Espaces vectoriels - Université de La Rochelle

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Agrégation interne de Mathématiques
Département de Mathématiques
Université de La Rochelle
F. Geoffriau
2006-2007
Espaces vectoriels
Convention 1. – Dans toute la suite, k désignera un corps quelconque.
Définition 2. – Espace vectoriel
On appelle k-espace vectoriel un ensemble E muni d’une loi de composition interne notée
+ et d’une loi de composition externe d’ensemble d’opérateurs k noté · vérifiant
. (E, +) est un groupe commutatif (d’élément neutre noté 0) ;
. λ · (x + y) = λ · x + λ · y pour tout λ ∈ k et tous x, y ∈ E ;
. (λ + µ) · x = λ · x + µ · x pour tous λ, µ ∈ k et tout x ∈ E ;
. λ · (µ · x) = (λµ) · x pour tous λ, µ ∈ k et tout x ∈ E ;
. 1 · x = x pour tout x ∈ E (1 étant l’élément neutre pour la multiplication de k).
Un élément de E est appelé un vecteur et un élément de k un scalaire.
Exemple 3. – Espaces vectoriels usuels
a. L’ensemble k est naturellement un k-espace vectoriel.
b. Soit n ∈ N∗ . L’ensemble kn est un espace vectoriel.
c. Soit A un ensemble et E un espace vectoriel. L’ensemble F(A, E) des applications de A
dans E est naturellement muni d’une structure d’espace vectoriel, les lois étant définies par
!
!
! A −→
! A −→
E
E
∀ f, g ∈ F(A, E) ∀ λ ∈ k
f + g !!
et λf !!
x %−→ λf (x)
x %−→ f (x) + g(x)
En particulier l’ensemble des suites à valeurs dans k et ou l’ensemble des applications de k
dans k sont des espaces vectoriels.
d. L’ensemble des polynômes à coefficients dans k est naturellement muni d’une structure
d’espace vectoriel.
Proposition 4. – Propriétés élémentaires
Soit E un espace vectoriel, λ, µ ∈ k, x, y ∈ E. Alors
a. λ · 0E = 0E ;
b. 0k · x = 0E ;
c. λ · (−x) = (−λ) · x = −(λ · x) ;
d. λ · (x − y) = λ · x − λ · y et (λ − µ) · x = λ · x − µ · x.
e. λ · x = 0E =⇒ λ = 0k ou x = 0E .
Preuve – a. On a λ · (0E + 0E ) = λ · 0E donc λ · 0E + λ · 0E = λ · 0E soit λ · 0E = 0E .
b. De même 0k · x = (0k + 0k ) · x = 0k · x + 0k · x d’où 0k · x = 0E .
c. On a λ · (x + (−x)) = λ · 0E donc λ · x + λ · (−x) = 0E et λ · (−x) = −(λ · x).
Et 0E = 0k · x = (λ + (−λ)) · x = λ · x + (−λ) · x soit (−λ) · x = −(λ · x).
d. On a λ · (x − y) = λ · (x + (−y)) = λ · x + (−λ) · y = λ · x − λ · y.
e. Supposons que λx = 0E et λ '= 0. Le scalaire λ admet un inverse dans k et
x = 1 · x = (λ−1 λ) · x = 0E
D’où le résultat.
!
– 2 – Espaces vectoriels
Définition 5. – Combinaison linéaire
Soit E un espace vectoriel sur k.
a. Soit u1 , u2 , . . . , up des vecteurs de E. Tout vecteur de la forme
λ1 u 1 + λ2 u 2 + · · · + λ p u p =
p
"
λk u k
k=1
où λ1 , . . . , λp sont des éléments de k, est appelé combinaison linéaire des vecteurs
u1 , u2 , . . . , up . Les scalaires λ1 , . . . , λp sont les coefficients.
b. Une famille de vecteurs (ou un système de vecteurs) de E indexée par un ensemble I
est, par définition, une application de I dans E, une telle famille se note usuellement (vi )i∈I .
