Fonctions de plusieurs variables, intégrales multiples, et intégrales

IUFM du Limousin 2009-10
PLC1 Mathématiques
S. Vinatier Rappels de cours
Fonctions de plusieurs variables, intégrales multiples,
et intégrales dépendant d’un paramètre
1 Fonctions de plusieurs variables
On rappelle ici quelques propriétés des fonctions de plusieurs variables, c’est-à-dire définies sur
une partie de Rnet à valeurs dans Rm, où net msont deux entiers naturels. Pour la présentation de la
plupart des notions, on se restreint au cas où n= 2, les autres cas étant parfaitement similaires. Noter
de plus que, au besoin, une fonction à valeurs dans Rmse décompose naturellement en mfonctions
à valeurs réelles, qui sont ses composantes dans la base canonique de Rm.
Pour pNet u= (u1, . . . , up)Rp, on note ||u|| l’une des trois normes équivalentes (c’est-à-dire
qu’elles engendrent la même topologie) :
||u||= sup
1ip|ui|,||u||1=
p
X
i=1 |ui|,||u||2= p
X
i=1
u2
i!1/2
.
La limite en un point se définit de façon similaire au cas des fonctions d’une variable.
Définition 1 Soient AR2,f:ARm,(x0, y0)Aet `Rm, alors fa pour limite `quand
(x, y)tend vers (x0, y0)si
ε > 0,η > 0,|xx0|< η et |yy0|< η⇒ ||f(x, y)`|| < ε .
On peut aussi exprimer l’implication de la manière suivante :
(x, y)B(x0, y0), η)f(x, y)B(`, ε),
B(u, r)désigne la boule (ouverte) de centre uet de rayon r(pour la norme choisie), dans R2d’un
côté, dans Rmde l’autre.
À partir de là on définit la notion de continuité comme dans le cas des fonctions d’une variable. On
dispose de fonctions de référence (polynômes, fractions rationnelles, racine carrée,...) et de théorèmes
généraux (somme, produit, inverse, composée de fonctions... ). Si fest à valeurs réelles, on peut
définir de manière analogue la notion de limite infinie.
Exercice 1
Soit hla fonction définie de R2dans Rpar h(0,0) = 0 et, si (x, y)6= (0,0),
h(x, y) = xy
x2+y2.
Vérifier que hest continue en tout point (x, y)6= (0,0). Calculer h(x, x)pour xR; la fonction h
est-elle continue en (0,0) ?
1
Étant donné (x0, y0)A, on définit les deux applications partielles associées à fen ce point par :
f1:x7→ f(x, y0)et f2:y7→ f(x0, y).
On appelle aussi f1et f2les fonctions directionnelles associées à f, de direction xpour la première,
ypour la seconde. Ce sont des fonctions d’une variable, que l’on sait donc éventuellement dériver, ce
qui permet de définir le cas échéant les dérivées partielles de f.
Définition 2 fadmet une dérivée partielle par rapport à x(resp. y) au point (x0, y0)si f1(resp.
f2) est dérivable en x0(resp. en y0). Dans ce cas on note :
f
x (x0, y0) = f0
1(x0)(resp. f
y (x0, y0) = f0
2(y0)).
Si par exemple f2est dérivable sur Ax0={yR,(x0, y)A}, on obtient ainsi une nouvelle fonction
de deux variables, f
y , définie sur Ax0. Attention à l’éventuelle confusion provenant du fait qu’on omet
souvent de noter le couple de variables (x0, y0), ou qu’on le note plus simplement (x, y), c’est-à-dire
qu’on écrit souvent f
y ou f
y (x, y).
Exercice 2
Montrer que la fonction hde l’exercice précédent est dérivable par rapport à xet par rapport à yen
tout point de R2et calculer ses dérivées partielles. Sont-elles continues en (0,0) ?
Si les dérivées partielles de fexistent et sont continues sur un ouvert UAde R2, alors fest dite
continûment différentiable, en abrégé C1, sur U. L’intérêt de cette notion est encore plus frappant que
pour les fonctions d’une variable. En effet, la continuité des applications partielles f1et f2n’entraîne
pas celle de f, comme on l’a vu dans l’exercice ci-dessus, qui montre aussi que l’existence des dérivées
partielles ne suffit pas plus à garantir la continuité de f. Par contre on a la propriété :
fcontinûment différentiable sur Ufcontinue sur U.
Pour calculer les dérivées partielles d’une fonction composée de manière agréable, on introduit la
notion de matrice jacobienne. Plaçons-nous dans le cadre le plus général f:URnRm, où Uest
un ouvert, et fadmet des dérivées partielles par rapport à toutes les variables en un point uU. La
matrice jacobienne de fen uest la matrice à mlignes et ncolonnes égale à :
Jf(u) = fi
xj
(u)!1im
1jn
.
