Traitement préventif par Isoniazide chez l`enfant dans deux districts

INT J TUBERC LUNG DIS 18(8):919928
© 2014 The Union
Auteur pour correspondance : H R Sivaramakrishna, WHORNTCP Technical Assistance Project, State TB Cell, Anti TB Associ-
ation Building, Teyanmpet, DMS Campus, Chennai, India. Tel: (+91) 93 4423 9692. e-mail: shivaramkrishanH@rntcp.org or srkho-
lur1979@gmail.com
[Traduction de l’article : « Isoniazid preventive treatment in children in two districts of South India: does practice follow policy? »
Int J Tuberc Lung Dis 2014; 18(8): 919928. http://dx.doi.org/10.5588/ijtld.14.0072]
Traitement préventif par isoniazide chez l’enfant dans deux
districts de l’Inde du Sud : la pratique suit-elle la politique?
H. R. Shivaramakrishna,* A. Frederick, M. Lakshmi, S. Satyanarayana,§ A. Sreenivas,*
A. M. Kumar,§ P. K. Moonan
*World Health Organization Country Office in India, New Delhi, Revised National TB Control Programme (RNTCP) District
Tuberculosis Unit, Krishnagiri and Dharmapuri Districts, Tamilnadu, RNTCP State Tuberculosis Unit, Tamilnadu,
§International Union Against Tuberculosis and Lung Disease, South-East Asia Regional Office, New Delhi, India; Division
of Tuberculosis Elimination, Centers for Disease Control and Prevention, Atlanta, Georgia, USA
______________________________________________________________________________RÉSUMÉ
CONTEXTE: Deux districts du Tamil Nadu, Inde.
OBJECTIFS : Déterminer la proportion des contacts domestiques âgés de <6 ans de patients tuberculeux avec
des résultats positifs de frottis de crachats qui ont démarré et terminé le traitement préventif par isoniazide
(TPI). Déterminer les raisons de non-initiation et de non-complétion du traitement par isoniazide.
SCHÉMA : Des visites à domicile ont été réalisées sur un échantillon aléatoire de patients adultes inscrits entre
janvier et juin 2012 afin d’identifier les contacts domestiques âgés de <6 ans.
RÉSULTATS : Parmi 271 enfants vivant avec 691 patients index, 218 (80%) ont été évalués et 9 (4%) ont eu un
diagnostic de tuberculose (TB). Sur les 209 contacts restants, 70 (33%) ont débuté le TPI et 16 (22,9%) ont ache-
vé leur traitement. Sur 139 contacts qui n’ont pas débuté le traitement, cinq ont développé une TB maladie. Les
motifs de non-initiation du TPI comprenaient l’absence de visite à domicile par le personnel de terrain (19%) et
l’absence d’information sur le TPI (61%). Les motifs de non achèvement du traitement comprenaient l’absence
de fourniture de l’isoniazide (52%) et la longue durée du traitement (28%).
CONCLUSION : Cette étude montre que les recommandations révisées relatives au Programme National Révisé
contre la Tuberculose ne sont pas suivies et que la mise en œuvre du TPI est insuffisante. Cette faible utilisation
du TPI représente une opportunité manquée de prévention de futurs cas de TB. La fourniture du TPI pourrait
être améliorée grâce à une formation, une meilleure logistique et une amélioration de la supervision et du suivi.