(On prendra garde au fait qu’une famille de vecteurs de E n’est pas, en général, une partie
de E car on peut avoir vi = vj avec i '= j.)
c. Soit A une famille de vecteurs de E. On appelle combinaison linéaire d’éléments de A,
tout vecteur v ∈ E pouvant s’écrire sous la forme
v = λ1 v1 + · · · + λp vp
avec p ∈ N, v1 , . . . , vp ∈ A et λ1 , . . . λp ∈ k. (Même si A est infinie, les combinaisons linéaires
sont toujours finies et si p = 0, alors v = 0.)
Définition 6. – Application linéaire
Soit E et F deux espaces vectoriels et f une application de E dans F .
a. On dit que f est un homomorphisme d’espaces vectoriels ou une application
linéaire si elle vérifie les conditions suivantes
a.. f (x + y) = f (x) + f (y) pour tous x, y ∈ E ;
a.. f (λ · x) = λ · f (x) pour tout x ∈ E et tout λ ∈ k.
b. On appelle endomorphisme de E toute application linéaire de E dans E, forme linéaire
sur E toute application linéaire de E dans k, isomorphisme de E dans F toute application
linéaire bijective de E dans F et automorphisme de E toute endomorphisme bijectif de E.
S’il existe un isomorphisme de E dans F , on dit que E et F sont des espaces vectoriels
isomorphes.
c. On note L(E, F ) l’ensemble des applications linéaires de E dans F , E ∗ l’ensemble L(E, k)
des formes linéaires de E (il est appelé le dual de E), L(E) l’ensemble des endomorphismes
de E et GL(E) l’ensemble des automorphismes de E (qui appelé groupe linéaire).
Remarque 7. – a. Soit E et F deux espaces vectoriels et f ∈ L(E, F ). Alors f (0) = 0,
en effet, f (0) = f (0 + 0) = f (0) + f (0), donc f (0) = 0.
b. Soit E un espace vectoriel, l’application idE identité de E dans E est linéaire. C’est un
automorphisme de E.
Proposition 8. – Caractérisation d’une application linéaire
Soit E et F deux espaces vectoriels et soit une application f : E → F .
a. L’application f est linéaire si et seulement si
∀ u, v ∈ E
∀ λ, µ ∈ k
f (λu + µv) = λf (u) + µf (v)
b. Si f est linéaire, pour tous u1 , . . . , up ∈ E et tous λ1 , . . . , λp ∈ k on a
f (λ1 u1 + · · · + λp up ) = f
p
#"
k=0
p
$ "
λk uk =
λk f (uk ) = λ1 f (u1 ) + · · · + λp f (up )
k=0
Preuve – a. Si f est une application linéaire, alors pour tous u, v ∈ E et λ, µ ∈ k
f (λu + µv) = f (λu) + f (µv) = λf (u) + µf (v)
et par récurrence on montre le deuxième point.
F. Geoffriau
Espaces vectoriels
–3–
b. Réciproquement, soit u, v ∈ E et λ ∈ k, on a
f (u + v) = f (1 · u + 1 · v) = 1 · f (u) + 1 · f (v) = f (u) + f (v)
f (λ · u) = f (λ · u + 0 · u) = λ · f (u) + 0 · f (u) = λ · f (u)
!
Ainsi f est linéaire.
Proposition 9. – Opérations sur les applications linéaires
Soit E, F , G trois espaces vectoriels.
a. Soit f : E → F et g: E → F deux applications linéaires et λ, µ ∈ k. L’application
!
! E −→
F
λf + µg !!
x %−→ λf (x) + µg(x)
est linéaire.
b. Si f : E → F et g: F → G sont deux applications linéaires alors g ◦ f : E → G est linéaire.
c. Si f : E → F un isomorphisme alors f −1 : F → E est linéaire.
