L’école, modèle réduit de la République C’est au fil des années que les enquêtes PISA, démontrent –aux yeux de certains du moins- une déliquescence de l’école française. Loin de moi l’idée de dresser un portrait apocalyptique où chaque élève serait voué à l’échec. Cette image, confortable à défendre, n’en est pas moins partiellement fausse. Certes en France, certains sont en échec (leur proportion augmente même) mais c’est à mettre en parallèle avec ceux –de plus en plus nombreux- à réussir. Le défaut de l’école française n’est donc pas de mené tous les écoliers à l’échec, c’est d’en mener inévitablement certains. Le problème n’est donc pas dans l’uniformité de l’échec, il est dans l’inégalité face à la réussite. Le mot est lâché, au pays des droits de l’homme, de l’égalité de tous –au moins devant la loi-, l’inégalité est devenue un problème. Entre hommes et femmes, entre immigrés et autochtones, entre les riches et les moins riches. L’école ne saurait expliquer à elle seule la totalité des inégalités, mais elle en explique tout de même une large partie. Dès l’école primaire, elles apparaissent. Au collège et au lycée, elles s’aggravent. Dans le supérieur, elles se matérialisent dans la voie (non-)choisie et par la force des choses dans la vie. Dans un système démocratique et méritocratique, c’est l’école qui devrait compenser l’inégalité des chances due à l’origine sociale. En France, elle ne fait que la renforcer. Or, c’est bel et bien l’éducation qui est à l’origine de l’émancipation et du progrès. Elle doit donc continuer à être au cœur du projet socialiste, force émancipatrice. Le président Hollande a promis 60 000 créations de poste dans l’éducation. Cela ne suffit certes pas à renverser la tendance, mais c’est un début intéressant. Des problèmes inhérents au système français ne pourront être résolus mais l’apport supplémentaire de jeunes professeurs est un véritable bol d’air. Quels que soit les pédagogies ou les programme appliqués, un professeur enseignera mieux à 20 élèves plutôt qu’à 36, en particulier à un moment où l’on a compris l’importance de personnaliser et adapter l’enseignement à chaque élève. Moins d’élèves par classe c’est non seulement la possibilité pour un professeur de personnaliser son enseignement et apporter des explications aux élèves en difficulté, c’est aussi la chance pour des élèves de prendre la parole plus aisément et plus souvent. Comment voulezvous apprendre l’anglais ou le français sans l’employer à l’oral, comment employer l’oral alors qu’on est 36 par classes ? Le nombre de professeurs n’est donc pas vraiment une question à négliger mais ce n’est qu’un début de réponse aux vastes problèmes de l’éducation française. L’école française connaît malheureusement des difficultés que le nombre de professeurs en plus ne saurait résoudre. Ces difficultés sont d’ordres plus pédagogiques. Trop d’heures, trop d’éparpillement, trop de cloisonnement. Il serait temps d’avoir une vision d’ensemble de l’éducation entre la maternelle et le supérieur en arrêtant de voguer de réforme en contre-réforme et de saupoudrer au lieu de refonder. C’est dit et redit, mais les journées sont trop longues et ça se ressent sur l’attention et la motivation des élèves. Peut-être faudrait-il une bonne fois pour toute faire triompher l’intérêt de l’élève sur celui du secteur de tourisme en raccourcissant les vacances. Loin de moi l’idée de copier le système allemand, mais force est de constater que leur organisation horaire est intéressante : une matinée de cours traditionnels (mathématiques, histoires, langues etc.) et une après-midi d’activités artistiques et sportives. Le XXIe siècle de l’école sera celui de la créativité. Il ne suffira plus maintenant de connaître toutes le nom de chaque capitale mondiale ou l’histoire de France par cœur, la vie en société future dans un monde mondialisé nécessite ouverture culturelle, pratique sportive et socialisation accrue. Autant d’atouts qui peuvent être instillés par les parents mais aussi intégrées à l’école, celle-ci permettant surtout de compenser les écarts en termes de capital culturel que le sociologue Pierre Bourdieu avait en son temps dénoncées. Il est de la vocation des socialistes d’élargir l’accès à la culturel et au sport, et il faut s’y atteler dès le plus jeune âge afin de susciter l’envie et la curiosité chez les futurs citoyens. Il serait toutefois bien trop simple de mettre l’entière faute aux mauvais résultats sur le dos des professeurs ou du ministère. Trop de personnes voient l’éducation comme une énième marchandise à consommer avec dans le rôle du vendeur/fournisseur le professeur. Le professeur serait donc tenu à une obligation de résultats. Cette idée malheureusement de plus en plus répandu entraîne un certain sentiment de déresponsabilisation des parents qui oublient le rôle irremplaçable qu’ils jouent dans l’éducation de leurs enfants. Le système éducatif ne doit pas oublier les parents. C’est justement leur oubli qui dresse professeurs contre parents et qui fait apparaître chez ses derniers des idées-reçues ou préconçues. Il est toujours malheureux de voir des parents marteler à leurs enfants qu’une série est meilleure qu’une autre ou qu’il faut quitte que coûte éviter le redoublement. Bien sûr, il n’y a pas de fumée sans feu. Les séries technologies et professionnelles méritent plus de moyens et de reconnaissance pour faire définitivement cesser le cliché de « voies-poubelles », dans les séries générales il est temps de mettre fin à l’hégémonie de la série scientifique dans le processus de sélection et enfin il faut casser le tabou du redoublement. Mais à chaque fois, ce sont les mentalités qu’il faudra aussi (et non sans difficultés) changer. De la pédagogie pour les élèves, mais aussi pour les parents. La refondation de l’école est une première étape, il faut maintenant refonder le secondaire et un jour le supérieur. Mais ne refaisons pas les erreurs du passé, le cloisonnement est une erreur : il faudrait au contraire refonder en créant la continuité. Le brevet tout comme le baccalauréat devraient cesser d’être des fins en soi, faisons-en plutôt des jalons. Ne raisonnons pas seulement en bac + x années, raisonnons dorénavant en terme de bac –3/bac +3 par exemple, afin de décloisonner et créer un continuum. L’intelligence repose justement sur l’interconnexion des connaissances, le décloisonnement tant horizontal (au niveau des matières enseignées) que vertical (entre les niveaux) devrait être le maître mot de la réforme du système éducatif qu’on voudra plus émancipateur et progressiste que jamais. Il y a des sujets sans doute trop politisés, mais d’autres pas assez. L’éducation en fait partie. Il faut choisir notre modèle éducatif. Veut-on vraiment du système actuel qui ne fait que reproduire et renforcer les inégalités ou préférons-nous un système véritablement républicain et méritocratique ? La réponse du militant socialiste devrait être naturellement la seconde et c’est pourquoi l’éducation et est doit rester la première priorité.