La formule des traces de Lefschetz-Verdier
Rencontre ARIVAF 4 - Exposé (4), Cédric Pépin
1 Correspondance de Frobenius géométrique
1.1. Soient pun nombre premier, mun entier 1,q:= pm.Onposek:= Fqet on fixe une clôture
algébrique kde k.Onnoteavecunebarrelesobjetssurkobtenus à partir d’objets sur kpar le changement
de base k!k.
1.2. Soient f:X!Spec(k)un k-schéma. Le m-ième itéré du Frobenius absolu de Xcoïncide avec le
m-ième itéré du Frobenius relatif de Xsur k.OnnoteFX/k ce k-endomorphisme de X.SoitLun faisceau
sur X,quelonidentieauX-espace algébrique étale qui le représente. On a
L
FL/X
FL
""
F
X/kL(FX/k )L//
L
XFX/k//X
au-dessus de
L
FL/X
!!
FL
##
F
X/kL(FX/k )L//
L
XFX/k //X.
Comme Lest étale sur X,leFrobeniusrelatifFL/X est un isomorphisme (puisque c’est alors un homéo-
morphisme universel étale). En particulier, FL/X définit un X-isomorphisme
FL/X :L//F
X/kL=F
X/kL.
Définition 1.3. La correspondance de Frobenius géométrique sur Lest le couple (FX/k, FL/X
1).
1
Définition 1.4. L’ opération de Frobenius géométrique sur R(X,L)est la composée
RfL//RfF
X/kLRf(FL/X
1)//RfL
R(X,L)//R(X,F
X/kL)R(X,FL/X
1)
//R(X,L)
où la première flèche est la composée canonique
RfL//RfRFX/kF
X/kL RfF
X/kL.
1.5. L’opération de Frobenius géométrique induit des opérations sur les groupes de cohomologies, et
celles-ci s’étendent aux Z`-etQ`-faisceaux.
2 La formule des traces pour un schéma propre
2.1. Soient pun nombre premier, mun entier 1,q:= pmet `un premier diérent de p.
Théorème 2.2 ([SGA 41
2]3.2).Soient Xun schéma propre sur Fqet Lun Q`-faisceau constructible sur
X. Alors :
X
i
(1)iTr (FX/k, FL/X
1),H
i(X,L)=X
x2X(Fq)
Tr FL/X
1, Lx.
2.3. Pour L=Q`,onaFL/X =Idet le terme de droite égale le cardinal de X(Fq).
2.4. Il existe une version de cette formule au niveau fini, c’est-à-dire dans laquelle les coecients `-adiques
sont remplacés par des coecients de torsion. La formule au niveau fini entraîne la formule `-adique par
passage à la limite ([SGA 41
2] 4.13). Cependant, des groupes de cohomologie à valeurs dans des faisceaux
de torsion ne sont en général pas libres, et il faut donc commencer par donner un sens au terme de gauche
de 2.2 dans ce cas. Ceci est possible grâce aux propriétés du complexe R(X,L).
2.5. Soient nun entier 1et :=Z/`n.OnnoteKparf la catégorie dont les objets sont les complexes
bornés de -modules libres de type fini, et dont les morphismes sont les classes d’homotopie de morphismes
de complexes. On note Dla catégorie dérivée des -modules et Dparf l’image essentielle du foncteur
pleinement fidèle naturel
Kparf ! D.
Lemme 2.6 ([SGA 41
2]4.5.1).Soit P2Ob D. Alors P2Ob Dparf si et seulement si Pest de Tor-
dimension finie à cohomologie de type fini.
Théorème 2.7 ([SGA 41
2]4.9).Soit Xun schéma propre sur un corps séparablement clos. Soit Lun
faisceau de -modules sur X, plat et constructible. Alors R(X,L)2Ob Dparf .
