L`Europe : un continent entre stagnation et tournant géopolitique

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Il s'agit du premier d'une nouvelle série d'examens trimestriels. Ils présentent les points clés des
évolutions sociales et économiques en Europe, et mettent en évidence les nouvelles contradictions
provoquées par ces évolutions aux niveaux politique et idéologique.
En juin 2014, la Banque mondiale a baissé ses prévisions pour la croissance mondiale de 3,2% à
2,8%, et la croissance des États-Unis d'Amérique de 2,8% à 2,1%. Après une période de faible
croissance économique au premier trimestre, le FMI s'attend à ce que les États-Unis devrait croître
de seulement 1,7% cette année, alors que précédemment la prévision était de 2%. Ces évolutions
confirment qu'on ne peut pas parler d'une reprise économique mondiale. En outre, aussi bien les
Etats-Unis que l'Union européenne ont connu des taux de croissance fragiles qui suggèrent que tous
les pays capitalistes développés suivent le modèle japonais : en raison de leur tendance continue à
réduire leur dette, ils sont incapables de sortir d'une période de stagnation marquée par la déflation.
Mais qu'est-ce que la stagnation ou même la contraction signifient ? Comme les élites politiques
continuent à défendre avec acharnement la répartition actuelle de la richesse et de la puissance, le
résultat est un fossé social qui ne cesse de s'élargir.
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Tout d'abord : la croissance des États-Unis d'Amérique continue d'être lente. Selon le Livre Beige,
un rapport sur l'économie publié par la Réserve fédérale, le lent processus de reprise de l'économie
américaine a continué pendant les mois d'été. L'économie a connu une croissance dans toutes les
régions du pays ; les dépenses dans le tourisme, l'automobile et les secteurs de la vente au détail ont
été les principaux moteurs. La Réserve fédérale a appelé le taux de croissance "lent à modéré". De
même, le marché du travail s'est amélioré dans toutes les régions du pays, indique le rapport. Pour
le secteur du logement, le rapport brosse un tableau mitigé - c'est aussi la raison pour laquelle le
FMI a réduit une fois de plus sa prévision pour le taux de croissance des États-Unis. 
Pour les évolutions aux États-Unis d'Amérique, les futures politiques de la Réserve fédérale sont
cruciales. En ce qui concerne le niveau bas des prix et une baisse du chômage, la Réserve fédérale a
acquis de nouveau des obligations d'État et les titres de créance via des investissements
immobiliers. Actuellement, le troisième programme d'achat d'obligations souveraines des États-
Unis (et les prêts hypothécaires) est dans sa phase finale. Seulement 15 milliards de dollars ont été
dépensés sur le marché dans les périodes entre les réunions régulières des agents de la Réserve
fédérale. Lors de la prochaine conférence du comité de direction de la FED en matière monétaire,
cette somme sera réduite à USD 5 milliards - et elle devrait être recouvrée en totalité pour la
réunion d'octobre au plus tard.En particulier, l'évolution du marché du travail américain (qui est fort
sur le papier) devrait avoir depuis longtemps suscité une réaction de la FED en matière de taux
d'intérêt, puisque le taux de chômage national a été réduit à 6,2% et est donc nettement inférieur à
l'objectif de 6,5 % défini comme « crucial » par l'ancien patron de la FED Ben Bernanke. 
Cependant, depuis un certain temps la structure du marché du travail américain a été telle qu'il ne
pouvait être question d'une situation du marché du travail satisfaisante aux Etats-Unis ; le nombre
de chômeurs de longue durée et de travailleurs à temps partiel reste trop élevé. Le taux de
participation au marché du travail a diminué de façon constante depuis 2000 et a diminué encore
plus fortement après la dernière récession. Avant de culminer au tournant du millénaire, le taux de
participation a été en constante augmentation. 
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A gauche : Diminution du taux de participation au marché du travail, en %.
A droite : Le taux de chômage de longue durée reste élevé, en millions de personnes
Sources :
A gauche : Bureau de la statistique du travail des Etats-Unis/
A droite : NZZ Infografik. Durée du chômage supérieure à 27 semaines.
Au cours des derniers mois, le taux de participation au marché du travail a, en fait, été stabilisé juste
en dessous de 63%. Toutefois, ce taux est encore inférieur de 3% au niveau observé au début de la
récession. En fait, il a longtemps été prévu que ce taux repartirait à la hausse avec le début de la
reprise économique (la récession américaine se termine officiellement en 2009) ; quand il y a
reprise économique, les travailleurs déjà licenciés sont réembauchés et les chômeurs sont
encouragés à chercher un emploi.
Expliquer pourquoi cela n'a pas été le cas et identifier les facteurs à l'origine des changements dans
le taux de participation au marché du travail sont sujets de débats houleux aux Etats-Unis. La
réponse à cette question est d'une importance particulière, et aussi la source de beaucoup de
controverses, car elle pourrait être un indicateur pour la durée et le niveau de l'augmentation des
taux d'intérêts fédéraux, qui devrait intervenir en 2015. L'évolution du taux de participation au
marché du travail comme mesure de l'offre de travail est également déterminante pour le taux de
croissance de l'économie américaine à moyen terme. Actuellement, il est juste de supposer qu'une
croissance modérée sera retenue et que cette situation fragile implique la poursuite des politiques
hésitantes de la Fed.
Deuxièmement : le gouvernement japonais doit accepter l'échec de leur tant vantés « Abenomics ».
