Dossier Industrialisation de la filière BTP Février Mars 2016

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Dossier INDUSTRIALISATION DE L A FILIÈRE BTP
Encore une fois, comparons avec l’industrie, par exemple
l’automobile : est-ce qu’un client se préoccupe de savoir si le
tableau de bord de sa nouvelle voiture a été «préfabriqué»
ou non ? Il va davantage s’attacher au produit fini, à la qualité des matériaux et à celle de leur mise en œuvre (finitions).
Le vendeur argumentera en ce sens, et bien entendu pas sur
le procédé constructif !
La préfabrication d’ouvrages ou
de parties d’ouvrages
Le développement de la préfabrication dépend beaucoup
des cultures des entreprises et des environnements. En règle
générale, la préfabrication est fort développée en Belgique,
où de grands industriels ont beaucoup investi dans des outils
de production de masse, très mécanisés.
En comparaison, et sans généraliser, on peut dire que la préfabrication est moins développée en France. Le grand effectif d’ouvriers salariés dans les grandes entreprises n’y est certainement pas étranger : le management vise avant tout à
utiliser son propre outil de production, puisqu’il existe et est
performant.
Autre exemple : l’utilisation de façades en ossature bois, préfabriquées en atelier, puis posées par panneaux sur un squelette de bâtiment. Ces panneaux préfabriqués comportent,
outre l’ossature, l’isolant, l’étanchéité, le revêtement extérieur, et même les châssis et les équipements électriques
intérieurs. Aux gains de qualité et de délais (y compris en
s’exonérant en partie des intempéries), s’ajoutent la sécurité
des personnes qui interviennent sur le chantier (moins de
travail en hauteur ou en bordure du vide).
Toutes ces démarches d’industrialisation peuvent être
menées avec n’importe quel matériau de construction
(béton, acier, bois, etc.). Le choix du matériau dépend de
nombreux éléments tels que l’architecture, le coût, la disponibilité de la filière d’approvisionnement, ou encore l’image
ou l’impact environnemental, etc.
Récemment, ce sont des éléments techniques du bâtiment
qui ont été préfabriqués en atelier : les réseaux des gaines
techniques. Ceux-ci arrivent en un seul bloc sur le chantier,
puis sont installés en une seule manipulation sur toute la
hauteur du bâtiment. Là encore, le gain en qualité et en délai
est évident. En revanche, ces méthodes nécessitent une plus
grande anticipation et préparation des travaux à réaliser.
En Chine, on voit apparaître de nombreuses et ambitieuses
initiatives en faveur de la préfabrication. Deux raisons sont
généralement avancées par les entreprises qui investissent
massivement dans des sites de production : la nécessité de
produire plus pour répondre à la gigantesque demande, et
surtout la nécessité de monter en qualité par rapport à la
construction traditionnelle sur site. Il est plus facile de certifier, puis de contrôler, un site industriel de production. Les
autorités favorisent donc également les développements
d’outils industriels.
Au travers de cette approche industrielle, on voit se développer une véritable culture du design auprès des concepteurs
(architectes, bureaux d’études) et des entreprises de
construction : cette approche par le design industriel se traduit autant par la recherche de la qualité marchande des produits, que par la recherche de solutions de production optimisées dès la phase conception.
Chez Rabot Dutilleul, nous menons plusieurs types de
démarches.
Sur chaque chantier, un calcul économique global permet de
décider au cas par cas ce qui sera préfabriqué et ce qui sera
produit sur le chantier, notamment en matière d’éléments
structurels en béton.
L’investissement dans cette nouvelle activité s’est fait au travers de l’achat d’une startup, Smart Module Concept, créée
par deux jeunes ingénieurs ayant développé le concept et
construit un démonstrateur.
