1.1. Réactivité électrophile des acides carboxyliques et groupes

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Molécules et matériaux organiques
Partie 1. Addition nucléophile suivie d’élimination (AN + E)
1.1. Réactivité électrophile des acides carboxyliques et groupes dérivés
Objectifs du chapitre
→ Notions à connaître :
 Activation du groupe carboxyle :
o Ex situ sous forme d’un chlorure d’acyle ou d’un anhydride d’acide ;
o In situ par protonation ;
o In vivo par formation de l’acétylCoA.
→ Capacités exigibles :
 Comparer les réactivités électrophiles des acides carboxyliques, chlorures d’acyle, anhydrides
d’acide, esters, amides, les aptitudes nucléofuges des groupes partants dans les molécules
correspondantes et en déduire l’opportunité ou non d’opérer une activation électrophile du groupe
carboxyle.
 Proposer et/ou analyser différents moyens d’activation d’un groupe carboxyle.
Les acides carboxyliques et les groupes fonctionnels qui en dérivent sont fréquemment rencontrés dans les synthèses organiques.
Dans la vie courante, de nombreux esters sont utilisés en parfumerie, mais aussi en tant qu’arômes par l’industrie agroalimentaire. La fonction amide constitue la liaison peptidique qui sert à lier entre eux les acides aminés dans les protéines.
Avant de s’intéresser aux réactions auxquelles ils participent, il est nécessaire de faire le point sur leur réactivité. Les acides
carboxyliques et les groupes qui en dérivent présentent un atome de carbone fonctionnel électrophile. Ils peuvent par conséquent
réagir avec des composés nucléophiles, mais une assistance est parfois nécessaire pour activer leur électrophilie. C’est là la
problématique centrale de ce premier sous-chapitre :
Problématique :
Les acides carboxyliques et les groupes fonctionnels qui en dérivent peuvent-ils réagir avec
un composé nucléophile sans activation ?
1. Rencontre avec les acides carboxyliques
1.1. Comment les nommer ?
Nommer les composés suivants :
H-CCOOH
CH3-COOH
CH3-(CH2)4-COOH
(CH3)2CH-COOH
HOOC-CH2-COOH
-1-
1.2. Comment les fabriquer ?
Rappeler les modes de synthèse des acides carboxyliques au programme de PCSI :
1.3. Structure électronique et géométrie
Que prévoit la méthode VSEPR quant à la géométrie autour du carbone fonctionnel ?
Le groupe « acide carboxylique » est-il polaire ?
Application : Les savons
Les savons sont des carboxylates (à longue de chaîne carbonée R) de potassium (R-COO-,K+) ou de sodium
(R-COO-,Na+). Composés amphiphiles : une partie est hydrophile (groupe carboxylate polaire + possibilité de liaison hydrogène),
une partie est lipophile (chaîne carbonée : interaction de London).
eau
savonneuse
tâche de
graisse
tissu
eau
savonneuse
micelle
de graisse
Les parties lipophiles se « lient » à la tache grasse par des interactions de type London, les parties hydrophiles étant orientées
vers l’extérieur (schéma 1). Grâce à une action mécanique (manuelle ou machine), la tâche se décolle du tissu : on obtient alors
une micelle, c’est-à-dire une entité sphérique constituée en surface d’agents tensio-actifs. Cette micelle est soluble dans l’eau,
contrairement à la tache grasse, puisque les têtes hydrophiles sont orientées vers l’extérieur.On aboutit alors lors du rinçage à
l’évacuation de la tache grasse avec les eaux usées.
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1.4. Identification par spectroscopie
-
Spectroscopie IR :
Comparaison avec les alcools :
Pourquoi la bande de vibration d’élongation de la liaison O-H est-elle beaucoup plus large
avec les acides carboxyliques qu’avec les alcools ?
-
Spectroscopie RMN :
Spectre en présence d’eau lourde :
Le signal situé vers 12 ppm disparaît en présence d’eau lourde D2O. Pourquoi ?
-3-
2. Réactivité des acides carboxyliques
2.1. Les acides carboxyliques sont des… acides
Identifier l’atome d’hydrogène labile sur un acide carboxylique et dessiner la base conjuguée :
H labile
Base conjuguée = ion carboxylate
Donner l’ordre de grandeur du pKA du couple Acide carboxylique R-COOH / Ion carboxylate R-COO-. Proposer des bases
réagissant totalement avec des acides carboxyliques :
Comparer la solubilité dans l’eau de la forme carboxylate R-COO- et de l’acide carboxylique. Comment peut-on utiliser cette
propriété lors de la phase d’isolement du produit à la fin une synthèse organique ?
Proposer une justification à la différence d’acidité des alcools (pKA (ROH/RO-) de 16 à 20) et celle des acides carboxyliques.
-4-
2.2. Orbitales frontalières des acides carboxyliques
Identifier les sites nucléophile et électrophile d’un acide carboxylique grâce aux représentations des orbitales frontalières :
HO
BV
L’approche classique (Lewis + mésomérie) conduit-elle à la même conclusion ou à une conclusion différente ?
Que penser de l’électrophilie du carbone fonctionnel ?
Comment l’améliorer ?
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Remarque : D’un point de vue orbitalaire, protoner un acide carboxylique revient à abaisser l’énergie de la BV. Cette orbitale
associée aux propriétés électrophiles du composé voit alors son énergie se rapprocher de celle de la HO d’un nucléophile : la
réaction entre le nucléophile et l’électrophile est accélérée.
Ceci a déjà été exploité dans le cours de PCSI pour activer l’électrophilie des dérivés carbonylés (aldéhydes et cétones) en vue de
les faire réagir avec des nucléophiles peu efficaces comme les alcools dans le cas de la réaction d’acétalisation.
Profil réactionnels avec ou sans activation électrophile :
2.3. Résumé
Sites réactifs d’un acide carboxylique :
Les acides carboxyliques présentent un site électrophile, un site basique et un site acide
3. Rencontre avec les groupes dérivés des acides carboxyliques
Groupes dérivés des acides carboxyliques = groupes fonctionnels préparés à partir des acides carboxyliques :
Groupe dérivé
Exemple
Nomenclature
Alcanoate d’alkyle
O
O
Ester
C
1
3
1
O
C
O
2
O
Amide
N
C
O
O
Chlorure
d’acyle
Anhydride
d’acide
N-alkylalcanamide
Chlorure d’alcanoyle
3
1
C
O
C
1
2
Anhydridealcanoïque
O
O
O
O
Cl
2
Cl
C
O
1
2
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Présents à l’état naturel
Fabriqués
(in situ)
Formule générale des groupes dérivés des acides carboxyliques :
Les dérivés des acides carboxyliques sont électrophiles, MAIS TOUT DEPEND DE LA NATURE DU GROUPE Z :
4. Réactivité comparée des dérivés des acides carboxyliques
Mécanisme AN + E :
Les acides carboxyliques et les groupes dérivés réagissent avec des nucléophiles selon un mécanisme
d’addition nucléophile puis élimination :
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4.1. Facilité de l’addition nucléophile ?
L’addition nucléophile est d’autant plus facile que la charge du carbone est élevée. Or le groupement Z intervient par deux
effets antagonistes :
 Plus électronégatif que C, il attire les électrons de la liaison C-Z : inductif attracteur
 Grâce à son doublet non liant, il est mésomère donneur
Chlorure d’acyle
Anhydride d’acide
Ester
Amide
Fort
Fort
Fort
Moyen
Faible
Moyen
Fort
Très fort
Z
Effet inductif
attracteur
Effet mésomère
donneur
Charge du carbone
fonctionnel
Facilité de l’addition
nucléophile
Quelques remarques :

