Éducation thérapeutique des patients atteints d'Hypertension Artérielle Pulmonaire Expérience bisontine Florence LACROIX IDE en Hôpital de Jour De Cardiologie Pneumologie Vendredi 14 septembre2012 CONFLIT D’INTERET AUCUN Définition L’HTAP se définit par une élévation de la pression artérielle pulmonaire : PAP moyenne >25mmHg au repos Elle se compose de plusieurs entités classées par l’OMS selon leur physiopathologie, leur présentation clinique et leur prise en charge. L’hypertension artérielle pulmonaire regroupe des maladies des artères de petits calibres caractérisée par une augmentation progressive des résistances vasculaires pulmonaires conduisant à une insuffisance cardiaque droite. L’HTAP fait l’objet d’une classification qui ne cesse d’évoluer depuis 1973. Physiopathologie et anatomopathologie de l’HTAP idiopathique 4 anomalies sont observées : vasoconstriction : déséquilibre au niveau endothélial entre substances vasodilatatrices (prostacyclines, monoxyde d’azote…) et vasoconstrictrices (endothéline, thromboxane A2…) prolifération cellulaire intimale inflammation thrombose Probable prédisposition génétique, et facteurs de risque spécifiques (anoréxigènes, VIH….) Mécanisme Les traitements doivent donc rééquilibrer la balance en s’opposant aux substances qui ferment trop les petites artères du poumon ou en favorisant, voire en les remplaçant, les substances favorables à leur dilatation. Dans l’avenir, on espère trouver des médicaments s’opposant surtout l’épaississement de la paroi pulmonaire en empêchant la prolifération anormale des cellules constituant cette paroi. Épidémiologie Elles sont multiples mais elles aboutissent toutes aux mêmes résultats. On distingue les HTAP dites idiopathiques où on ne retrouve aucune circonstance favorisante, aucune maladie associée. Elle touche 40% des sujets atteints d’HTAP Les HTAP familiales, plusieurs sujets dans la famille sont atteints (4-6% des patients), on connaît la mutation d’un gène: BMPR2 Les HTAP induites par la prise de certains coupe faim ou d’autres substances toxiques (10% des cas) Les HTAP associés à d’autres maladies Les HTAP secondaires Epidémiologie (suite) L’HTAP touche environ 15 personnes par million d’habitants, elle est considérée comme une maladie rare. Elle touche 1,7 femmes pour 1 homme. Le pic de fréquence se situe entre 30 et 40 ans. On compte 2,4 nouveaux cas par million d'habitants (adultes) par an. En 2006 en France, on recensait 1500 patients traités par voie orale et plus de 2000 par voie veineuse, inhalée ou sous cutanée. En Franche Comté depuis 2003, 122 patients ont été pris en charge dans notre centre. Le nombre de malades détectés et pris en charge dans les années à venir va augmenter en raison de la création de réseau de soins permettant un diagnostic plus précoce et un meilleur accès aux soins. Le diagnostic clinique de l’HTAP Il est souvent tardif, délais moyen entre le début des symptômes et le diagnostic de l’ordre de 2 ans environ Brenot et al chest 1994, et Rich et al Ann Int Med 1987 Il repose sur un bilan clinique complet, un interrogatoire à la recherche de problèmes médicaux antérieurs et/ou familiaux et un certain nombre d’examens complémentaires. I. Les symptômes • • • • • • • • • La dyspnée d’effort classée selon la classification de la NYHA, symptôme présent dans 98% des cas La fatigue (70 %) Les douleurs thoraciques (50%) , Lipothymies et syncopes d’effort (40 %), Œdèmes des jambes et des pieds (30 %), Palpitations (30 %), Hémoptysies (10 %), Modification de la voix ( 10 %), Syndrome de Raynaud (10 %) • Dysphonie Le diagnostic d’HTAP (suite) II. Les examens paracliniques : ECG, RxP, EFR, Gaz du sang permettent d’orienter le diagnostic mais ne permettent pas un diagnostic certain. Le test de marche permet de mesurer la distance parcourue en 6 minutes lors de la marche à vitesse normale. Il permet de mesurer les conséquences de la gêne respiratoire et la limitation de l’effort. C’est aussi un moyen simple et fiable pour apprécier l’évolution de la maladie