En parallèle, des expérimentations sont menées pour industrialiser la production de parties d’ouvrages. Cette démarche
est d’ailleurs favorisée par le management de l’entreprise. Par
exemple, ces dernières années, l’utilisation de salles de bain
préfabriquées a été expérimentée sur plusieurs chantiers : il
s’agit de faire fabriquer des modules de salle de bain à l’avance, chez un industriel spécialisé, et de les incorporer au bâtiment au fur et à mesure de sa construction. Le contrôle qualité des salles de bain est effectué en sortie d’usine, et cellesci sont bien évidemment protégées pendant les travaux. En
fin de chantier, il suffit de déballer les modules et d’en
connecter les réseaux à ceux du bâtiment. Ce procédé présente des avantages évidents en qualité et en délais de réalisation. Ces salles de bain sont construites avec des matériaux
«traditionnels» (murs, carrelage, etc.), de sorte qu’à l’usage
on ne peut pas faire la différence avec des salles de bains
construites de manière «classique». Ici encore, il faut bien différencier le procédé constructif du produit fini.
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Pour aller plus loin dans la démarche d’industrialisation,
Rabot Dutilleul a également lancé une activité de production
de modules tridimensionnels à ossature bois.
Depuis 2015, Smart Module Concept a bâti un site de production de 15 000 m2 dans la région lilloise et a enregistré de
beaux succès commerciaux auprès des autres sociétés du
Groupe Rabot Dutilleul (Nacarat et Rabot Dutilleul
Construction), bien évidemment, et auprès de clients extérieurs : bailleurs sociaux, collectivités locales, investisseurs.
Le procédé constructif, l’ossature bois, se prête parfaitement
à cette démarche industrielle, car il relève de la filière sèche
et repose sur des matériaux renouvelables, mais il aurait tout
à fait été possible de choisir aussi le béton ou l’acier.
Le principe consiste à produire en usine des modules et de
les livrer finis sur le site final. La juxtaposition ou la superposition de modules permet la construction d’un ensemble de
maisons ou d’un immeuble. La dimension des modules est
proche de celle des containers maritimes. Le temps de chantier est ainsi réduit à quelques jours ou quelques semaines,
pour un temps de production en atelier de quelques
semaines à quelques mois. Lors de la construction du
démonstrateur (une maison), les occupants ont pu emménager le jour-même où le chantier avait débuté.
Mines Revue des Ingénieurs #483 Janvier/Février 2016
INDUSTRIALISATION DE L A FILIÈRE BTP Dossier
L’industrialisation est poussée à l’extrême, puisque les
modules sont livrés finis du sol au plafond, y compris les
équipements électriques, sanitaires, électroménager, et
autres équipements des cuisines et salles de bain.
Le BIM
L’objectif est bien de «transporter de la valeur ajoutée», justifiant ainsi le coût d’un transport en convoi exceptionnel, soumis à une réglementation stricte et encadrée, donc prévisible.
La technologie BIM (Building Information Model ou
Modélisation des Données du Bâtiment) est la plus répandue. Le BIM est un processus de création et d’utilisation d’un
modèle 3D qui permet également de faire communiquer les
acteurs de la construction et de les aider à prendre les
meilleures décisions.
La démarche industrielle de Smart Module Concept, dite
Industrie 4.0, a été récemment récompensée par l’ADEME qui
a inscrit ce projet dans le Programme d’Investissements
d’Avenir. Cette labélisation est accompagnée d’une aide globale de 0,8 M€.
Le succès commercial rencontré chez Smart Module
Concept, et les synergies techniques et commerciales opérées avec les autres sociétés du Groupe Rabot Dutilleul, viennent conforter cette stratégie de développement d’un outil
industriel performant.
L’objectif est de réaliser des gains de productivité permettant
de diminuer les coûts de construction, et donc de rapprocher
l’offre de la demande en matière de logement. Si cet objectif
est atteint, une production de masse pourra être lancée sur
l’ensemble du territoire français. Elle sera également diversifiée : bureaux, locaux d’enseignement, etc.
