ENJEUX ET PERSPETIVES DU SECTEUR INFORMEL EN

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ENJEUX ET PERSPETIVES DU SECTEUR INFORMEL EN AFRIQUE
La question de développement de l’Afrique est devenue une préoccupation majeure de la Communauté
internationale. Aujourd’hui, plusieurs zones du globe connaissent une implantation progressive de l’émergence
économique, mais force est de constater que malgré quelques succès mitigés, l’Afrique présente toujours des
résultats insuffisants. Cette situation est beaucoup plus marquée dans la partie subsaharienne qu’affirme René
Dumont, « l’Afrique est mal partie». Plusieurs facteurs expliquent les raisons de ce blocage économique.
D’après le récent rapport fait par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) en 2011, sur
quarante deux (42) nations identifiées comme ayant « la plus faible valeur de l’Indice de Développement
Humain », trente quatre (34) se trouvent en Afrique 1. Ajoutant à cela, la dépendance financière extérieure qui
est l’une des manifestations les plus évidentes, en plus l’endettement croissant des Etats africains dû à la
mauvaise politique en matière de développement, lesquels seraient à l’origine du retard accusé de son
décollage économique.
C’est pourquoi, selon l’analyse macro économique faite, l’Afrique est classée parmi les pays pauvres très
endettés (PPTE), et elle reste le seul continent au monde le plus touché par l’extrême pauvreté. Mais à l’heure
actuelle, les territoires africains apparaissent comme de nouveaux espaces créateurs de richesses et
constituent de ce fait, un angle de recherche pour stimuler l’analyse des capacités sur l’entrepreneuriat local
neutralisé par l’absence de moyens financiers. Bien que l’Afrique dispose d’immenses potentialités de
ressources naturelles, mais qui demeurent inexploitées. La relance du secteur informel peut être une voie pour
l’aider à résoudre le problème de son déséquilibre économique.
Ainsi, que faut-il entendre par le secteur informel? Puis, ce secteur présente-t-il combien de variétés
d’activités ?
Le secteur informel selon le Bureau international de Travail (BIT), se définit comme « un ensemble d’unités
produisant des biens et des services en vue principalement de créer des emplois et des revenus pour les
personnes concernées. Ces unités, ayant un faible niveau d’organisation, opèrent à petite échelle et de manière
spécifique, avec peu ou pas de division entre le travail et le capital en tant que facteurs de production. Les
relations de travail, lorsqu’elles existent, sont surtout fondées sur l’emploi occasionnel, les relations de parenté
ou les relations personnelles et sociales plutôt que sur des accords contractuels comportant des garanties en
bonne et due forme»2.
En effet, le secteur informel présente une gamme variée d’activités difficile à les définir. Ainsi, on distingue :

L’informel de production (agriculture périurbaine, production horticole, menuiserie bois et métal,
etc.);
1
2
Rapport du PNUD, 2011.
Bureau international de Travail, 1993
1

L’informel d’art (bijouterie, sculpture, tissage, couture, broderie, maroquinerie, cordonnerie, peinture,
etc.) ;

L’informel de services (restauration populaire, transports urbains, coiffure, réparation mécanique ou
électrique, etc.) ;

L’informel d’échanges (petites industries, distribution, commerce, change, tontines etc.).
On se demande aujourd’hui, est- ce le secteur informel a d’impact dans l’économie de la sous région Afrique ?
Dans le contexte actuel, quel problème ce secteur rencontre t-il? Et comment peut-on relever les défis pour
une véritable intégration régionale de l’Afrique?
I – Impacts du secteur informel dans la sous région Afrique.