MOTS CLÉS : tuberculose ; dépistage ; enfants ; isoniazide ; traitement préventif
CHAQUE ANNEE, environ 1 million de nouveaux cas
de tuberculose (TB) surviennent chez des enfants de
moins de 15 ans dans le monde, avec 75% de ces cas
dans les 22 pays les plus durement frappés par la TB.1
Les jeunes enfants en contact étroit avec un cas de TB
pulmonaire à frottis positif courent un risque élevé
d’infection tuberculeuse latente (ITL) et d’évolution
vers la tuberculose maladie. On estime que jusquà
43% des enfants infectés avant l’âge de 12 mois et 24%
de ceux infectés entre 1 et 5 ans vont développer la
maladie.2 De plus, les enfants âgés de moins de 5 ans
ont un risque plus élevé de développer des formes
disséminées de TB, incluant les TB miliaires et les
méningites tuberculeuses, aboutissant souvent au décès.2,3
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) re-
commande le dépistage à domicile des contacts du cas
index afin didentifier les enfants atteints de TB et de
permettre un traitement rapide. Le dépistage offre éga-
lement une opportunité de fournir un traitement pré-
ventif par isoniazide (TPI) aux contacts qui ne sont pas
encore malades.4 Il a été démontré que la prise quoti-
dienne d’isoniazide (INH) pendant au moins 6 mois,
donnée à titre préventif aux jeunes enfants, duisait
considérablement la probabilité d’évolution de l’ITL
vers une maladie tuberculeuse active.5–7 Le TPI est sûr,
les effets secondaires étant extrêmement rares chez les
enfants et son efficacité en termes de prévention de la
maladie atteint 90% lorsque sa prise est correcte.5–7
Cependant, plusieurs études ont montré que
l’adhésion au TPI était généralement médiocre, particu-
lièrement dans les contextes de prévalence élevée et de
ressources limitées.8–15
L’Inde est l’un des pays les plus durement frappés
par la TB dans le monde.1 Le programme national de
lutte contre la TB révisé par le gouvernement indien
(RNTCP) recommande le dépistage des contacts do-
mestiques (particulièrement les enfants âgés de moins
de 6 ans) de tous les cas de TB pulmonaire à frottis de
crachats positif.16 Pour les enfants sans signe de TB
active, le TPI à raison de 5 mg/kg/jour est recommandé
pendant 6 mois.4,7,16 En dépit de ces recommandations,
la mise en œuvre du TPI chez les enfants reste insuffi-
sante en Inde.
Deux études à base communautaire réalisées dans
le Krishna District de l’Etat d’Andhra Pradesh et au
Tuberculosis Research Centre (TRC) de Chennai, ont
révélé que respectivement 56% et 19% seulement des
enfants éligibles avaient démarré le TPI.8,17 Ces études
2 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
n’ont cependant pas fourni d’informations sur
l’adhésion au TPI après sa mise en route.
Nous avons entrepris une recherche opérationnelle
dans deux districts de l’Etat du Tamil Nadu dans le sud
de l’Inde afin de déterminer la proportion des contacts
familiaux (âgés de moins de 6 ans) qui ont démarré
puis achevé le TPI et les raisons éventuelles à la fois de
la non initiation et de la non complétion selon la pers-
pective des patients.
THODES
Schéma et contexte
Cette étude transversale a été réalisée dans les districts
de Krishnagiri et Tiruvalur de l’Etat du Tamil Nadu en
Inde du Sud. En 2012, ces districts avaient une popula-
tion de 1,8 et 2,8 millions, respectivement. La majorité
des habitants de ces districts y pratique l’agriculture et
vit généralement en familles nucléaires avec une
moyenne de 4–5 personnes par foyer. Les deux districts
ensemble disposaient de neuf unités de tuberculose du
RNTCP (UTB) couvrant chacune une population de
500.000 personnes.
Après le diagnostic de la TB et l’initiation du trai-
tement, un travailleur paramédical venant du centre de
santé primaire le plus proche rend visite à chaque pa-
tient à son domicile afin de lui offrir ainsi quà sa fa-
mille des conseils en matière de maladie tuberculeuse
et de traitement. Lors de cette visite initiale à domicile,
tous les membres du foyer bénéficient d’une recherche
d’éventuels symptômes de TB. Les personnes sympto-
matiques sont référées à la structure de santé la plus
proche pour une radio pulmonaire et un examen cli-
nique. Après élimination d’une TB active, les enfants
en contact devraient bénéficier du TPI. Les détails
relatifs au dépistage et à la mise en route du TPI sont
notés sur la carte de traitement du patient par les tra-
vailleurs paramédicaux. Tous les patients qui ont eu un
diagnostic de TB et une mise en route du traitement sont
inscrits dans un registre de TB qui est tenu par le per-
sonnel de supervision paramédical au niveau de l’UTB.
Définitions
Les cas index ont été finis comme tous les patients
ayant une TB à frottis de crachats positif inscrits en vue
d’un traitement entre janvier 2012 et juin 2012. Les
membres du foyer ont été définis comme toutes les
personnes qui partageaient de la nourriture provenant
de la même cuisine que le cas index. Pour cette étude,
les enfants membres du foyer ont été définis comme
des enfants âgés de moins de 6 ans et vivant avec le cas
index pendant la durée de leur traitement anti tubercu-
leux (quelle que soit cette durée).
