Diagnostics clinique, urétéroscopique et photodynamique des

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Progrès en urologie (2014) 24, 977—986
Disponible en ligne sur
ScienceDirect
www.sciencedirect.com
Diagnostics clinique, urétéroscopique et
photodynamique des tumeurs de la voie
excrétrice urinaire supérieures :
état-de-l’art pour le rapport scientifique
annuel de l’Association française d’urologie
Clinical, ureteroscopic and photodynamic diagnosis of urothelial
carcinomas of the upper tract: State-of-the art for the yearly
scientific report of the French national association of urology
L. Nison a,1, G. Bozzini a,1, M. Rouprêt b,∗, O. Traxer c,
P. Colin d,e
a
Service d’urologie, hôpital Claude-Huriez, université de Lille, CHRU Lille, 59000 Lille,
France
b
Service d’urologie, hôpital Pitié-Salpêtrière, faculté de médecine Pierre-et-Marie-Curie,
université Paris 6, 83, boulevard Hôpital, AP—HP, 75013 Paris, France
c
Service d’urologie, hôpital Tenon, AP—HP, université Pierre-et-Marie-Curie, université Paris
6, 75020 Paris, France
d
Service d’urologie, hôpital Privé-de-La-Louvière, Générale-de-Santé, 59037 Lille, France
e
Service d’urologie, hôpital de Seclin, 59113 Seclin, France
Reçu le 25 juin 2014 ; accepté le 22 juillet 2014
Disponible sur Internet le 8 septembre 2014
MOTS CLÉS
(MeSH) ;
Carcinome
urothélial ;
Voie excrétrice
urinaire ;
∗
1
Résumé
Objectif. — Proposer un état-de-l’art des connaissances concernant les modalités cliniques,
urétéroscopiques et photodynamiques pour le diagnostic des tumeurs de la voie excrétrice
supérieure (TVES).
Matériel et méthode. — Une recherche bibliographique a été conduite à partir de la base de
données bibliographiques Medline (NLM outil Pubmed) à partir des mots clés suivants : carcinome
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (M. Rouprêt).
Les deux premiers auteurs ont contribué à part égale à la rédaction de cet article.
http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2014.07.012
1166-7087/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
978
L. Nison et al.
Uretère ;
Bassinet ;
Diagnostic ;
Fluorescence ;
Urétéroscopie ;
Technique
photodynamique ;
Biopsie ;
Cytologie
urothélial ; voie excrétrice urinaire ; uretère ; bassinet ; diagnostic ; fluorescence ; ureteroscopie ; technique photodynamique ; biopsie ; cytologie.
Résultats. — L’hématurie macroscopique et les douleurs lombaires sont les deux principaux symptômes révélateurs d’une TVES en pratique clinique quotidienne. La cytologie
urinaire et la cystoscopie sont nécessaires pour éliminer une tumeur de la vessie concomittante synchrone. L’urétéroscopie souple a révolutionné le diagnostic des TVES en
permettant une exploration exhaustive des voies excrétrices, une visualisation endoscopique de la lésion et des biopsies pour déterminer le grade. L’urétéroscopie souple
doit être faite dans le bilan diagnostique chaque fois qu’un traitement conservateur
est envisagé par la suite. Les nouvelles technologies d’investigation comme la fluorescence, le narrow band imaging et la tomographie optique de cohérence (OCT) ± couplée
à l’endo-échographie sont des voies d’exploration particulièrement prometteuse pour
l’avenir.
Conclusion. — Le bilan diagnostique d’une TVES ne doit pas faire oublier qu’il s’agit d’un carcinome urothélial et que l’arbre urinaire doit être exploré dans son ensemble pour éliminer
une autre tumeur. L’urétéroscopie souple a révolutionné la prise en charge diagnostique de ces
lésions et fait désormais partie du bilan initial.
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS
Summary
Purpose. — To propose a state-of-the art of current knowledge about clinical, ureteroscopic and photodynamic for the diagnosis of the upper urinary tract cancer
(UTUC).
Material and method. — A systematic review of the literature search was performed from the
database Medline (NLM, Pubmed), focused on the following keywords: urothelial carcinomas;
upper urinary tract; ureter; renal pelvis; diagnosis; fluorescence; ureteroscopy; photodynamic
technique; biopsy; cytology.
