Synthèse Animation pédagogique Statut de l’erreur – évaluation 05-11-2004 Quelques citations « L’impuissance où l’on est à transmettre le sens en mathématiques… Des individus en parfait état mental sont amenés à produire des textes insanes malgré eux, en dépit de ce qu’ils sont capables de comprendre. Et ces textes insanes, il est temps de leur faire face, pour se demander comment un système d’enseignement a pu contraindre ceux qu’il enseigne au point de faire dire que : oui, le capitaine a 36 ans parce qu’il a 26 moutons et 10 chèvres sur son bateau… » Stella Baruk « A toute erreur des sens correspondent d’étranges fleurs de la raison » Louis Aragon Les fonctions de l’évaluation Dans le système éducatif, l’évaluation possède deux types de fonctions, les unes sociales, externes au système proprement dit, les autres internes, à visée pédagogique. a. Les fonctions sociales Le rôle le plus connu et le plus usuel est celui de certification ou de sélection b. Les fonctions pédagogiques L’évaluation informe l’élève mais doit aussi viser à la régulation des apprentissages. Elle doit stimuler la motivation et non la faire décroître. L’évaluation doit informer l’enseignant afin de lui permettre d’adapter en conséquence ses objectifs et ses méthodes. On peut la concevoir comme une régulation de la conduite de l’enseignement dans le cas d’une évaluation dite formative. Toute réflexion sur l’évaluation conduit à une explicitation des buts de l’action éducative (objectifs, finalités, contenus disciplinaires…) Les diverses catégories et formes de l’évaluation a. L’évaluation prédictive ou diagnostique Le but est ici de faire un bilan avant d’entamer un apprentissage (évaluations nationales CE2 / 6ème). On tient à mettre en évidence les compétences déjà acquises ou non par les élèves ou de discerner les niveaux d’habiletés des enseignés. b. L’évaluation sommative Là encore il s’agit de faire un bilan des acquis des élèves mais cette fois à la fin d’un apprentissage. Cependant, on trouve ici l’aspect certification de l’évaluation et le but est de classer, sélectionner, différencier. C’est la forme d’évaluation la plus courante et elle est présentée la plupart du temps sous forme d’une appréciation définitive bien souvent vécue comme une sanction (ou récompense). Christophe Baderot CPC généraliste A.P. statut de l’erreur – évaluation 05-11-2004 1 Ce type d’évaluation, s’il est majoritaire dans la démarche de l’enseignant, peut induire des comportements déviants, les élèves recherchant la performance au détriment de la compétence, des contenus et des processus… De plus si elle permet d’identifier les difficultés, elle n’offre pas de remédiation possible et ne renseigne nullement sur les raisons des erreurs ou réussites. (ce n’est d’ailleurs pas son but.) c. L’évaluation formative Elle positionne l’élève, le groupe par rapport à des savoirs, des savoir-faire et des savoir-être concrets ; elle renseigne l’élève régulièrement sur les niveaux atteints, les objectifs à atteindre. Elle doit susciter et permettre l’appropriation par l’élève de son enseignement en jouant le rôle d’aide et de régulation au cours de l’apprentissage. L’évaluation formative fait partie intégrante des processus d’enseignement et devient ainsi moyen pédagogique . Elle renseigne l’élève sur son degré de maîtrise des objectifs opérationnels fixés, tout en l’aidant à comprendre le comment et le pourquoi des choses. L’évaluation formative se trouve être le premier moment de la pédagogie différenciée et le moyen essentiel de la régulation de l’action pédagogique. Seul l’élève peut corriger ses erreurs … avec l’aide de l’enseignant, d’outils… Bien qu’ayant des fonctions différentes et se situant à des moments propres, ces trois catégories d’évaluation devraient se compléter si l’on a bien conscience de ce qu’on cherche à évaluer. (schéma de synthèse ci-dessous) - - - prédictive ou diagnostique formative sommative - avant pendant après - prestation, réalisation observation auto-description - POURQUOI QUOI QUAND POUR QUI COMMENT EVALUER PAR QUI - - - Christophe Baderot CPC généraliste Produit de la formation : la performance Processus de la formation : La manière de faire Les élèves Les enseignants Les parents L’institution INTERNE : enseignant élève auto-évaluation EXTERNE : examen parents employeur A.P. statut de l’erreur – évaluation 05-11-2004 2 Des éléments pour une démarche possible - - Définir les types d’obstacles auxquels peuvent être confrontés les élèves au cours d’un apprentissage. Lister avec les élèves les « familles d’erreurs » constatées et provoquées par les obstacles précités. Définir, construire puis afficher ou donner individuellement des outils méthodologiques (démarches de raisonnement, grilles d’évaluation répertoriant la typologie des erreurs…) Définir avec l’élève ou lui proposer un contrat / parcours personnalisé de travail lui permettant de surmonter un obstacle particulier auquel il est confronté. (Ceci suppose de la part de l’enseignant de « réagir vite », d’être doté de ressources nombreuses, disponibles, variées et facilement exploitables (fichiers auto-correctifs, référentiels de compétences et des exercices correspondants codés pour une utilisation plus rapide) Définir les moyens d’aide pour le domaine concerné (enseignant, camarade, cahier de règles…) Définir, si possible avec l’enfant, les connaissances « utiles » ou nécessaires pour surmonter l’obstacle auquel il est confronté. Définir, donner des critères de réalisation / réussite concernant la tâche à réaliser. faire preuve d’une clarté d’apprentissage (que l’élève sache ce qu’il apprend, comment…) « La prise en compte de l’erreur est en réalité, en pédagogie, la meilleure manière de combattre l’échec…Car il n’est de pédagogie de la réussite que celle des erreurs rectifiées. » Philippe Meirieu Pourquoi tant d’erreurs ? Les