Participants à l’étude et période d’étude
Les participants à l’étude étaient des contacts domes-
tiques des cas index. L’étude a été réalisée entre no-
vembre 2012 et février 2013. Tous les foyers ont été
visités au moins 6 mois après le début du traitement de
chaque cas index, ce qui réduisait l’exposition perma-
nente et le risque de réinfection des contacts et allouait
suffisamment de temps aux participants pour terminer
un TPI complet.
Procédures de recueil de données, sources de
données et variables
Les chefs de district de la Tuberculose et les médecins
de l’UTB ont préparé une liste de tous les cas index à
partir des registres de tuberculose et les cartes de trai-
tement conservées dans toutes les UTB. Comme il
n’était pas possible d’étudier tous les cas index pendant
la durée de l’étude, nous en avons sélectionné environ
la moitié (n = 740) par un échantillonnage aléatoire
simple. Une liste de tous les contacts à domicile a été
élaborée grâce aux cartes de traitement. Pour chaque
contact domestique de la liste, les chefs de district et
les médecins respectifs ont recueilli la date de
l’initiation du TPI, le nombre de doses mensuelles
d’INH distribuées et la durée du TPI (si disponible) à
partir des cartes de traitement dans un dossier séparé de
recueil de données.
Des personnels de terrain formés ont visité les do-
miciles de tous les 740 patients. Durant la visite à do-
micile, un parent a é informé de l’étude et invité à
répondre à un questionnaire structuré. Le questionnaire
a recueilli les informations suivantes à propos du cas
index : âge, sexe, nombre de membres du foyer et des
contacts, résidence en zone urbaine ou rurale, niveau
d’instruction et distance (en km) du centre de santé
primaire le plus proche. Pour les contacts domestiques
des enfants âgés de moins de 6 ans, on a demandé aux
parents de fournir les informations suivantes : âge,
sexe, relation par rapport au cas index, niveau
d’instruction des parents, dépistage de la TB, diagnos-
tic de TB, initiation du TPI, durée de la prise du TPI et
raisons de la non initiation et de la non complétion du
TPI. Les investigateurs principaux ont visité les domi-
ciles de 10% des cas index afin de vérifier et d’évaluer
la qualité des informations recueillies par le personnel de
terrain.
Saisie et analyse des données
Les opérateurs de saisie des données (deux dans
chaque district) ont saisi les données séparément
(double saisie de données). Les deux bases ont été
comparées et toutes les discordances observées ont été
résolues en se référant à l’outil original de recueil des
données pour les finaliser. On a utilisé le logiciel Epi-
Data version 3,1 (EpiData Association, Odense, Dane-
mark) pour entrer et analyser les données. Les fré-
quences et les proportions ont é calculées pour toutes
les variables. Le test v2 de Pearson a permis de compa-
rer les différences en termes de proportions entre les
groupes (par exemple, les personnes ayant débuté le
TPI contre celles qui ne l’ont pas fait). Une valeur de P
< 0,05 a été considérée comme statistiquement signifi-
cative.
Questions éthiques
L’étude a été approuvée par le Groupe Consultatif
d’éthique de l’Union Internationale contre la Tubercu-
lose et les Maladies Respiratoires (Paris, France) et le
Comité Institutionnel d’éthique de l’Institut National
de la Tuberculose (Bangalore, Inde). Un consentement
éclairé a été obtenu des membres du foyer avant les
entretiens. La participation du Center for Disease Con-
Le TPI chez les enfants de Tamil Nadu, Inde 3
trol and Prevention (CDC) des Etats-Unis à ce projet ne
répondait pas à la définition d’un engagement dans une
recherche sur des sujets humains et il n’a pas été néces-
saire d’obtenir une approbation séparée du conseil de
révision institutionnel.