Results. — Gross hematuria and flank pain are the two main clinical symptoms revealing a
UTUC in daily clinical practice. Urinary cystoscopy and cystoscopy are mandatory to rule
out a concomittant synchronous bladder tumour. Flexible ureteroscopy has revolutionized the
management of UTUC by allowing a full exploration of upper urinary tract, an endoscopi
vizualization of the tumour and assessment of grade with biopsies. A flexible ureteroscopy
is mandatory in diagnostic evaluation of UTUC as soon as a conservative management is
being considered. New investigation technologies such as fluorescence, narrow band imaging
and optical coherence tomography (± combined with ultra sound), are promising for a near
future.
Conclusion. — It has to be understood that the diagnostic work-up of a UTUC has to be exhaustive
and particularly the search of another urothelial carcinoma within the urinary tract. Flexible
ureterosocopy has revolutionized the diagnosis and management of UTUC and belongs fully to
its initial evaluation.
© 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
(MeSH);
Urothelial
carcinomas;
Upper urinary tract;
Ureter;
Renal pelvis;
Diagnosis;
Fluorescence;
Ureteroscopy;
Photodynamic
technique;
Biopsy;
Cytology
Introduction
Les tumeurs de la voie excrétrices supérieure (TVES)
représentent 5 % des cancers urothéliaux avec une incidence stable en Europe (1,2 cas pour 100 000 habitants/an)
[1,2].
Découvertes essentiellement au décours de symptômes
cliniques, les TVES sont majoritairement de localisation
pyélo-calicielle (deux-tiers des cas) et diagnostiquées à un
stade musculo-invasif (60 % des cas) [3,4].
Le but de cet article était de proposer un état-de-l’art
des éléments cliniques, urétéroscopiques et photodynamiques à la disposition des urologues pour le diagnostic des
TVES. Les différentes modalités diagnostiques d’imagerie
seront traités dans un autre article au sein du rapport de
congrès de l’AFU.
Matériel et méthodes
Une recherche bibliographique exhaustive à partir de la
base de données PubMed (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/)
a été effectuée entre janvier 1990 à avril 2014 en utilisant les mots clés suivants (MeSH) : urothelial carcinomas ;
upper urinary tract ; ureter ; renal pelvis ; diagnosis ; fluorescence ; ureteroscopy ; photodynamic technique ; biopsy
et cytology. Les articles ont été sélectionnés en fonction de
la langue (français et anglais) et de leur pertinence. Seules
Diagnostic endoscopique des TVES
des études prospectives et rétrospectives ou des articles de
revue ont été sélectionnés permettant ainsi d’exclure les
cas cliniques.
Résultats
Présentation clinique
Hématurie
Une hématurie macroscopique est le symptôme le plus fréquemment présent lors du diagnostic de TVES (68 à 82 %
des cas) [5—7]. En revanche, le bilan étiologique ne met en
évidence une TVES que dans 0,3—5,3 % des cas au décours
d’une hématurie isolée [8,9]. L’hématurie peut être microou macroscopique, souvent totale, parfois terminale en cas
de tumeur du bas uretère prolabée au méat. Son abondance
est variable, de même que sa fréquence (intermittente,
récurrente, permanente). Généralement indolore, elle peut
parfois être responsable de douleurs de type colique néphrétique en cas de caillotage dans la VES.
979
diagnostique des uro-scanners réalisés à titre systématique
en cas d’antécédent de TVNIM reste faible (0,5 %). Toutefois,
une publication récente en souligne l’intérêt en cas de signes
cliniques avec une valeur prédictive positive de 63 % [12,13].
Le taux de récidive localisée aux VES après cystectomie pour tumeur de vessie infiltrant le muscle (TVIM) est
faible (3,75 à 4,82 % des cas). Ces récidives sont souvent
tardives (3 à 5 ans en moyenne après le geste). Lorsque
les examens sont réalisés au cours de la surveillance d’une
TVIM, on découvre fortuitement 38 % de récidives aux VES.
Néanmoins, le pronostic péjoratif d’une TVES localement
avancée ou métastatique justifie la poursuite d’une surveillance du haut appareil après cystectomie totale [14].