Preuve – a. Soit u, v ∈ E et soit α, β ∈ k, on a
(λf + µg)(αu + βv) = λf (αu + βv) + µg(αu + µv)
%
&
%
&
= λ αf (u) + βf (v) + µ αg(u) + βg(v)
&
&
= α(λf (u) + µg(u) + β(λf (v) + µg(v)
= α(λf + µg)(u) + β(λf + µg)(v)
ainsi λf + µg est une application linéaire.
b. Soit u, v ∈ E et soit λ, µ ∈ k, on a
%
&
%
&
g ◦ f (λu + µv) = g f (λu + µv) = g λf (u) + µf (v)
%
&
%
&
= λg f (u) + µg f (v) = λg ◦ f (u) + µg ◦ f (v)
ainsi g ◦ f est une application linéaire.
c. Soit u, v ∈ F et λ, µ ∈ k, on a
ainsi f −1 est linéaire.
# %
&
%
&$
f −1 (λu + µv) = f −1 λf f −1 (u) + µf f −1 (v)
# %
&
&$
= f −1 f λf −1 (u) + µf −1 (v)
&
= λf −1 (u) + µf −1 (v)
!
Remarque 10. – Soit E et F deux espaces vectoriels. L’ensemble L(E, F ) est muni, de
façon naturelle, d’une structure d’espace vectoriel et l’ensemble L(E) est muni, de façon
naturelle, d’une structure d’algèbre, le produit étant la composée des applications et l’unité
est l’application identique idE .
De plus, l’ensemble GL(E) est muni naturellement d’une structure de groupe, c’est le
groupe des inversibles de l’anneau L(E).
Définition 11. – Sous-espace vectoriel
Soit E un espace vectoriel. Une partie F de E est un sous-espace vectoriel de E si
a. 0E ∈ F ;
F. Geoffriau
– 4 – Espaces vectoriels
b. ∀ x, y ∈ F x + y ∈ F ;
c. ∀ λ ∈ k, ∀ x ∈ F λx ∈ F .
Remarque 12. – a. Un sous-espace vectoriel d’un espace vectoriel est lui-même un espace
vectoriel. En particulier, pour montrer qu’un ensemble possède une structure d’espace
vectoriel, il est souvent plus simple de montrer que c’est un sous-espace vectoriel d’un espace
vectoriel connu.
b. Un sous-espace vectoriel n’est jamais vide car il contient l’élément nul.
Exemple 13. – a. Si E est un espace vectoriel, E et {0E } sont des sous-espaces vectoriels
de E.
b. Soit E un espace vectoriel et a ∈ E\{0}. L’ensemble Da = {λa; λ ∈ k} est un sous-espace
vectoriel de E appelé droite vectorielle.
c. L’ensemble F = {(x, y, z) ∈ R3 ; x − y + 2z = 1} n’est pas un sous-espace vectoriel de R3
car 0R3 '∈ F .
d. Par contre l’ensemble F = {(x, y, z) ∈ R3 ; x − y + 2z = 0} est un sous-espace vectoriel
de R3 .
e. L’ensemble C(R, R) des applications continues de R dans R est un sous-espace vectoriel
de F(R, R).
f. Soit E et F des espaces vectoriels. Alors l’ensemble des endomorphismes L(E, F ) est un
sous-espace vectoriel de F(E, F ).
Proposition 14. – Caractérisation d’un sous-espace vectoriel
Soit E un espace vectoriel et soit F une partie de E.
a. La partie F est un sous-espace vectoriel de E si et seulement si
a.. F est non vide ;
a.. ∀ u, v ∈ F, ∀ λ, µ ∈ k λu + µv ∈ F .
b. Si F est un sous-espace vectoriel de E, toute combinaison linéaire de vecteurs de F
appartient à F , i.e.
p
"
∀ u 1 , . . . , u p ∈ F ∀ λ1 , . . . , λ p ∈ k
λk u k ∈ F
k=1
Preuve – a. Supposons que F soit un sous-espace vectoriel de E. On a 0 ∈ F , donc
F '= ∅. Soit x, y ∈ F et λ, µ ∈ k, alors u = λx et v = µy sont des éléments de F et
λx + µy = u + v ∈ F .