Lorsque n=m, on nomme jacobien de fle déterminant de la matrice jacobienne.
Proposition 1 Soient fet gdeux applications définies respectivement de URndans Rmet de
VRmdans Rp, avec f(U)V. On suppose qu’elles sont continûment dérivables respectivement
aux points uUet v=f(u). Alors on a l’égalité des matrices :
Jgf(u) = Jg(v)Jf(u).
Exercice 3
Retrouver les formules donnant f
x et f
y lorsque f(x, y) = F(u, v), où u=u(x, y),v=v(x, y).
2
Revenons au cas f:UR2Rmde classe C1. Les dérivées partielles étant des fonctions de
deux variables, on peut considérer leurs dérivées partielles, à nouveau par rapport à xet par rapport
ày, si elles existent. On obtient ainsi les dérivées partielles secondes de f, qui sont au nombre de 3
puisque le théorème de Schwarz stipule que l’ordre dans lequel sont prises les dérivées partielles par
rapport à différentes variables n’importe pas, en clair :
2f
x∂y =
x
f
y =
y
f
x =2f
yx .
La fonction fest dite de classe Cksur Usi toutes ses dérivées partielles à l’ordre kexistent et sont
continues. (Question : combien y en a-t-il ?)
Celles d’ordre 2sont particulièrement importantes pour déterminer les extrema des fonctions à
valeurs réelles. Supposons donc f:UR2Rde classe C2et (x0, y0)U. On pose :
p=f
x (x0, y0), q =f
y (x0, y0), r =2f
x2(x0, y0), s =2f
x∂y (x0, y0), t =2f
y2(x0, y0)
et on appelle r s
s t la matrice hessienne de f. On dit que fadmet un extremum local en (x0, y0)
appartenant à Usi f(x, y)f(x0, y0)garde un signe constant au voisinage de (x0, y0). Il s’agit d’un
maximum local si ce signe est négatif, d’un minimum local sinon.
Théorème 2 Pour que fadmette un extremum local en (x0, y0), il est nécessaire que p=q= 0.
Pour que fadmette un extremum local en (x0, y0), il suffit que la condition précédente soit remplie
(on parle alors de point critique) et que s2rt < 0. Dans ce cas, on aura un minimum local si r > 0,
un maximum local si r < 0.
Noter que r6= 0, et que test du même signe que r, si s2rt < 0. On peut montrer de plus qu’on
obtient un point col si s2rt > 0; si s2rt = 0, on ne peut rien dire. En fait, on a le développement
de Taylor-Young suivant pour fau voisinage du point (x0, y0):
f(x0+h, y0+k) = f(x0, y0)+(ph +qk) + 1
2(rh2+ 2shk +tk2)+(h2+k2)ε(h, k),
ε(h, k)tend vers 0quand (h, k)tend vers 0. Donc, si p=q= 0,f(x0+h, y0+k)f(x0, y0)est
pour (h, k)au voisinage de (0,0) de même signe que l’image de (h, k)par la forme quadratique de
matrice la hessienne de f.
Exercice 4
On revient à la fonction hdu premier exercice.
a) Montrer que, pour (x, y)6= (0,0),h
x (x, y) = h
y (x, y)=0si et seulement si x=±y.
b) Montrer que, pour tout (x, y)R2,1
2h(x, y)1
2; qu’en déduit-on pour les points de
coordonnées (x, ±x)avec x6= 0 ?
c) Calculer les dérivées secondes de hen (x, y)6= (0,0). Quels renseignements donne la matrice
hessienne de haux points de coordonnées (x, ±x)avec x6= 0 ?
2 Intégrales multiples
Maintenant que l’on connaît les fonctions de plusieurs variables, comment les intégrer ? Nous
allons dessiner les contours de la construction de l’intégrale de Riemann de ces fonctions, dont on
3
verra qu’ils rappellent fortement ce qu’on fait pour les fonctions d’une variable. On traite le cas des
fonctions à valeurs réelles, étant entendu que le cas des fonctions à valeurs dans Rms’en déduit en
les traitant composante par composante. On donnera ensuite deux procédés permettant de calculer
les intégrales multiples dans un certain nombre de cas.