Endoscopie diagnostique
Cystoscopie
La cystoscopie est recommandée dans le bilan systématique
de première intention (grade A, AFU et EAU), et permet
d’éliminer une localisation vésicale synchrone associée à
une cytologie urinaire [4,6].
Douleur
Urétéropyélographie rétrograde (UPR)
La douleur des flancs et des fosses lombaires représente le
second symptôme en termes de fréquence (20 à 30 % des
cas) [5,6]. En cas de caillotage intraluminal, la douleur est
aiguë ou peut se manifester par une sensation de pesanteur
lors d’une dilatation progressive des cavités excrétrices en
amont d’une obstruction tumorale [10].
L’extension locorégionale de la tumeur provoque des douleurs moins typiques, sourdes constantes et mal localisées.
La diffusion métastatique, notamment osseuse, peut également être responsable de douleurs variées.
L’UPR consiste en l’opacification par voie rétrograde de la
VES après cathétérisme préalable de celle-ci par une sonde
urétérale. Elle est faite par l’urologue lors de la cystoscopie ou d’une exploration en urétéroscopie. De part son
excellente résolution spatiale, l’UPR demeure un examen
recommandé par l’AFU et l’EAU (grade C) [4,6]. Réalisée
dans des conditions optimales, l’UPR a une sensibilité de
97 % et une spécificité de 93 % pour la détection des TVES
[15]. L’UPR a sa place dans un contexte d’urgence ou
lorsqu’une imagerie optimale du haut appareil urinaire n’a
pas pu être effectuée.
Découverte fortuite
Le taux de tumeurs asymptomatiques varie de 10 à 16 %
selon les séries [5]. La découverte de TVES est volontiers fortuite, au décours d’une imagerie abdominale réalisée pour
un autre motif.
Autres manifestations cliniques
Elles sont présentes dans environ 10 % des cas. Une masse
palpable en fosse lombaire peut correspondre à des tumeurs
pyélo-calicielles très évoluées ou à un rein hydronéphrotique [11]. La perception d’une masse lombaire comme
premier signe clinique est rare et reste dépendante du
morphotype des patients. Une symptomatologie irritative
ou infectieuse peut également être présente lors du diagnostic. Les tumeurs du bas uretère prolabées au méat ou les
localisations vésicales synchrones (7—17 % des cas) sont souvent à l’origine d’une pollakiurie [5]. La pyélonéphrite peut
compliquer une dilatation chronique des voies excrétrices
supérieures en amont d’une lésion urétérale. L’altération
de l’état général, rare, révèle volontiers une TVES évoluée
ou métastatique [5,10,11].
Surveillance d’une tumeur de la vessie
Une autre circonstance de découverte fortuite de TVES est
la surveillance systématique en cas de tumeurs primitive de
la vessie n’infiltrant pas le muscle (TVNIM). La rentabilité
L’urétérorénoscopie souple (URSS)
Les progrès technologiques ont permis à l’URSS de devenir
un outil diagnostique précieux pour l’exploration des images
lacunaires suspectes visualisées en imagerie. L’URSS a
également un intérêt dans le diagnostic en cas de cytologies
urinaires positives sans lésions objectivées en cystoscopie et
imagerie [16].
Une URSS avec prélèvements biopsiques doit être
systématiquement discutée dans le bilan préopératoire
d’une TVES selon les recommandations de l’AFU et l’EAU
(grade C) [4,6].
En pratique courante, l’URSS est notamment indispensable lorsqu’il existe un doute diagnostique ou
lorsqu’un traitement conservateur est envisagé. Elle permet
d’éliminer certains diagnostics différentiels notamment le
polype fibro-épithélial des cavités, bénin, dont l’aspect en
« battant de cloche » est quasi pathognomonique (Fig. 1).
La question de la nécessité d’une URSS pour une lésion
localement avancée en imagerie avec cytologie urinaire
positive reste en débat. L’intérêt de la preuve histologique
est discutable dans ce contexte car elle ne changera pas le
traitement de référence que constitue la NUT dans ce cas
[17].
L’URSS rend possible l’exploration macroscopique d’au
moins 95 % de l’ensemble du haut appareil (y compris des
calices inférieurs) [18].
980
Figure 1. Diagnostic différentiel de TVES : polype fibro-épithélial
de l’uretère avec aspect en bâton de cloche typique en urétéroscopie. L’aspect IRM de la lésion laissait supposer l’existence d’une
TVES.
