Keystone/Bagus Indahono Recherche Cancer du pancréas: mieux dépister pour mieux traiter Le cancer du pancréas est une tumeur peu fréquente. Mais lorsqu’il se manifeste, il est presque toujours trop tard. Anne Grapin-Botton, 39 ans, a choisi d’explorer les mécanismes moléculaires à l’origine de ce cancer. Texte: Dr Martina Frei, journaliste au TagesAnzeiger Dans la couveuse, deux douzaines d’œufs de poule blancs attendent, sagement alignés. Tous ont un petit trou en haut, par lequel on peut voir le jaune de l’œuf. Là, un minuscule point rouge palpite: le cœur de l’embryon de poule, dont la taille atteint à peine un millimètre. Ces œufs sont utilisés dans l’espoir de détecter plus rapidement – et, par conséquent, de traiter Recherche A l’aide d’une aiguille fine, elle injecte précautionneusement un peu de solution d’ADN dans la zone de l’œuf où l’appareil digestif de la poule va se former. La solution contient des informations génétiques – des gènes dont Anne GrapinBotton suppose que, chez l’homme, ils poussent les cellules du cancer du pancréas à migrer pour former des métastases. La chercheuse fait passer un faible courant électrique dans l’œuf. «Cela permet aux cellules d’absorber les segments d’ADN. Dans une semaine, nous saurons si le gène que nous avons ainsi introduit peut jouer un rôle dans le processus de formation des métastases du cancer du pancréas.» Elle examinera ensuite si les cellules qui ont intégré le gène sont restées à leur emplacement d’origine ou si elles ont migré. Composé de neuf collaborateurs, son groupe de travail à l’Institut Suisse de Recherche Expérimentale sur le Cancer (ISREC) à Epalinges poursuit deux objectifs: «Pour la forme la plus fréquente de cancer du pancréas, l’adénocarcinome, nous voulons reconstituer le déroulement des voies de signalisation cellulaire.» Les informations données à la cellule pour qu’elle se divise, croisse et forme des métastases parviennent aux cellules cancéreuses à leur surface; de là, elles doivent être transmises au «tableau de commande» de la cellule – le noyau – par le biais de réactions et de molécules biochimiques. «A partir du moment où on connaîtra en s bi Pour des formes rares de cancer du pancréas, la biologiste a déjà découvert une mutation génétique importante dans une voie de signalisation. Non sans surprise: «On retrouve le même mécanisme dans le cancer de l’intestin. Comment se fait-il qu’un seul gène défectueux puisse conduire à des tumeurs aussi différentes?» s’est-elle demandée. Les différentes tumeurs du pancréas viendraient-elles finalement des mêmes cellules primitives, voire, pour certaines, de cellules souches? Autant de questions auxquelles la chercheuse entend trouver une réponse: «Lorsque nous aurons percé ce mystère, nous saurons également contre quel type de cellule il faut avant tout cibler le traitement.» ree Royalty -F /C or is «Un grand nombre de chercheurs s’intéressent à la biologie du développement cérébral. Mais on ne sait pas grand-chose de celle de l’appareil digestif», a relevé la biologiste dans sa thèse de doctorat. Du coup, elle a décidé d’étudier de plus près ces tumeurs délaissées. détail le fonctionnement de ces processus, explique Anne Grapin-Botton, on pourra chercher des cibles auxquelles un futur médicament pourrait s’attaquer efficacement.» rb plus efficacement – un des cancers les plus difficiles à soigner: le cancer du pancréas. «Le problème avec le cancer du pancréas, explique Anne Grapin-Botton, c’est qu’au moment du diagnostic, trois patients sur quatre ont déjà des métastases.» En moyenne, la survie est de six mois à partir du moment où la tumeur a été décelée. ee -Fr Royalty /C Ro ya o lt y -F ree/Corbis Carte d’identité Née le 1er juillet 1967 à La Rochelle (F). 1990 – 1995 Etudes de biologie moléculaire et cellulaire à l’Université de Paris VI-VII; domaine de spécialité: la biologie du développement. 1996 – 2001 Séjours de recherche, notamment à l’Université de Harvard aux Etats-Unis. Depuis 2001, collaboratrice scientifique associée à l’ISREC à Epalinges. Depuis octobre 2005, professeur assistante à l’EPFL. Anne Grapin-Botton est mariée et a trois enfants.