L’industrialisation des processus
L’industrialisation dans la construction peut également s’entendre lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre des procédés «traditionnels» (construction sur site, notamment).
Là encore, il s’agit d’appliquer au secteur du BTP les recettes
qui fonctionnent dans l’industrie. Le benchmarking est particulièrement intéressant avec l’industrie automobile à laquelle
sont empruntés des méthodes, un vocabulaire, et finalement
une culture.
L’industrialisation des processus consiste également à davantage mesurer pour progresser.
On voit notamment se développer l’application de la méthode Lean dans le monde de la construction. Le Lean
Management s’applique aussi bien sur les chantiers que, bien
évidemment, dans les activités tertiaires des différents services des entreprises : études de prix, bureaux d’études techniques, etc.
Le secteur de la construction utilise de plus en plus les
méthodes de modélisation 3D des bâtiments.
Le BIM permet aux acteurs de concevoir, visualiser, simuler, et
communiquer tout au long du cycle de vie du projet. En effet,
son usage ne se limite pas à la période de construction,
puisque les données de l’ensemble des matériaux et équipements peuvent y être stockées, permettant ainsi de bâtir des
plans de maintenance et de faciliter l’usage futur du bâtiment. Par ailleurs, son utilisation s’apparente à celle d’une
plateforme collaborative, permettant notamment le travail à
distance et à plusieurs sur un même projet.
Chez Rabot Dutilleul, de plus en plus de projets utilisent la
technologie du BIM. Les techniciens des bureaux d’études
ont été formés et disposent du matériel informatique nécessaire.
Une filiale spécialisée accompagne la formation et le développement. La société Archi Graphique (www.archigraphique.fr) propose ses services de BIM Manager aux différentes entreprises du Groupe comme à des clients externes.
Clin d’œil de l’histoire, Archi Graphique a été créée il y a 20
ans pour accompagner l’arrivée d’une nouvelle technologie
de l’époque : le dessin en 2D sur plans informatisés (on parlait alors de plans automatiques), et cette même société
poursuit sa même mission avec la 3D.
À noter également que le dessin en 3D est utile pour modéliser l’ouvrage à construire, lui-même, mais aussi les différentes étapes de la construction, intégrant les outils et autres
ouvrages provisoires nécessaires à la construction (échafaudages, étaiements, coffrages, moyens de levage, etc.).
Et après ?
Sur le chantier, les idées appliquées sont simples, donc efficaces : chasse au gaspillage, limitation des ruptures de charge, etc. Elles reposent sur une meilleure planification et un
système d’apprentissage continu via le retour d’expériences.
C’est aussi l’occasion de voir les choses autrement, donc de
remettre en question les mauvaises habitudes, de changer
l’état d’esprit des acteurs.
On comprend aisément que la modélisation 3D, couplée
avec des méthodes industrielles, permettra le développement et la programmation de nouveaux automates qui viendront améliorer la productivité dans la construction.
Les démarches de développement durable initient et enrichissent la Recherche & Développement autour de nouveaux
matériaux.
On voit bien que l’utilisation de ces nouveaux matériaux de
construction, croisée avec l’apparition de robots, permettra
le développement de la fabrication additive, ou impression
3D, dont les expérimentations font l’objet de communications soutenues en Europe, aux États-Unis et en Asie.
Chez Rabot Dutilleul, l’utilisation des méthodes Lean fait partie du projet stratégique visant à développer la performance
de l’entreprise.
Notre «vieux métier» de la construction dispose d’un immense gisement de progrès et donc d’un fort potentiel de développement… vivons-nous une révolution industrielle ? ■
Mines Revue des Ingénieurs #483 Janvier/Février 2016
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Dossier INDUSTRIALISATION DE L A FILIÈRE BTP
BH - groupe Bénéteau, l’expertise de
l’industrie nautique au service du logement
Bruno MAROTTE (N87)
Directeur Général de la Division Habitat
du groupe Bénéteau
Un procédé constructif abouti
Créé en 2009, BH a développé un procédé industrialisé reposant sur une construction modulaire à ossature bois à destination des professionnels de l’habitat. Les logements, entièrement équipés en usine, répondent aux normes de la
construction en vigueur, notamment le DTU 31.2 sur la
construction de maisons et bâtiments à ossature bois.
