
prométhéenne de transformer le monde en jugulant une nature réputée hostile et sauvage ? A dépouiller de
son usage un univers rongé par la pollution et la corruption. Et à se trouver lui-même dépouillé du privilège
d’assurer la survie des sociétés puisque les exploiteurs préfèrent aujourd’hui faire fructier leur capital plutôt
que l’investir dans des entreprises salubres socialement mais insalubres au regard de la rentabilité.
Tandis qu’en reuant dans le vide de la pensée contemporaine, les égouts obstrués du libéralisme prêtent au
nom de Marx une sonorité incongrue, ses deux hypothèses les plus controversées, la baisse tendancielle du
taux de prot et la paupérisation absolue, se vérient.
Une oligarchie nancière retient par-devers soi un capital qu’elle juge peu fructueux d’engager dans le secteur
industriel. Un prolétariat de plus en plus nombreux est spolié de ses acquis sociaux et voué à une misère dont
la société de consommation lui avait ôté le souvenir.
L’accumulation d’argent improductif et l’ état d’une terre épuisée d’avoir produit de la rentabilité au lieu de
nourrir les peuples ne nous d ésignent plus aujourd’hui que l’impasse où a été menée une économie qui fondait
ses succès sur l’exploitation conjugu ée de la nature et de l’homme par l’homme.
Les sociétés n’ont changé qu’en raison des changements qu’exigeait une économie tributaire des progrès de
la marchandise et du travail qui amendait sa facture.
La prépondérence de l’agriculture cède le pas à l’industrie sous la pression du commerce et de libre circulation
des biens.
Le nouveau mode de production tombe à son tour en désuétude au prot d’un vaste circuit de consommation
où la marchandise gagne plus à se distribuer qu’à se manufacturer. Plus rentable enn que la production et la
consommation, la gestion du capital l’emporte et abandonne la planète à l’ état de patrimoine foncier propre à
la rentabilit é et impropre à l’investissement.
Une mutation s’annonce. Elle marquera la n de l’ économie d’exploitation et l’ émergence de nouveaux mo-
des de production, issus des énergies naturelles. Elle restaurera la primaut é de la valeur d’usage sur la valeur
d’ échange, et entreprendra d’humaniser la marchandise à d éfaut d’humaniser l’homme.
La désagrégation sociale et le désarroi des mentalités s’accentuent à mesure que le capital se retire lente-
ment et surement du secteur de la production. Dans une atmosphère de corruption av ér ée et de parodique n
du monde, une économie épuis ée s’emploie avec zèle à amasser ses ultimes b én éces et à les concentrer
dans le cercle d’une sp éculation internationale où son inutilit é est cot ée en bourse.
Sous la forme économique qui dépérit naît confusément une manière de néocapitalisme. Misant sur la re-
construction d’une planète ravagée, il en escompte des prots que viendront soutenir à plus ou moins longue
échéance de nouveaux modes de production.
Notre époque se situe au point de conuence et de divergence de deux sociétés dont nous ne voulons pas,
l’une parce qu’elle produit la mort, l’autre parce qu’elle préfère à la vie son mensonge lucratif.
L’accumulation d’un capital qui se désintéresse du progrès social parce que le prot n’y trouve son compte ne
laisse pas d’ évoquer l’ état de corruption où se tenait la France à la veille de sa r évolution. L’essor de la mar-
chandise se refrénait avec peine derrière les barrières d’octroi, les droits de l’homme s’exaltaient à pressentir
dans la libre circulation des biens la libre circulation des id ées et le capitalisme industriel en gestation, si loin
qu’il fut de se r éaliser, inspirait aux esprits en éveil le gout de l’invention et une volonté de bouleverser l’ordre
d’un monde pétrié depuis des siècles.
Le parasitisme d’une aristocratie pressurant le commerce et l’artisanat de taxes, d’impôts, de redevances,
vivant de ses rentes et pratiquant la vénalité comme un art destiné à éclipser tous les autres offre --mutatis
mutandis-- bien des traits communs avec la bureaucratie affairiste dont l’inertie lucrative paralyse les socités.
L’une s’accroche aux privilèges que le mode de production agraire lui a conféré et dont il n’assure plus, en
déclinant, que le support instable, l’autre fourgonne dans une économie en stagnation et fourrage ses ultimes
ressources sans souci d’en produire de nouvelles.
Derrière la porte à peine entrouverte patiente ou piaffe un n éocapitalisme qui est au développement futur des
énergies naturelles ce que furent aux centrales électriques les expériences de Faraday.
Le dynamisme des capitaines d’industrie et des vendeurs d’illusion monnayée s’est réfugié dans la seule
gestion du patrimoine acquis. Une grande lassitude s’exhale du capitalisme de vieillard qui comptabilise ses