petites masses rénales. Cependant, la découverte des masses de façon inopinée, sans symptôme, ne doit pas systématiquement faire envisager une chirurgie. À partir de la base de données de la SEER, une étude rétrospective a été réalisée sur des patients âgés de 66 ans ou plus répartis entre traitement chirurgical et surveillance pour une masse rénale de moins de 4 cm diagnostiquée entre 2000 et 2007 (3). Parmi 8 317 patients, 7 148 avaient une preuve histologique de tumeur rénale ; 5 564 d’entre eux (78 %) ont eu une chirurgie (néphrectomie élargie [65 %] versus néphrectomie partielle [35 %]), et 22 % n’ont bénéficié que d’une surveillance. Seuls 6 % des sujets (n = 100) du groupe surveillance ont ensuite bénéficié d’une chirurgie. Le suivi médian de cette étude est de seulement 5 ans environ. Au cours du temps, 1 536 patients sont décédés, 24 % dans le bras chirurgie et 13 % dans le bras surveillance. Dans ce même bras, une diminution du risque de décès était notée, toutes causes confondues. Les complications cardiaques ont été plus nombreuses dans le bras chirurgie que dans le bras surveillance (27 % versus 13 %). On observe une réduction du risque de complications cardiaques de 49 % (HR = 0,51 ; IC95 : 0,440,60) dans le bras surveillance. Cette étude conclut à une majoration du risque cardiovasculaire dans le bras chirurgie. Elle comporte néanmoins beaucoup de biais, et aucune donnée n’est apportée quant aux caractéristiques initiales des patients, en particulier en termes de comorbidités. Par ailleurs, cette étude ne s’adressait qu’aux sujets de plus de 65 ans et ne doit pas être généralisée. Le risque est de laisser en place une tumeur potentiellement létale, et il n’existe pas, aujourd’hui, de données permettant de caractériser une tumeur “indolente”. Prise en charge des lésions classées Bosniak IIF, III et IV Une étude rétrospective portant sur une population de patients ayant des lésions classées Bosniak IIF (n = 143), III (n = 114) et IV (n = 29) a été réalisée (4). Les patients ont été soit traités par chirurgie, soit traités par radiofréquence, soit mis sous surveillance. Les complications ont été enregistrées en utilisant la classification de Clavien. Très peu de patients ont présenté une progression métastatique. Des complications modérées à sévères ont été enregistrées avec la chirurgie (19 % [16/86]) et avec les traitements thermoablatifs (5 % [1/19]) ; aucune complication n’a été observée avec la surveillance par imagerie simple (n = 181). Le coût est 2 fois plus important pour la chirurgie que pour la thermoablation (p = 0,001). Aucun décès n’a été à déplorer avec aucune des stratégies proposées. Essais randomisés dans le cancer du rein métastatique en première ligne Étude de phase III : axitinib versus sorafénib Dans l’étude AXIS, l’axitinib avait été comparé au sorafénib et avait démontré un avantage en survie sans progression (SSP). Une étude de phase III a été conduite en première ligne de façon à comparer ces 2 molécules, avec comme objectif une augmentation de la SSP de 78 % avec une puissance de 90 % (passage d’une SSP de 5,5 mois à 9,8 mois, correspondant à un HR de 0,56) [5]. Les patients souffrant d’un cancer du rein métastatique à cellules claires (n = 288) et ayant un performance status (PS) de 0 ou 1 ont été randomisés (2:1) entre axitinib (5 mg × 2/j) et sorafénib (400 mg × 2/j per os). Les sujets étaient stratifiés en fonction du PS. La médiane de la SSP est de 10,1 mois pour l’axitinib et de 6,5 mois pour le sorafénib (HR = 0,77 ; IC95 : 0,56-1,05 [p = 0,038]). Pour les patients avec un PS à 0, la SSP est de 13,7 et de 6,6 mois, respectivement (p = 0,022) ; pour ceux avec un PS à 1, la médiane de SSP est respectivement de 6,5 et de 6,4 mois (p = 0,38). Le taux de réponse est de 32,3 versus 14,6 % en faveur de l’axitinib (p = 0,0006) ajusté