SULTATS
Sur 1513 cas de TB à frottis de crachats positif (cas
index) inscrits entre janvier et juin 2012, 740 cas index
ont été sélectionnés au hasard. Les domiciles de 691
(92,5%) cas index ont été visités parmi lesquels 188
(27%) avaient au moins un enfant contact âgé de moins
de 6 ans (Figure 1). Sur 271 enfants en contact identi-
fiés, 218 (80%) ont été examinés à la recherche d’une
TB par un dispensaire du RNTCP du district ; parmi
eux, neuf (4%) ont eu un diagnostic de TB et ont été
mis au traitement standard à quatre médicaments selon
les directives du RNTCP.16 Sur les 209 contacts res-
tants qui n’ont pas eu un diagnostic de TB, 70 (33%)
ont commencé le TPI. Parmi eux, 12 (17%) ont eu une
semaine de traitement, 16 (23%) ont eu 1–4 semaines
de traitement, 8 (11%) ont eu 1–2 mois de traitement,
18 (26%) ont eu 3–4 mois de traitement et 16 (23%)
ont achevé le protocole complet de 6 mois. Au total,
parmi 271 contacts domestiques âgés de moins de 6
ans, identifiés dans notre étude, seulement 25 (9%)
contacts (neuf enfants chez qui une TB a été diagnosti-
quée et qui étaient liés aux services de traitement et 16
qui ont achevé le protocole complet de le TPI) ont
profité de tous les bénéfices de la politique actuelle de
dépistage des contacts et du TPI (c’est-à-dire le dépis-
tage, l’identification de la TB et la mise en route du
traitement de la TB ou la mise en route du TPI et sa
complétion) (Figure 2).
Figure 1 Enfants âgés de 6 ans identifiés par recherche de
contacts domestiques de patients ayant une tuberculose (TB)
à frottis de crachats positif dans les districts de Krishnagiri et
Tiruvalur, Inde, 2012.
Figure 2 Contacts tuberculeux pédiatriques identifiés, dépis-
tés, initiés au TPI et achevant le traitement dans les districts
de Krishnagiri et Tiruvalur, Inde, 2012. TPI = traitement pré-
ventif par isoniazide.
Les caractéristiques démographiques des contacts et
celles de ceux qui ont initié le TPI figurent au Tableau
1. Les enfants contacts dont les parents étaient des cas
index et ceux dont les domiciles ont été visités par des
travailleurs paramédicaux étaient plus susceptibles de
bénéficier d’une initiation du TPI.
Tableau 1 Caractéristiques des contacts domestiques qui
ont débuté le TPI dans les districts de Krishnagiri et Tiruvalur,
Inde, 2012
Total
Ont débuté le TPI
Valeur
Caractéristique
N
n
(%)
de P
Total
209
70
(33)
Sexe
Masculin
97
36
(37)
0,61
Féminin
112
34
(30)
Age, années
0–1
18
2
(11)
0,07
1–2
39
15
(38)
2–3
38
14
(37)
3–4
36
13
(36)
4–5
46
17
(37)
5–6
32
9
(28)
Niveau d’instruction de la
mère
Non-alphabétisée
49
12
(25)
0,27
Alphabétisée
160
58
(36)
Distance par rapport à la plus
proche structure de santé,
km
<3
107
42
(39)
0,25
>3 à <5
44
12
(27)
>5
58
16
(27)
Relation entre le cas index et
l’enfant
Parent
111
51
(46)
0,001
Autre
98
19
(19)
Visite initiale par un travailleur
paramédical
Oui
140
58
(41)
0,004
Non
69
12
(17)
TPI = traitement préventif par isoniazide.
Echantillonnage aléatoire
simple de cas index pour
leur inclusion dans l’étude
(n = 740 [49%])
domestique âgé de ≤ 6 ans
Cas index avec un
contact âgé de ≤ 6 ans
(n = 188 [27%])
Cas index de TB à frottis
de crachats positif
(N = 1513)
Patients impossibles à
contacter
(n = 49 [6,6%])
Patients ayant eu une visite
et un entretien à domicile
(n = 691 [93.4%])
Nombre total de contacts
domestiques âgés de ≤ 6 ans
(n = 271)
Nombre de contacts do-
mestiques non évalués
pour la TB active et ne
débutant pas le TPI
(n = 53 [20%])
Non initiés au TPI
(n = 139 [67%])
Ont achevé le TPI
(n = 16 [23%])
Nombre de contacts
domestiques évalués
pour la TB active
(n = 218 [80%])
Eligibles pour le TPI
(n = 209 [96%])
Initiés au TPI
(n = 70 [33%])
N’ont pas achevé le TPI
(n = 54 [77%])
Nombre de contacts
domestiques identifiés
(n = 271)
4 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
Tableau 2 Raisons alléguées par les responsables de
l’enfant pour la non initiation et la non complétion du TPI parmi
les contacts domestiques dans les districts de Krishnagiri et
Tiruvalur, Inde, 2012
n (%)
Raisons de la non initiation au TP (n = 139)
Visite à domicile faite mais pas d’information sur le
TPI
85
(61)
Pas de visite initiale par le personnel de terrain
27
(19)
Information sur le TPI mais pas de distribution de
médicament
15
(11)
Médicament distribué mais non mis en route à cause
de la corvée de la prise
12
(9)
Raisons de la non complétion du TPI (n = 54)
Pas de distribution de comprimés d’INH
28
(52)
Longue durée du traitement
15
(28)
Effets secondaires
6
(11)
Déménagement / décès de l’enfant
5
(9)
INH = isoniazide ; TPI = traitement préventif par isoniazide.
