LA MAUVAISE PRISE EN CHARGE DE LA DIARRHÉE DE L’ENFANT EN FRANCE
hydratation orale avec principalement
de l’eau, du sel et du sucre ou qu’elles
se procurent des sachets tous prépa-
rés. Cette dernière stratégie l’empor-
tera. Dans de nombreux pays, l’usage
des sachets sera favorisé par le statut
et le prestige lié au médicament. Ils
seront souvent pris en charge par les
systèmes de santé locaux ou les sys-
tèmes sociaux.
À l’occasion d’un service de coopé-
ration dans un petit hôpital d’un pays
d’Amérique centrale en 1982-1983,
j’ai constaté de visu que les recom-
mandations de réhydratation orale
étaient affichées dans l’entrée des
centres de santé et que les infirmières
géraient couramment l’évaluation de
la déshydratation des enfants qui ve-
naient en consultation ainsi que leur
prise en charge. Une abondante litté-
rature de formation des personnels de
santé a été accessible en plusieurs
langues, dès les années 1980.
En 1992, l’OMS publie un ouvrage
en français, en anglais et en espagnol,
intitulé « Usage rationnel des médica-
ments dans le traitement des diarrhées
aiguës de l’enfant » [9]. L’OMS reprend
tous les essais cliniques internationaux
réalisés pour la mise sur le marché
d’une dizaine des médicaments anti-
diarrhéiques les plus utilisés, le Smec-
ta®notamment, et invite les prescrip-
teurs à ne pas les utiliser du fait de leur
inefficacité, de leur trop faible efficaci-
té ou de leur toxicité potentielle, au re-
gard de la priorité à donner aux sels de
réhydratation orale, dont ils risquent
de détourner les usagers.
Échec de la mise en œuvre
du programme OMS
en France
Dans les années 1990, plusieurs
études montrent la faible prescription
des sels de réhydratation orale par les
médecins français, les conséquences
dramatiques que cela entraîne ainsi
que l’incohérence des informations
données par le dictionnaire Vidal. Deux
d’entre elles retiennent plus particuliè-
rement l’attention : la première menée
par l’association. Pour une Information
Médicale Éthique et le Développement
(PIMED) recense des données épidé-
miologiques et analyse les modalités
de prise en charge ainsi que l’informa-
tion officielle disponible en France sur
les spécialités antidiarrhéiques [1].
C’est ainsi que PIMED avec l’aide du
service de PMI de Seine-Saint-Denis
publie les premiers chiffres français de
mortalité liée à la diarrhée en 1998 [13].
PIMED met aussi en lumière, après
d’autres, le faible recours aux sels de
réhydratation orale et la fréquence des
prescriptions médicamenteuses dé-
conseillées par l’OMS. Pour cela, l’as-
sociation élabore une étude menée en
lien avec le Groupement des pédiatres
de la région de Lyon. L’analyse des
prescriptions recensées en 1996 au-
près d’une soixantaine de pédiatres et
généralistes [2] montre que seulement
35 % des prescriptions comportent
des sels de réhydratation orale et que
6 % contiennent comme unique pro-
duit prescrit des sels de réhydratation
orale.
L’information officielle sur les spé-
cialités « antidiarrhéiques », qui était
transcrite en 1996 dans le dictionnaire
Vidal, apparaissait souvent en discor-
dance avec les recommandations de
l’OMS. Le conseil d’utiliser systémati-
quement des sels de réhydratation
orale n’était pas présent. Par ailleurs,
les sels de réhydratation orale, n’étant
pas considérés comme médicaments,
figuraient parmi les produits diété-
tiques. Dans la presse médicale et
pharmaceutique, la publicité pour les
antidiarrhéiques déconseillés par
l’OMS occupait plus de place que les
articles susceptibles d’orienter la
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