Économie, sociologie et histoire du monde contemporain, 2e édition © Armand Colin, 2016.
Fiche concours : Faut-il revenir aux taux de changes fixes?
(Chapitre 8-II )
Introduction
Le bilan que l’on peut tirer de l’évolution du SMI depuis l’abandon du système de Bretton Woods est loin d’être positif.
Les effets stabilisateurs du flottement des monnaies ne se sont pas produits (volatilité des cours du change, amples
mouvements d’appréciation et de dépréciation de certaines monnaies, persistance des déséquilibres de balance
courante, tensions entre les pays qui s’accusent mutuellement de dumping monétaire, etc.). La situation est donc loin
d’être satisfaisante.
Dans ces conditions, le retour aux changes fixes peut apparaître comme une solution. D’autant que de nombreux
économistes ont souligné le lien qui existe entre instabilité monétaire et instabilité financière et que certains pays
(notamment la Chine) ne cachent pas leur mécontentement à l’égard du fonctionnement actuel du SMI.
I. Les avantages d’un retour aux changes fixes
La situation actuelle de flottement le plus souvent impur (c’est-à-dire avec interventions des États alors qu’ils se
déclarent en situation de flottement libre des monnaies) est une source de tension. Surtout lorsque les conditions des
échanges internationaux deviennent moins favorables, lorsque la croissance économique se ralentit dans certaines
régions du monde. Restaurer des règles en matière de taux de change, débattre des taux de change d’équilibre, mettre en
place des coopérations pour défendre ces taux, discuter de façon collégiale des modifications de parité rendues
nécessaires par les évolutions structurelles des économies ne pourraient qu’être favorable à l’ensemble des économies
du monde.
Le passage aux changes flottants est largement imputable à la libéralisation des mouvements de capitaux et à
l’augmentation très importante de ces flux financiers. Dans la mesure où l’un des objectifs qui pourrait être poursuivi est
la réduction de la part relative des activités financières par rapport aux activités réelles, une régulation plus volontariste
des mouvements de capitaux pourrait être un complément utile à un retour vers des changes fixes.
II. Les conditions d’un retour aux changes fixes
La perspective d’un retour à l’étalon or ou même simplement aux règles de Bretton Woods ne semble guère réaliste. La
raison de fond, c’est que ces deux épisodes de changes fixes reposaient sur l’existence d’une «devise clé», celle d’une
puissance dominante la fois sur le plan économique, financier et monétaire) assurant une «stabilité hégémonique»
(Charles Kindleberger).
Or nous sommes très loin d’une telle situation. Le «privilège exorbitant du dollar» (Barry Eichengreen) est mis en cause
même aux États-Unis et les pays émergents n’entendent plus faire de la figuration dans la gouvernance mondiale.
Dans ces conditions, le retour aux changes fixes ne peut se réaliser que dans un monde multidevises (dollar, euro, yuan).
On pourrait s’inspirer alors de propositions de John Williamson en mettant en place des zones cibles entre les trois
monnaies de référence, la stabilité des cours du change au sein de ces zones cibles étant gérée de façon coopérative. Il
reviendrait ensuite aux pays membres des trois grandes zones monétaires (Europe et Afrique, Amériques, Asie)
d’organiser la gestion des changes en leur sein. Un certain nombre de pays d’Asie ont déjà commencé à s’organiser sur le
plan monétaire autour de la Chine et la «zone franc» est institutionnellement reliée à l’Euro. Il suffirait donc d’étendre et
d’approfondir des stratégies coopératives qui existent déjà.
Un tel dispositif pourrait être utilement complété par l’attribution au Droits de tirage spéciaux (DTS) du statut de
véritable monnaie et par le renforcement du pouvoir du FMI.
Conclusion
Le retour à des changes rigoureusement fixes autour de la monnaie d’une puissance dominante n’est pas vraisemblable.
Par contre, l’idée d’un monde multidevises s’organisant pour limiter l’ampleur des fluctuations de change tout en
conservant assez de souplesse pour s’adapter aux chocs réels qui affectent l’économie est indiscutablement une
perspective prometteuse.
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