Universit´e de Bourgogne Licence de Math´ematiques
D´epartement de Math´ematiques Compl´ements d’analyse
Chapitre 3: Les espaces de Hilbert
1. Produit scalaire et espaces de Hilbert
D´efinition (Produit scalaire)
Soit Hun espace vectoriel sur K=Cou K=R. Un produit scalaire sur Hest une application
H×HKnot´ee (x, y)7→ (x|y)telle que:
1) yH,x7→ (x|y)est lin´eaire de Hvers K,
2) x,yH,(y|x) = (x|y),
3) xH,(x|x)0et (x|x) = 0 =x= 0.
On dit aussi que (x, y)7→ (x|y) est une forme sesquilin´eaire d´efinie positive. Un espace Hmuni
d’un produit scalaire est un espace pr´ehilbertien (r´eel ou complexe). Si dim(H)<, on dit que
Hest un espace euclidien (si K=R) ou hermitien (si K=C).
Si Hest un espace pr´ehilbertien, il est norm´e par
x7→ kxk=p(x|x).
En effet:
Lemme (In´egalit´e de Schwarz)
Soit Hun espace pr´ehilbertien et x,ydeux vecteurs de H. Alors:
|(x|y)| ≤ kxk.kyk.
Preuve
Si (x|y) = 0, cette in´egalit´e est ´evidente. Sinon, on ´ecrit pour tout tr´eel:
0xt(x|y)
|(x|y)|y|xt(x|y)
|(x|y)|y= (x|x)2t|(x|y)|+t2(y|y).
Ce trinˆome en test toujours positif, son discriminant r´eduit est donc n´egatif ou nul:
0=|(x|y)|2(x|x)(y|y)0.
1
Corollaire (k k est une norme)
L’application x7→ kxkv´eruifie les axiomes d’une norme:
pour tout x,kxk ≥ 0et kxk= 0 =x= 0,
pour tout xet tout λ,kλxk=|λ|kxk,
pour tout xet tout y,kx+yk ≤ kxk+kyk.
Preuve
Le premier point est ´evident,
On a kλxk=p(λx|λx) = qλλ(x|x) = |λ|kxk.
On a: kx+yk2= (x+y|x+y) = (x|x)+(x|y)+(y|x)+(y|y)
=kxk2+ 2Re(x|y) + kyk2
(kxk+kyk)2.
Lemme (Egalit´e du parall´elogramme)
Si Hest un espace pr´ehilbertien, sa norme satisfait l’´egalit´e du parall´elogramme:
kx+yk2+kxyk2= 2kxk2+ 2kyk2x, y.
C’est un simple calcul:
kx+yk2+kxyk2= (x|x)+(x|y)+(y|x)+(y|y)+(x|x)(x|y)(y|x)+(y|y).
D´efinition (Espace de Hilbert)
Un espace de Hilbert est un espace pr´ehilbertien complet (pour la distance associ´ee `a sa norme).
Exemples
1) Cnmuni du produit scalaire:
(x|y) =
n
X
i=1
xiyi
est un espace pr´ehilbertien complet. Les espaces de Hilbert de dimension finie s’appellent des
espaces euclidiens s’ils sont r´eels, hermitiens s’ils sont complexes.
2) L’espace Knavec l’une des normes:
kxk1=
n
X
i=1 |un|,kxk= sup
0in|ui|
n’est pas un espace de Hilbert car l’´egalit´e du parall´elogramme n’est pas vraie pour ces normes.
3) L’espace `2des suites de carr´es sommable est un espace de Hilbert:
`2=nu= (un)nN,
X
n=0 |un|2<o,(u|v) =
X
n=0
unvn.
2
4) L’espace C([0,1]) des fonctions continues sur [0,1] avec le produit scalaire:
(f|g) = Z1
0
f(t)g(t)dt
est un espace pr´ehilbertien non complet: la suite de fonctions:
fn(t) =
1 si t1
2
0 si t1
2+1
n
1n(t1
2) si 1
2< t < 1
2+1
n
est de Cauchy mais n’a pas de limite dans C([0,1]) pour la norme
kfk2=sZ1
0|f(t)|2dt.
5) L’espace C([0,1]) avec l’une des normes:
kfk1=Z1
0|f(t)|dt, kfk= sup
t[0,1] |f(t)|
n’est pas un espace de Hilbert car l’´egalit´e du parall´elogramme n’est pas vraie pour ces normes
(voir l’exemple 2).
Remarque
Si (E, k k) est un espace norm´e dont la norme v´erifie l’´egalit´e du parall´elogramme, alors, Eest
un espace pr´ehilbertien: on peut d´efinir ‘par polarisation’ un produit scalaire (x, y)7→ (x|y) tel
que kxk=p(x|x) pour tout xde E. Ce produit scalaire est d’ailleurs unique.
Proposition (Continuit´e du produit scalaire)
Soit Hun espace pr´ehilbertien muni de sa norme. Alors
les applications x7→ (x|y)et y7→ (x|y)sont uniform´ement continues sur H,
l’application H×HKest continue.
Preuve
On a:
|(x1|y)(x2|y)|=|(x1x2|y)| ≤ kx1x2kkyk.
On a aussi:
|(x1|y1)(x2|y2)|=|(x1x2|y1)+(x1|y1y2)(x1x2|y1y2)|
≤ kx1x2kky1k+kx1kky1y2k+kx1x2kky1y2k.