Devant tant de questions, nous pouvons jeter des regards croisés sur le développement en Afrique pour lancer
des investigations objectives sur le problème de la croissance économique africaine. Aujourd’hui, pour une
intégration plus évidente de l'Afrique dans l'économie régionale peut stimuler les échanges commerciaux pour
la croissance économique à l’échelle régionale et mondiale. Pour qu’il ait une véritable croissance économique,
un accent particulier doit être mis sur le secteur informel, qui peut être soutenu qu’à travers le transfert de
connaissances en vue de l’intégration régionale de l’Afrique. C’est pourquoi, le recours aux poly activités est un
atout pour l’intégration régionale en Afrique. Le souci consisterait à multiplier les activités du secteur informel.
Car il joue un rôle très important en Afrique et constitue d’une part comme l’une des principales sources
d'emploi et de revenu, d’autre part l'un des gros producteurs de biens et de services et donc l’un des
contributeurs au produit intérieur brut (PIB) de l'économie. Selon l'Organisation International de Travail, au
cours des années 2000 en Afrique, la population active a augmenté de 96 millions de personnes, tandis que le
nombre d'emplois créés a augmenté de seulement 63 millions, soit un écart de 36 millions personnes sont
employés dans le secteur informel.
A l’heure actuelle, ce secteur reste toujours un acteur clé du marché du travail sur le plan de l'intégration
régionale de l’Afrique. Tandis que les statistiques officielles indiquent que le commerce intra-africain
représente seulement 12,8 % du commerce extérieur total en 2011 3. Quelques études spéciales ont trouvé
que le commerce transfrontalier informel représente de 15 % du commerce extérieur total au Nigeria à plus de
20 % dans des pays comme la République Centrafricaine et la Guinée équatoriale.
La récente enquête administrée par la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique (UNECA)
montre que secteur informel est devenu le principal pourvoyeur d'emploi urbain et rural, bien que les
entreprises modernes assurent encore 80 % de la valeur ajoutée non-agricole. On peut toutefois affirmer que
l’informel a toujours été le principal moteur de la croissance économique. Dans la sous région, on assiste à la
création des micro-entreprises de construction des maisons, des fabricantes de meubles et des petites
3
Rapport de la CEA sur les Perspectives Économiques en Afrique 2012.
2
industries agroalimentaires, qui constituent là comme l’un des moyens de lutte contre la pauvreté. D'un côté,
les petits producteurs appartiennent à des réseaux caractérisés par des relations interpersonnelles de
confiance et de coopération et liés aux unités domestiques par l’utilisation de la main-d’œuvre familiale, mais
qui sont insérés au marché, qui subissent la concurrence. En effet, plusieurs travaux montrent que les activités
informelles sont incompatibles aux normes économiques et à l’économie de marché. En outre, les échanges
informels trouvent leur source dans les disparités des politiques économiques, financières, monétaires et
commerciales bien distinctes selon les pays. Les activités informelles se déploient sur des espaces frontaliers, à
partir de réseaux marchands différenciés selon les régions, et structurés depuis longtemps. Sur la base de
solidarités ethniques et d'échanges régionaux, le comportement des acteurs n'est pas irrationnel s'insère dans
un cadre communautaire de référence. C’est pourquoi, la volonté des uns est de rendre officiel l'informel.
L'économie informelle dégage des ressources et représente un facteur de décollage économique.
De nos jours, on se rend compte qu’à côté de l’artisanat traditionnel se développe, l’informel de production,
qui vend des produits comparables aux biens et services modernes, mais les pouvoirs d'achat sont plus faibles
et avec des moyens plus limités. Les stratégies développées par l’informel de production nécessitent
l’adaptation des acteurs, la recherche et mise en œuvre des innovations technologiques, l’articulation avec le
secteur moderne, trois types d’activités sont à retenir à savoir : l’agriculture périurbaine, les activités de tissage
et la menuiserie de bois, illustrent ci-après à leur manière et ces dynamiques dans les contextes bien différents.
D’où une partie des citadins s’adonne à l’agriculture périurbaine, qualifiée de l’agriculture vivrière peu
développée. La population a trouvé dans cette activité deux motifs de satisfaction : la création d’emplois et
l’approvisionnement en produits frais. Le rôle de l’agriculture périurbaine dans l’emploi, l’alimentation des
villes et surtout son mode de fonctionnement font qu’elle est ici abordée comme un pan de l’économie
informelle.
