mauvaises solutions. Vous prétendez vous attaquer aux fondements des problèmes. En réalité,
vous les instrumentalisez pour satisfaire des intérêts particuliers. Il en résulte un constat pour le
moins inquiétant pour les législateurs que nous sommes : la philosophie de votre réforme repose
sur une tromperie construite à partir de faits matraqués pour être instrumentalisés.
Ainsi, les objectifs affichés de protection de l’ordre public et social et de préservation de la santé
publique, qui devraient être au centre des préoccupations de votre politique visant à réguler les
jeux, ne sont que des leurres destinés à faire passer la pilule de l’ouverture à la concurrence du
secteur des jeux d’argent et de hasard.
Certes, nous nous réjouissons de la conservation de la forme mutuelle des paris hippiques. Nous
attirerons néanmoins votre attention au cours des débats sur les risques que fait peser cette
réforme sur toute la filière équine, notamment en termes d’emplois et de perte de qualité de la
filière. Mesurons bien ce que représente cette filière, qui va de l’élevage aux employés du PMU,
en particulier pour des régions comme la Normandie.
L’extension du champ des jeux avec l’autorisation d’une offre de poker va également dans le bon
sens. Mais, pour le reste, nous voyons surtout dans votre texte de mauvaises solutions.
Nous contestons énergiquement la logique même de l’ouverture à la concurrence sur un secteur
aussi sensible que celui des jeux de hasard et d’argent. Pourquoi ne pas avoir imaginé une simple
modernisation des opérateurs historiques français en leur permettant notamment d’exploiter une
palette élargie de jeux en ligne ?
Addiction et surendettement des joueurs, corruption dans le sport et les courses, trucage des
matches, blanchiment d’argent, les risques avérés d’une telle libéralisation, même régulée, sont
trop nombreux pour que la puissance publique se prive du contrôle des acteurs historiques du
secteur.
De surcroît, le risque de nuisance sur la santé publique, l’ordre public et l’ordre social est loin
d’être négligeable et appelle à la prudence. Mais votre volonté de mettre à bas l’État
administrateur pour bâtir l’État stratège et en faire un poste avancé du libéralisme débridé
l’emporte pour marginaliser ses prérogatives de puissance publique.
En corollaire, nous sommes, par principe, opposés à l’autorisation de la publicité en faveur d’un
opérateur de jeux ou de paris agréé. Dans la mesure où le rôle de toute publicité réside dans
l’incitation à consommer, il est irresponsable d’alléguer qu’elle ne fait courir aucun risque à la
santé publique. Il est hypocrite d’arguer qu’elle contrera efficacement l’offre illégale.
Nous nous opposons, avec une plus grande fermeté encore, à la généralisation en France des
paris à cote fixe. Leur éthique est discutable : ils opposent le joueur et le bookmaker, l’intérêt du
second étant de voir perdre le premier. Ils comportent des risques importants pour la santé
publique dans la mesure où les gains potentiels, souvent plus attrayants que pour les paris
mutuels, accroissent le potentiel addictif de ce type de pari, au détriment par exemple du PMU.
Par ailleurs, le pari à cote fixe fera courir un risque non négligeable au secteur sportif. L’exemple
du Royaume-Uni est à cet égard instructif, et le Gouvernement serait bien inspiré de ne pas s’en
inspirer : outre-Manche, les cas de fraude, de corruption, de paris truqués, de cotes pourries sont
avérés et entachent régulièrement le monde du sport.
Pourquoi ne pas suivre la voie de la sagesse de dizaines d’États américains qui, en raison des
risques évoqués, ont interdit cette forme de paris ? À la lecture de vos propositions, comment ne
pas craindre que, encore une fois, ce soit les citoyens les plus vulnérables qui fassent les frais de
cette libéralisation ?
J’en viens aux motivations de ce projet de loi.
De l’instrumentalisation des faits à la justification par l’absurde, vous vous êtes livré à un petit