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Fiche n°1. La problématique du chikungunya en tant que maladie émergente
En 1995, constatant la résurgence des maladies infectieuses et les risques croissants de leur
propagation internationale, l’Assemblée mondiale de la santé a demandé au Directeur général de
l’OMS de préparer une révision du règlement sanitaire international. En effet, celui-ci ne concernait,
alors, plus que trois maladies dont une arbovirose (fièvre jaune), et devenait inadapté aux enjeux réels
liés à l’intensification des échanges internationaux.
En 2007, le règlement sanitaire international révisé entrait en vigueur, approuvé par la très grande
majorité des Etats. Il considère d’une part, la multiplicité des sources d’information existantes mais,
surtout, prend véritablement en compte la réalité des échanges internationaux qui se sont
incroyablement intensifiés depuis une trentaine d’années. En effet, la rapidité des moyens modernes
de transport au premier rang desquels l’avion, fait que, aujourd’hui, aucune partie du globe,
pratiquement, n’est à plus de 24 à 36 heures du reste du monde. Cet élément est très important si l’on
veut comprendre la dynamique de diffusion de certaines maladies virales dont l’incubation, le portage
et la phase de contagion sont courts.
En 2003, une épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère (Sras), due à un virus de la famille des
coronavirus, réputés jusqu’alors pour être responsables de rhinites, touchait Hong-Kong, le Vietnam et,
quasi simultanément, le Canada. En quelques semaines, plus de 8500 personnes étaient contaminées
dans près de 30 pays et on dénombrait de l’ordre de 800 décès. Quelques années auparavant, en
1999, un virus, inconnu dans le nouveau monde, le virus « West Nile », s’implantait à New York,
vraisemblablement importé via des oiseaux d’ornement. Depuis, ce virus s’est répandu à travers le
continent Nord Américain sans qu’il soit possible de contrôler son expansion. Les exemples de ce type
se sont multipliés au cours des trois dernières décennies : de l’épidémie de fièvre aphteuse au
Royaume-Uni, début 2000, à la grippe aviaire due au virus A H5N1, mais aussi, à d’autres virus
grippaux comme le virus A H7N7 aux Pays-Bas en 2003.
Dans le même temps de nouveaux virus ne cessent de faire leur apparition tels les hantavirus du
nouveau monde responsables de formes pulmonaires ou les Henipavirus, paramyxovirus identifiés
dans les années 90 lors d’épidémies en Asie et Océanie.
Le cas du chikungunya est représentatif de ces risques émergents ou ré-émergents.
L’épidémie de la Réunion et de Mayotte est survenue dans les suites d’une épidémie massive aux
Comores, elle-même liée à une épidémie au Kenya. Ce passage d’un territoire à l’autre témoigne d’une
part, des échanges qui existent entre les îles de l’Océan Indien et l’Afrique et met en évidence, d’autre
part, le rôle des transports modernes dans l’expansion des maladies. On peut en effet considérer que
le virus chikungunya a été introduit simultanément à Maurice, à la Réunion et à Mayotte au gré des
échanges entre ces territoires et les Comores, mais aussi, sans doute en raison des flux importants de
voyageurs entre la Réunion et Maurice ou la Réunion et Mayotte. Par la suite, c’est bien la souche
isolée à la Réunion qui sera retrouvée en Inde au cours des épidémies massives de 2006 et 2007.
Le virus du chikungunya a évolué au cours de l’épidémie qui a sévi à la Réunion. L’une de ces
mutations l’a rendu particulièrement adapté aux cellules de moustique et cette mutation est peut-être
pour partie responsable de l’explosion épidémique de la Réunion et Mayotte, fin 2005 début 2006.