En tant que filiale du groupe Bénéteau (leader mondial de
bateaux à voile et à moteur et leader européen de l’habitat
de loisirs), BH s’appuie sur des compétences reconnues en
matière d’organisation industrielle, de maîtrise du matériau
bois et d’optimisation des espaces.
L’usine, conçue sur-mesure, offre une superficie totale de
12 000m² pour une capacité annuelle de 1 000 maisons. Le
procédé intègre l’ensemble des métiers de la construction et
permet d’offrir des garanties de qualité, de maîtrise des coûts
et de délais record.
Une maturité de l’offre
BH bénéficie désormais d’une expérience solide autour de
son procédé industrialisé avec la construction de plus de 700
maisons individuelles et plus de 1 200 studios en résidences
collectives. L’année 2015 illustre la prise de vitesse de l’activité avec la livraison de 150 maisons individuelles (deux fois
plus qu’en 2014), de 220 logements en résidences collectives
et de 20 logements séniors (béguinage à Quimper pour Vivre
en Béguinage).
Bruno MAROTTE
Bruno Marotte est Directeur Général de la Division Habitat du groupe
Bénéteau. Au sein de cette Division, il assure directement la direction générale de la société BH, acteur majeur de la construction modulaire et industrialisée à ossature bois.
Auparavant, Bruno Marotte a exercé des responsabilités de cadre dirigeant au sein des groupes SAUR et Bouygues. Il a notamment initié les
premiers Contrats de Performances Energétiques en neuf et en rénovation
en Île-de-France.
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BH multiplie les références en résidences collectives et étudiantes avec notamment les dernières réalisations : 100
chambres pour le Crous de Metz (septembre 2014) et 170
chambres à Avignon pour le Crous Aix-Marseille (septembre
2015). BH a réalisé l’internat du lycée Chevrollier (80 lits) à
Angers avec un délai record de huit mois et l’internat de Laval
(104 chambres pour 350 lits) pour le compte du Conseil
Régional des Pays de la Loire. BH réalise également des
classes modulaires pour deux collègues à Savenay (livraison
2016) et à St-Joseph-de-Porterie (livraison 2017), dont l’appel
d’offres stipulait une évolutivité du bâtiment.
Efficacité constructive et innovations au service du client
La production industrialisée permet une démarche qualité à
chaque étape de la fabrication. Les multiples procédures de
contrôles et pré-réceptions en atelier minimisent fortement,
voire suppriment, les réserves à réception. C’est le cas de la
résidence étudiante livrée à Avignon en août 2015 pour
laquelle les 170 chambres ont été réceptionnées sans réserve. Les chambres disposent d’un carrelage flottant réalisé en
usine, nouvelle avancée dans l’industrialisation du bâtiment.
Autre exemple d’innovation : BH a mis au point un système
d’enduit hydraulique des façades réalisé en usine. Cette technique s’inscrit dans la logique d’industrialisation et s’appuie
sur les avantages des systèmes de gestion de la qualité et de
la rapidité de production. Il s’agit de poser une première
couche d’enduit sur le complexe isolation-grillage, assez
résistante pour supporter les opérations de transport et de
montage. La démarche a été validée par l’obtention d’un avis
technique du CSTB (AT N° 7/13-1558). Cette technique d’enduit posé en usine a été expérimentée pour une opération
de 43 maisons sur l’île d’Oléron. Réalisé par le promoteur
Proméo pour Immobilière 3F, ce programme sera livré en
seulement huit mois (VRD comprises).