raisons sont multiples, en voici quelquesunes : - - La volonté de satisfaire l’institution représentée par l’enseignant qui s’il donne un problème d’apparence mathématique en attend une réponse (qui existe nécessairement) et de préférence une réponse mathématique. Une analyse erronée des informations, l’élève ne sachant donner du sens au texte. Le manque d’esprit critique et d’initiative qui empêche d’imaginer une réponse considérée « hors norme » (car en butte aux schèmes familiers.) La peur de ne savoir justifier une telle réponse. L’habitude d’associer des données numériques. Les grands types d’erreurs 1. Les erreurs relatives à la situation La situation est nouvelle (rupture avec les habitudes et les nouvelles exigences) au niveau de : - la présentation de l’exercice - le support est nouveau (document, manuel, dictionnaire…) - le contexte ne parle pas à l’élève - la tâche et la consigne (justification, QCM, situation ouverte ou fermée…) - le langage (terminologie) est insuffisamment maîtrisé par les élèves La situation est connue - la réflexion (analytique ou synthétique) ou le raisonnement (inductif ou déductif…) sont mal maîtrisés par l’élève. Christophe Baderot CPC généraliste A.P. statut de l’erreur – évaluation 05-11-2004 3 - l’élève se construit une représentation erronée de la tâche. La situation est connue mais impose des contraintes fortes - un temps limité ou des exercices trop nombreux (difficulté à gérer le temps). - divers apprentissages doivent être mobilisés en même temps. - la tâche comporte un degré de complexité supérieur - une présentation contraignante - une demande de production originale 2. Les erreurs relatives à la consigne La formulation : - ambiguë, mal formulée - le vocabulaire employé est inconnu (sur le plan mathématique, géographique, scientifique…) - la consigne est double ou contient une négation… reformuler, prendre le temps, présenter de diverses manières, expliciter La compréhension : - difficulté de lecture (ponctuation, impossibilité d’oraliser, mots faisant obstacles…) - lecture/ compréhension partielle (mauvais tri des infos, prise en compte du secondaire, substitution de mots, lapsus sur certains mots, invention d’une consigne à l’appui de quelques mots…) Reformuler autrement / à l’oral, identifier les éléments importants, ébaucher la démarche L’attitude par rapport à la consigne : - manque d’autonomie - manque ou excès d’anticipation - oubli de la consigne en cours de tâche. Aider le questionnement, faire représenter mentalement les actions, donner l’habitude de relire avant d’exécuter Les erreurs relatives aux opérations intellectuelles à mettre en jeu Le niveau des opérations apprises : - La répétition qui fait appel à la mémoire et permet de reproduire, copier, réciter - La conceptualisation permet d’abstraire pour trier, réunir, analyser, classer - L’application permet de décontextualiser pour utiliser des règles et des connaissances en les transférant à d’autres activités. Le niveau des opérations exigeant une initiative : - L’exploration qui consiste à observer, prélever, inventorier, chercher, imaginer - La mobilisation permet de chercher dans ses propres acquis, références. - La résolution de problèmes exige de transférer des connaissances propres à une situation connue à une situation en partie ou totalement nouvelle. Les erreurs relatives aux acquis antérieurs Le savoir n’est pas acquis : L’élève a été absent ou n’a pas su se l’approprier. Le savoir a été acquis mais de manière incorrecte ou partielle : - l’apprentissage s’est construit sur des représentations erronées - la connaissance est partielle et lacunaire Le savoir a été acquis mais est insuffisamment consolidé : - l’apprentissage a été superficiel et la phase d’entraînement a été négligée. La maîtrise trop superficielle ne permet pas un transfert. Christophe Baderot CPC généraliste A.P. statut de l’erreur – évaluation 05-11-2004 4 Les dérives possibles • • Il convient de bien distinguer performance et compétence L’évaluation doit rester une relation personnalisée, de l’enseignant à l’élève (et à sa famille) et n on une présentation publique devant toute la classe. • L’évaluation peut servir à des fins « discutables » (maintien de l’ordre, incitation au travail) • L’évaluation ne peut pas répondre à tous les questionnements, aussi élaborée soit-elle. De plus, l’évaluation n’est pas tout : l’obsession du thermomètre n’a jamais fait baissé la température. • L’évaluation peut parfois « briser » des élèves. • On ne peut pas évaluer tout en même temps, il faut faire des choix précis. On ne peut pas tout évaluer avec des outils identiques (alternance entre tests, QCM, productions, observations…) • Veillez à ne pas évaluer à l’écrit ce qui a été enseigné oralement ou relève de l’oral. • Veillez à bien choisir la situation pour ne pas évaluer autre chose que ce que l’on souhaite évaluer. En conclusion Pour les élèves ayant des difficultés (et les autres aussi…) : • L’enseignant doit pouvoir se rendre disponible • L’enseignant (et l ’élève) doit essayer de comprendre les erreurs commises • L’évaluation ne doit pas être permanente et peut se faire sous forme simple (observation) • On ne peut évaluer tout en même temps, il faut faire des choix précis et ne pas mélanger / amalgamer des compétences variées. • L’évaluation diagnostique/sommative (de fin de période ou d’apprentissage) est la même pour tous • L’évaluation formative (continue) peut / « doit » être différente selon les élèves et leurs difficultés • Les tâches proposées peuvent / doivent donc être différenciées. • L’enseignant doit pouvoir contrôler ce que font les élèves, les élèves aussi. • L’enseignant et les élèves doivent être dotés d’outils. • L’évaluation est une activité qui doit s’exercer au profit de ceux sur qui elle s’exerce (les élèves). 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