Juifs et arabes : histoire d'une symbiose
Les relations entre juifs et musulmans remontent à l'époque préislamique mais c'est pendant l'âge d'or de la
civilisation musulmane que leurs liens vont se renforcer pour donner naissance à une symbiose judéo-arabe
exceptionnelle.
L'orient de cette époque était celui du délice, des merveilles et de l'harmonie ; c'était aussi celui de la passion du
savoir et de la connaissance, « alors que l'Europe se débattait dans un moyen âge de conflits et de blocage, le
monde arabe était le théâtre d'une admirable civilisation » écrit Sigrid Hunke. [5] Et c'est en Andalousie, lieu de
nostalgie et d'enchantement, que la civilisation arabe avait atteint son apogée ; et c'est aussi en Andalousie que la
symbiose judéo-arabe a été au zénith de sa splendeur.
Lorsque en 711 le soleil d'Allah brilla sur l'occident, les juifs d'Espagne accueillirent les musulmans en libérateurs. A
l'époque, ils vivaient des périodes difficiles sous le règne des rois wisigoths ; ils subissaient les spoliations, les
conversions massives et les expulsions. La conquête musulmane va non seulement les libérer du joug de leurs
oppresseurs mais va permettre à « l'histoire juive de connaître sa période la plus florissante - celle qui exerça une
influence exceptionnelle sur la destinée des juifs et du judaïsme » affirme Eliyahu Ashtor. [1]
Cette rencontre de l'islam et du judaïsme a été facilitée d'une part du fait des grandes similitudes entre les deux
religions et d'autre part grâce à la tolérance musulmane de l'époque.
En effet, les deux religions reposent sur la communication directe entre Dieu et l'homme et sur la loi (Shari'a pour
l'islam et Halakha pour le judaïsme). Si le judaïsme a pour source la Torah écrite (Pentateuque) et la Torah orale
(Mishna et Talmud), l'islam se base sur le Livre (Coran) et les traditions prophétiques (Sunna). Les deux religions
possèdent aussi de multiple similitudes comme le manger, le vestimentaire, la circoncision et autres rites.
L'autre raison de la réussite de la rencontre judéo-arabe se trouve dans les prescriptions coraniques mêmes « Il ne
doit pas y avoir de contrainte en matière de foi » et « Vous avez votre religion et j'ai la mienne ». Les musulmans
n'ont essayé ni d'imposer leur religion par la coercition aux peuples soumis à leur pouvoir ni de s'immiscer dans leurs
vies privées ; chacun pouvait pratiquer librement sa religion et conserver ses lieux de culte.
En plus de cette tolérance religieuse, la générosité légendaire de l'homme arabe du désert des temps préislamiques
a fait émerger « un sentiment d'humanité universel, qui ignore les frontières, une générosité dont bénéficient
jusqu'aux ennemis » écrit Sigrid Hunke. [5] « Ils (les musulmans) sont équitables, ne nous font aucun tort et ne se
livrent à aucun acte de violence envers nous » écrit le patriarche de Jérusalem à celui de Constantinople au IXe
siècle.
Les arabes refusaient toute logique d'assimilation ou d'enfermement communautariste ; cette tolérance a permis aux
juifs de conserver leur identité tout en étant une partie active de la société. Ils s'ancrèrent dans la société arabe,
participèrent avec enthousiasme et loyauté à la réalisation de cette prestigieuse civilisation.
Des poètes, des musiciens, des philosophes, des médecins, des talmudistes coopèrent avec les scientifiques et les
philosophes musulmans ; ils créèrent et innovèrent.
Même si les juifs furent fortement enracinés dans la culture arabe, ils restèrent fidèles à leurs traditions et donnèrent
un essor nouveau à leur langue et à leur culture « cette exceptionnelle symbiose excluait tout danger d'assimilation.
Si les juifs d'Espagne adoptèrent la langue des conquérants arabes et, inévitablement, leurs schémas de pensée et
leurs idées, il reste que les juifs préservèrent, voire enrichirent, leurs singularités avec une vigueur et une
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