Les raisons les plus fréquentes de non initiation et
de non complétion du TPI figurent au Tableau 2.
Quatre-vingt-cinq (61%) contacts n’ont reçu aucune
information sur le TPI au moment de la visite initiale à
leur domicile et 27 (19%) n’ont bénéficié d’aucune
visite à domicile. Parmi les personnes qui ont débuté le
TPI mais ne l’ont pas terminé, 28 (52%) n’ont pas reçu
de comprimés d’INH et 15 (28%) contacts n’ont pas
terminé leur traitement à cause de sa durée de 6 mois.
Pendant l’étude, quand les enquêteurs de terrain ont
visité les foyers pour recueillir des données, ils se sont
enquis du statut actuel des contacts (Tableau 3). Trois
contacts qui n’avaient pas achevé le TPI étaient décé-
dés ; aucun n’avait eu un diagnostic antérieur de TB.
Quarante-cinq contacts se sont avérés présenter des
symptômes suggestifs de TB ; tous ont bénéficié d’une
recherche de TB active dans la structure de santé la
plus proche et cinq enfants qui n’avaient pas reçu le
TPI ont eu un diagnostic de TB et ont débuté un traite-
ment anti tuberculeux standard associant quatre médi-
caments.
DISCUSSION
Dans cette étude, 27% des patients tuberculeux à frottis
positif inscrits en vue d’un traitement dans le cadre du
RNTCP dans deux districts du Tamil Nadu, Inde,
avaient un contact domestique âgé de moins de 6 ans.
Un cinquième de ces contacts n’ont pas bénéficié d’un
dépistage de TB. Parmi ceux examinés, plus de 95%
n’avaient pas de TB et étaient éligibles pour le TPI,
mais seulement un tiers d’entre eux a eu une mise en
route du traitement. De plus, parmi ceux qui ont démar-
ré le TPI, environ 75% n’ont pas eu le traitement com-
plet. Au total, sur les 271 contacts familiaux âgés de
moins de 6 ans, seulement 25 (9%) ont eu tous les
bénéfices de la politique actuelle relative au dépistage
des contacts et au TPI. Ceci incluait seulement deux
enfants sur 18 (11%) âgés de 2 ans, c’est-dire le
groupe exposé au plus grand risque de développer une
TB active.
Cette étude a plusieurs points forts. D’abord, en
plus d’avoir revu les registres du programme, nous
avons validé cette information en visitant les foyers de
plus de 90% des patients tuberculeux et vérifié le statut
du dépistage, de l’initiation du TPI, de la durée de la
prise du traitement et de sa complétion ; ce type
d’investigation n’avait pas encore été réalisé en Inde.
Deuxièmement, l’étude a évalué la mise en œuvre des
directives nationales de recherche des contacts et de
mise en œuvre du TPI dans les conditions d’un pro-
gramme de routine. L’implication active du personnel
du programme tout au long de l’étude a accru la qualité
et la validité des données exposées dans cet article.
Cette étude reflète donc les réalités au niveau du terrain.