BH poursuit sa démarche d’innovations :
• En nouveaux produits comme les charpentes, les combles
et les attiques réalisés en usine.
• En performances thermiques par l’obtention de la RT2012
THPE et des niveaux Bepas et Bepos.
Un offre BH 100% BIM
Toute la vie d’un projet est rythmée par la démarche BIM.
L’architecte partenaire développe la maquette et les équipes
commerciales communiquent sur le projet en interactif. En
phase de développement, les différents échanges BIM entre
le maître d’ouvrage, le maître d’œuvre, les bureaux d’études
et le constructeur sont un gain de temps précieux et un gage
de fluidité des informations. ■
Mines Revue des Ingénieurs #483 Janvier/Février 2016
Dossier INDUSTRIALISATION DE L A FILIÈRE BTP
Quelle forme d’industrialisation
pour le secteur du BTP ?
Philippe ROBART (P88)
Directeur Ingénierie et Innovation
VINCI Construction France
La
transition écologique s’appuie sur de nouvelles
conceptions de bâtiments : adéquation aux nouvelles façons de vivre et de travailler (l’individu
connecté anytime-anywhere - partout et tout de suite),
meilleur usage des surfaces, mutualisation de locaux et de
services, éco-conception avec en particulier une meilleure
maîtrise de la matière consommée, l’autoproduction et l’autoconsommation d’énergies renouvelables.
La transition numérique se doit d’être au service de la transition énergétique, de la performance durable des ouvrages.
Or l’utilisation d’approches digitales, de modélisations et de
processus BIM, sera réellement efficace si l’on regarde désormais le bâtiment comme un ensemble de systèmes mettant
en jeu des composants, plutôt que comme un ensemble de
lots.
Les premières orientations qui découlent de ces deux grands
mouvements sont les suivantes.
Procédé Habitat Colonne
ment ou enlever des panneaux producteurs d’énergie (BIPV –
Building Integrated Photo Voltaïc) en fonction de l’évolution
de l’environnement immédiat du bâtiment et des masques
solaires, la façade est non porteuse.
De la flexibillité à la réversibilité du bâtiment, pour
une empreinte environnementale minimale
La décision de construire 1m² est désormais associée à la
recherche du meilleur usage de ce m² sur le cycle de vie du
bâtiment. Démolir pour reconstruire in-situ est très pénalisant en émissions de CO2. Il s’agit donc de concevoir des
ouvrages flexibles (à nature d’usage constant), voire réversibles (avec changement d’usage) pour contribuer aux objectifs de mutabilité de la ville.
Pour assurer une flexibilité maximale des espaces et des
volumes, le système constructif qui s’impose, dans le référentiel des normes et règles de l’art actuelles, est un système
poteaux-dalles sans retombée de poutre. En effet, l’utilisation de voiles bétons en partitionnement des logements ou
des espaces de bureaux limite fortement la flexibilité des
espaces.
Pour assurer une évolutivité de la façade et par exemple
reconsidérer a posteriori l’équilibre entre les parties vitrées et
les parties opaques, ou encore mettre en place ultérieure-
Mines Revue des Ingénieurs #483 Janvier/Février 2016
Façade à ossature bois Arbonis
La question de la lumière naturelle invite par ailleurs à privilégier des appartements traversants ou doublement exposés, et à remettre en cause les notions de noyau/circulation
centrale
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Dossier INDUSTRIALISATION DE L A FILIÈRE BTP
Pour répondre à la mutabilité souhaitée pour la ville de
demain, VINCI Construction France a développé une solution
réversible qui combine sept choix-clés de façon à pérenniser
les investissements et limiter l’empreinte environnementale
des bâtiments neufs sur leur cycle de vie complet : la solution
Conjugo®, construire réversible c’est construire durable.
La Blue BIM Toolbox : lauréate du concours PUCA BIM Bonnes Pratiques –
Processus Concepts Idées Services.