Les activités de tissage qui sont anciennes, ont su s’adapter à la modernisation des sociétés, notamment dans
le domaine de l’habillement. A côté du secteur de survie, on assiste ici à un mouvement dynamique soutenu
par la demande, accompagné par une innovation technologique. Ce secteur a un effet multiplicateur important
pour les nombreuses filières connexes allant de la culture du coton en passant par sa récolte, la filature, la
teinture, le tissage, la bonneterie, la confection, le lavage et la commercialisation. Ces différentes filières font
du secteur textile le plus grand pourvoyeur d’emplois en Afrique de l’Ouest après le secteur agricole. Le secteur
de tissage au Mali utilise environ 65 % des artisans, ensuite 50 % au Burkina Faso puis 40 % au Ghana.
Au Mali, la teinture du basin a connu un essor, il compte actuellement plusieurs milliers d’ateliers de teinture.
Cet artisanat s’est aussi développé ailleurs dans la sous-région avec des pôles importants en Guinée, au
Sénégal, au Bénin et au Nigeria, chaque région s’efforce à évoluer vers une performance. Les teinturières
maliennes demeurent cependant les plus réputées. Les actions les plus innovantes concernent l’abandon
progressif des teintures traditionnelles tirées de l’indigo et des écorces d’arbres, qui ne résistent souvent pas
au lavage. Ces produits sont ensuite remplacés par les colorants chimiques importés d’Europe.
3
Or, le développement du textile traditionnel a connu des innovations parallèles tant dans le domaine de la
filature, du tissage que de la teinture. Ces innovations confèrent à ces tissus une nouvelle qualité qui pousse les
créateurs de mode à s’y intéresser et laissent penser que le secteur textile traditionnel peut devenir l’une des
composantes du décollage économique. La menuiserie du bois fait partie des secteurs les mieux encadrés de
l’artisanat africain. Elle concerne à la fois l’informel de production, de services et d’art. Au Bénin, les
menuisiers se sont constitués en coopératives sur l’ensemble du territoire national. Mais, ils peuvent être
classés en trois catégories :
La première catégorie rassemble le plus d’adhérents. Elle est constituée d’artisans qui travaillent à la main et
sans aucun équipement en dehors de la scie et du rabot. Ils travaillent le bois de façon mécanique pour
produire de petits objets de consommation courante.
Les artisans de la deuxième catégorie sont plus installés dans les petites agglomérations et les quartiers
périphériques des principales villes. Ils disposent d’un minimum d’équipements et utilisent les services de
scierie pour préparer les bois qu’ils transforment en fauteuils, meubles de salon de niveau moyen, tables à
manger, chaises et portes en bois, etc. Ces artisans peuvent accéder à de petits marchés liés à l’habitation ou
travailler sous-traitance pour les menuisiers de plus grande envergure et pour quelques entreprises de
construction.
La troisième catégorie de menuisiers du bois fait partie des « entreprises émergentes », établies sous forme de
Petites et Moyennes Entreprises (PME) et possèdent un équipement important et bien organisés. Ces
menuisiers peuvent répondre à des appels d’offre ou participer à de gros chantiers de construction. La
production est plus diversifiée, ce qui permet à ces PME d’exporter des meubles vers les pays limitrophes et
parfois vers l’Europe. La plupart de ces entreprises utilise d’importante main-d’œuvre composée d’ouvriers, de
machinistes, de décorateurs, de matelassiers et de dessinateurs. Actuellement, ce métier fait face à beaucoup
de difficultés liées au coût d’installation, aux normes de construction, à la rareté d’une main-d’œuvre qualifiée
et des matières premières etc. Toutes ces contraintes se traduisent par des difficultés pour trouver des
marchés.
