Page 28 LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 21 - 27 MAI 2016
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pale du demandeur et son lieu d’activité
professionnelle.
La Semaine Juridique : La presse parle
beaucoup des locations meublées de
courte durée. Dans quels cas une auto-
risation est-elle nécessaire ?
Guillaume Daudré : De nombreux pro-
priétaires de meublés touristiques ignorent
qu’ils sont en infraction au regard de la
législation sur l’usage ; de son côté, la ville
de Paris multiplie les opérations « coup de
poing » à leur encontre et obtient presque
toujours gain de cause devant les tribunaux.
Patrick Wallut : La loi Alur a clarifié les
règles : aucune autorisation de changement
d’usage n’est requise lorsque le meublé
constitue la résidence principale au sens
l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989 soit du
loueur, soit du locataire. Dans les autres
cas, il faut obtenir une autorisation dont la
portée réelle ou personnelle varie selon le
régime instauré par la ville.
L’arsenal de lutte contre les meublés de-
vrait être prochainement renforcé. Dans
le cadre du projet de loi pour une Répu-
blique numérique, en cours de discussion,
les sénateurs ont adopté un amendement
autorisant les communes à rendre obliga-
toire l’enregistrement de ces locations via
des sites internet. En outre ces sites devront
bloquer toute annonce de location meublée
de résidence principale ne respectant pas la
réglementation.
La Semaine Juridique : On dit parfois
que le sujet n’intéresse que Paris. Qu’en
est-il en régions ?
Patrick Wallut : Depuis la réforme opérée
par l’ordonnance de 2005, sont concernées
de plein droit les villes de plus de 200 000
habitants (aujourd’hui au nombre de onze)
et les communes de la petite couronne
parisienne.
Mais encore faut-il que ces municipalités
aient adopté un règlement local d’applica-
tion. Bien sûr, Paris est la première concer-
née et elle a déjà modifié à quatre reprises
son règlement édicté pour la première fois
en décembre 2008.
Guillaume Daudré : Lyon, Marseille, Nice
et Strasbourg ont fait délibérer leur Métro-
pole pour édicter un règlement concernant
principalement leur hyper-centre ; certaines
communes des Hauts de Seine, telles par
exemple que Neuilly-sur-Seine, Levallois-
Perret ou Rueil-Malmaison ont jugé utile
d’élaborer un contrôle de l’usage d’habita-
tion. Nantes et Bordeaux sont en train de
préparer leur règlement.
Patrick Wallut : La décentralisation ré-
sultant de la loi du 4 août 2008 a incité les
communes à prendre en main ce contrôle,
conscientes qu’elles sont de la disparition
progressive des habitants de centre-ville au
profit de bureaux ou commerces ou, depuis
une date récente, de logements donnés en
location meublée de courtes durées. Elles
réalisent que leur planification urbaine n’est
pas suffisante pour endiguer ce phénomène
et que le contrôle de l’usage complète par-
faitement la gestion de la cité.
La Semaine Juridique : Rencontre-t-on
des difficultés d’application ?
Patrick Wallut : Le mérite de la réforme
de 2005 réside dans le fait que la sécurité
juridique s’est sensiblement confortée : les
pouvoirs de l’administration sont moins
discrétionnaires qu’ils n’étaient, celle-ci ne
pouvant prendre ses décisions qu’en fonc-
tion d’un règlement d’application et dans le
cadre défini par la loi ; la date de référence
de l’usage, portée de 1945 à 1970, est plus
aisée à appréhender.
Mais l’ordonnance de 2005 avait convenu
que la qualité de l’usage devait s’apprécier
au 1er janvier 1970, au motif que cette date
correspondait à celle du dernier recense-
ment des propriétés foncières bâties ; en
1970, chaque propriétaire a dû établir une
déclaration détaillée, local par local, de ses
biens en indiquant, notamment, le carac-
tère de l’occupation et le nom de l’occupant.
Ces déclarations, détenues par les Centres
des impôts fonciers (CDIF), sont librement
consultables par les propriétaires actuels ou
leur mandataire. Or la Direction générale
des finances publiques vient de décider que
le public n’aurait plus accès à ces déclara-
tions, invoquant le fait qu’elles n’ont plus
Guillaume Daudré est notaire à Paris.
Il est chargé d’enseignement à l’uni-
versité de Poitiers dans le cadre du
master 2 droit de l’urbanisme et de la
construction
Bilan des changements d’usage contrôlés par la ville de Paris
L’évolution des superficies des changements d’usage avec et sans compensation est résumée dans le tableau ci-dessous :
2010 2011 2012 2013 2014 2015
Superficie autorisée par des décisions per-
sonnelles (mixte, mission d’intérêt général,
professionnel) 18 887 18 483 17 798 19 568 24 372 23 950
Superficie autorisée par des décisions défini-
tives (avec compensation) 8 916 9 107 7 854 5 875 27 887 15 738
TOTAL 27 803 27 590 25 652 25 443 52 259 39 688