et contrôler l’efficacité du traitement. III. Les examens de référence sont : L’échocardiographie cardiaque est l’examen clé pour faire le diagnostic de dépistage. Le cathétérisme droit est l’examen de référence qui permet de confirmer le diagnostic d’HTAP. Prise en charge thérapeutique de l’HTP. Dana Poi 2008 Anticoagulants oraux (E/B) – HTAPi Traitement de soutien et mesures générales Eviter effort physique im Diurétiques (E/A) Oxygène* (E/A) Digoxine (E/C) Rééducation (E/B) Consultation vers un centre de compétence (E/A) Contraception (E/A) Soutien psychologique/s Prévention des infections Test de vasoréactivité au NO en aigu (A pour HTAP-I) (E/C pour HTAP-A) Vasoréactif Non-Vasoréactif: Recommandations pour Traitement Initial OMS Classe I-IV Nifédipine, amlodipine, diltiazem (B) Niveau de Recommandation A Ambrisentan Bosentan Sildenafil Ambrisentan, Bosentan, Iloprost inh, Epoprosténol IV, Sildenafil Epoprosténol IV Réponse soutenue (OMS I-II) B Sitaxsentan Sitaxsentan, Treprostinil SC Iloprost inhalé Béraprost Treprostinil SC Iloprost IV Treprostinil IV Iloprost IV, Treprostinil IV Traitement combiné initial OMS Classe II C E/B OMS Classe III E/C OUI Ambrisentan, Bosentan, S Sitaxsentan NON N/A Nifédipine, amlodipine, diltiazem (B) OMS Classe Tadalafil + Treprostinil inh+, Tadalafil+ Tadalafil+, Treprostinil inh Réponse clinique insuffisante Traitement combiné séquentiel Prostanoïdes Réponse clinique i Pronostic Il est mauvais car la pathologie est souvent découverte à un stade avancé. Les médianes de survie sans traitement de patients atteints d’HTAP idiopathique sont : • Classe I ou II: 5 ans environ • Classe III: 2 ans et demi • Classe IV: 6 mois Alonso et al Ann Int Med 1991 Il s’améliore avec un diagnostic plus précoce et des traitements efficaces. Le pronostic pour un patient en particulier n’est pas aisé à déterminer car : - chaque personne est unique, - la réponse au traitement est variable d’un sujet à l’autre, - nous ne disposons pas de données sur la survie de patients porteurs d’HTAP avec les traitements actuels. Genèse : Un projet de service L’éducation thérapeutique est une priorité de pôle. Programme d’ETP existant en HDJ depuis fin 2004 avec personnel formé pour la prise en charge des patients atteints d’insuffisance cardiaque chronique. Possibilité d’accueillir 2 patients 2 fois par semaine en HDJ. Un staff multidisciplinaire, multiprofessionnel 1 lundi par mois. Temps d’échanges multidisciplinaires intra et extrahospitaliers Démarche éducative (diagnostic, objectifs..) Évaluation Processus continu, centré sur le patient Intégrée dans les soins Éducation du patient Répond un programme établi au préalable par une équipe multidisciplinaire formée à l’ET Proposée à tous les patients et entourage Collaboration soignant, Soigné et famille Mise en œuvre dès l’annonce du diagnostic Appropriation des connaissances et changement de comportement du patient Composition de l’équipe Infirmière Libérale Infirmières référentes Céline Mélonio Florence Lacroix Centre de compétence multidisciplinaire Cardiologues, Pneumologues, Internistes, Radiologues, Hépatologues… Médecin Traitant Equipe soignante (IDE, AS, Diét, ASH) PATIENT Entourage Assistante Sociale Equipe de Vitalaire Psychologue Soins Palliatifs Secrétaire Kinésithérapeute Recrutement des patients Les patients sont adressés au CHRU par les services de cardiologie ou pneumologie des hôpitaux périphériques ou des médecins libéraux afin de faire le diagnostic de la maladie et d’adapter les thérapeutiques. Le diagnostic établi, une IDE de l’HDJ rencontre le patient avant sa sortie d’hospitalisation, se présente, répond à ses questions éventuelles et lui remet une convocation pour une visite à distance du diagnostic de la maladie en hôpital de jour. L’organisation Le patient est accueilli en HDJ avec son entourage. La prise en charge comporte : Suivi médical : A chaque visite, ECG, prise de constantes, bilan sanguin, examen clinique par le médecin, test de marche effectué par l’IDE puis adaptation des thérapeutiques. Tous les 3 mois : ETT (plus si aggravation de la maladie) Au début : KT Dt et à 1 an pour les HTAP idiopathiques. Suivi infirmier : Rôles de l’infirmière 1. 