Le deuxième point se déduit alors par récurrence.
b. Réciproquement, il existe u ∈ F , car F '= ∅. Alors 0 = 0 · u + 0 · u ∈ F . Soit x, y ∈ F et
λ ∈ k, on a
x + y = 1 · x + 1 · y ∈ F et λx = λx + 0u ∈ F
!
Donc F est un sous-espace vectoriel de E.
Proposition 15. – Espace vectoriel quotient
Soit E un espace vectoriel et F un sous-espace vectoriel. La relation
∀ x, y ∈ E
x * y ⇐⇒ x − y ∈ F
est une relation d’équivalence compatible avec les lois d’espaces vectoriels. Ainsi l’ensemble
quotient E/F est muni naturellement d’une structure d’espace vectoriel.
Preuve – Soit x, x$ , y, y $ ∈ E tels que x * y et x$ * y $ et soit λ ∈ k. On a x − y ∈ F ,
x$ − y $ ∈ F et
(x + x$ ) − (y + y $ ) = (x − y) + (x$ − y $ ) ∈ F
et
λx − λy = λ(x − y) ∈ F
donc x + x$ * y + y $ et λx * λy. Ainsi les lois de l’espace vectoriel sont compatibles avec la
relation d’équivalence.
!
F. Geoffriau
Espaces vectoriels
–5–
Définition 16. – Espace vectoriel produit
Soit E1 , E2 , . . . , En des espaces vectoriels. L’ensemble produit
E = E1 × E2 × · · · × En
est muni d’une structure naturelle d’espace vectoriel en posant pour (x1 , x2 , . . . , xn ) ∈ E,
(y1 , y2 , . . . , yn ) ∈ E et λ ∈ k,
(x1 , x2 , . . . , xn ) + (y1 , y2 , . . . , yn ) = (x1 + y1 , x2 + y2 , . . . , xn + yn )
λ · (x1 , x2 , . . . , xn ) = (λ · x1 , λ · x2 , . . . , λ · xn )
On dit que E est l’espace
'n vectoriel produit ou la somme directe extérieure de
E1 , E2 , . . . , En et est noté i=1 Ei ou ⊕ni=1 Ei .
L’application
!
!E
−→
E
ψi !! i
x
%−→ (0, . . . , 0, x, 0 . . . , 0)
(le seul coefficient non nul étant x en position i) est l’injection canonique de Ei dans E.
C’est une application linéaire injective d’image {0} ×{ 0} × · · · × {0} × Ei × {0} × · · · × {0},
elle permet d’identifier Ei à ce sous-espace vectoriel de E.
L’application
!
!
E
−→ Ei
πi !!
(x1 , x2 , . . . , xn ) %−→ xi
est la projection canonique de E sur Ei . C’est une application linéaire surjective de noyau
E1 × E2 × · · · × Ei−1 × {0} × Ei+1 × · · · × En .
On a
n
"
πi ◦ ψi = idEi ;
ψi ◦ πi = idE
i=1
Remarque 17. – On retrouve le fait que kn (n ∈ N∗ ) est un espace vectoriel.
Définition 18. – Noyau d’une application linéaire
Soit E et F deux espaces vectoriels, ϕ: E → F une application linéaire. On appelle noyau
de l’application linéaire ϕ l’ensemble
ker(ϕ) = {x ∈ E; ϕ(x) = 0F } = ϕ−1 ({0F })
Théorème 19. – Noyau et injection
Une application linéaire ϕ: E → F est injective si et seulement si ker(ϕ) = {0E }.