2.1 Construction de l’intégrale
Plaçons-nous dans Rnpour un entier n2. On appelle pavé de Rnle produit cartésien Π =
I1× ··· × Inde nintervalles I1, . . . , Inde R. Le pa Πest borné (resp. compact) si tous les Ikle
sont ; la mesure de Πest le produit µ(Π) des longueurs des Ik; deux pavés sont quasi-disjoints si la
mesure de leur intersection (qui est un pavé) est nulle. Si Πest un pavé compact, P= (Π1,...,Πr)
est un pavage de Πsi les Πksont deux à deux quasi-disjoints, d’union égale à Π. On vérifie alors que
la mesure de Πest égale à la somme des mesure des Πk. On peut aussi définir la notion de pavage
plus fin que deux pavages donnés Pet P0de Π.
Soit Πun pavé. Une fonction ϕ: Π Rest en escalier s’il existe un pavage Pde Πtel que, pour
tout P∈ P,ϕ|Pest constante ; Pest alors dit adapté à ϕ. En notant χPla fonction indicatrice d’un
pavé P, on voit qu’il existe des réels λPpour P∈ P tels que
ϕ=X
P∈P
λPχP
et on peut définir l’intégrale de ϕen posant :
I(ϕ) = X
P∈P
λPµ(P),
en vérifiant que ceci ne dépend pas du pavage adapté à ϕchoisi (grâce à la notion de pavage plus fin).
Notons Ele R-espace vectoriel des fonctions en escalier définies sur Π. Pour f: Π Rbornée, on
peut alors définir
I(f) = sup{I(ϕ) : ϕf, ϕ ∈ E} , I(f) = inf{I(ϕ) : ϕf, ϕ ∈ E} ,
et décider (avec Riemann) que fest intégrable si I(f) = I(f), auquel cas on note cette valeur :
ZΠ
f=Z···ZΠ
f(x1, . . . , xn)dx1. . . dxn.
Enfin, une partie bornée Ade Rnest dite mesurable si sa fonction indicatrice χAest intégrable sur
un pavé Πcontenant A. Si tel est le cas, et si f:ARest bornée, alors fest intégrable sur Asi
fχAest intégrable sur un paΠcontenant A, auquel cas on pose :
ZA
f=ZΠ
fχA.
On montre en particulier que toute fonction continue sur une partie mesurable Aest intégrable sur
cette partie.
2.2 Théorème de Fubini
On voit maintenant un théorème essentiel pour le calcul des intégrales multiples, puisqu’il permet
de découper celui-ci en plusieurs calculs d’intégrales de fonctions d’une variable. Sa preuve suit le
cheminement effectué ci-dessus pour la construction de l’intégrale (pour les fonctions en escalier, puis
pour les fonctions intégrables).
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Théorème 3 Soit Aune partie mesurable de Rp×Rqet f:ARune fonction intégrable. On
suppose que, pour tout xRp:
Ax={yRq|(x, y)A}est mesurable ;
y7→ f(x, y)est intégrable sur Ax.
On suppose de plus que x7→ RAxf(x, y)dyest intégrable sur Rp. Alors on a l’égalité :
ZA
f(x, y)dxdy=ZRpZAx
f(x, y)dydx .
Exercice 5
En déduire la valeur de ZZA
xyqx2+y2dxdy, où A={(x, y)R2:x0, y 0, x2+ 2y21}.
On pourra commencer par représenter la partie A.
Il est parfois plus pratique d’utiliser ce résultat sous la forme suivante.
Corollaire 4 En supposant de plus, pour tout yRq:
A0
y={xRp|(x, y)A}est mesurable ;
x7→ f(x, y)est intégrable sur A0
y;
et y7→ RA0
yf(x, y)dxest intégrable sur Rq, on a l’égalité :
ZRpZAx
f(x, y)dydx=ZRq ZA0
y
f(x, y)dx!dy .
2.3 Changement de variable
Le théorème de changement de variables classique, pour les fonctions de la variable réelle, se
généralise aux intégrales multiples.
Théorème 5 Si ϕ:UVest un C1-difféomorphisme mesurable entre deux ouverts Uet Vde Rn,
dont on note ϕle jacobien, et f:VRune fonction intégrable, alors x7→ fϕ(x)|ϕ(x)|est
intégrable sur Uet ZV
f(y)dy =ZU
fϕ(x)|ϕ(x)|dx .
Un exemple d’application très utile de ce résultat est le passage des coordonnées cartésiennes aux
polaires, donné par le C1-difféomorphisme φ:R+×]π, π[R2\]− ∞,0[×{0}tel que
φ(ρ, θ)=(ρcos θ, ρ sin θ).
Exercice 6
1. Déterminer la matrice jacobienne de φ. En déduire, pour f:R2Rintégrable,
ZR2
f(x, y)dxdy =ZR+
×[π]
f(ρcos θ, ρ sin θ)ρ dρ dθ .
2. Établir l’égalité ZR2e(x2+y2)dxdy =π .
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