L’informel apparait comme le principal pourvoyeur d’emplois. Au niveau des villes côtières, les unités du
secteur informel contribuent à 37 % du Produit Local Brut (PLB). Il est à noter que ce secteur contribue en
revanche peu aux dépenses publiques locales liées à l’urbanisation (eau, électricité, voierie...). De nombreuses
activités de l’informel ne sont peu assujetties aux impôts et taxes. Il en résulte que les collectivités locales
disposent de budgets qui ne reflètent en aucun cas le dynamisme économique des villes. Pourtant, des
expériences menées dans la sous région montrent que la marge de manœuvre des responsables locaux est
importante en matière de mobilisation de ressources locales. En dépit des efforts croissants déployés en vue
d’analyser l’économie informelle, les activités correspondantes demeurent insuffisamment mesurées voire non
enregistrées à l’échelle nationale.
4
Les réseaux de commerce informel au niveau régional, représentent 12,5 % des échanges dans l’espace
CEDEAO. Mais il en résulte que ces réseaux s’effectuent sur une base intra-régionale. Le commerce régional
représente en réalité plus du double de commerce extérieur. Cependant, le poids dans les échanges de la
région des exportations de pétrole et la nature informelle d’une bonne partie des échanges entre pays non
exportateurs de pétrole, conduisent à sous-estimer l’importance de ce commerce, qui peut-être un véritable
moteur de l’intégration régionale. Les commerçants exploitent les opportunités liées à la production agricole
et industrielle régionale. La libre circulation des marchandises au niveau de la sous région Afrique doit faciliter
ces échanges et la création d’un marché régional. A cela s’ajoute la difficulté qu’éprouvent les acteurs à opérer
des transactions financières entre les pays, soit pour des raisons techniques ou pour des motifs
réglementaires : inconvertibilité des monnaies entre la zone francophone et la zone anglophone.
Les échanges informels s’appuient sur des réseaux marchands couvrent toute la sous-région. Les plateformes
commerciales entre les pays d’Afrique, les plus grandes de la région écoulent des biens manufacturés en
provenance de l’Europe, de l’Asie et du Moyen-Orient. Ces échanges sont devenus un facteur de régulation et
d’une meilleure distribution des richesses dans la zone. Au niveau local, l’informel joue un rôle incontournable
dans les échanges commerciaux et a réussi à avoir un poids dominant sur l’économique nationale.
En effet, la constitution des groupements régionaux peuvent relever d'un interventionnisme étatique, du jeu
des acteurs, ou d'une ouverture sur l'extérieur à partir de l'économie de marché : Le rôle de l'État se diffère
d’un continent à un continent. Sa légitimité, sa constitution, le comportement d'ordre ethnique et religieux,
constituent des variables à intégrer dans les politiques économiques africaines. Car elles influent sur les
grandes orientations politiques, sur la hiérarchie des objectifs sur le rôle assigné aux organisations sur le poids
et le respect des conventions sur la place laissée aux entreprises. Alors qu'en Asie de l’Est, le cadre libéral
relatif aux mécanismes de marché est un modèle pour l’Afrique de redynamiser le secteur informel en vue de
la réglementation administrative, qui tend à canaliser des dynamiques comportements.
A propos du jeu des acteurs, les enquêtes de terrain montrent que les politiques macro-économiques décidées
d'en haut se heurtent aux comportements des agents du bas. Les exemples récents des programmes
d'ajustement structurel en Afrique subsaharienne peuvent en témoigner. Il convient donc de tenir compte des
stratégies des acteurs insérés dans leur environnement social le plus proche.
Enfin, en Asie le secteur informel constitue un facteur non négligeable dans l'intégration sur la base d'un
potentiel de petites entreprises dont les responsables qualifiés ont des comportements d'entrepreneurs
dynamiques. L'acteur économique asiatique peut ainsi déployer son esprit d'initiative d'autant qu'il bénéficie
de conditions macro économiques initiales favorables : économies protégées, interventionnisme étatique avec
un rôle efficace d'orientation des ressources vers des projets à long terme (révolution verte, développement
des infrastructures), politique de substitution aux importations à partir de stratégies cohérentes, clairement
définies, liberté d'entreprendre, taux de change adapté aux conditions du marché, mécanismes du marché non
bridés. Il trouve donc dans le secteur informel des espoirs de réussite.