Preuve – a. Si ϕ est injective, alors, pour x ∈ E,
x ∈ ker(ϕ) ⇐⇒ ϕ(x) = 0 ⇐⇒ ϕ(x) = ϕ(0) ⇐⇒ x = 0
donc ker(ϕ) = {0E }.
b. Supposons que ker(ϕ) = {0E } et soit x1 et x2 deux éléments tels que ϕ(x1 ) = ϕ(x2 ).
Comme ϕ est linéaire, on obtient ϕ(x1 − x2 ) = ϕ(x1 ) − ϕ(x2 ) = 0E , soit x1 − x2 ∈ ker(ϕ)
donc x1 − x2 = 0, x1 = x2 . Ainsi ϕ est injective.
!
Proposition 20. – Image et image réciproque de sous-espaces vectoriels
Soit E et F deux espaces vectoriels, ϕ: E → F une application linéaire, A un sous-espace
vectoriel de E et B un sous-espace vectoriel de F . Alors
F. Geoffriau
– 6 – Espaces vectoriels
a.
b.
c.
d.
l’ensemble ϕ(A) est un sous-espace vectoriel de F ;
l’image im(ϕ) = ϕ(E) est un sous-espace vectoriel de F ;
l’ensemble ϕ−1 (B) est un sous-espace vectoriel de E ;
le noyau ker(ϕ) = ϕ−1 ({0F }) est un sous-espace vectoriel de E.
Preuve – a. La partie A contient 0E , donc ϕ(A) contient 0F .
Soit x, y ∈ ϕ(A) et λ, µ ∈ k. Il existe a, b ∈ A tels que x = ϕ(a) et y = ϕ(b). Alors
λx + µy = λϕ(a) + µϕ(b) = ϕ(λa + µb). Puisque A est un sous-espace vectoriel, λa + µb est
un élément de A et donc λx + µy est un élément de ϕ(A).
Par conséquent, ϕ(A) est un sous-espace vectoriel de F .
b. Cas particulier du précédent.
c. De ϕ(0E ) = 0F et 0F ∈ B, on en déduit que 0E ∈ ϕ−1 (B).
Soit x, y ∈ ϕ−1 (B) et soit λ, µ ∈ k. On a ϕ(λx + µy) = λϕ(x) + µϕ(y) et ϕ(x), ϕ(y) ∈ B,
donc λϕ(x) + µϕ(y) ∈ B. On en déduit que λx + µy appartient à ϕ−1 (B).
Par conséquent, ϕ−1 (B) est un sous-espace vectoriel de E.
d. Cas particulier du précédent.
!
Proposition 21. – Intersection de sous-espaces vectoriels
Soit E un espace vectoriel. Toute intersection de sous-espaces vectoriels est un sous-espace
vectoriel de E.
Preuve – Soit (Fi )i∈I une famille de sous-espaces vectoriels et soit
(
F =
Fi = {x ∈ E; ∀ i ∈ I x ∈ Fi }
i
Pour tout i ∈ I, on a 0E ∈ Fi , donc 0E ∈ F .
Soit x, y ∈ F et λ, µ ∈ k. Pour tout i ∈ I, x, y ∈ Fi . Comme Fi est un sous-espace
vectoriel, λx + µy ∈ Fi . Ainsi, λx + µy ∈ F .
Donc F est un sous-espace vectoriel.
!
Remarque 22. – Réunion de sous-espaces vectoriels
La réunion de sous-espaces vectoriels n’est pas, en général, un sous-espace vectoriel. Par
exemple, si F1 = {(x, 0) ∈ R2 ; x ∈ R} et F2 = {(0, x) ∈ R2 ; x ∈ R} alors F1 ∪ F2 n’est pas
un sous-espace vectoriel de R2 , il ne contient pas (1, 0) + (0, 1), or (1, 0) ∈ F1 et (0, 1) ∈ F2 .
Proposition 23. – Sous-espace vectoriel engendré
Soit E un espace vectoriel et A une famille non vide de vecteurs de E. On note Vect(A)
l’ensemble des combinaisons linéaires d’éléments de A.