Le pouvoir inductif attracteur est fortement lié à l’électronégativité de l’élément : χO et χCl proches et supérieures à χO.

Le pouvoir mésomère donneur de Cl est faible car le doublet non liant de Cl est assimilable à une orbitale 3p plus haute
en énergie que les OA du carbone… L’interaction est alors considérée peu efficace.

Dans l’anhydride d’acide, l’effet donneur de l’oxygène se répartit sur deux sites contrairement à l’ester.
4.2. Facilité de l’élimination ?
Le groupement Z doit ensuite quitter la molécule. Meilleur est le pouvoir nucléofuge de Z-, plus rapide est l’élimination.
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Moyen mnémotechnique : Le caractère nucléofuge est difficile à aborder. En revanche, on peut utiliser un « truc » pour se
souvenir de la facilité d’un groupement à partir. Il ne n’agit aucunement d’une justification car le caractère nucléofuge n’a rien à
voir avec le pKA.
Plus le groupe partant est basique, moins il part facilement.
Autrement dit, les meilleurs groupes partants sont les bases les plus faibles (pK A petit).
pKA(HZ/Z-)
Chlorure d’acyle
Anhydride d’acide
Ester
Amide
HCl/Cl-7
RCOOH/RCOO5
ROH/RO18
RNH2/RNH35
Facilité de
l’élimination
Remarques :

Pourquoi l’élimination se produit-elle ? Quel est le moteur de cette élimination ?
Données : Energies de liaisons : D(C=O) = 720 kJ.mol–1 et D(C-O) = 350 kJ.mol–1

Pourquoi n’observe-t-on pas d’élimination après une addition nucléophile sur un aldéhyde ou une cétone ?
4.3. Bilan
Facilité de l’addition
nucléophile
Facilité de
l’élimination
Chlorure d’acyle
Anhydride d’acide
Ester
Amide
++
+
-
--
++
+
-
--
Ordre de réactivité vis-à-vis d’un nucléophile :
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4.4. Que dit l’approche orbitalaire ?
A l’aide du diagramme d’OM suivant, conclure quant à la réactivité des dérivés d’acide vis à vis d’un nucléophile :
Calculs réalisés par Eric Noizet à l’aide du logiciel Jimp2
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5. Réactivité comparée des dérivés des acides carboxyliques
A partir de ce qui a été abordé jusqu’ici proposer plusieurs méthodes pour rendre un acide carboxylique plus électrophile :
Et dans la nature ? Activation in vivo par formation de l’acétylCoA
Dans l’organisme, tous les acides gras sont formés à partir de l’éthanol CH3-CH2-OH obtenu par fermentation du glucose.
L’éthanol est d’abord oxydé en acide éthanoïque CH3-COOH qui a besoin d’être activé si on veut pouvoir lui additionner un
nucléophile.
L’activation de l’acide éthanoïque est réalisée par estérification avec le groupe thiol (R-SH, analogue soufré des alcools) d’une
molécule complexe : le coenzyme A.
L’acétyl-CoA se fixe alors de façon sélective sur une enzyme, où il subit une succession de réactions d’allongement de chaîne
carbonée par additions successives de nucléophiles pouvant mener par exemple à l’acide palmitique (16 atomes de carbone)
ou stéarique (18 atomes de carbone).
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