au PS (figure 1, p. 16). L’intensité relative de dose est excellente pour les 2 bras, avec une possibilité d’escalade de dose pour l’axitinib (125 % versus 98 % pour le sorafénib). Les données de survie ne sont pas encore matures. L’axitinib s’accompagne de plus de toxicités (> 20 % tous grades) : diarrhées (50 % versus 40 %), hypertension (49 % versus 29 %), perte de poids (37 % versus 24 %), fatigue (33 % versus 26 %), anorexie (29 % versus 19 %), dysphonie (23 % versus 10 %), asthénie Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2013 15 Les temps forts de l’ASCO®-GU 2013 dossier thématique (21 % versus 16 %) et hypothyroïdie (21 % versus 7 %). Le critère principal de cette étude est considéré comme négatif, et les toxicités avec l’axitinib sont plus importantes. Les patients n’étaient pas initialement classés en fonction des critères de Motzer ou de Heng. Le choix d’une SSP à 5,5 mois pour le sorafénib était très hasardeux, si l’on considère toutes les études de phase II ou de phase III plus récentes rapportant des SSP situées entre 5,8 et 9,1 mois (6). Essai BEST L’essai BEST (7) cherchait à démontrer que des combinaisons de traitements pouvaient améliorer la SSP par rapport à un traitement en monothérapie par bévacizumab. L’objectif était une SSP de 15 mois avec les combinaisons, versus 9 mois avec la monothérapie, soit une différence de 67 %. Les 4 bras de traitement en première ligne étaient les suivants : ✓ bévacizumab seul (10 mg/kg toutes les 2 semaines) ; ✓ bévacizumab (10 mg/kg toutes les 2 semaines) + temsirolimus (25 mg/sem.) ; ✓ bévacizumab (5 mg/kg toutes les 2 semaines) + sorafénib (400 mg 5 jours sur 7) ; ✓ sorafénib (400 mg en continu) + temsirolimus (25 mg/sem.) [tableau I]. Tableau I. Résultats de l’étude de phase II randomisée BEST dans le cancer du rein métastatique en première ligne. Bévacizumab Bévacizumab + Bévacizumab + temsirolimus sorafénib Sorafénib + temsirolimus SSP (mois) 8,7 7,3 11,3 7,7 ORR (%) 12 28 30 27 SSP : survie sans progression. ORR : taux de réponse. Réponse objective (%) 100 p = 0,019* 80 60 48 % 59 % 54 % 34 % 40 20 0 Total† (n = 213) * † Titration effective (n = 56) Placebo (n = 56) Non randomisés (n = 91) Valeur du p (test de Cochran-Mantel-Haenszel) avec stratification en fonction de l’ECOG PS. Inclut 10 patients retirés de l’étude pendant le premier cycle d’axitinib. Figure 1. Taux de réponse objective en fonction des bras de traitement (titration effective versus placebo ou patients non randomisés en raison d’une toxicité dès le premier cycle d’axitinib). 16 Les patients étaient stratifiés en fonction des critères de Motzer et de l’existence ou non du traitement par immunothérapie ou d’un vaccin antérieur. Environ 87 % des patients avaient subi une néphrectomie avant de commencer le traitement. Aucune différence n’a été observée en termes de SSP ni de survie globale (tableau I). Les toxicités étaient plus fréquentes dans les bras combinaisons, et plus graves. Malgré le fait que cette étude utilise comme comparateur un traitement non référencé (le bévacizumab en monothérapie), encore une fois les traitements combinés n’améliorent pas la SSP par rapport à un traitement en monothérapie. Étude COMPARZ : nouvelles données de qualité de vie Le pazopanib est un inhibiteur de tyrosine kinase (ITK) qui a démontré sa supériorité par rapport à un placebo dans une étude de phase III randomisée regroupant des patients atteints d’un cancer du rein métastatique prétraités ou non par cytokine. La courbe de SSP des 155 patients naïfs de traitement systémique, avec une médiane de 11,1 mois, se rapproche de celle obtenue avec le sunitinib ou le bévacizumab associé à l’interféron, mais le profil de toxicité semble plus intéressant. Cela a motivé une AMM européenne conditionnelle et la réalisation de l’étude de phase III randomisée