La thermochronologie Principe de base : une réaction nucléaire naturelle mène à la production d’un élément ou isotope ‘fils’ (N ) par dégénérescence d’un isotope ‘père’, (P ). ∂P = −λP ∂t P (t = 0) = P0 Père Fils 87Rb 87Sr 235-238U-232Th 206-8Pb 147Sm 40K 39Ar 176Lu P = P0 e−λt 143Nd 40Ar 40Ar 176Hf Or, puisque N = P0 − P , N = P (eλt − 1) t = 1/λ ln[N/P + 1] + 4He Si nous définissons l’âge d’une roche comme le temps (dans le passé) à partir duquel la réaction nucléaire à commencé, nous pouvons le calculer à partir de la concentration présente de père et de fils (et de la connaissance de la constante de dégénérescence, λ). Notons que l’on introduit également la notion de ‘demi-vie’, t1/2 pour caractériser une réaction nucléaire spontannée : t1/2 = −(1/λ) ln(1/2) COMMENTAIRES/NOTES Température de fermeture On peut sans doute considérer que l’âge d’une roche est simplement l’âge de sa formation, c’est-à-dire de sa crystallization. Cependant, l’isotope fils peut s’échapper de la roche où il a été produit par diffusion (à l’état solide). Cette diffusion est fonction (exponentielle) de la température. Ainsi on définit la température de fermeture comme la température en deçà de laquelle la diffusion de l’isotope fils est négligeable. L’âge d’une roche peut alors être défini comme le temps dans le passé auquel la roche a été refroidie à une température inférieure à la température de fermeture. C’est de là que vient le concept de ‘thermochronologie’, c’est-à-dire de la datation de l’histoire thermique d’une roche. COMMENTAIRES/NOTES Diffusion à l’état solide Sample 87 JK 127 Sierra de los Filabres, S. Spain 27.4+0.9 29.0+0.5 27.7+0.9 28.7+1.7 30.2+0.9 26.7+1.0 31.9+1.9 30.5+0.7 31.2+4.9 30.9+1.3 32.6+6.5 31.4+0.9 29.8+0.8 Le phénomène de diffusion de l’isotope fils peut se représenter par l’addition d’un terme de diffusion dans l’équation d’évolution : 30.1+0.3 30.9+0.6 27.8+1.4 28.4+0.6 28.6+1.4 27.2+1.1 24.3+2.2 ∂N = λ(P0 − N ) + D(T )∇2 N ∂t D0 Ea D(T ) = 2 e− RT a 28.7+1.7 où D0 est une constante de diffusion, a est la taille du domaine de diffusion (grain), R est la constante des gaz parfaits, Ea est l’énergie d’activation et T est la température. Les paramètres D0 /a2 et EA sont déterminés en laboratoire. 26.2+0.8 Integrated Age: 29.3 + 0.2 Ma 0 0.5 1.0 mm COMMENTAIRES/NOTES Apparent Age (Ma) 34 Plateau Age: 29.5 + 0.1 Ma 30 26 22 0 0.2 0.4 0.6 Fraction 39Ar released 0.8 1.0 Températures de fermeture Système Isotopique Minéral 40Ar/39Ar Mica 350-375 Biotite 280-330 K-Feldspath 150-300 Sphène 280-320 Zircon 200-240 Apatite 100-120 Zircon 160-200 Farley, 2000, J. Geophys. Res., 105, 2903–2914; Apatite 40-75 Ehlers & Farley, 2003., Earth Planet. Sci. Lett. 206, 114 Traces de Fission (U/Th)-He Tc (°C) Référence McDougall & Harrison, 1988. Geochronology and thermochronology by the 40Ar/39Ar method, Oxford Univ. Press Wagner & Van den haute, 1992. Fission Track Dating, Kluwer Ac. Publ. On peut montrer que pour des systèmes qui se refroidissent de façon monotonique, la température de fermeture est proportionnelle au taux de refroidissement, ∂T ∂t : Tc = Ea 0 R ln(Aτ D a2 ) τ =− RTc2 Ea ∂T ∂t COMMENTAIRES/NOTES Datation par traces de fission Accumulation of spontaneous fission tracks Polished section through crystal surface confined spontaneous tracks etched external mica detector attached irradiation by thermal neutrons: Il existe une autre méthode très usitée de thermochronométrie : la datation par traces de fission. Cette dernière est basée sur la mesure de la densité de ‘traces’, c’est à dire d’imperfection causées par la fission de l’238 U qui génère des particules à haute énergie. Celles-ci crèent un sillage linéaire de dommages ioniques dans la structure cristalline de la roche. Ces sillages ou ‘traces’ peuvent être amplifiés par une réaction chimique effectuée sur la surface polie de la roche. En comptant le nombre de traces de fission, on peut également obtenir un âge pour la roche, car les traces de fission s’annihilent (disparaissent) lorsque la roche se trouve à une température supérieure à l’équivalent d’une température de fermeture d’un système classique. induced fission tracks registered in detector COMMENTAIRES/NOTES induced tracks etched only in detector 0 100 µm Détermination du taux d’érosion Tc T La thermochronologie est souvent utilisée pour déterminer le taux d’érosion. En effet, vu du point de vue d’une roche initialement à une profondeur z, l’érosion apparaı̂t comme un rapprochement de la surface froide, et donc cause un refroidissement. Si le gradient géothermique (augmentation de la température avec la profondeur) est linéaire, l’âge d’une roche peut être utilisé pour en déduire le temps de passage de la roche à une température donnée (la température de fermeture) et donc à une profondeur donnée. Le taux d’érosion, ∂z ∂t , peut donc être obtenu à partir du rapport entre cette profondeur, zT , et l’âge de la roche, aT . Ainsi : ∂z zT Tc = = ∂t aT aT G où G est le gradient vertical de température : G= zT La thermochronologie peut donc être utilisée pour mesurer le taux d’érosion local. COMMENTAIRES/NOTES z ∂T ∂z Déterminer la vitesse de convergence tectonique 0°C v 35 km 500°C COMMENTAIRES/NOTES 45° 45° En supposant qu’un équilibre a été atteint entre l’érosion et le soulèvement tectonique de la surface, la thermochronologie peut nous informer sur la vitesse de convergence entre deux plaques continentales en collision. Pour illustrer ceci, considérons l’exemple ci-contre. En supposant que les roches récoltées à la surface de cette montagne ont un âge moyen de 5 Myr (millions d’années) pour un système caractérisé par une température de fermeture de 300◦ C, peut-on déterminer la vitesse de convergence entre les deux plaques. Déterminer d’autres paramètres O°C 35 km 400°C 20 km/Myr COMMENTAIRES/NOTES Lorsque les taux d’exhumation sont élevés, on ne peut plus considérer que le gradient de température vertical est constant et/ou uniforme. En effet, lorsque les roches sont amenées vers la surface à une vitesse (tectonique) finie, elles ne parviennent pas à perdre leur chaleur par conduction. Ceci cause une augmentation locale du gradient de chaleur, comme le montre le diagramme ci-contre. Dans ce cas, essayons de déterminer l’âge des roches en fonction de leur distance par rapport à la faille (zone de cisaillement) ‘pro’. Exemple concret Une telle analyse a été effectuée dans les Alpes du Sud de la Nouvelle-zélande. Les résultats des prédictions ont été comparées à des âges mesurés et ont permis de déterminer non seulement la vitesse de convergence entre les deux plaques mais également la pente de la Faille Alpine. Ceci démontre que la thermochronologie peut non seulement nous aider à déterminer des âges ou des taux d’érosion, mais également des facteurs géométriques. COMMENTAIRES/NOTES