5
En Afrique, les relations commerciales se font à base ethnique et parfois sont situées dans un espace
multinational. L'étude des comportements des agents individuels sur les marchés parallèles devient
incontournable d'autant que les échanges informels en Afrique se font avec les opérateurs asiatiques. L'impact
des activités informelles puis leur rôle en Afrique se situent dans le contexte macro-économique où l'on
retrouve l'État, le marché, les acteurs au cœur d'un processus de régionalisation. De toute évidence, il faut
distinguer le petit artisanat, le petit commerce de rues, les multiples services à faible rentabilité, des activités
informelles plus porteuses, et qui peuvent créer de profits substantiels.
A propos des petites industries asiatiques, précisément à Taïwan, l'État demande à des entreprises élues de
transformer les matières premières qu'il leur vend puis qu'il rachète après transformation pour ensuite les
exporter. Cela permet aux entreprises d'échapper au problème d’approvisionnement en matières premières,
au capital d'exploitation et au marketing. Certaines entreprises ont bénéficié d’un appui de la part de l’Etat
dans chacune des phases de leur activité, les aidant par le renforcement de leurs capacités technologiques, les
favorisant à l’avenir leur mouvement de délocalisation. L'État apparaît comme un vecteur du développement.
La volonté de participer aux échanges internationaux et de favoriser les mécanismes du marché ont été
accompagnés d'une intervention étatique de façon permanente.
Le succès du processus de libéralisation tient en partie à l'existence d'un Etat fort, capable de mobiliser les
moyens de renforcer les décisions. Mais, les échecs de divers pays du Sud, notamment l’Afrique sont le
résultat d'un État faible. En Asie, la complémentarité entre les petites et les grandes entreprises permet aux
petites de profiter des conditions de crédit obtenues par les grandes.
Dans une étude relative aux tontines africaines et asiatiques, on constate que les pratiques financières
informelles asiatiques sont davantage orientées vers la disponibilité du crédit qui ne peut être pratiquée en
Afrique. Les emprunts peuvent être opérés auprès de la famille, des amis, du propriétaire, du commerçant ainsi
qu'auprès des prêteurs professionnels, c'est-à-dire ceux qui accordent des crédits au nom d'une banque. Les
tontines asiatiques, qui sont du domaine informel, ont une vocation économique où les fonds sont utilisés pour
l'investissement.
Ainsi qu’en Asie, l'organisation des tontines est devenue un véritable métier, elles sont gérées exactement
comme des véritables institutions financières quelque soit leurs tailles. Les responsables politiques leur ont
accordé un cadre légal à partir duquel leur activité peut se développer. On retrouve ici, une organisation
structurée mais informelle, qui peut s'étendre sans que les autorités essaient de la remplacer par des
organismes bancaires.
On constate qu’en Afrique une bonne politique en matière d’appui au secteur informel est relativement
insuffisante.
A ce titre, quels enseignements l’Afrique peut-elle tirer de l’Asie du rôle de l'État face au secteur informel pour
son intégration régionale?
6
Or les tendances ont limité la performance des activités informelles, qui ne saurait être au niveau de la taille
des marchés africains où est conditionnée par les bas revenus. En outre, le manque d’infrastructures routières
en Afrique sont un handicap, les moyens de transport sont inadaptés pour l’écoulement des produits de base.
On trouve beaucoup de petits sous-marchés limités en volume et en extension spatiale. La constitution d'un
processus de l’intégration régionale permettrait à court et moyen terme de multiplier les échanges de biens et
services différenciés, d’une part et d'autre part d’accroitre les économies nationales. Les potentialités
d'exportation ouvrent des possibilités aux micro-entreprises informelles à une croissance. L'exemple du
développement de filières horticoles dans l'ouest du Cameroun sous l'impulsion des Bamilékés est révélateur,
et leur dynamisme dans un contexte de solidarité ethnique leur permettait d'exporter vers les pays frontaliers,
dont le Gabon. De toute évidence, des moyens de transport adaptés et des libre-échanges des contraintes
douanières ne pourraient que favoriser une telle activité.