de non-infériorité COMPARZ, comparant le pazopanib et le sunitinib en première ligne métastatique. Les résultats portant sur la qualité de vie ont été rapportés à la suite de la présentation faite à l’ESMO sur les données de SSP et de toxicité en faveur du pazopanib (8). Les 4 questionnaires FACIT-F (Functional Assessment of Chronic Illness Therapy-Fatigue), FKSI-19 (Functional Assessment of Cancer Therapy-Kidney Symptom Index-19), CTSQ (Cancer Therapy Satisfaction Questionnaire) et SQLQ (Supplementary Quality of Life Questionnaire) ont été utilisés. Hormis le CTSQ, tous les questionnaires ont été donnés aux patients tous les 28 jours. Pendant les 6 premiers mois, tous les questionnaires sont en faveur du pazopanib (p = 0,05). Ces résultats vont dans le sens de l’étude PISCES sur la préférence du patient, très en faveur du pazopanib (70 % des cas). Par ailleurs, une comparaison a été réalisée entre les populations asiatiques, nord-américaines et européennes sur la SSP et la toxicité. Les SSP sont semblables, mais on enregistre plus de toxicités de type syndrome mains-pieds, hypertension, toxicités hépatique et hématologique dans la population asiatique. On note en revanche plus de troubles digestifs et de céphalées dans la population asiatique (9). Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2013 Actualités sur le cancer du rein Étude TIVO-1 : nouvelles données Le tivozanib est un ITK oral inhibant les récepteurs VEGF-1, -2 et -3, sans effet sur le PDFR, c-kit et raf. Les résultats de l’étude de phase II évaluant le tivozanib ont été publiés dans le Journal of Clinical Oncology en 2012 et montraient une SSP de 11,7 mois. Les résultats de la phase III comparant le tivozanib (1,5 mg/j, 3 semaines sur 4) au sorafénib (400 mg × 2/j) ont été présentés à l’ASCO® en 2012 et montraient un avantage en termes de SSP pour le tivozanib (11,9 mois [IC95 : 9,314,7] versus 9,1 mois [IC95 : 7,3-9,5] ; p = 0,042). Dans le sous-groupe des patients non prétraités par immunothérapie, la SSP était de 12,7 mois pour le tivozanib. Les données de survie globale ont été présentées à l’ASCO® GU et montrent une tendance à une meilleure survie sous sorafénib que sous tivozanib (29,3 mois versus 28,8 mois [HR = 1,25 ; p = 0,1]) [10]. Une analyse en sous-groupes a été réalisée en se basant sur des critères prédéfinis : origine géographique, PS, patients n’ayant jamais reçu de traitement ou ayant reçu une première ligne d’immunothérapie, critères de Motzer et de Heng, nombre d’organes métastatiquement envahis, modification de la tension artérielle sous traitement. Une amélioration significative de la SSP sous tivozanib a été rapportée pour tous les sous-groupes suivants : population nord-américaine/européenne, PS coté à 0, patients n’ayant jamais reçu de traitement, critères de Motzer favorables et critères de Heng favorables et intermédiaires, nombre d’organes métastatiquement envahis de 2 ou plus. Concernant les modifications de la tension artérielle sous traitement, quel que soit l’antiangiogénique administré, il existe une corrélation entre hypertension et amélioration de la SSP (11). Enfin, une analyse a été réalisée concernant les patients qui ont progressé sous sorafénib et qui ont reçu le tivozanib en deuxième ligne dans le cadre du protocole TIVO-1. Le tivozanib est efficace après progression sous sorafénib, avec un taux de réponse objective (RECIST 1.0) de 13 %, un bénéfice clinique de 74 % et une SSP de 8,4 mois. Cette efficacité pourrait expliquer l’absence de différence de survie entre les 2 groupes, qui n’apparaissait pas dans les résultats présentés par R.J. Motzer (10). Il n’existe pas de toxicité cumulative, et le tivozanib en deuxième ligne a le même profil de toxicité qu’en première ligne. Concernant les données de qualité de vie, D. Cella (12) a présenté les résultats fondés