
PAIN: CLINICAL UPDATES • DECEMBRE 2013 5
pour modeler les critères du DSM pour
satisfaire à l’état de dépendance ou
l’addiction chez les patients douloureux
ont été largement inutiles et même
préjudiciables.
Avant les années 50, l’addiction
était considérée comme une faiblesse
de caractère ou de contrôle, pas
comme une pathologie médicale. A
cette époque, la compréhension de la
neurobiologie de l’addiction était rudi-
mentaire, et l’existence des systèmes
opioïdes endogènes était seulement
imaginée. Dans les années 50, les
critères pour l’addiction étaient recher-
chés dans le but de le médicaliser et
faciliter le traitement. Le premier DSM
(Diagnosis and Statistic Manual) de
l’Association Américaine de Psychiatrie
(APA - American Psychiatric Associa-
tion), publié en 1952, regroupait l’abus
d’alcool et de substances sous le terme
Perturbation de la Personnalité de type
Sociopathique et ne reconnaissait pas
le rôle clé de la tolérance et du manque
dans l’addiction médicamenteuse. Ce
n’est qu’à partir du DSM-III en 1980 que
la tolérance et le manque ont été inclus
comme critères en même temps que
des facteurs sociaux et culturels. Cette
édition était aussi la première à utiliser
formellement le terme de «dépen-
dance» pour indiquer l’addiction à un
médicament. La «dépendance» est
distinguée de l’«abus», qui est une
utilisation maladaptée sans tolérance,
manque, ou schéma d’utilisation
compulsive. Le lecteur verra facile-
ment que la définition de ces termes
dans le DSM-III et le DSM-IV (reflé-
tant la Classification Internationale
des Maladies - CIM) n’est pas la même
que celle habituellement comprise en
anglais familier.17,18 Cette différence
en soi produit plus de confusion. Au
cours des années, plusieurs mots ont
trouvé leur voie dans et en dehors de la
nosologie de l’addiction, dont les termes
«habituation», «mésusage», «abus»,
«dépendance», et «addiction». Le mot
«addiction» dans les définitions médi-
cales a été évité récemment en raison
de ces connotations associés. Ce qui est
particulièrement problématique dans
le choix du terme «dépendance à une
substance» pour décrire l’addiction à
un médicament est que cela produit de
la confusion lorsque cela survient pour
traiter la douleur avec des opioïdes,
parce que les patients douloureux trai-
tés en continu peuvent être considéré
comme étant dépendants (i.e., avoir des
difficultés à interrompre un traite-
ment) mais ne sont pas nécessairement
addicts (i.e., recherche compulsive de
médicament).
Les nouvelles définitions pour
l’addiction médicamenteuse ont été
publiées par l’APA en mai 2013 dans le
DSM-V.19 Deux changements signi-
ficatifs ont été réalisés, à l’égard des
problèmes vécus, pour conceptualiser
la dépendance et l’addiction lorsqu’ils
apparaissent chez des patients doulou-
reux traités par opioïdes. Le premier
changement a été d’abandonner le
terme «dépendance à une substance»,
qui a été utilisé à la fois dans le DSM-III
et le DSM-IV pour indiquer l’addiction
à un médicament.17 Dans le DSM-V, la
«dépendance à une substance» a été
remplacé par des termes comme «trou-
ble de l’utilisation d’une substance» et
«trouble de l’utilisation d’un opioïde».
Tableau I
Un modèle maladaptatif d’utilisation de substance conduisant
à une détresse ou un handicap signicatif, se manifestant par
deux ou plus des critères suivants : Comportements suggérant l’abus de médicaments prescrits
• Échec à satisfaire à des obligations majeures lié à un rôle au
travail, à l’école ou à la maison
• Utilisation poursuivie dans des situations dans lesquels cela
est physiquement hasardeux (e.g., conduire)
• Problèmes interpersonnels ou sociaux récurrents ou persis-
tants
• Substance prise en grande quantité ou plus longtemps que
cela n’était prévu
• Envie persistante et effort infructueux pour s’arrêter
• Énormément de temps passé dans des activités nécessaire
pour obtenir la substance, utiliser la substance, ou récupérer
après l’utilisation de la substance
• Abandon et réduction d’activités de détente, professionnelles,
ou sociales importantes
• Utilisation continue malgré la connaissance des dégâts
• Envie irrésistible
• Prescripteurs multiples
• Fréquentes consultations aux urgences
• Intolérances à de multiples médicaments décrits comme « al-
lergie » et refus de poursuivre des traitements non-opioïdes
• Escalade posologique fréquente et auto-escalade des doses
• Cessation rapide fréquente de médicament
• Fréquents appels aux cabinets de consultation
• Focalisation principalement sur les avantages des médica-
ments opioïdes au cours des consultations
• Perte répétée de prescription avec des excuses « classiques
» comme le chien a mangé mon ordonnance, la compagnie
aérienne a perdu mes bagages, les médicaments ont été volés
Critères comportementaux utilisés pour les troubles de l’utilisation de
substances, Manuel de Diagnostic et Statistique des Pathologies Men-
tales, 5ème édition (DSM-V).9
Adapted from Wilsey and Fishman.24