Le Premier ministre japonais Shinzo Abe a promis de relancer l'inflation et donc de « résoudre » les
problèmes du pays. Les dernières données économiques, cependant, suggèrent une catastrophe, tout
montrant l'impact dévastateur des Abenomics.
Le gouvernement lui-même est revenu sur ses prévisions de croissance. Contrairement aux
allégations d'Abe, selon qui le secteur de l'exportation et l'ensemble de l'économie seraient stimulés
par l'intermédiaire d'une forte dépréciation du yen, le déficit du commerce extérieur augmente parce
que les citoyens japonais ont à dépenser de plus en plus en importations d'énergie coûteuses. Il y a
une baisse significative des nouvelles commandes pour les machines. L'augmentation de la TVA a
provoqué une contraction de l'économie japonaise parallèle à la baisse observée après le tsunami
catastrophique qui a frappé le pays en mars 2011. Le PIB a diminué avec une moyenne cumulée de
6,8% pour l'année ; les économistes s'attendent toutefois à un taux de croissance de 3-5% pour le
troisième trimestre. La consommation pourrait être stimulée si (principalement) les grandes
entreprises devaient verser des primes importantes à leurs employés. En outre, comme il devient de
plus en plus difficile pour les entreprises de trouver la main-d'œuvre dont elles ont besoin,
l'augmentation des salaires devient tout à fait probable.
Le Japon a été pris dans une période de déflation, et par conséquent une spirale à la baisse des prix,
depuis environ 15 ans maintenant. Ce phénomène paralyse l'économie parce que les consommateurs
achètent moins dans l'attente de voir les prix encore baisser et les entreprises reportent les
investissements. Les tentatives pour sortir de cette spirale peuvent être considérées comme un échec
et les ressources pour d'autres expériences économiques sont limitées. Le Japon a déjà la dette
nationale la plus élevée du monde, à 240% du PIB japonais. 
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Troisièmement : avec un taux de croissance de 7,4% au premier semestre 2014, l'économie chinoise,
et l'administration au pouvoir, ont définitivement mis le cap sur la croissance, mais la menace d'un
ralentissement à long terme de la dynamique du capital ne peut pas être écartée. Au delà des
questions de société internes à la Chine, ce qui est certain, c'est que la Chine est en train de perdre
lentement son rôle de moteur de la croissance économique mondiale.
Quatrièmement : de plus, les données provenant de l'UE et la zone euro sont également médiocres.
En comparaison avec le trimestre précédent, le PIB de la zone euro a stagné au deuxième trimestre,
après un taux de croissance décevant au cours des trois premiers mois de cette année. Pour l'UE 28,
a été une légère augmentation de 0,2% a été notée, ce qui représente une contraction par rapport à la
hausse de 0,3% observée au trimestre précédent. En France, le deuxième plus grand pays de la zone
euro, un taux de croissance nul a montré un développement économique décevant. À la lumière des
dernières données économiques, le gouvernement français s'est senti obligé de réduire sa prévision
pronostic de croissance de moitié, le PIB français ne croîtra que de 0,5%. Les perspectives pour un
pays voisin de la France, l'Italie, sont encore plus sombres : il est en récession avec un taux de 0,2%
de contraction. La stagnation de la croissance dans l'Union monétaire dure et le risque pour la
région de glisser dans une autre période de récession se développe grandit. Ce serait la troisième
fois en six ans ; après la récession à double creux, nous pourrions en vivre un troisième. 
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Cinquièmement : sept ans après la crise financière, l'Allemagne continue à se battre avec les
structures économiques nouvelles.Il n'y a aucun signe d'une reprise forte et durable ; l'économie
allemande a ralenti de manière significative au milieu de l'année. Le PIB allemand s'est contracté de
0,2% par rapport au trimestre précédent.
On s'attendait au moins à ce que les économies du centre connaissent une forte reprise qui - en
raison de la demande excessive - aboutirait même à un manque de capacités productives en 2015.
En revenant sur les dernières années, la façon dont l'économie a évolué ne peut pas être expliquée
par les théories économiques bien établies, qui sont basées sur un cycle continu de booms
économiques et de récessions. La Réserve fédérale a surestimé le taux de croissance des États-Unis
pour la cinquième année consécutive - et pas seulement un peu, mais avec une grande marge.
Cependant, la Fed s'accroche encore à ses espoirs d'une reprise économique durable et de
l'économie des États-Unis d'Amérique pour revenir à des taux de croissance robustes (voir fig. 3. 
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Depuis 2007, l'économie mondiale a traversé un état continu de stagnation. La «stagnation» est
souvent à définie à tort comme une période longue du laquelle une économie ne change guère. La
vérité est que, pendant une période de stagnation, il y a quelques légers changements ; le taux de
croissance, cependant, est en dessous de la tendance historique et restera à ce niveau faible à moins
que des changements structurels sont mis en œuvre. L'UE, en particulier, n'a pas réussi à faire de
progrès dans la lutte contre la crise ; la performance économique globale reste inférieure à son
niveau d'avant la crise. Les taux de chômage sont tristement élevés dans les pays européens en
crise, et leur compétitivité ne s'est pas améliorée, malgré les politiques d'austérité largement
appliquées en vue d'atteindre cet objectif. Bien que la plupart des pays aient connu une rupture de
tendance économique importante dans l'économie en termes de l'évolution de coûts unitaires du
travail - ce qui est l'objectif explicite des politiques de la concurrence - ces changements dans les
coûts de main-d'œuvre ne sont pas suffisantes pour renforcer la position de ces pays sur le marché
international (fig. 5). 
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