L’amélioration de la déflexion et de la résolution d’image
des récents urétérorénoscopes souples numériques renforce
encore la qualité de l’exploration des voies excrétrices supérieures (Fig. 2). Le diagnostic visuel est possible dans plus
de 95 % des cas, mais ne permet pas toujours une évaluation
fine du grade tumoral [6,19].
Grasso et al. ont décrit une technique « no touch »
commençant par l’inspection de l’uretère jusqu’au croisement des vaisseaux à l’aide d’un urétéroscope rigide afin
de ne pas méconnaitre une lésion plus distale. L’URSS est
ensuite remonté sur un fil guide mis en place sous contrôle
de l’urétéroscope rigide pour l’exploration du reste de la
voie excrétrice. Cette technique a été initialement décrite
sans l’utilisation d’une gaine d’accès [20].
Techniquement, il convient de travailler à basse pression en flux continu permettant une bonne visualisation des
structures sans risque d’extravasation [21].
Certains auteurs ont recommandé l’utilisation de gaine
d’accès urétérales pour faciliter les aller et retour de
l’endoscope au sein de voie excrétrice et diminuer ainsi
L. Nison et al.
Figure 2. Urétéroscopie souple : comparaison de la qualité de la
vision en fibre optique (en bas) et en numérique (en haut).
le risque théorique d’essaimage des prélèvements biopsiques (théorie du « seeding ») [21,22]. Ceci reste cependant
controversé compte-tenu du risque potentiel de lésion iatrogène de l’uretère lors de la montée de la gaine (Fig. 3). Il
faut idéalement explorer la voie excrétrice dans son intégralité et la gaine a pour inconvénient de masquer des zones
où une tumeur multifocale aurait pu s’implanter (Fig. 4).
La sensibilité de détection peut être améliorée par
la vision obtenue en Narrow Band Imaging (NBI) ou à
l’aide du photodiagnostic dynamique utilisant l’acide 5aminolévulinique (5-ALA), notamment pour les lésions de
petite taille et de carcinoma in situ (CIS) [23,24].
Photodiagnostic dynamique (PDD)
L’endoscopie de fluorescence ou PDD est une technique
endoscopique reposant sur la détection d’un gradient de
fluorescence entre les tissus sains et tumoraux. Son principe
repose sur l’interaction d’une lumière bleue de longueur
d’onde spécifique ( = 380—470 nm) et d’un agent photosensibilisant endogène (PS). La production du PS est
rendue possible par l’utilisation d’une pro-drogue (acide
5-aminolévulinique ou héxaminolévulinate) qui induit in situ
la formation de porphyrines photoactives sélectivement
accumulées dans les cellules cancéreuses. Les cellules
Diagnostic endoscopique des TVES
981
Figure 4. Exploration rétrograde par urétéroscopie souple de la
VES en vue de la réalisation d’une biopsie sans gaine d’accès.
Figure 3. Plaie iatrogène de la voie excrétrice urinaire supérieure
après utilisation d’une gaine d’accès.
Un certain nombre d’études prospectives randomisées
ont déjà confirmé la capacité de la cystoscopie de fluorescence à optimiser la détection tumeurs de la vessie et leur
résection endoscopique. Le faible nombre de cas rapportés
d’URSS couplée au PDD dans la littérature ne permet pas
encore de proposer cet outil en routine. Sur le plan pratique, l’instillation du produit dans la VES pose problème et
le temps de contact avec l’urothélium est limité car il ne
s’agit pas d’un organe de stockage, contrairement à la vessie. Il semblerait néanmoins que l’utilisation du PDD puisse
améliorer le taux de détection global et de lésion de CIS
[24,25].
Narrow band imaging (NBI)
néoplasiques émettent alors une fluorescence qui facilite
leur détection.
La voie d’administration topique pourrait être une
alternative à l’ingestion (présentant un plus haut risque
d’accident hypotensif et de photosensibilisation cutanée).
Elle nécessiterait néanmoins la mise en place préalable
d’une pyélostomie ou d’une endoprothèse (pour la création
d’un reflux vésico-urétéral) [24].
Figure 5.