Démonstration. Les Hi(X,L)sont nuls pour i>2dim(X)d’après le théorème d’annulation, et de type
fini d’après le théorème de finitude. De plus R(X,L)est de Tor-dimension 0:celasevoitsurla
formule de Künneth
R(X,L)LM= R(X,LLM),
puisque LLM=LMd’après l’hypothèse de platitude sur L.Lelemme2.6conclut.
2.8. Ceci étant, la trace d’un endomorphisme de R(X,L)(par exemple la trace de l’opération de
Frobenius géométrique 1.4) est dénie au moyen du lemme suivant.
Lemme 2.9. Pour tout P1,P22Ob Dparf , posant DP1:= RHom(P1,), on a un isomorphisme cano-
nique
RHom(P1,P
2)//DP1LP2.
2
Démonstration. On peut supposer P12Ob Kparf ,desorteque
RHom(P1,P
2) = Hom·(P1,P
2),DP
1= Hom·(P1,)et DP12Ob Kparf .
Il s’agit alors de construire un isomorphisme
Hom·(P1,P
2)//Hom·(P1,)P2.(1)
Comme P12Ob Kparf ,ondisposedisomorphismescanoniques
cani,j : Hom(Pi
1,Pj
2)//Hom(Pi
1,)Pj
2
et on définit (1) en degré d2Zpar
Lj=i+d(1)icani,j :Lj=i+dHom(Pi
1,Pj
2)//Li+j=dHom(Pi
1,)Pj
2.
Le choix des signes (1)iest fait pour rendre ces flèches compatibles aux diérentielles des complexes
Hom·(P1,P
2)et Hom(P1,)P2.
Définition 2.10 ([SGA 6] I 8.1).Pour tout P2Ob Dparf , on appelle trace l’homomorphisme de -
modules
Tr(·,P) : Hom(P, P)////
obtenu en appliquant H0à la composée
RHom(P, P)//DP LP//,
la première flèche étant l’isomorphisme 2.9 et la seconde l’évaluation.
2.11. Si uest un endomorphisme d’un complexe Pde Kparf ,onadonc
Tr(u, P )=X
i
(1)iTr(ui)
où les traces du second membre sont les traces usuelles d’endomorphismes de -modules libres de type
fini, et Tr(u, P )ne dépend que de la classe d’homotopie de u.
2.12. Rappelons par ailleurs que les germes d’un faisceau de -modules plat sont plats (cf. [SGA 4] V
1.6 1)), et donc libres de rang fini s’ils sont de type fini. La trace d’un endomorphisme d’un germe est
alors bien définie.
Théorème 2.13 ([SGA 41
2]4.10).Soient Xun schéma propre sur Fqet Lun Z/`n-faisceau sur X, plat
et constructible. Alors :
Tr (FX/k, FL/X
1),R(X,L)=X
x2X(Fq)
Tr FL/X
1, Lx.
2.14. La suite de cet exposé est consacrée à la méthode de Artin et Verdier fournissant une démonstration
de 2.13 lorsque Xest une courbe propre et lisse. La première étape est la formule de Lefschetz-Verdier
exprimant le membre de gauche en termes locaux, valable pour un Fq-schéma propre quelconque. La
seconde étape est le calcul des termes locaux dans le cas d’une courbe propre et lisse.
3 Formules de Künneth
3.1. Soient Sle spectre d’un corps, `un nombre premier inversible sur S,nun entier 1et :=Z/`n.
Pour un morphisme séparé de type fini f:X!S,ocrirasouventf,f!et f!au lieu de Rf,Rf!
et Rf!.Sifest lisse de dimension d,alorsf!=f(·)(d)[2d]par dualité de Poincaré. On note D(X)
la catégorie dérivée des faisceaux de -modules sur Xet Dctf (X)la sous-catégorie pleine de D(X)
formée des complexes isomorphes dans D(X)àuncomplexebornédefaisceauxde-modules plats et
constructibles.