2. 3. 4. 5. Relationnel Suivi éducatif Soins Techniques Coordination Formation Expérience Bisontine : Pour quels patients ? Population suivie 122 patients répertoriés sur le registre 52 patients suivis actuellement en hôpital de jour cardio-pneumo. Causes : 12 idiopathique, 11 pulmonaire, 10 Eisenmenger, 10 post-emboliques 6 Mixte 3 sclérodermie, 42 décédés, 11 perdu de vue, 2 endartériectomie, 2 greffés pulmonaires (MVO) Population suivie 30 femmes pour 22 hommes Moyenne d’ âge de 62 ans ; le plus jeune 17 ans, la plus âgée 87 ans. NYHA : patients surtout de stade III et IV Traitements Thérapie Nom du traitement Nombre de personnes traitées Monothérapie (21) TRACLEER* REVATIO* VOLIBRIS* ADCIRCA* 12 6 2 1 TRACLEER-REVATIO* 13 TRACLEER-ADCIRCA* TRACLEER-FLOLAN* TRACLEER-PATENT 1 et 2 6 1 1 REVATIO-FLOLAN* 2 ADCIRCA-VOLIBRIS* TRACLEER-TILDIEM(NO) 1 1 TRACLEER-REVATIO-FLOLAN* 3 TRACLEER-REVATIO-VENTAVIS* 1 TRACLEER-REVATIO-REMODULIN* 1 REVATIO-VOLIBRIS-TILDIEM 1 Bithérapie (25) Trithérapie (6) L’évolution Le vendredi 13 Avril 2012 nous avons organisé notre premier après-midi d’informations et d’échanges pour nos patients dans un salon d’hôtel sur Besançon. 20 patients et 19 accompagnants y ont assisté (sur 42 patients suivis en HDJ à ce moment là). Le programme comportait : Une intervention sur la maladie et les différents traitements par les cardiologues et un pneumologue, Une présentation de l’association HTAP France par Mélanie Gallant Dewavrin et Ludivine Chantraine, Un atelier pratique animé par l’équipe de Vitalaire. A l’issue de cet après-midi, les patients nous ont fait part de leur satisfaction mais aussi de leur souhait d’une nouvelle rencontre l’année prochaine. Conclusion L’HTAP est une maladie rare, grave et invalidante au quotidien qui atteint toutes les tranches d’âge avec une prédominance d’adultes jeunes. Toutefois, les traitements actuels en ont modifié le pronostic de façon significative. Notre prise en charge s’oriente donc vers un diagnostic et une adaptation thérapeutique plus précoces afin de ralentir l’évolution de la maladie et de permettre au patient de vivre le plus longtemps possible et le mieux possible. Conclusion (suite) Ceci implique de notre part d’avoir une motivation et un investissement permanent tant pour l’amélioration de nos connaissances, que la formation régulière du personnel soignant, mais aussi l’évaluation de nos pratiques et outils utilisés. Tout ceci dans le but de permettre aux patients de bénéficier d’une prise en charge optimale. Rôle de l’infirmière (1) 1. Suivi relationnel Entretien individuel par IDE, cardiologue et +/- autres intervenants . Bilan partagé : Faire connaissance avec le patient au niveau socio-professionnel, habitat, entourage familial. Reconnaître les ressources, les difficultés du patient et ses priorités. Identifier et comprendre sa détresse, ses émotions et souffrances, l’annonce du diagnostic étant souvent vécue comme un moment brutal, les mots prononcés par le médecin sont entendus mais pas toujours intégrés, car il est difficile de comprendre et d’assimiler une telle nouvelle. Plus le diagnostic est tardif, plus il génère une souffrance anxieuse (exemple : à la fin ma famille me disait : « arrête de t’écouter » mais c’est souvent aussi un soulagement pour le patient d’avoir un diagnostic « ça y est on sait enfin ce que j’ai, à quoi correspondent mes symptômes ». Négociation d’objectifs avec le patient en tenant compte de ses priorités. Ces derniers seront évalués et rajustés dans le temps. Être disponible et ne porter aucun jugement. Suivi tous les mois pour les patients sous prostacycline Tous les 2 mois pour les patients sous ventavis Tous les 3 mois pour les autres. Permanence téléphonique Rôles de l’infirmière 2. Suivi éducatif Apprendre au patient à : Connaître la gravité et la chronicité de sa