Par convention, on pose Vect(∅) = {0E }.
a. La partie Vect(A) est un sous-espace vectoriel de E.
b. Soit F est un sous-espace vectoriel de E contenant A, alors Vect(A) ⊂ F .
Le sous-espace vectoriel Vect(A) est appelé sous-espace vectoriel engendré par A,
c’est le plus petit sous-espace vectoriel de E (au sens de l’inclusion) contenant A.
Preuve – a. Si A = ∅, Vect(A) = {0E } est un sous-espace vectoriel de E. Supposons
maintenant A '= ∅. Alors Vect(A) est non vide, il contient A.
Soit u, v ∈ Vect(A) et λ, µ ∈ k. Il existe a1 , . . . , ap ∈ A et λ1 , . . . , λp , µ1 , . . . , µp ∈ k tels
que u = λ1 a1 + · · · + λp ap et v = µ1 a1 + · · · + µp ap (à priori les vecteurs de A constituant
les combinaisons linéaires de u et v n’ont aucune raison d’être identiques, mais on peut le
supposer quitte à mettre devant un coefficient nul). Alors
λu + µv = λ(λ1 a1 + · · · + λp ap ) + µ(µ1 a1 + · · · + µp ap ) = (λλ1 + µµ1 )a1 + · · · + (λλp + µµp )ap
C’est donc un élément de Vect(A) qui est ainsi un sous-espace vectoriel de E.
F. Geoffriau
Espaces vectoriels
–7–
b. Soit x ∈ Vect(A), il existe u1 , . . . , un ∈ A et λ1 , . . . , λn ∈ k tels que x = λ1 u1 + · · · + λn un .
Alors, comme A ⊂ F , on a u1 , . . . , un ∈ F et
x = λ1 u 1 + · · · + λ n u n ∈ F
!
Donc Vect(A) ⊂ F .
Exemple 24. – Soit E un espace vectoriel et u, v deux vecteurs de E. Le sous-espace
vectoriel engendré par u est Vect(u) = {λu ∈ E; λ ∈ k} et celui engendré par u et v est
Vect(u, v) = {λu + µv ∈ E; λ, µ ∈ k}.
Définition 25. – Famille génératrice
Soit E un espace vectoriel et F un sous-espace vectoriel. On dit qu’une famille A de vecteurs
de E est une famille génératrice de F si F = Vect(A). On dit encore que A engendre F .
Exemple 26. – Famille génératrice des espaces vectoriels usuels
a. Pour i = 1, . . . , n, on pose ei = (0, 0, . . . , 0, 1, 0, . . . , 0), le 1 étant la i-ème coordonnée du
vecteur. La famille (e1 , e2 , . . . , en ) engendre l’espace kn . En effet si x ∈ kn on a
x = (xi )1!i!n = (x1 , x2 , . . . , xn ) = x1 e1 + x2 e2 + · · · + xn en =
n
"
xk ek
k=1
b. La famille (X n )n∈N est une famille génératrice de k[X], en effet pour tout polynôme
P ∈ k[X], il existe n ∈ N et a0 , . . . , an ∈ k tels que
P = a0 + a1 X + · · · + an X n =
n
"
ak X k
k=0
c. Soit p ∈ N, la famille (1, X, . . . , X p ) est une famille génératrice de kp [X] l’espace vectoriel
des polynômes de degré inférieur ou égal à p.
Théorème 27. – Somme de sous-espaces vectoriels
Soit F et G des sous-espaces vectoriels de E. Alors
Vect(F ∪ G) = {u + v; u ∈ F et v ∈ G}
On dit que c’est la somme des sous-espaces vectoriels F et G, et on le note F + G.
Preuve – On pose A = Vect(F ∪ G) et B = {u + v; u ∈ F et v ∈ G}. Comme A est
l’ensemble des combinaisons linéaires d’éléments de F ∪ G, on a B ⊂ A.