2. Orthogonalit´e
D´efinition (Vecteurs orthogonaux)
Deux vecteurs xet yd’un espace pr´ehilbertien Hsont dits orthogonaux si (x|y) = 0.
3
Ceci a un sens puisque (x|y) = 0 si et seulement si (y|x) = 0 donc si xest orthogonal `a y,yest
orthogonal `a x.
Si Aest une partie de H, on note Al’ensemble de tous les vecteurs orthogonaux `a A:
A={xHtels que (a|x) = 0,aA}.
Par construction, Aest toujours un sous-espace vectoriel ferm´e de H:
x1Aet x2A=λ1x1+λ2x2Aet xnAnet xnx=xA.
Proposition (Convexes complets de H)
Soit Aune partie convexe et compl`ete de H. Alors Acontient un ´el´ement x0et un seul de
norme minimale.
Preuve
C’est une cons´equence de l’´egalit´e du parall´elogramme, c’est `a dire de la forme des boules de
H. Soit δla distance de 0 `a A:
δ= inf{kxk, x A}.
Existence de x0. Par d´efinition, on peut trouver une suite (xn) de points de Atelle que
kxnk → δ. On ´ecrit l’´egalit´e du parall´elogramme pour les vecteurs 1
2xnet 1
2xm:
1
2xn+1
2xm
2
+
1
2xn1
2xm
2
=
xn+xm
2
2
+1
4kxnxmk2= 21
4kxnk2+ 21
4kxmk2.
Donc:
0≤ kxnxmk2= 2kxnk2+ 2kxmk24
xn+xm
2
2
2kxnk2+ 2kxmk24δ20 si n, m → ∞.
On en d´eduit que la suite (xn) est de Cauchy, comme Aest complet, (xn) converge vers un vecteur
xde A, comme la norme est continue, kxk=δ.
Unicit´e de x0. Si xet ysont deux points de Aqui v´erifient kxk=kyk=δ, alors le mˆeme calcul
donne:
δ2=1
2kxk2+1
2kyk2=
x+y
2
2
+1
4kxyk2δ2+1
4kxyk2.
Donc kxyk2= 0 et x=y.
Th´eor`eme (Projection orthogonale)
Soit Eun sous-espace vectoriel complet de l’espace pr´ehilbertien H(dans la pratique, on se
limite aux cas Hcomplet et Eferm´e ou Hquelconque et Ede dimension finie). Soit xun vecteur
de H. Alors:
1) Il existe un unique vecteur de E, not´e P(x)tel que xP(x)soit de norme minimale:
kxP(x)k= inf {kxyk, y E},
2) P(x)est l’unique vecteur yde Etel que xysoit orthogonal `a E:
yEet xyEy=P(x),
4
3) On a H=EEet la d´ecomposition de xHdans cette somme directe est:
x=P(x)+(id P)(x),
Pest la projection orthogonale sur Eet id Pest la projection orthogonale sur E,
4) On a, pour tout xde H,kxk2=kP(x)k2+k(id P)(x)k2.
Preuve
1) On pose A=Ex={yx, y E}.Aest convexe et complet. Il existe donc un vecteur et
un seul a=P(x)xde Ade norme minimale. Par d´efinition, P(x)E.
2) Soit z6= 0 un vecteur non nul quelconque de E. Par d´efinition de P(x), si y=P(x)x, on a
pour tout αC,
kP(x)xk2=kyk2≤ kyαzk2= (y|y)α(y|z)α(z|y) + |α|2(z|z).
Prenons α=(y|z)
(z|z), ceci nous dit:
0≤ −(y|z)
(z|z)(y|z)|(y|z)|2
(z|z)+|(y|z)|2
(z|z)2(z|z) = |(y|z)|2
(z|z)
donc (y|z) = 0. C’est aussi vrai si z= 0, yest donc dans E.
R´eciproquement, si uest un vecteur de Etel que (xu)E, alors:
x=u+ (xu), x P(x) = (uP(x)) + (xu), u P(x) = (xP(x)) (xu).
Le vecteur uP(x) appartient `a Epar d´efinition et aussi `a Epuisque (xP(x)) et (xu) sont
tous deux dans E. On en d´eduit que ce vecteur est orthogonal `a lui-mˆeme:
0 = (uP(x)|uP(x)) = kuP(x)k2
donc u=P(x).
3) Pour tout xde H,x=P(x)+(xP(x)) appartient `a E+Eet EE={0}, la somme est
donc directe, H=EE. Ceci veut dire que Pest la projection sur Eparall´element `a E. On
appelle donc cette application la projection orthogonale de Hsur E.
4) Par d´efinition:
kxk2= (P(x)+(xP(x)|P(x)+(xP(x))
= (P(x)|P(x)) + ((xP(x)|P(x)) + (P(x)|(xP(x)) + (xP(x)|(xP(x))
=kP(x)k2+kxP(x)k2(Th´eor`eme de Pythagore).
3. Le dual d’un espace de Hilbert H
Nous avons d´ej`a vu que, pour tout vecteur yde l’espace de Hilbert H, la forme ϕy:HK,
ϕy:x7→ (x|y) est une forme lin´eaire et continue. En fait toutes les formes de Hsont de ce type:
le gros avantage des espaces de Hilbert est que chacun d’eux est isomorphe `a son dual.
Th´eor`eme de Riesz-Fischer
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