Lévaluation se pratique depuis que les humains s’échangent
des biens puisque tout échange de biens requiert un exercice
dappréciation de la valeur par les parties concernées.
Lévaluation dentreprises, quand à elle, existe depuis que des
entreprises ou des participations dans des entreprises se vendent
ou s’achètent.
Lorsqu’un professionnel aide un client dans le cadre dune
opération dacquisition ou de cession dentreprises, il est appelé
à déterminer un prix plutôt quune juste valeur marchande. Par
contre, les principes, démarches et méthodes afrents à la déter-
mination de la juste valeur marchande constituent un bon point
de départ pour déterminer ce prix.
Sylvain LevasseurRon Schiller
CONSEILLER PME
Lévaluation d’entreprises
MAI 2012 21
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PRINCIPES DE BASE
EN ÉVALUATION D’ENTREPRISES
Ni les produits, ni la rentabilité ne suffisent
à fournir une indication fiable de la valeur.
Beaucoup dautres facteurs entrent en ligne
de compte, notamment les actifs corporels
et incorporels, les critères financiers, la
rentabilité et la structure du capital ainsi
qu’une comparaison entre la société et les
normes de son secteur. Les principes sui-
vants guident le jugement et les démarches
du professionnel lors de lévaluation:
La valeur est déterminée à une date
spécifique dans le temps;
La valeur d’un bien est établie en
fonction de ses perspectives d’avenir;
La valeur se définit comme étant la
valeur actualisée de tous les avantages
futurs qu’un bien est susceptible de
procurer;
Les risques du marché dictent le taux
de rendement requis;
La valeur est établie en fonction de la
capacité d’une société à générer un
rendement, sauf si on obtient une valeur
plus élevée en vendant ses actifs.
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22 MAI 2012
DÉMARCHES ET MÉTHODES
D’ÉVALUATION
Lillustration ci-dessus présente de façon
schématique les démarches et méthodes
dévaluation généralement retenues.
Trois démarches fondamentales sont
généralement reconnues en matière déva-
luation dentreprises. Afin de choisir la
marche dévaluation appropriée, on
doit dabord déterminer si lentreprise
est viable. Une analyse préliminaire des
perspectives de rentabilité (bénéfices / flux
monétaires) est donc requise. Les résultats
préliminaires de cette analyse devraient
permettre denvisager la possibilité ou
non de justifier une valeur plus élevée
en utilisant une démarche fondée sur le
rendement ou sur le marché par rapport
à une autre, fondée sur les actifs.
Les trois démarches sont les suivantes:
1. LA DÉMARCHE FONDÉE SUR LA VALEUR
DES ACTIFS D’UNE ENTREPRISE
La démarche fondée sur la valeur des
actifs est retenue si:
une liquidation est envisagée en
raison du manque de viabilité de
l’entreprise selon l’hypothèse de la
continuité de l’exploitation;
la nature de lentreprise fait en sorte
que la valeur des actifs représente
le facteur déterminant de la valeur
de (ex : un terrain inoccupé, un
portefeuille de biens immobiliers ou
de titres négociables, etc.);
s’il n’y a aucun bénéfice ou flux de
trésorerie représentatif à capitaliser.
Cette méthode consiste donc à
quantifier le montant net que réalisera
lentreprise après la disposition de tous
ses actifs et le paiement de tous ses passifs.
Voici un sommaire de la méthode fondée
sur la valeur des actifs:
VALEUR DE LIQUIDATION DES ACTIFS
Frais de vente et autres coûts
reliés à la liquidation
Paiement des passifs
+ Profits ou pertes d’exploitation
durant la période de liquidation
+ Impôts d’entreprises
= Fonds disponibles aux
actionnaires
Impôts au moment de la
distribution aux actionnaires
= Valeur de liquidation
2. LA DÉMARCHE FONDÉE SUR LE MARCHÉ
La démarche fondée sur le marché est une
façon générale détablir la valeur dune
entreprise à laide dune ou de plusieurs
méthodes qui comparent lément à
létude à des entreprises comparables qui
ont été vendues réellement.
Des exemples de méthodes utili-
sées dans le cadre de cette démarche
comprennent:
l’étude de sociétés comparables à
l’aide de bases de données;
les analyses dopérations antérieures
relatives à la propriété de la société
sous étude.
Cette méthode présente quelques diffi-
cultés pratiques. Ilest souvent très difficile
dobtenir de linformation financière pré-
cise au sujet de transactions comparables
puisque cette information est générale-
ment tenue confidentielle. Linconvénient
prédominant de cette méthode demeure
limprécision due au nombre important
déléments qui caracrisent lunicité de
chaque entreprise.