Inversement, soit v ∈ A. Le vecteur v est combinaison linéaire d’éléments de F et de G,
donc il existe λ1 , . . . , λn , µ1 , . . . , µp ∈ k, u1 , . . . , un ∈ F et v1 , . . . , vp ∈ G tels que
v = λ1 u1 + · · · + λn un + µ1 v1 + · · · + µp vp
En posant x = λ1 u1 + · · · + λn un ∈ F et y = µ1 v1 + · · · + µp vp ∈ G, on a v = x + y ∈ B.
Ainsi A ⊂ B.
Par conséquent A = B.
!
Définition 28. – Somme directe et supplémentaire
Soit F et G des sous-espaces vectoriels de E.
a. On dit que F et G sont en somme directe, ou que la somme F + G est directe, si
F ∩ G = {0}. S’il en est ainsi, on note la somme F ⊕ G.
F. Geoffriau
– 8 – Espaces vectoriels
b. On dit que F et G sont des sous-espaces vectoriels supplémentaires (dans E) si la
somme de F et G est directe et est égale à E (i.e. F + G = E et F ∩ G = {0}), et on note
E = F ⊕ G.
Remarque 29. – Ne pas confondre les notions de supplémentaire et de complémentaire.
Théorème 30. – Somme directe et unicité de l’écriture
Soit F et G des sous-espaces vectoriels d’un espace vectoriel de E. Ils sont supplémentaires si
et seulement si pour tout u ∈ E, il existe un unique couple (v, w) ∈ F × G tel que u = v + w
et dans ce cas E est isomorphe à F × G en tant qu’espace vectoriel.
Preuve – a. Supposons que F et G soient supplémentaires. Soit u ∈ E. Comme
F + G = E, il existe (v, w) ∈ F × G tel que u = v + w.
Supposons qu’il existe un autre couple (v $ , w$ ) ∈ F × G tels que u = v $ + w$ . Il vient
v − v $ = w$ − w. Or v − v $ ∈ F et w$ − w ∈ G. On en déduit que v − v $ ∈ F ∩ G = {0}, donc
v = v $ , puis w = w$ . Ainsi (v, w) = (v $ , w$ ).
On a montrer que l’application qui à (u, v) ∈ F × G associe u + v ∈ E est une bijection de
F × G sur E, il est clair qu’elle est linéaire, c’est donc un isomorphisme d’espaces vectoriels.
b. Réciproquement, F + G étant la somme des éléments de F et de G, on a F + G = E.
Soit u ∈ F ∩ G. Alors 0 = u + (−u) = 0 + 0 avec u, 0 ∈ F et −u, 0 ∈ G. Comme il y a
unicité de l’écriture, on obtient u = 0. Donc la somme F + G est directe. Ainsi F et G sont
supplémentaires.
!
Définition 31. – Projection vectorielle
Soit F et G deux sous-espaces vectoriels supplémentaires d’un espace vectoriel E. On appelle
projection de E sur F parallèlement à G, l’application de E dans F qui à un élément u ∈ E
associe l’unique élément v ∈ F tel que u − v ∈ G (cet élément existe et est unique d’après
30).
Proposition 32. – Caractérisation d’une projection
Soit F et G deux sous-espaces vectoriels supplémentaires d’un espace vectoriel E.
projection p de E sur F parallèlement à G est une application linéaire qui vérifie
p◦p=p
p|F = idF
ker(f ) = G
La
im(f ) = F
Réciproquement, toute application linéaire p: E → E telle que p ◦ p = p est appelée un
projecteur de E, c’est la projection de E sur im(p) parallèlement à ker(p) (qui sont par
conséquent supplémentaires dans E).