Les résultats de l’étude ont eu plusieurs implica-
tions en termes de politique et de programme. En pre-
mier lieu, le dépistage des contacts familiaux et le TPI
dans les foyers des patients atteints de TB à frottis de
crachats positif ont été mis en œuvre de façon insuffi-
sante en dépit des directives nationales et internationales.4
Ceci est cohérent avec les études réalisées antérieu-
rement dans d’autres régions du pays8,17 et à travers le
monde.3,9 Deuxièmement, notre étude a révélé plu-
sieurs problèmes soulevés par les familles des enfants
contacts. La majorité signalait qu’elle n’avait pas reçu
suffisamment d’informations sur les bénéfices du TPI
pour prendre une décision éclairée sur la mise en œuvre
du traitement. Même s’ils n’ont pas été systématique-
ment évalués dans cette étude, ces résultats impliquent
que davantage d’éducation et de suivi des travailleurs
paramédicaux sont nécessaires dans ce contexte. Même
parmi ceux qui ont reçu cette information, plus de la
moitié (52%) n’a pas reçu de médicaments. Ces défail-
lances peuvent s’expliquer, en partie parce que le
personnel du programme lui-me ne comprenait pas
pleinement les bénéfices du TPI dans la prévention de
la maladie chez les enfants, et donc n’en percevait pas
l’urgence, et aussi, jusqu’à un certain point, par les
défis de l’approvisionnement et de la distribution des
Tableau 3 Statut des contacts domestiques au moment de la visite par les enquêteurs de terrain destinée à recueillir des
données sur l’initiation et la complétion de le TPI dans les districts de Krishnagiri et Tiruvalur, Inde, 2012
Décédés
Diagnostic
de TB
Symptômes
suggestifs de
TB
Diagnostic de TB
parmi ceux ayant
des symptômes
Catégorie de contact domestique
n (%)
n (%)
n (%)
n (%)
Dépistés mais non éligibles au TPI (n = 53)
0
0
9 (17)
0
Dépistés et éligibles mais n’ayant pas débuté le TPI (n =
139)
0
0
28 (20)
5 (4)
Débuté le TPI mais pas de complétion du protocole complet
de TPI (n = 54)
3 (6)
0
7 (13)
0
Ont achevé le protocole complet du TPI (n = 16)
0
0
1 (6)
0
TPI = traitement préventif par isoniazide ; TB = tuberculose.
Le TPI chez les enfants de Tamil Nadu, Inde 5
médicaments du TPI aux patients chaque mois.8 Cette
difficulté pourrait également être due à l’absence de
systèmes de suivi de la mise en œuvre. Nos résultats
mettent donc en lumière le besoin urgent d’élaborer et
de mettre en œuvre des outils de suivi et d’évaluation
afin d’apprécier l’initiation et la complétion de le TPI
en Inde.
Troisièmement, près de 10% de tous les non initia-
teurs et 30% des parents des enfants qui n’ont pas
achevé leur traitement ont déclaré que la longue durée
du TPI (chaque jour pendant 6 mois) influençait la non
compliance. Réduire la fréquence ou la durée de la
prise de médicaments pourrait donc améliorer
l’initiation et la complétion du TPI. Chez les adultes,
un nouveau protocole combinant l’INH et la rifapentine
(RPT) administré une fois par semaine pendant 12
semaines sous forme de traitement sous observation
directe (TDO) s’est montré aussi efficace dans la pré-
vention de la TB que les autres protocoles.18 Cepen-
dant, la sécurité et l’efficacité de l’INH-RPT chez les
enfants n’a pas été démontrée et ce protocole n’est
donc pas actuellement recommandé dans ce groupe
d’âge.18 Si les essais cliniques établissent la sécurité,
l’efficacité et la bonne tolérance de cette combinaison
dans la prévention de la TB chez les enfants, ce pour-
rait être une option valable de réduction de la durée du
traitement dans cette population à haut risque, particu-
lièrement dans des contextes où la TB sévit fortement.
D’autres options thérapeutiques potentielles ont é
étudiées pour réduire la durée du traitement. Un proto-
cole à forte dose d’INH (cest-à-dire 2030 kg/kg de
poids, 2 fois par semaine)19 et 4 mois de rifampicine
quotidienne20 ont mis en évidence un taux de complé-
tion plus élevé et des taux plus faibles d’hépato toxicité
que neuf mois d’INH quotidien.21–23
Enfin, cette étude fournit également des informa-
tions sur le statut des contacts familiaux 6 à 9 mois
après le diagnostic du cas index et l’initiation du trai-
tement. Quelques contacts étaient décédés et près de
17% avaient des symptômes suggestifs de TB, parmi
lesquels quelques cas de TB maladie ont été détectés.