3. LA DÉMARCHE FONDÉE SUR
LE RENDEMENT
La démarche fondée sur le rendement
est une façon générale détablir la
valeur dune entreprise à laide dune
ou plusieurs méthodes par lesquelles la
valeur est déterminée en convertissant
les bénéfices prévus. Cette démarche
envisage la continuité de lexploitation
de lentreprise. Les méthodes les plus
couramment utilies sont:
capitalisation du bénéfice net
représentatif;
capitalisation du flux monétaire
représentatif;
capitalisation des bénéfices avant
intérêts, impôts et amortissements
(BAIIA);
actualisation des flux monétaires
discrétionnaires.
LA MÉTHODE DE LA CAPITALISATION DU
BÉNÉFICE NET REPRÉSENTATIF
Cette méthode est principalement utilie
dans des cas dentreprises de service, de
distributeurs et de détaillants et est basée
sur le fait que le passé de lentreprise va se
maintenir au même rythme dans le futur.
Elle est utilisée lorsque les investissements
en immobilisations ne vont pas connaî-
tre de changements majeurs et lorsque
lentreprise n’est pas dans une phase de
croissance importante.
CONSEILLER PME Les différentes méthodes d’évaluation
Les actifs Le marché Le rendement
Liquidation Actifs nets
redressés Comparables Opérations
sur le marché Capitalisation Actualisation
des flux
monétaires
Forcée Ordonnée Bénéfice Flux
monétaire
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24 MAI 2012
Le bénéfice net représentatif avant
impôts est déterminé en fonction des
résultats des derniers exercices financiers
et des résultats budgétés pour les années
à venir, redressés pour tenir compte de
revenus ou dépenses non susceptibles
de se reproduire dans le futur ou non
représentatifs dune exploitation normale.
Les redressements qui surviennent les
plus fréquemment sont:
revenus ou dépenses relatifs aux
éléments d’actif excédentaires;
amortissement de l’achalandage ou
actifs incorporels;
rémunération excédentaire des
dirigeants;
loyers ou autres payés à des parties ne
traitant pas à distance;
mauvaises créances exceptionnelles;
gain ou perte sur vente déléments
d’actifs;
radiation de stocks désuets;
contributions pour services passés
à un fonds de pension;
dépenses relatives à un
déménagement.
Après avoir redressé les résultats annuels
antérieurs et budgétés, on détermine le
néfice représentatif avant impôts par
voie de moyenne simple ou pondérée. On
déduit de ce montant les impôts au taux
dimposition approprié afin dobtenir le
montant dunéfice net représentatif.
Afin de déterminer le taux de capitali-
sation, les professionnels en sont venus à
développer une démarche de détermina-
tion des multiples applicables au bénéfice
net représentatif qui s’appelle la méthode
de laccumulation (Build-up method).
Cette méthode est fondée sur le principe
de laccumulation. Ainsi, le taux dactua-
lisation des bénéfices (et par conséquent
le taux de capitalisation y afrent) est
constitué de plusieurs primes de risque qu’il
est possible de définir et qui, lorsqu’on les
additionne au taux de rendement sans ris-
que, équivalent au rendement global qu’un
investisseur devrait réaliser en investissant
dans lentreprise.
CONSEILLER PME Tableau sommaire de la méthode de capita-
lisation du bénéfice net représentatif:
BÉNÉFICE NET AVANT IMPÔTS
+/– Redressement
Impôts
= Bénéfice net représentatif après
impôts
x Taux de capitalisation (multiple qui
correspond à l’inverse du taux de
rendement exigé)
= Valeur actualisée
+ Éléments d’actifs excédentaires
= Juste valeur marchande
LA MÉTHODE DE CAPITALISATION
DU FLUX MONÉTAIRE REPRÉSENTATIF
Cette méthode est principalement utilie
dans des cas dentreprises manufacturières et
celles requérant des investissements en capi-
tal importants et est appliquée lorsqu’on est
en mesure de pouvoir établir des prévisions
financières sur une période significative (entre
3 et 5 ans).
Cette méthode est similaire à celle de la
capitalisation du bénéfice net représentatif,
sauf que les éléments suivants sont égale-
ment considérés:
élimination de l’amortissement;
réinvestissement annuel de maintien
après impôts;
valeur actualisée des économies fiscales.
Sommaire de la méthode de capitalisation
du flux monétaire représentatif:
BÉNÉFICE REPRÉSENTATIF AVANT IMPÔTS
+ Amortissement
Impôts
Réinvestissement annuel de maintien
en immobilisations après impôts
= Flux monétaire net représentatif
x Taux de capitalisation
= Valeur capitalisée du flux monétaire
représentatif
+ Valeur actualisée des économies
d’impôts
= Valeur en continuité d’exploitation
+ Éléments d’actif excédentaires
= Juste valeur marchande
Le modèle de la méthode de laccu-
mulation se résume comme suit:
TAUX DE RENDEMENT
SANS RISQUE
Taux de rendement moyen des
obligations à long terme du
gouvernement du Canada
+ Prime de risque de
participation au capital-
actions (rendement moyen
additionnel qu’un investisseur
est susceptible de réaliser sur un
placement en actions en sus du
rendement des titres du
gouvernement du Canada. La
source la plus utilisée pour
déterminer cette prime est
Ibbotson Associates Stocks,
Bonds and Inflation Yearbooks).
