Wing-Yee LI Mardi 12 octobre 2004
Fiche technique n°1 Conférence d’économie de Sophie HARNAY
QUE REPRESENTE L’AGENT REPRESENTATIF ?
La notion d’agent représentatif est une expression d’Alfred MARSHALL qui a suscité
de nombreuses polémiques dans les années 20, mais qui a été réutilisé, dans les années 70, par
le courant des néo-classiques en macroéconomie, avec une définition différente. En fait,
l’agent représentatif est une représentation théorique simplifiée à l’extrême d’un agent
économique qui permet l’explication des comportements de celui-ci.
Mais alors, que représente réellement l’agent représentatif ? En d’autres termes,
pourquoi peut-on parler d’agent représentatif et quelles sont les conséquences de
l’introduction de cette notion en microéconomie ?
Pour répondre à cette question, nous allons tout d’abord démontrer que l’homogénéité
des comportements des agents économiques permet de parler d’agent représentatif et ensuite
que cependant, cette notion a de nombreuses limites.
I. L’homogénéité des comportements des agents économiques
permet de parler d’agent représentatif.
A. Des consommateurs qui ont des motivations identiques.
Ici, nous entendrons par consommateurs essentiellement les ménages mais sachons
que les entreprises sont aussi des consommateurs lorsqu’ils se fournissent chez une autre
entreprise.
Les consommateurs sont des agents économiques rationnels. En effet, ils font leur
choix en se basant sur leurs préférences et leur objectif. Or l’hypothèse de comportement
rationnel implique pour les consommateurs d’agir en fonction de leur intérêt personnel, qui
est de retirer le maximum de satisfaction de leurs consommations. Puisque les motivations des
consommateurs sont les mêmes, nous pouvons maintenant parler DU consommateur. La
fonction d’utilité permet de mesurer cette satisfaction. En effet, le consommateur va
maximiser son utilité lorsqu’il choisit de consommer les biens qui lui procurent le plus de
satisfaction et donc qu’il préfère. Il établit alors une relation de préférences en fonction de
l’utilité du bien. En effet, il est capable de classer les biens par ordre de préférences. D’où le
fait que l’on peut réduire l’ensemble des consommateurs à un seul puisque nous pouvons
remarquer que l’ensemble des consommateurs ont le même comportement. Et en règle
générale, la satisfaction apportée par une unité supplémentaire d’un bien, et qui est qualifiée
d’utilité marginale, est décroissante au fur et à mesure que la quantité de biens consommée
augmente.
De plus, pour maximiser son utilité, le consommateur, lorsqu’il a le choix entre
délaisser un bien pour en consommer un autre, va choisir la situation qui l’arrange le plus,
c’est-à-dire que si l’on représente cette situation sur un graphique, le choix du consommateur
va s’arrêter sur un des points de la courbe qui correspond à la frontières du domaine des choix
possibles. D’autre part, tous les consommateurs ont à réfléchir à la répartition, des ressources
limitées (le revenu par exemple), qu’ils possèdent pour la consommation. En effet, les
consommateurs ne possèdent qu’un budget limité. Ils doivent donc prendre en compte dans
leur choix l’argent mais aussi le temps. Et il faut également noter que les consommateurs ne
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consomment pas tout leur revenu mais en épargne aussi une partie. Par ailleurs, ils doivent
également décider le temps qu’ils vont affecter à l’emploi et à la consommation. En effet, en
fonction de leurs préférences, ils vont choisir de consacrer plus ou moins de temps au travail.
Ces choix sont des décisions que tous les consommateurs doivent prendre, d’où l’unicité des
comportements et donc un seul consommateur.
B. Des entreprises qui agissent similairement.
Les entreprises, tout comme les consommateurs sont des agents économiques
rationnels. Le but des entreprises n’est pas la satisfaction maximale des besoins mais la
recherche maximale de profits. Pour s’enrichir, l’entreprise doit produire. Elle doit donc
décider de la quantité de facteurs de production qu’elle va allouer à chaque tâche. Les deux
facteurs de production principaux sont le travail, c’est-à-dire les salariés, et le capital, c’est-à-
dire les machines et en général les biens de production durables. Mais il existe également les
facteurs terre (ressources naturelles du sol et du sous-sol) et le facteur progrès technique
(innovations). De plus, pour produire, l’entreprise doit utiliser des biens, essentiellement des
biens de consommation intermédiaire et des services. Ici encore, l’entreprise est confrontée
face à un choix. L’entreprise doit donc opérer un choix d’affectation des ressources, et il en
est de même pour toutes les entreprises, en fonction de la productivité des facteurs de
production et de leur rentabilité.
D’autre part, comme la principale motivation des entreprises est la maximisation des
profits, elles vont faire en sorte de faire le maximum de bénéfices sur chaque bien ou service
produit. Pour ce, elles vont réfléchir à la combinaison idéale qui coïncide graphiquement avec
les points de la courbe formant la frontière des possibilités de production. Les entreprises,
comme les consommateurs raisonnent également en terme de coût d’opportunité, c’est-à-dire
qu’ils prennent en compte ce qu’ils auraient pu faire de cet argent s’ils ne l’avaient pas
dépenser dans la consommation de tel ou tel bien. On retrouve ici que les entreprises adoptent
les mêmes comportements face à des situations qu’ils rencontrent forcément, d’où
l’homogénéité des comportements et la représentabilité par une seule entreprise.