Preuve – a. Soit u, v ∈ E et soit λ, µ ∈ k. On a λp(u) + µp(v) ∈ F et
%
&
%
&
%
&
(λu + µv) − λp(u) + µp(v) = λ u − p(u) + µ v − p(v) ∈ G
donc p(λu + µv) = λp(u) + µp(v). Ainsi p est une application linéaire.
Soit u ∈ F , on a u − u = 0 ∈ G, donc p(u) = u. Ainsi la restriction de p à F est l’identité
de F .
Par définition de p, on a im(p) ⊂ F . Et comme l’image d’un élément de F est lui-même,
on a F ⊂ im(p). Ainsi im(p) = F .
De plus, pour tout u ∈ E, p(u) ∈ F , donc
%
&
%
&
p ◦ p(u) = p p(u) = idF p(u) = p(u)
Ainsi p ◦ p = p.
Soit u ∈ E. On a u − p(u) ∈ G, donc si u ∈ ker(p), alors u ∈ G. Réciproquement, si
u ∈ G, alors 0 ∈ F et 0 − u ∈ G, donc p(u) = 0 et u ∈ ker(p). Ainsi ker(p) = G.
F. Geoffriau
Espaces vectoriels
–9–
b. Soit p ∈ L(E) telle que p ◦ p = p. Soit u ∈ ker(p) ∩ im(p), il existe v ∈ E tel que u = p(v)
et alors
%
&
u = p(v) = p ◦ p(v) = p p(v) = p(u) = 0
Donc ker(p) ∩ im(p) = {0} et ker(p)
et im(p)
%
& sont en somme directe.
Soit u ∈ E, on a u = p(u) + u − p(u) et p étant linéaire
%
&
%
&
p u − p(u) = p(u) − p p(u) = p(u) − p ◦ p(u) = 0
donc u − p(u) ∈ ker(p) et comme p(u) ∈ im(p), la somme de ker(p) et de im(p) est E.
Par conséquent im(p) et ker(p) sont supplémentaires dans E. De plus pour tout u ∈ E,
p(u) vérifie p(u) ∈ im(p) et u − p(u) ∈ ker(p), donc p est la projection de E sur im(p)
parallèlement à ker(p).
!
Remarque 33. – De manière générale, le noyau et l’image d’un endomorphisme ne sont
pas supplémentaires.
Proposition 34. – Supplémentaire et quotient
Soit E un espace vectoriel et F un sous-espace vectoriel de E. Alors tout sous-espace vectoriel
supplémentaire de F dans E est isomorphe à E/F .
Preuve – Soit G un supplémentaire de F dans E. Il suffit de considérer la projection de
E sur G parallèlement à F , son image est G et son noyau F . Par passage au quotient, elle
induit un isomorphisme entre E/F et G.
!
Proposition 35. – Isomorphisme entre l’image et un supplémentaire du noyau
Soit E et F deux espaces vectoriels, f ∈ L(E, F ) une application linéaire et E $ un
supplémentaire de ker(f ) dans E. L’application
! $
!E
)
f !!
x
−→ im(f )
%−→ f (x)
est un isomorphisme d’espaces vectoriels.
Preuve – Puisque f est linéaire, il est clair que f) l’est. Soit x ∈ E $ ,
x ∈ ker(f)) ⇐⇒ f)(x) = 0 ⇐⇒ f (x) = 0 ⇐⇒ x ∈ ker(f ) ⇐⇒ x = 0
car E $ ∩ ker(f ) = {0}. Ainsi ker(f)) = {0} et f) est injective.
Soit y ∈ im(f ). Il existe x ∈ E tel que y = f (x). Et puisque E $ est un supplémentaire de
ker(f ) dans E, il existe (x1 , x2 ) ∈ ker(f ) × E $ tel que x = x1 + x2 et alors
y = f (x) = f (x1 + x2 ) = f (x1 ) + f (x2 ) = f)(x2 )
Donc f) est surjective.
Ainsi f) est un isomorphisme d’espaces vectoriels de E $ sur im(f ).
F. Geoffriau
!
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