maladie, Surveiller les signes d’aggravation (prise de poids rapide, OMI, dyspnée et fatigue), Expliquer la nécessité de prendre régulièrement le traitement, Limiter la quantité de sel et de liquide dans l’alimentation, Avoir une activité physique telle que la marche lorsque le temps et l’état de santé du patient le permet, Avoir des périodes de repos, Ne pas vouloir faire d’efforts importants, Éviter toute intervention chirurgicale sous AG (sauf urgence médicale), Éviter les séjours en altitude au dessus de 800 mètres, Se faire vacciner contre la grippe et Pneumo 23, Contre indiquer la grossesse. Rôles de l’infirmière (3) 3. Soins techniques Introduire et augmenter les doses de comprimés prescrits en surveillant les constantes Expliquer au patient : que les médicaments sont délivrés uniquement en milieu hospitalier, qu’il devra les prendre régulièrement, les effets secondaires possibles. Rôle de l’infirmière (4) 3. Soins techniques (suite) Introduction d’un traitement par Prostacycline : Sous forme inhalée : Iloprost=Ventavis* : explication du matériel et mode d’administration par IDE de l’HDJ, puis relais avec IDE de Vitalaire qui rencontre le patient et le suit au domicile. Sous forme IV : Epoprosténol=Flolan* : informations données sur le matériel et la voie d’administration, visualisation du film : « Flolan*, les bons gestes au quotidien », rencontre avec un patient sous Flolan*. Sous forme sous cutanée : Treprostinil=Remodulin* : informations données au patient Rôle de l’infirmière (5) 3. Soins techniques (suite) Programmation de l’hospitalisation en service conventionnel pour introduction du traitement lorsque le patient a donné son accord. Formation des infirmières à domicile du patient par l’équipe de Vitalaire lors de l’hospitalisation du patient, mais formation du patient lui-même dès sa sortie des soins intensifs pour les manipulations de pompe, reconstitution des produits, remplissage des réservoirs... Tout ceci est fait bien entendu en fonction de l’état de santé du patient et à sa vitesse. Lors de la sortie d’hospitalisation, le patient rejoindra son domicile avec au moins 1 semaine de traitement pris au CHU et une ordonnance pour la délivrance du reste du traitement dans l’hôpital périphérique le plus proche du domicile du patient, jusqu’à être revu à 1 mois en HDJ. L’IDE de Vitalaire sera présente au retour à domicile du patient en même temps que les IDE libérales pour la première préparation de produit ; elle le reverra à 3 jours, puis à 1 mois, 3 mois, 6 mois. Les IDE de Vitalaire pourront être bien entendus Rôles de l’infirmière 4. Coordination : Prise en charge multidisciplinaire Permettre au patient : De rencontrer une assistante sociale pour la constitution d’un dossier auprès de la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) afin d’obtenir des aides répondant aux besoins de la personne (ex : l’ aménagement du domicile, carte invalidité, de priorité de stationnement, allocation adulte handicapé...) D’avoir le soutien d’une psychologue (deuil de la bonne santé, perte d’autonomie...) De disposer d’une IDE à domicile pour les soins d’hygiène, bilans sanguins ou soins techniques (si patient sous Prostacyclines : Flolan* ou Remodulin*) pour préparation et administration des produits, mais aussi pour la réfection des pansements. Rôles de l’infirmière Coordination (suite) De rencontrer l’équipe de Vitalaire : pour l’oxygénothérapie si nécessaire, pour le suivi à domicile pour le réapprovisionnement en matériel mais aussi l’éducation lors de la mise sous Prostacyclines. A chaque visite, l’IDE de Vitalaire nous adresse un compte rendu et nous contacte si problème urgent à régler. De rencontrer l’équipe du Centre de référence à l’Hôpital Le Kremlin Bicêtre, De contacter l’association HTAP France par le biais de Mélanie Gallant Dewavrin et Ludivine Chantraine. Rôles de l’infirmière La Formation du personnel soignant par le biais d’un stage dans le service, et/ou par des sessions d’information sur la maladie et les différents traitements.