
Le toucher : un geste à redécouvrir
paradoxale. ... entre attirance et dégoût, compassion et rejet, attention et indifférence, bien souvent et
inconsciemment redoutée par tous ceux qui se consacrent aux corps malades ". Martin-Braud (7) évoque les
blocages et les appréhensions qui paralysent. Le toucher ne peut éviter d'évoquer la sexualité, de la place qu'elle
prend dans notre rapport à l'autre, des tabous qu'elle génère et de la "possibilité que nous avons d'envisager, dans
notre culture occidentale, un contact physique sans implicite sexuel... " Vinit (4). Concernant les effets du toucher,
Vinit (4) rapporte que " placé du côté de l'impensable ou marqué du signe du soupçon, il porte souvent le risque
d'une confusion des identités, d'une emprise possible sur l'autre ou d'une effusion affective impossible à gérer ".
Tous les auteurs évoque la notion de refuge derrière des soins techniques purs et durs (technicité-rempart pour Vinit
(4)), amenant " au contact avec le corps de l'autre derrière la barrière de blouses, des masques, des gants " comme
le constate Dien (7), ne laissant que peu de place à la relation. Car celle -ci peut amener à la mise en confiance,
voire à la confidence. Comment, alors, gérer les émotions ? Comment répondre aux questions ? Dien (7) pose aussi
cette question " Jusqu'o๠pouvons-nous, devons-nous aller ? " et avance : " nous, soignants, recevons le corps de
l'autre avec nos angoisses, nos transferts et nous devons les aider, les toucher, les " nurser " alors que nous
sommes confrontés à nos propres sentiments de pitié, de compassion, d'empathie, de sympathie, de dégoût,
d'amour... sentiments mêlés, parfois contradictoires, souvent difficiles à contrôler... ".
UNE PRATIQUE DE SOIN : LE TOUCHER
" Parce que les moindres de mes gestes techniques s'accomplissent par un contact de mes mains avec le corps
malade " Martin-Braud (7). Malaquin-Pavan (8) émet l'hypothèse que " de nombreux soignants ont l'intuition que
certains gestes peuvent calmer, mais peu d'entre eux osent les poser comme de " vrais " gestes professionnels ". En
tout état de cause, " le toucher fait entrer le soignant dans l'intimité du soigné. Pour être accepté et acceptable, cette
intimité doit être protégée par une éthique humaniste. Il faut reconnaà®tre et protéger l'autre en respectant ses
limites, en évitant de l'envahir, et en le rendant actif dans le sens de son autonomie,..., en favorisant son bien-être et
non en l'enfermant dans une relation de dépendance " Rioult (5). " Entre envie et appréhension, ces moments
peuvent être un vrai temps privilégié de partage. Mais pour que ce soit plaisir, et plaisir partagé, il faut que le
soignant soit disponible, qu'il soit persuadé de l'importance de ses gestes, qu'il prenne le temps nécessaire pour le
faire et qu'il ait envie de le faire, car ces soins n'ont aucun support technique ; pour les soignants, ce sont des " soins
nus " o๠leur personnalité est mise à jour et pour le soigné, c'est la dignité même qui est prise ou non en
considération " Dien (7).
Pour que le toucher ait cette dimension de pratique de soin, plusieurs critères s'avèrent nécessaires :
l'intention : " avoir envie ". Comme Rioult (5) le rappelle, " l'intentionnalité à l'œuvre dans un soin concerne un
toucher ponctuel, limité dans le temps et l'espace, qu'une qualité de contact prolonge tout autant qu'il la précède, le
geste prenant appui sur une " atmosphère relationnelle ". Vinit (4) confirme qu'"un toucher intentionnel, qui saisit que
la moindre demande peut être le vecteur d'une relation humaine, est alors facteur important de qualité de vie pour les
patients, une occasion d'atténuer la fragilisation induite par la maladie et de manifester concrètement le souci actuel
d'éthique ". la disponibilité : la présence. Rioult (5) insiste sur le geste de l'infirmière qui doit être "habité, ...sinon le
receveur le perçoit comme mécanique et sans grand intérêt " la réciprocité : donner et recevoir, toucher et être
touché. Rioult (5), encore, considère l'infirmière comme habituée plus à donner et à prendre en charge l'autre que
de recevoir. Le patient à qui l'on donne (du temps, de l'écoute, de l'attention, du bien-être) va se sentir suffisamment
en confiance pour exprimer ses sentiments face à ce qu'il vit. Vinit (4) souligne " la douceur d'une toilette, le plaisir
de soins cosmétiques ou même l'attention présente au cœur de l'acte clinique, si leur exécution confirme et
reconnaà®t le patient comme être de relation et de langage, ... ils peuvent éveiller les confidences, le besoin d'un
dialogue ou les souvenirs engourdis au creux de la peau ". Clerget (1) aborde l'aspect psychanalytique du toucher, la
notion d'abandonner et de laisser aller. "S'abandonner, c'est adopter l'Autre, c'est prendre le risque d'être adopté,
celui aussi de s'adopter. S'adopter, c'est s'abandonner à l'Autre, s'accueillir soi-même, ce qui n'est pas possible
sans l'Autre ". le savoir-être et le savoir-faire. Si c'est dans le regard du soignant que le malade appréhende bien
souvent sa déchéance physique, Dien (7) précise que c'est aussi dans ce regard "qu'il cherche la confirmation de ce
qu'il sent, de ce qu'il sait ainsi que le réconfort et le courage de continuer ". E.Malaquin-Pavan (9) insiste, elle aussi,
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