II. L’agent représentatif, une notion absurde d’après Bernard
GUERRIEN.
A. Le principe de l’agent représentatif : représenter toute l’économie.
En effet, l’agent représentatif est le seul agent économique qui existe dans l’économie.
C’est pourquoi, il ne représente que lui-même. En fait, on suppose que tous les agents
économiques, essentiellement les entreprises et les ménages, sont tous identiques, pour
faciliter l’analyse économique. Il s’agit du principe énoncé par Thomas SARGENT en
1979 dans son ouvrage Macroeconomic Theory : « Plutôt que d’avoir à traîner tout du long le
nombre d’entreprises et le nombre de ménages en tant que paramètres, ce qui alourdit la
présentation, nous utilisons le moyen astucieux que sont les « agents représentatifs ». Ce qui
revient, pour l’essentiel, à faire l’hypothèse que toutes les entreprises sont identiques, ainsi
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que les tous les ménages, ce qui permet, sur un plan technique, de ne plus avoir besoin de
devoir tenir compte, en permanence, de leur nombre ».
Il s’agit de la situation d’un Robinson Crusoé seul sur son île. Puisqu’il est seul, il
représente donc un ménage et comme, par définition, une entreprise est possédée par un
ménage, Robinson se retrouve donc à la fois ménage et détenteur de l’entreprise. Ici,
Robinson va devoir opérer les mêmes choix que ce que nous avons vus précédemment avec
les entreprises et les consommateurs. Il se comporte comme un centre de décision. Tout
comme les ménages, il va décider du temps qu’il va allouer à son travail et aux loisirs, donc la
consommation, et la part du produit qu’il va consommer en cherchant à maximiser sa fonction
d’utilité inter temporel. Toute l’économie est centrée autour de Robinson. En effet, la
production nationale correspond à la production de Robinson, l’emploi au temps que
Robinson consacre au travail et l’investissement à la part du produit qu’il consacre à la
production de biens futurs.
B. L’agent représentatif peine à représenter l’ensemble des agents
économiques.
Les deux principaux agents économiques représentés par l’agent représentatif sont le
consommateur et l’entreprise. En réalité, il s’agit de l’entreprise privée. En aucun cas on ne
fait allusion aux entreprises publiques qui jouent quand même pour l’instant un rôle important
dans l’économie. En effet, seules les entreprises privées ont un but lucratif alors que les
entreprises publiques n’ont pas pour objectif principal la recherche de profits mais la
satisfaction des besoins de la population. On ne parle pas non plus des institutions au service
des ménages à but non lucratif qui ne proposent pas de biens mais des services non
marchands. Cette notion d’agent représentatif ne représente pas assez les agents économiques
puisqu’il en oublie toute une partie. De plus, cette notion s’appuie sur la rationalité des agents
économiques, c’est-à-dire que les consommateurs agissent en fonction de leurs intérêts
personnels et les entreprises dans le but de maximiser leurs profits. Or, il se trouve que cette
hypothèse ne soit pas toujours vérifiée. Par exemple les bénévoles qui travaillent dans les
« restos du cœur » ne l’ont pas choisi par intérêt personnel. Par ailleurs, l’analyse économique
classique suppose que les agents économiques sont tous capables de classer par ordre leurs
préférences. Cependant, il y a des cas dans lesquels nous sommes incapables de distinguer le
bien que l’on préfère le plus.
D’après Bernard GUERRIEN, le principe d’agent représentatif coïncide avec la
volonté de certains économistes de faire des « recherches des FONDEMENTS
MICROECONOMIQUES DE LA MACROECONOMIE » qui consiste à essayer d’expliquer
des phénomènes macroéconomiques à partir des comportements microéconomiques des
agents économiques. Ce qui était intéressant pour ces économistes était le fait de pouvoir
étudier les interdépendances entre les différents agents économiques. Or, avec la notion
d’agent représentatif, Robinson est censé représenté TOUTE la société. Il n’existe donc que
lui-même. Robinson étant tout seul, comment peut-il y avoir interaction ? Et comment faire
fonctionner une économie dans laquelle il n’existe qu’un seul agent économique puisqu’il n’y
a pas d’échange ?
Pour conclure, un agent représentatif est un agent économique censé représenter tous
les agents économiques et autour de qui tourne tout le monde économique. En effet, cela est
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réalisable grâce à l’hypothèse, selon laquelle les comportements et les préférences des
différents agents économiques sont identiques, est parfaitement vérifiée.
Toutes les analyses économiques sont basées sur des hypothèses. Or ces hypothèses
sont susceptibles d’être détruites par les adversaires puisqu’il suffit d’en affirmer le contraire.
On pourrait alors se demander s’il vaut vraiment la peine de les apprendre vu qu’elles sont
tellement fragiles.
BIBLIOGRAPHIE
Dictionnaire d’analyse économique, Bernard GUERRIEN, Repères, La Découverte, 2002 ;
Economie, SAMUELSON, NORDHAUS, Economica, 16ème édition ;
Economie politique, Jacques GENEREUX, Les Fondamentaux, Hachette Supérieur, 2000 ;
Principes d’économie moderne, Joseph E. STIGLITZ, De Boeck Université, 2000.
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