inflammation_et_psychiatrie_Docvadis Dépression inflammation

L'inflammation chronique de bas grade est actuellement reconnue comme étant le
mécanisme physiopathologique qui accompagne la plupart des maladies chroniques,
telles que les maladies cardio-vasculaires, le cancer, le diabète 2, les maladies
neurodégénératives et la dépression.
Le système immunitaire répond à une agression ( une blessure, une infection… ) en
multipliant des cellules immunitaires qui, elles mêmes, sécrètent des molécules
propres au phénomène inflammatoire.
On a longtemps pensé que le phénomène inflammatoire ne concernait pas le
cerveau. On s'aperçoit maintenant que des troubles dépressifs, psychotiques ou des
maladies neuro-dégénératives sont associés à la présence d'une inflammation
cérébrale.
Un article de 2012 fait le point sur les travaux qui concernent le lien entre dépression
et cerveau -voici le lien pour y accéder:
http://www.jain-resources.info/uploads/3/3/5/8/3358541/haroon_-_deplin_ds.pdf
Le titre de l'article est: "PSYCHONEUROIMMUNOLOGY MEETS
NEUROPSYCHOPHARMACOLOGY: TRANSLATIONAL IMPLICATIONS OF THE IMPACT OF
INFLAMMATION ON BEHAVIOR", Ebrahim Haroon, Charles L Raison and Andrew H
Miller
Je vais tenter de le résumer:
LIEN ENTRE DEPRESSION ET INFLAMMATION
Les patients présentant un état dépressif majeur ( au sens du DSM IV ) ont des
marqueurs biologiques de l'inflammation élevés.
Les premières publications son attribuables à Michaël Maes, psychiatre néerlandais
qui dans les années 1991, fait paraître des articles où il montre que des patients
déprimés présentent des taux plasmatiques élevés de marqueurs de l'inflammation.
Depuis, de nombreuses études ont confirmé ces observations, la CRPus,
l'interleukine 6 et le TNF alpha étant les biomarqueurs, les plus régulièrement élevés
en cas de dépression. Le NF kappa B, induit par le stress, est également augmenté.
On trouve une corrélation entre la résistance au antidépresseurs et l'augmentation
des marqueurs de l'inflammation.
Une population probablement à risque serait les enfants victimes de maltraitance
dans l'enfance , l'inflammation y étant particulièrement présente.
L'administration de cytokines induit des symptômes dépressifs
L'administration de cytokines ou d'inducteurs des cytokines ( ex: traitement des
hépatites C par Interféron, vaccin de la typhoïde ) entraîne des changements
comportementaux et psychologiques qui miment l'état dépressif et peuvent être
suivis de véritables états dépressifs.
Le traitement préalable par antidépresseur annihile la survenue de la dépression.
Le stress augmente l'inflammation.
Ceci est une donnée majeure, qui permet de faire le lien entre psychologie et
biologie. Les stress psycho-sociaux sont les pourvoyeurs les plus fréquents des états
dépressifs, qu'ils soient aigus ou chroniques. De plus, l'état dépressif augmente la
réponse inflammatoire au stress.
On retrouve aussi dans ces observations la plus grande vulnérabilité des populations
exposées jeunes à des évènements vitaux stressants ou à la maltraitance.
Le mécanisme par lequel le stress déclencherait l'inflammation semble être
l'activation du système nerveux sympathique, lequel a pour neurotransmetteur
l'adrénaline. Par la stimulation de ses récepteurs alpha et bêta adrénergiques, il
augmente les taux d'IL6, en périphérie et dans le cerveau des rats.
Le système nerveux parasympathique a un rôle opposé, car il diminue les marqueurs
inflammatoires.
MECHANISMES D'ACTION DES CYTOKINES SUR LE CERVEAU
Les signaux des cytokines parviennent au cerveau
Bien que les cytokines soient des protéines d'assez grande taille et ne pouvant donc
traverser la barrière hémato-encéphalique (BHE), il existerait au moins cinq chemins
par lesquels elles pourraient atteindre le cerveau.