Ceci représente une opportunité manquée de lutte
contre la TB et de prévention ; un dépistage régulier et
le TPI pourraient avoir permis une détection précoce de
la TB et prévenu la maladie.
La limite principale de cette étude tient au fait que
les informations relatives au dépistage de la TB, à
l’initiation du TPI et à la complétion du traitement ont
été recueillies grâce à un questionnaire administ aux
parents des contacts familiaux. Les résultats peuvent
donc être biaisés en cas d’oubli de certaines informa-
tions ou de problème de compréhension des questions.
Pour éviter cet écueil, nous avons revu les informations
recueillies dans les registres du programme afin d’en
vérifier la cohérence. L’ampleur des erreurs liées à des
problèmes de mémoire est donc probablement mini-
male.
CONCLUSIONS
Cette étude montre que dans les deux districts du Tamil
Nadu, les directives du RNTP n’ont pas été suivies et la
mise en œuvre de le TPI a été médiocre. Le fait de ne
pas offrir en routine le TPI aux enfants contacts repré-
sente des opportunités manquées de prévention de
futurs cas de TB. Les principales causes de la non ini-
tiation pourraient être corrigés par la formation, une
meilleure logistique et une amélioration de la supervi-
sion et du suivi. De plus, comme la prise quotidienne
de comprimés pendant 6 mois s’est révélée être une
contrainte, des protocoles plus courts, quand ils sont
disponibles, pourraient améliorer à la fois l’initiation et
la complétion du traitement préventif. La décision de
recourir à des protocoles de prévention alternatifs dans
le but d’améliorer l’adhésion au traitement doit être
pesée vis-à-vis du coût potentiellement élevé de distri-
bution de ces médicaments sous observation directe
conformément aux recommandations.
Remerciements
Cette étude a été réalisée dans le cadre du « Operations
Research Training Project » (projet de formation en re-
cherche opérationnelle) visant à un renforcement des capaci-
tés de recherche opérationnelle au sein du Programme natio-
nal révisé de lutte contre la tuberculose en Inde (RNTCP). Ce
projet de formation a été conçu et mis en œuvre conjointe-
ment par la division centrale de la tuberculose (Direction
Générale des Services de san, Ministère de la santé et du
bien-être familial, Gouvernement d’Inde), l’Institut national
de la tuberculose (Direction Générale des Services de santé,
Ministère de la santé et du bien-être familial, Gouvernement
d’Inde, Bangalore, Inde), l’Organisation Mondiale de la
Santé (OMS, bureau d’Inde), l’Union Internationale contre la
Tuberculose et les Maladies Respiratoires (L’Union, bureau
régional d’Asie du Sud-est, New Delhi, Inde) et le « Center
for Disease Control and Prevention » des Etats-Unis (CDC;
Division de l’élimination de la tuberculose, Atlanta, Etats-
Unis). Le soutien financier a été fourni en partie par L’Union
à partir des fonds du projet TB Inde du Fonds Mondial- Série
9 et par l’OMS Inde, par les fonds de l’Agence américaine de
développement international et par la State Health Society du
Tamil Nadu (RNTCP) dans le cadre de la recherche. Les
financeurs n’ont eu aucun rôle dans la conception de l’étude,
dans le recueil de données ni dans leur analyse, la décision de
publier ou la préparation du manuscrit.
Les auteurs remercient le directeur de l’enseignement
médical du Tamil Nadu, les chefs de service de microbiologie
et de médecine communautaire de l’école de médecine ACS
et les enquêteurs de terrain des écoles de médecine ACS
MMC et PES (étudiants PG) pour leur assistance dans cette
étude.
Les opinions exprimées dans cet article reflètent celles de
l’auteur et ne représentent pas les décisions ou les politiques
de l’OMS, de L’Union, du CDC ou de la division centrale de
la TB du RNTCP, Inde.
Conflit d’intérêt : aucun conflit déclaré.
Références
1 World Health Organization. Global Tuberculosis Report
2012. WHO/HTM/TB/2012.6. Geneva, Switzerland:
WHO, 2012.
2 Nelson L J, Wells C D. Global epidemiology of child-
hood tuberculosis. Int J Tuberc Lung Dis 2004; 8: 636
647.
3 Marais B J, Ayles H, Graham S M, Godfrey-Faussett P.
Screening and preventive therapy for tuberculosis. Clin
Chest Med 2009; 30: 827–846.
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