Une autre perspective en évaluation est l’utilisation, grâce
aux urétéroscopes numériques à haute résolution, d’un procédé d’amélioration de l’image appelé NBI. Cette technique
applique des filtres d’interférence optique qui limitent la
longueur d’onde de la lumière blanche à une bande étroite
(415—540 nm). Celle-ci n’atteint pas les couches inférieures
de tissu, mettant ainsi l’accent sur les vaisseaux sanguins et
les tissus tumoraux plans (dont le CIS). (Fig. 5) Les premières
Aspect de TVES non détectable en lumière blanche (gauche) et visible en technologie NBI (droite).
982
L. Nison et al.
Figure 7. Aspects différents pour trois TVES en tomographie
optique de cohérence : un outil prometteur pour déterminer le
stade d’infiltration de la lésion primitive.
Figure 8. Tomographie optique de cohérence (OCT) couplée à
l’écho-endoscopie intra-urétérale (ELUS) : l’association des deux
technologies semble complémentaire dans l’expérience initiale.
Figure 6. Détection d’une petite tumeur plane (flèche) en urétéroscopie souple difficilement identifiable en lumière blanche
traditionnelle.
études de la littérature rapportent un gain de détection
des TVES de 22,7 % par rapport à la lumière blanche [23].
La combinaison du NBI à l’urétéroscopie souple diagnostique semble prometteur (Fig. 6), son utilisation nécessite
un matériel dédié dont le coût peut être un facteur limitant
[26].
Morbidité
Les complications de l’urétérorénoscopie diagnostique sont
rares (0,5 à 5 % des cas). On recense notamment : perforations, stripping, sténoses de l’uretère ou infections
parenchymateuses.
L’hypothèse d’un possible essaimage tumoral induit par
l’hyperpression dans les cavités rénales au décours de
l’urétéroscopie n’a finalement jamais été confirmée [27].
L’impact sur la récidive vésicale par contact avec le liquide
d’irrigation reste débattu [28—30]. L’augmentation du délai
de prise en charge induit par l’exploration endoscopique
couplée aux biopsies n’affecterait pas de manière significative le devenir oncologique [17].
Techniques en cours de développement
L’évaluation visuelle de l’infiltration tissulaire des TVES
reste une des limites de l’endoscopie [19]. À l’instar
de l’écho-endoscopie digestive, l’échographie couplée à
l’urétéroscopie a été décrite mais n’est pas encore
utilisée en pratique clinique [31]. De nouvelles techniques
d’imagerie telles que la tomographie optique de cohérence
(OCT) (Fig. 7) ou la microscopie confocale endoscopique sont
en cours de développement et pourraient à l’avenir être
utilisés, en complément de la réalisation de biopsies, pour
l’évaluation spécifique en temps réel du stade, grade et des
marges tumorales [26,32]. L’évaluation prospective de l’OCT
est en cours (ClinicalTrials.gov Identifier : NCT02108587)
seule ou couplée à l’écho-endoscopie urétérale (Fig. 8).
Prélèvements anatomopathologiques
Le diagnostic macroscopique visuel ne permet toutefois pas
de déterminer le caractère infiltrant de la TVES. En effet,
l’aspect tumoral endoscopique conduit à une erreur dans
l’évaluation du stade dans 30 % des cas [19].
Cytologie urinaire
La cytologie urinaire repose sur l’analyse de cellules desquamées dans les urines.
Celles-ci sont recueillies au décours d’une miction ou via
des prélèvements effectués lors de la cystoscopie ou idéalement in situ lors de l’URSS (et avant instillation de produit
de contraste lors d’une UPR).
La réalisation d’une cytologie urinaire dans le bilan d’une
TVES est impérative (grade A — AFU/EAU) [4,6].
Le cyto-diagnostic urinaire mictionnel est non invasif
mais il est limité par une sensibilité variable (35 à 65 %)
en lien avec une variabilité inter-individuelle importante
de l’interprétation par le pathologiste et la possibilité de
Diagnostic endoscopique des TVES
983
Figure 10. Echantillons biopsiques macroscopiques de TVES obtenus à l’aide d’une pince classique et d’une pince macro-biopsie
(insérée de façon rétrograde par l’avant de l’URSS).
médiocres pour prédire le grade et le stade tumoral définitif. Pour Messer et al., une cytologie urinaire positive prédit
une tumeur de haut grade avec une sensibilité de 56 % et
une tumeur infiltrante avec une sensibilité de 62 % [33].