- Il existe en effet des régions de la BHE qui laisseraient passer ces molécules
- Il existe un transport actif de ces molécules au travers de la BHE
- elles activent dans cette membrane des cellules qui a leur tour sécrètent des
cytokines qu'elles envoient vers le cerveau
- elles se lient à des récepteurs aux cytokines situés sur les nerfs afférents qui
relaient alors ces signaux jusqu'au cerveau
-des cellules immunitaires sont recrutées, de la périphérie jusqu’au cerveau où
elles vont alors produire des cytokines
Ces études ont montrées que le NF-kappa B est une protéine majeure dans la
transmission du signal des cytokines au cerveau.
Une fois que les signaux des cytokines sont parvenus au cerveau, un riche réseau
cellulaire y répond : des cellules gliales - la microglie et les astrocytes - et des
neurones. Les cellules du cerveau qui produisent le plus de cytokines sont les
cellules microgliales, qui sont l'équivalent des macrophages dans le cerveau. Ces
cellules répondent au stress en produisant des cytokines.
Les cytokines altèrent le métabolisme des neurotransmetteurs
Ces molécules vont affecter le métabolisme des mono-amines, dont la sérotonine et
la dopamine, molécules dont la diminution d'activité est depuis longtemps connue
pour être impliquée dans les phénomènes dépressifs.
Pour la sérotonine, plusieurs études convergent pour montrer l'implication de cette
molécule dans les troubles de l'humeur associés à l'inflammation. Les premiers
travaux ont montré l'efficacité des antidépresseurs sérotoninergiques dans la
prévention ou le traitement de la dépression induite par l'administration de cytokines.
Par la suite, des études génétiques ont poursuivi ces travaux, en indiquant qu'un
polymorphisme génétique touchant la région du promoteur du gène contrôlant le
transporteur de la sérotonine était associé à la survenue de troubles dépressifs chez
les patients traités par interféron.
Enfin, on a montré que l'élévation de l'IL6, secondaire à l'administration d'interféron
était corrélée négativement au taux de 5HIAA, un métabolite de la sérotonine.
Pour la dopamine, on observe lors d'études de neuro-imagerie qu'il y a une
diminution du flux sanguin et de l'activité métabolique dans les régions du cerveau
riches en dopamine -les noyaux des ganglions de la base-, lors de l'exposition à des
stimuli inflammatoires.
Chez des primates, il y a une corrélation entre la diminution d'un métabolite de la
dopamine dans le liquide céphalo-rachidien (LCR) et un comportement dépressif,
après administration d'IL6.
Des études chez des rongeurs ont montré que les cytokines ont pour cible les
ganglions de la base et les voies dopaminergiques. C'est ainsi que l'injection d'une
dose élevée de cytokines induit une diminution d'environ 50% des neurones
exprimant une enzyme essentielle à la synthèse de la dopamine -la tyrolise-
hydroxylase.
Ces effets semblent en partie liés à la production du TNF alpha par les cytokines et à
l'activité pro-oxydante qui en découle.
Les mécanismes par lesquels les cytokines affectent le métabolisme des
monoamines
L'Indolamine-2,3-dioxygénase (IDO) est une enzyme exprimée par de multiples
cellules de l'organisme.
Elle est activée par un grand nombre de cytokines, au travers d'une stimulation des
voies de signalisation des cytokines tels que le STAT ( signal transducer and
activator of transcription ) , le régulateur du IFN-1 , le MAPK ( p38 mitogen-activated
protein kinase ) et le NFkappaB.
En ce qui concerne la sérotonine, l'IDO transforme le tryptophane en kinurénine ,
l'empêchant ainsi de s'orienter vers la voie de la synthèse de sérotonine. De plus, la
kinurénine peut ensuite être catabolisée en acide kinurénique (KA) et en acide
quinolinique. Ces deux catabolites sont augmentés dans le liquide céphalo-rachidien
de patients traités par IFN alpha.
L’acide quinolinique contribue à augmenter le glutamate et est associé à une
augmentation du stress oxydatif ainsi qu’à une augmentation de l’oxydation des
lipides. Ces phénomènes contribuent à une excitotoxcité neuronale.