sur l’évaluation de 2 des 3 questionnaires FACT-G (Functional Assessment of Cancer Therapy-General), FKSI-DRS (FACT-Kidney Symptom Index Disease Related Symptom) et EQ-5D (EuroQoL 5-dimensional). Les questionnaires étaient remis aux patients juste avant qu’ils commencent l’étude et à chaque cycle de traitement. L’analyse a porté sur 509 patients et démontre un avantage du tivozanib en termes de qualité de vie quel que soit le questionnaire utilisé. Une différence en termes de bienêtre est notée en faveur du tivozanib (37,4 versus 25,2 % [p ≤ 0,01]). Le temps médian jusqu’à la détérioration de la qualité de vie (FACT-G) est plus long dans le bras tivozanib (3,8 versus 2,8 mois). Étude de titration de l’axitinib : données nouvelles L’axitinib est un ITK de deuxième génération qui a démontré une activité supérieure à celle du sorafénib en traitement de deuxième ligne dans le cancer du rein métastatique (étude AXIS). L’étude de titration avait été présentée à l’ASCO® en 2012 et a été actualisée à l’ASCO® GU cette année (13). Tous les patients recevaient un cycle d’axitinib (5 mg × 2/j pendant 4 semaines), puis étaient randomisés entre escalade de dose de l’axitinib jusqu’à 7 voire 10 mg × 2/j et placebo (figure 2, p. 18). Les patients n’ayant pas d’hypertension artérielle ni de toxicité de grade 3-4, chez qui la dose n’avait pas été réduite et qui recevaient moins de 2 antihypertenseurs pouvaient participer à la phase de randomisation. Le critère principal était le taux de réponse objective. Parmi les 213 patients inclus, 112 ont été randomisés entre escalade de dose et placebo. La levée d’aveugle a été faite et montre un taux de réponse de 54 % versus 34 % en faveur de la titration (tableau II). Le taux de réponse globale tous patients confondus est de 48 % ; le taux est plus élevé pour les patients qui n’ont pu participer à la phase de randomisation en raison d’un des critères d’exclusion : 59 %. La médiane de la SSP est de 14,6 mois (IC95 : 11,5-17,5 mois). Il n’y a pas de Tableau II. Efficacité clinique de l’axitinib. Taux de réponse objective (IC95) Total* (n = 213) Titration effective (n = 56) Placebo (n = 56) Non randomisés (n = 91) 48 % (42-55) 54 % (40-67) 34 % (22-48) 59 % (49-70) 15,7 (8,3-19,4) 16,6 (11,2-22,5) p = 0,019 SSP depuis la première dose d’axitinib Médiane (mois) (IC95) HR (IC95) 14,6 (11,5-17,5) 14,5 (9,2-24,5) 0,85 (0,54-1,35) p = 0,244 * Inclut 10 patients retirés de l’étude pendant le premier cycle d’axitinib. Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2013 17 Les temps forts de l’ASCO®-GU 2013 dossier thématique R Axitinib 5 mg 2 fois par jour (4 sem.) Critères de randomisation* : t1"ɉNN)H FUɉBOUJIZQFSUFOTFVST t1BTEFUPYJDJUÏTEFHSBEF MJÏFTËMBYJUJOJC t1BTEFSÏEVDUJPOEFEPTF Bras A Axitinib 5 mg 2 fois par jour + 5JUSBUJPOFõFDUJWF† (axitinib) FOBWFVHMF OUI " 4 4 * ( / ² NON Évaluations t.FTVSFEFTNBTTFTUVNPSBMFTQBSDSJUÒSFT3&$*45BWBOUUSBJUFNFOU BVYTFNBJOFTFUEVUSBJUFNFOUFUUPVTMFTNPJTFOTVJUF t5PYJDJUÏ$5$"&WFSTJPO Bras B Axitinib 5 mg 2 fois par jour + QMBDFCP UJUSBUJPOEFEPTF† FOBWFVHMF Bras C Axitinib 5 mg 2 fois par jour QBTEFUJUSBUJPOEFEPTF * Pour au moins 2 semaines consécutives. † Escalade de dose : 7 mg 2 fois par jour puis 10 mg 2 fois par jour. Figure 2. Schéma de l’étude de phase II randomisée de titration des doses de l’axitinib. différence en termes de SSP entre escalade de dose et placebo (14,5 mois [IC95 : 9,2-24,5] versus 15,7 mois [IC95 : 8,3-19,4] ; p = 0,2). L’incidence de l’hypertension (tous grades, grade 3-4) est plus élevée dans le bras titration que dans le bras placebo (61 et 18 % ; 43 et 9 %). Les données de pharmacocinétique sont en cours d’analyse ainsi que celles sur les biomarqueurs. Évaluation de nouvelles molécules Activité de l’anti-PD-1 L’anticorps anti-PD-1 (nivolumab) a été testé chez des patients souffrant d’un