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prend toute son importance, ne relevant « pas seulement du folklore ou
de l’histoire des machines à sous » mais incarnant la force active du
joueur (Martignoni, 2000, p. 69). Précisément, il s’agit de faire
« pleuvoir » les pièces, les faire chuter du ciel, en faisant descendre la
puissance du hasard sur soi. L’impulsion verticale du haut vers le bas
que donne le joueur en actionnant le levier correspond à cette volonté
et à cette mise en action de la symbolique du mouvement
d’abaissement. De surcroît, le symbolisme de la rotation se cumule à
l’effet transcendantal puisque la roue fait partie des attributs de la
Fortune (et les rouleaux de la MAS). Si le joueur est inactif en
tapotant mécaniquement sur les touches, il redevient pleinement
acteur en saisissant le manche pour « réveiller le hasard, changer le
cours des choses », en percevant la machine comme un robot aux
entrailles de métal, doué « d’une sorte de volonté cliquetante, qui peut
refuser ou donner » (ibid.).
La tension provoquée par le va-et-vient de la machine qui donne,
reprend, refuse de donner, provoque le ressenti de l’excitation typique
du hasard. La griserie provient, comme avec les produits de la FDJ, du
principe de redistribution et de la rapidité des loteries instantanées. Au
Rapido comme aux MAS, la vitesse provoque le vertige en rendant
plus difficile la possession de soi. Les joueurs disent eux-mêmes qu’il
est « difficile de se maîtriser au Rapido parce qu’il y a des tirages tout
le temps » et, au casino, il faut « suivre la machine, aller aussi vite
qu’elle ». C’est d’ailleurs ce qui a valu au Rapido d’être remplacé par
le consensuel Amigo dont le seul nom atteste la volonté de donner une
image inoffensive et même bienveillante aux loteries de la FDJ
(conformément à sa stature, originaire de la Loterie nationale, dont les
initiatives en faveur des orphelins ou des gueules cassées ont façonné
une réputation débonnaire). Du côté du PMU, l’hypnose poussant au
jeu répétitif est assurée par les téléviseurs retransmettant les courses
hippiques sur lesquelles les parieurs viennent de miser. Qui plus est,
ce secteur de jeu se veut historiquement compétitif puisqu’il se fonde
sur un sport. Les turfistes ne jouent pas au hasard comme les joueurs