+ Prime additionnelle en
raison de la taille de
l’entreprise (on retrouve aussi
cette prime additionnelle dans
les statistiques Ibbotson).
+ Prime pour autres facteurs de
risque spécifiques à
l’entreprise (secteur industriel,
risque financier de l’entreprise,
diversification des activités,
autres caractéristiques
opérationnelles…)
= Taux de capitalisation du
bénéfice net représentatif
Finalement, afin détablir la juste
valeur marchande de lentreprise, il
est nécessaire dajouter, sil y a lieu, la
juste valeur marchande des éléments
dactif excédentaires à la valeur capi-
talisée de bénéfice net représentatif.
Voici quelques exemples déments
dactifs excédentaires:
excédent d’encaisse;
placements en actions boursières;
placements dans dautres
entreprises;
actifs ne servant pas à
l’exploitation courante;
capacité d’emprunt inutilisée.
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26 MAI 2012
LA MÉTHODE DE LA
CAPITALISATION DES BAIIA
Cette méthode de la capitalisa-
tion du BAIIA est une variante
de la méthode de la capitalisa-
tion du bénéfice/flux monétaire
net représentatif.
Les acquéreurs dentreprises
adoptent fquemment une
approche « sans dette » lorsqu’ils
envisagent lacquisition des é-
ments dactif dune entreprise
ou prévoient son refinancement.
Cette méthode permet
déliminer les distorsions qui
peuvent être engendrées par des
comparaisons avec des entre-
prises ayant des structures de
financement ou des politiques
damortissement différentes.
( a ) BAIIA
Il est établi de la même façon que le béné-
fice/flux monétaire représentatif avant
impôts, en y ajoutant les frais financiers.
( b ) Multiple
Il est établi de la même façon qu’expliquée
antérieurement, mais en convertissant le
taux de capitalisation en un taux avant
impôts et frais financiers. Ceci suppose que
lacquéreur peut établir son coût moyen pon-
déré du capital (CMPC) en se basant sur
une structure de financement appropriée.
La valeur obtenue en appliquant un mul-
tiple approprié au BAIIA permet de dégager
la valeur combinée des actions et de la dette
portant intérêt, soit léquivalent de la somme
du fonds de roulement et des éléments dactif
servant à lexploitation de lentreprise.
LA MÉTHODE DE LACTUALISATION DES
FLUX MONÉTAIRES DISCRÉTIONNAIRES
Cette méthode consiste à déterminer la
valeur actualisée des flux monétaires
discrétionnaires projetés et est principale-
ment utilisée dans des cas dentreprises en
démarrage ou dentreprises qui devraient
connaître une forte croissance dans un
avenir rapproché.
UNE VUE D’ENSEMBLE
Cette chronique a été rédigée
afin de fournir aux lecteurs une
vue densemble ou un cadre de
référence pour être mieux sensi-
bilis aux problèmes inrents à
lévaluation dentreprises.
En plus de quantifier la valeur
dune société, entre autres à des
fins de transaction, le processus
dévaluation peut permettre
aux propriétaires dentreprises
de comprendre les facteurs qui
influencent sa valeur. Déterminer
la valeur dune société relève à la
fois de la science et de lart.
Quelles que soient les rai-
sons qui les amènent à effectuer
une évaluation, les propriétaires
dentreprises tirent parti du processus
dévaluation proprement dit. Les résultats
de lévaluation peuvent leur faire entrevoir
unerie doptions leur permettant da-
liorer la valeur à court ou long terme de leur
entreprise, de la préparer adéquatement à la
relève ou à sa vente éventuelle ou deffectuer
une planification fiscale.
Ron Schiller, CA, Planigesco Inc.
Conseillers en management
Sylvain Levasseur, CA, CFA ,
Acolytes Montréal Inc.
Conseillers en vente dentreprises
CONSEILLER PME
DEUX QUESTIONS
IMPORTANTES
à poser au client pour soutenir
le travail de l’évaluateur
1 Le conseiller doit questionner
son client pour connaître
la tendance évolutive de son
entreprise afin d’estimer
raisonnablement toute plus-
value future anticipée.
2 Le conseiller doit identifier
le secteur ou l’industrie auquel
appartient l’entreprise et
en quoi elle s’en distingue
ou s’y compare.
Jean-Guy Grenier, BAA, CMC,
AdmA, Pl.Fin., conseiller
principal en planification
financière, fiscale et
successorale, Desjardins
Sécurité financière.
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