cancer du rein métastatique et prétraités par immunothérapie et/ou antiangiogéniques. Une actualisation de l’activité de cet anticorps a été faite sur 34 patients largement prétraités (plus de 40 % prétraités par au moins 3 traitements, plus de 70 % par antiangiogéniques et 60 % par immunothérapie). Les doses étaient de 1 ou 10 mg/kg toutes les 2 semaines. Les toxicités principales (tous grades) sont la fatigue (41 %), les réactions cutanées et le prurit (27 et 18 %), et les diarrhées (15 %). Le taux de réponse objective est de 29 % ; la SSP à 6 mois est de 58 %, avec des réponses très prolongées. Une étude internationale de phase III est en cours afin de déterminer l’intérêt de cette molécule après un ITK (en deuxième ou troisième ligne) par rapport à un bras témoin sous évérolimus. L’expression de PD-1 semble corrélée à la réponse thérapeutique, et une 18 évaluation sur le plan tumoral est prévue dans le cadre de la phase III afin d’analyser précisément cet aspect moléculaire (14). Une étude de phase Ib associant le lenvatinib à l’évérolimus a été réalisée par l’équipe du Memorial SloanKettering Cancer Center (15). Le lenvatinib est un ITK inhibant le VEGFR1-3, FGFR1-4, RET, KIT et PDGFb. Par groupes de 3 + 3 patients pour l’escalade de dose, l’association a permis de déterminer une dose maximale tolérable de 18 mg pour le lenvatinib et de 5 mg pour l’évérolimus en continu. Les principales toxicités sont des troubles digestifs (nausées, vomissements, mucites et douleurs abdominales) et une asthénie (50 %). Le taux de réponse objective est de 33 % dans cette population largement prétraitée (≥ 2 traitements). La médiane de SSP est de 15 mois. Cette association fera-t-elle cependant mieux que des traitements séquentiels ? Une étude de phase I évaluant l’association entre le sunitinib et une immunothérapie personnalisée (AGS-003) fondée sur un chargement de cellules dendritiques obtenues par leucophérèse avec de l’ARN provenant de la tumeur rénale ou de l’exérèse de lésions métastatiques par électroporation a été présentée (16). Après un cycle de sunitinib, un traitement par AGS-003 en dose de charge toutes les 3 semaines puis tous les 4 mois jusqu’à progression était proposé en association. Les 21 patients inclus avaient un pronostic intermédiaire ou un mauvais pronostic, avec un PS coté à 0 (71 %) ou à 1 (29 %). Aucune toxicité de grade 3-4 n’a Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2013 Actualités sur le cancer du rein été rapportée pour l’AGS-003 en dehors de douleurs et de rashs cutanés au point d’injection. Le bénéfice clinique a été de 81 %. La médiane de SSP globale est de 11,2 mois, et 52 % des patients ont une survie prolongée au-delà de 30 mois. Ces premiers résultats encourageants servent de point de départ à l’étude de phase III ADAPT comparant, selon un ratio 2:1, l’AGS-003 après un cycle de sunitinib et la poursuite du sunitinib jusqu’à progression. Une étude de phase I (17) a été réalisée avec le SGN-75, qui est un anticorps de type IgG1 anti-CD70 conjugué avec une chimiothérapie de type inhibiteur des microtubules (monométhyl-auristatine [MMAE]). Cette étude s’est intéressée à des patients ayant un cancer du rein métastatique (n = 39) ou un lymphome non hodgkinien CD70+ (n = 19). La dose retenue était de 3 mg/kg toutes les 3 semaines en intraveineux. Les effets indésirables (grade 3-4) notés chez plus de 20 % des patients sont l’asthénie, les yeux secs, la protéinurie, l’atteinte cornéenne et la thrombocytopénie. Le bénéfice clinique est de 46 semaines, avec 2 réponses partielles chez des patients largement prétraités. Une étude de phase I en association avec l’évérolimus est actuellement activée. Toxicité des inhibiteurs de mTOR Une méta-analyse a été réalisée par l’équipe du Dana-Farber Cancer Institute, de Boston, quant au risque d’événements