Par ailleurs, une cytologie urinaire préopératoire positive
semble être un facteur de risque de récidive intra-vésicale
[34].
Biopsies
Figure 9. Biopsie endoscopique d’une TVES en urétéroscopie
souple : pince classique.
faux positifs en cas de traumatisme de l’urothélium ou
d’inflammation. La spécificité de cette technique est par
ailleurs excellente (> 90 %).
En cas de cytologie urinaire positive avec cystoscopie normale, la probabilité d’une TVES est très élevée. Toutefois,
la cytologie urinaire de manière isolée a des performances
Lors de l’URSS, l’opérateur peut réaliser des biopsies de
la lésion suspecte. Les biopsies établissent le diagnostic
avec une sensibilité de 89 à 95 % et souvent le grade de
la tumeur [35]. La fiabilité du stade tumoral biopsique est
encore faible avec un taux de sous-évaluation important.
Ainsi 45 % des tumeurs classées Ta seraient en réalité des
tumeurs infiltrantes [36,37]. En revanche, le grade biopsique
est un bon reflet du grade tumoral définitif dans 69 à 91 %
des cas [22,38,39]. Il existe également une corrélation entre
le grade biopsique et le stade tumoral définitif. En effet, les
biopsies in situ révélant du grade 1 correspondraient à une
tumeur non infiltrante (≤ pT1) dans 68 à 100 % et les biopsies retrouvant du grade 3 correspondraient à une tumeur
infiltrante (≥ pT2) dans 62 à 100 % des cas [22,35—39].
La réalisation de biopsies n’est pas toujours facile,
notamment pour les lésions localisées dans les calices inférieurs. En effet, selon le type de pince utilisée lors l’URSS,
il peut se produire une limitation plus ou moins grande des
capacités de déflexion par l’introduction de la pince dans le
canal opérateur de l’urétéroscope (Fig. 9) [40].
La qualité de l’analyse histologique des biopsies est
dépendante de celle des prélèvements [40]. Plusieurs
équipes évaluent actuellement en ce sens les résultats
des instruments mis à la disposition des opérateurs et
984
L. Nison et al.
celles des biopsies [44]. Il n’est cependant plus évoqué dans
les recommandations récentes [4,6].
Fluorescence in situ hibridization (FISH)
La FISH est un test diagnostique cytologique recherchant
des aneuploïdies sur les chromosomes 3, 7 et 17 ainsi que
des délétions sur le locus 9p21 à l’aide de sondes spécifiques
par FISH. Cette technique présente une meilleure sensibilité
(78,9—100 %) que la cytologie urinaire avec une spécificité qui semble légèrement plus faible (89,5—99 %) [45,46].
L’association FISH-cytologies urinaires standard améliorerait
le taux de détection des TVES [47]. Cependant, les résultats
restent préliminaires, sur de petites séries et le coût de la
technique élevé.
Le dépistage des lésions du haut appareil par utilisation
de la FISH après cystectomie n’a, lui, pas été clairement
démontré [48].
À l’heure actuelle, aucun marqueur urinaire n’est recommandé pour une utilisation en pratique clinique [4,6].
Conclusion
Le diagnostic précis des TVES a été révolutionné au cours
de ces dernières années par le développement de l’endourologie. Tous les outils disponibles pour le traitement de
la lithiase sont aujourd’hui mis à contribution pour la prise
en charge personnalisée des TVES. En pratique, l’URSS est
l’outil principal de cette révolution qui permet le diagnostic
(biopsie, cytologie in situ) et parfois même le traitement de
la TVES durant la même intervention.
Déclaration d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en
relation avec cet article.
Références
Figure 11. Biopsie endoscopique d’une TVES en urétéroscopie
souple : panier en nitinol.
notamment les pinces à macro-biopsie (Fig. 10) [41,42].
Les biopsies à l’aide de panier au nitinol auraient ainsi une
meilleure rentabilité (diagnostic dans 94 %) (Fig. 11) que les
pinces classiques (diagnostic dans 63 %). La réalisation d’une
cytologie associée aux biopsies permettrait d’augmenter
encore ces résultats [43].
Brossage
Le recueil de cellules urothéliales par brossage rétrograde
est associé à des sensibilité et spécificité plus faibles que
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