Cette boîte à outils a été labellisée par le PUCA (Plan Urbanisme
Construction Architecture] en 2015.
Travailler avec le BIM est un prérequis pour aller vers la
construction virtuelle : réaliser le film du chantier avant le
chantier physique et ainsi anticiper les problèmes et les
risques.
Le modèle BIM de l’ouvrage est également organisé en fonction de son usage ultérieur en maintenance, il constitue la
carte vitale ou le passeport numérique de l’ouvrage.
Conjugo®
Les systèmes poteaux-dalles et les façades à ossature bois,
avec libre choix du parement, sont des éléments favorables
pour un meilleur bilan carbone : il s’agit de viser une
empreinte environnementale minimale sur le cycle de vie de
l’ouvrage. Et l’on sait qu’un bâtiment aura plusieurs vies.
Le béton est utilisé pour les poteaux (qualité structurelle du
béton) et pour les planchers, de façon à bénéficier de l’inertie thermique spécifique au béton. Après avoir travaillé à
minimiser les besoins et utilisé au maximum les qualités passives du bâti, les systèmes techniques apportent et distribuent l’ultime complément d’énergie nécessaire, qui a été
porté à son strict minimum.
L’intégration des énergies renouvelables (EnR) peut se faire
dans une démarche BIPV (Building Integrated Photo Voltaïc)
en utilisant des films PV dans les vitrages (films PV occultants
dans un ensemble vitré transparent) et sur les parois
opaques. Lafarge Holcim a développé un principe de coulage
de béton fibré directement sur un film PV.
Quels outils et processus de conception pour ces
bâtiments vertueux de nouvelle génération ?
Pour concevoir et réaliser des ouvrages performants qui
répondent aux objectifs de la transition écologique, et améliorer la qualité, les délais de réalisation, VINCI Construction
France déploie le BIM au sein de ses filiales. Pour que ses
équipes en études, comme sur les chantiers, puissent constituer et manipuler efficacement des modèles organisés de
façon adéquate, et ainsi produire de la valeur avec le BIM,
VINCI Construction France a développé une boîte à outils
dans l’environnement Revit® d’Autodesk : la Blue BIM
Toolbox.
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Quelles technologies de mise en œuvre
sur le chantier ? Quid de l’impression 3D ?
Après avoir posé les fondamentaux de conception indiqués
ci-avant, et doté les équipes des processus et outils de logiciels de conception les plus avancés, vient la question de la
mise en œuvre sur le chantier. Les objectifs de construction
durable se déclinent dans la continuité de la conception :
sécurité accrue pour les personnels sur le chantier grâce à la
construction virtuelle qui offre le maximum de pédagogie et
garantit la levée des risques en amont, unicité et précision de
l’information servant une qualité de réalisation accrue, rapidité de mise en œuvre par des flux logistiques définis selon la
méthode LEAN comme dans les industries manufacturières,
juste consommation de matière et d’énergie.
L’automatisation de l’acte de construire peut s’appuyer sur
quatre grandes familles de techniques de réalisation :
• La préfabrication.
• La robotique, qui dans certains cas va se substituer à l’acte
manuel.
• La cobotique, qui va prolonger et faciliter l’acte manuel
avec plus de sécurité, plus de précision, moins de pénibilité.
• L’impression 3D, famille des procédés basés sur la synthèse
additive (empiler des couches), ici encore pour une précision optimale, mais surtout pour n’utiliser que la quantité
de matière strictement nécessaire.
Ces différentes solutions peuvent être juxtaposées voire
combinées.
Techniquement, l’impression 3D avec le matériau béton a
encore quelques difficultés à surmonter. Le matériau doit à la
fois disposer de la bonne fluidité en entrée pour pouvoir
donner la forme, mais doit se figer rapidement en sortie pour
éviter l’affaissement de l’ensemble multicouches produit
(une superposition de boudins).