indésirables graves et fatals Auteur Nombre d’événements avec l’utilisation des anti-mTOR en cancérologie (18, 19). Une analyse de la base Medline a été faite : 366 études ont été sélectionnées, et, après avoir rempli les critères d’éligibilité, seules 8 études randomisées versus placebo (cancer du rein et du sein, tumeurs neuroendocrines, lymphomes du manteau) ont été retenues (5 avec l’évérolimus et 3 avec le temsirolimus). Le risque relatif d’événements fatals est de 2,33. Concernant l’incidence des infections, sur les 6 études qui rapportent précisément le type d’infections, la plupart sont d’origine pulmonaire (61,7 %) ou génito-urinaire (29,4 %). Le risque relatif d’infections tous grades confondus est de 2, et le risque relatif d’infections gravissimes, de 2,6, par rapport aux bras placebo. Cette méta-analyse met en évidence la nécessité d’un suivi des patients qui sont sous mTOR et surtout d’une vigilance concernant les symptômes pulmonaires de façon à ne pas passer à côté d’une infection potentiellement létale (figure 3). Conclusion Une nouvelle classification moléculaire pourrait voir le jour dans le cancer du rein. L’âge de la détection et de la consultation d’oncogénétique devrait se situer avant 46 ans. Un risque cardiovasculaire majoré chez les patients néphrectomisés doit être pris en compte dans le bilan préchirurgical. Avoir une ambition démesurée Risque relatif p mTOR Témoins IC95 Baselga et al., 2012 7/482 1/238 3,46 (0,43-27,93) 0,25 Baselga et al., 2009 0/137 0/132 0,96 (0,02-48,22) 0,99 Yao et al., 2011 7/207 1/203 6,87 (0,85-55,30) 0,07 Pavel et al., 2011 12/103 5/120 2,80 (1,02-7,67) 0,05 Motzer et al., 2010 14/274 6/137 1,17 (0,46-2,97) 0,75 Hudes et al., 2007 9/419 1/207 4,45 (0,57-34,86) 0,16 Hess et al., 2009 5/108 0/53 5,45 (0,31-96,75) 0,25 Negrier et al., 2011 Total 2/88 0/82 4,66 (0,23-95,70) 0,32 56/1 818 14/1 172 2,33 (1,32-4,10) 0,003 RR : risque relatif. 0,01 1,0 5 10 50 100 RR (IC95) La taille des rectangles est dépendante du nombre de données disponibles dans chaque essai. Figure 3. Forest plot des 8 études randomisées ayant évalué la toxicité de l’évérolimus et du temsirolimus. Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2013 19 Les temps forts de l’ASCO®-GU 2013 dossier thématique amène à mettre en péril une molécule en première ligne avec les résultats négatifs de l’axitinib versus sorafénib. L’axitinib devra donc être uniquement utilisé en deuxième ligne métastatique. Deux ITK de deuxième génération, le pazopanib et le tivozanib, montrent leur intérêt en termes d’efficacité et, surtout, de tolérance. L’anti-PD-1 continue de montrer son efficacité et sa tolérance, et l’essai comparant le nivolumab à l’évérolimus est attendu. De nouvelles immunothérapies sont en cours d’évaluation (l’AGS-003 et le SGN-75). La surveillance des patients sous anti-mTOR est à considérer, en particulier en raison de l’immunodépression induite responsable d’infections opportunistes, notamment pulmonaires. ■ Références 1. Brugarolas J, Kapur P, Pena-Llopis S et al. Toward a molecular 8. Cella D, Hackshaw MD, Diaz J et al. Quality of life among 14. McDermott DF, Drake CG, Sznol M et al. Clinical activity genetic classification of clear cell renal cell carcinoma. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 341. patients with renal cell carcinoma treated with pazopanib versus sunitinib in the COMPARZ study. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 346. and safety of antiprogrammed death-1 (PD-1) (BMS-936558/ MDX-1106/ONO-4538) in patients with previously treated, metastatic renal cell carcinoma: an updated analysis. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 351. 2. Shuch B, Vourganti S, Middleton L et al. Defining early-onset kidney cancer: implications for genetic counseling. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 342. 