3
3.2. Le lemme 2.6 et le théorème 2.7 se généralisent comme suit : un objet de D(X)est un objet de
Dctf (X)si et seulement si il est de Tor-dimension finie à cohomologie constructible ([SGA 41
2]4.6);si
f:X!Yest un morphisme de S-schémas séparés de type fini, alors f!Dctf (X)Dctf (Y)(loc. cit.
4.5.1). On a par ailleurs fDctf (Y)Dctf (X),etfDctf (X)Dctf (Y),f!Dctf (Y)Dctf (X)d’après les
théorèmes de finitude de [SGA 41
2] [Th. finitude] (cf. loc. cit. 1.7).
3.3. Le lemme 2.9 admet la généralisation fondamentale suivante :
Théorème 3.4 ([SGA 5] III 3.1.1).Soit un carré cartésien de S-morphismes séparés de type fini
X
p1
~~
p2
X1
f1
X2
f2
~~
S.
Pour tout Li2Ob Dctf (Xi), posant KX1:= f!
1et DL1:= RHom(L1,K
X1), on a un isomorphisme
canonique
RHomS(L1,L
2)//DL1L
SL2
avec
RHomS(·,·) := RHom(p
1(·),p
!
2(·)) et (·)L
S(·):=p
1(·)Lp
2(·).
3.5. Signalons simplement que ce théorème est une conséquence des formules de Künneth suivantes, qui
nécessitent [SGA 41
2] [Théorème de finitude] 1.9.
Théorème 3.6 ([SGA 5] III 1.6.4 et 1.7.3).Soient un diagramme de S-morphismes séparés de type fini
X1
f1//Y1
X1SX2
OO
f=f1Sf2//Y1SY2
OO
X2
f2//Y2
et Li2Ob Dctf (Xi),Mi2Ob Dctf (Yi). On a des isomorphismes de Künneth
f1L1L
Sf2L2
//f(L1L
SL2)(2)
f!
1M1L
Sf!
2M2
//f!(M1L
SM2).(3)
4 Correspondances cohomologiques
4.1. Les notations sont celles de 3.1.
4.2. Soient un carré cartésien de S-morphismes séparés de type fini
X
p1
~~
p2
f
X1
f1
X2
f2
~~
S
et Li2Ob Dctf (Xi).
4
Définition 4.3. Les éléments de
HomS(L1,L
2):=H0X, RHomS(L1,L
2)= Hom(p
1L1,p
!
2L2)
sont les correspondances cohomologiques de L1àL2.
4.4. Soient c:C!Xune immersion fermée, c1,c2les morphismes obtenus par composition avec p1,
p2:
C
c1
c
c2
X
p1
~~
p2
!!
X1X2.
Définition 4.5. Les éléments de Hom(c
1L1,c
!
2L2)sont les correspondances cohomologiques de L1àL2
àsupportdansC.
4.6. D’après la formule d’induction [SGA 4] XVIII 3.1.12.2, on a un isomorphisme canonique
c!RHom(p
1L1,p
!
2L2)//RHom(c
1L1,c
!
2L2)
d’où, grâce à l’adjonction cc!!Id, une flèche
Hom(c
1L1,c
!
2L2)//HomS(L1,L
2).
4.7. Soient F:X2!X1un S-morphisme et c:C:= Im(F, Id) !Xson graphe, définissant un
diagramme
C
c1
c
c2
X
p1
~~
p2
!!
X1X2.
F
oo
En identifiant CàX2via l’isomorphisme c2,onobtient
RHom(c
1L1,c
!
2L2) = RHom(FL1,L
2)
Hom(c
1L1,c
!
2L2) = Hom(FL1,L
2).
Par exemple, pour X1=X2=T,L1=L2=L,
12Hom(L, L)
définit la correspondance diagonale sur Là support dans la diagonale de TST
1
2
TST
p1
{{
p2
##
TT.
Ave c l es nota t ions de l a s e ctio n 1 , p ou r X1=X2=X,L1=L2=L,
FL/X
12Hom(F
X/kL, L)
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