Mines Revue des Ingénieurs #483 Janvier/Février 2016
INDUSTRIALISATION DE L A FILIÈRE BTP Dossier
même de couches) et qu’elle est en revanche très performante pour les structures réticulaires.
La prise en compte des nouveaux choix de conception, guidés par les objectifs de flexibilité, de sobriété énergétique, de
consommation minimale des ressources, d’une part, et l’analyse des atouts et faiblesses de l’impression 3D d’autre part,
conduit à penser autrement : exit les voiles porteurs au profit d’une structure qui remplace les poteaux et qui porte des
planchers préfabriqués, structure optimale assurant la tenue
de l’ouvrage en consommant un minimum de matière et qui
peut être mise en œuvre sans danger, extrêmement rapidement, avec une performance économique. Dans la continuité du même raisonnement, il convient d’envisager des planchers mixtes béton-autre matériau (exemple mixte bétonbois) pour limiter les émissions de CO2 et maximiser les propriétés structurelles, thermiques, acoustiques du plancher.
Vers des changements majeurs de processus
et d’outils, de la conception à l’exploitation
des ouvrages
Essai de réalisation d’un voile béton en impression 3D par Lafarge Holcim]
Le renforcement de cet ensemble multicouches pour pouvoir se référer aux normes de construction en béton armé
reste à mettre au point, à moins que seuls les bétons fibrés
soient utilisés, et qu’on s’affranchisse des armatures, ce qui
est peu probable. L’impression 3D en métal étant assez complexe, d’autres types d’armatures sont actuellement envisagés.
On constate que l’impression 3D est peu à l’aise quand il
s’agit de produire de la masse (pénalisée par le principe
Pour que la transition numérique dans le bâtiment soit au
service de la transition écologique, au service de la performance durable des ouvrages, tout en contrubuant à la productivité des entreprises et à la sécurité des personnels, il
apparaît donc indispensable de revoir entièrement la chaîne
d’information et de bousculer les usages. En premier lieu, il
faut d’abord adapter les choix de conception plutôt que
chercher à utiliser une technique de mise en œuvre innovante en la plaquant sur les conceptions traditionnelles. Ensuite,
les techniques de réalisation telles que la préfabrication, la
robotisation, l’emploi de la cobotique et l’impression 3D sont
à coupler pour atteindre les meilleurs équilibres. ■
LES ÉDITIONS PERSÉE
Adieu Berlines, adieu mineurs
par Jacques Bonnet (E58)
«… Enfin, après quelques bons coups de masse
accompagnés de sourdes invectives en «platt», tout
s’est mis en place. Les carters ont été refermés, les
boulons serrés à fond et la machine, au premier
essai du haveur, s’est mise à ronronner comme un
gros chat. Redescendus au pied de la taille pour voir
tout ce charbon qui défilait sur le convoyeur en une
masse noire et chaude, nous avons ressenti une
intense jubilation. Le chef-porion, soucieux de sa
dignité, avait à la main sa lampe de sécurité et se
composait un masque impénétrable ; mais ses yeux
le trahissaient. C’est comme ça, la mine ! On y
devient amoureux d’un tas de charbon…».
222 pages
Mines Revue des Ingénieurs #483 Janvier/Février 2016
Dans notre pays d’ancienne tradition minière, toutes
les houillères ont fermé les unes après les autres ; le
souvenir même de cette industrie qui donna du travail
à des millions de personnes tend à s’estomper.
Jacques Bonnet raconte les différentes facettes de ce
métier, exceptionnellement dur et dangereux au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Dix années après
la Libération, les «gueules noires» travaillaient sans
relâche, confrontés au danger. Produire du combustible
en quantité suffisante pour faire redémarrer l’économie
du pays était d’une importance vitale.
Peu à peu, l’économie se rétablit et on oublia les
«gueules noires». Ils se retrouvèrent seuls pour livrer
un combat final dont l’issue était décidée ailleurs.
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