3. Huang WC, Pinheiro LC, Russo P et al. Surveillance for the management of small renal masses: utilization and outcomes in a population-based cohort. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 343. 4. Smith AD, Allen B, Sanyal R et al. Outcomes, complications, and costs of care of Bosniak IIF, III, and IV cystic renal lesions/ malignancies: data from the largest multi-institutional study to date. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 344. 9. Guo J, Jin J, Huang Y et al. Comparison of PFS and safety for Asian compared to North American and European populations in the phase III trial of pazopanib versus sunitinib in patients with treatment-naive RCC (COMPARZ). J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 366. 15. Molina AM, Hutson TE, Larkin JM et al. A phase Ib clinical 10. Motzer RJ, Eisen T, Hutson TE et al. Overall survival results 16. Amin A, Dudek A, Logan T et al. Prolonged survival with from a phase III study of tivozanib hydrochloride versus sorafenib in patients with renal cell carcinoma. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 350. 11. Hutson TE, Nosov D, Eisen T et al. Subgroup analyses of a trial of the multitargeted kinase inhibitor lenvatinib (E7080) in combination with everolimus for treatment of metastatic renal cell carcinoma. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 358. personalized immunotherapy (AGS-003) in combination with sunitinib in unfavorable risk metastatic RCC. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 357. 17. Thompson JA, Forero A, Heath EI et al. SGN-75 in the treat- nib as first-line therapy in patients with metastatic renal cell carcinoma (mRCC). J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. LBA348. phase III trial comparing tivozanib hydrochloride versus sorafenib as initial targeted therapy for patients with metastatic renal cell carcinoma. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 354. 6. Hutson TE, Nosov D, Eisen T et al. Subgroup analyses of a 12. Cella D, Ivanescu C, Skaltsa K et al. Treatment benefit of phase III trial comparing tivozanib hydrochloride versus sorafenib as initial targeted therapy for patients with metastatic renal cell carcinoma. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 354. tivozanib hydrochloride versus sorafenib on health-related quality of life among patients with advanced/metastatic renal cell carcinoma: TIVO-1 study results. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 355. 18. Choueiri TK, Je Y, Sonpavde G et al. Incidence and risk of 13. Rini BI, Gruenwald V, Fishman MN et al. Axitinib with or 19. Kaymakcalan M, Je Y, Sonpavde G et al. Incidence and risk without dose titration for first-line metastatic renal cell carcinoma: unblinded results from a randomized phase II study. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. LBA349. of infections in renal cell cancer and non-RCC patients treated with everolimus and temsirolimus: a meta-analysis of randomized control trials. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 353. 5. Hutson TE, Gallardo J, Lesovoy V et al. Axitinib versus sorafe- 7. McDermott DF, Manola J, Pins M et al. The BEST trial (E2804): a randomized phase II study of VEGF, RAF kinase, and mTOR combination targeted therapy with bevacizumab, sorafenib, and temsirolimus in advanced renal cell carcinoma. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 345. 20 ment of patients with CD70-positive malignancies including metastatic renal cell carcinoma. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 368. treatment-related mortality in patients with renal cell cancer and non-RCC treated with mammalian target of rapamycin inhibitors. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 347. Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2013