Un excès d’acide quinolénique est impliqué dans plusieurs maladies neuronales
dégénératives.
La Mitogen-activated protein kinase (MAPK) augmente l'expression et la fonction du
transporteur de la sérotonine. Cette voie de signalisation influence également le
transporteur de la dopamine.
La Tetrahydrobiopterin (BH4) est un cofacteur essentiel et une enzyme limitante de
la synthèse de la dopamine et de la sérotonine. Elle est par ailleurs très sensible à
l'action du NO (nitric oxyd ou acide nitrique).
L'inflammation augmente la production du NO et cela suggère que l'influence des
cytokines sur la BH4, se fait au travers du NO et du stress oxydatif. C'est ainsi que
l'action de l'inflammation et des cytokines réduirait les neurotransmetteurs en
abaissant la BH4.
Effets des cytokines sur le métabolisme du glutamate En dehors de leur action sur
les monoamines, les cytokines ont également pour cible le glutamate.
Elles peuvent : 1) diminuer l'expression de transporteurs du glutamate dans certaines
cellules gliales, 2) augmenter la sécrétion de glutamate par les cellules
astrocytaires, ce qui a pour résultat d'augmenter l'excito-toxicité et par conséquence
de voir diminuer la production de facteurs neurotrophiques dont le brain-derived
neurotrphic factor (BDNF).
Effets des cytokines sur la neurogénèse
La neurogénèse - la production de nouveaux neurones - est apparue comme un
processus important dans le phénomène de la dépression et dans l'action des
antidépresseurs. Nombre d'antidépresseurs augmentent la neurogénèse dans le
cerveau, et certains de leurs effets sur le comportement sont dépendants de cette
action sur la neurogénèse.
A l'opposé, le stress chronique inhibe la neurogénèse, laquelle est à son tour
associée au développement de comportements dépressifs chez l'animal de
laboratoire.
Ces effets sont induits par les cytokines, par l'intermédiaire du NF-kappaB
Effets des cytokines sur la fonction neuro-endocrine
Les perturbations de l'axe Hypothalamo-hypophyso-adrenergique (HPA) sont parmi
les troubles biologiques les plus étudiés chez les patients souffrant de dépression.
Toutes les hormones de cet axe, dont le cortisol, sont augmentées par les cytokines,
en administration unique.
Lorsque ces cytokines sont données en chronique, il y a alors une diminution de la
sécrétion du cortisol diurne et une augmentation du cortisol vespéral. Les cytokines
diminuent l'activité du récepteur aux glucocorticoïdes.
Effets des cytokines sur les circuits cérébraux
les ganglions de la base sont l'objet d'une déplétion en dopamine. On a suggéré que
l'effet des cytokines sur cette région du cerveau et sur l'activité locomotrice diminuée
qui en résulte serait un mécanisme sélectionné lors de l'évolution, servant à
protégerer l'animal malade.
La réduction de l'activité épargnerait les réserves énergétiques, celles-ci étant alors
employées à lutter contre l'infection ou la blessure.
le cortex cingulaire antérieur dorsal est une région du cerveau impliquée dans la
détection des erreurs et l'adaptation comportementale aux changements. Cette
région du cerveau est activée chez les patients traités par INFalpha lors d'hépatite.
Les patients ayant des traits anxieux , des scores élevés aux échelles de
neuroticisme ou des Tocs présentent une hyperactivité de cette zone cérébrale.
Des auteurs ont également remarqué que cette zone cérébrale serait activée en cas
de stress psycho-social.
ORIGINE DE L'INFLAMMATION PERIPHERIQUE DANS LA DEPRESSION
L'inflammation n'est pas liée qu'aux stress psychosociaux ou à la maltraitance
infantile. Elle peut-être liée à l'existence de maladies inflammatoires, aiguës ou
chroniques, à des problèmes d'origine allergique mais aussi à des problèmes de
santé tels que l'obésité.
L'alimentation joue un grand rôle dans l'inflammation car elle peut à elle seule, être
pro-inflammatoire. Le syndrôme de l'intestin perméable est souvent au carrefour de
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