Par ailleurs, dans la sous région Afrique, les tontines jouent un rôle majeur dans le circuit financier, mais à la
différence des tontines asiatiques, les tontines africaines ont plutôt une vocation sociale où les fonds sont
d'abord utilisés pour la consommation, excepté quelques cas récents au Bénin et au Togo. Le recours au
marché financier informel, est davantage, limite la taille du marché qui pose problème. Elles sont liées au
niveau de l'épargne domestique, laquelle dépend à terme de la croissance économique où des performances
économiques nationales.
Toutefois on peut proposer une réduction des charges administratives et fiscales sur les entreprises informelles
et faire en sorte que l'environnement économique soit plus favorable à l'expansion de leurs activités. Le
phénomène des petits commerçants, communément appelés Boubanguéré en Centrafrique, est un secteur mal
structuré et mal maîtrisé, ils font du commerce clandestin. Dans la plupart de temps, ils travaillent pour le
compte des Libaniens et font perdre à l’Etat des dizaines de milliards. A ce propos, les pays qui ont entamé des
réformes en matière fiscale, semblent connaître de meilleures performances économiques. De même, devant
une étude comparative faite entre les pays asiatiques et africains, le cas de Thaïlande où la fiscalité est plus
simple puisque l'impôt sur les sociétés, représente 90% de la charge fiscale totale, depuis, les petites
entreprises non assujetties sont exonérées de la Taxe sur Valeur Ajoutée (TVA). La règle institutionnelle ne
s'applique pas uniformément. Dans le même ordre d’idée, une étude faite sur le Niger, les auteurs relèvent
que la fiscalité est plus ou moins insupportable selon la conjoncture économique. On constate que c’est en
Afrique que le rôle de l’Etat interventionnisme est inadapté.
On se demande dans quelle mesure les réformes en matière fiscale sont-elles nécessaires? Pour qu’il ait une
véritable intégration de l’Afrique, quel rôle doit jouer les dirigeants, les décideurs et les experts africains et
ceux de la diaspora pour la relance du secteur informel ?
II - Perspectives
L’Organisation internationale du Travail (OIT) estime que 80% de la main-d’œuvre non agricole en Afrique
subsaharienne sont employés dans l’économie informelle, tout comme s’y trouvent 92% des offres d’emploi
destinées aux femmes dans cette région. En part du revenu national brut, le secteur informel va de moins de
7
30% en Afrique du Sud et près de 60% au Nigéria. Pourtant, les opérations du secteur informel rencontrent
d’énormes problèmes, allant du harcèlement par les autorités au manque d’accès au crédit et aux services de
base, tels que l’électricité et l’eau. Cette situation est imputable à l’absence d’un cadre directif. Combler la
fracture entre le secteur formel et le secteur informel devrait être au centre des plans tendant à instaurer un
climat d’affaires africain propice et ouvert à tous, qui soutienne diverses catégories d’opérateurs informels. Les
entreprises du secteur informel pourraient devenir des sociétés du secteur formel plus productives, créant des
emplois, générant de la croissance et augmentant utilement les recettes fiscales4.
Les différents exemples présentés attestent le secteur informel contribue à la croissance économique. Car, il
apparait comme un moteur de l’économie régionale. A cela, un certain nombre de défis doit être envisagé pour
incorporer l’économie informelle dans le processus de développement. Au niveau des politiques publiques, les
États doivent mettre l’accent sur le secteur informel, puis qu’il demeure une ressource majeure pour
l’économie en termes d’emploi et de revenus, mais aussi en termes de prélèvement fiscal. L’accompagnement
des entreprises par l’État permettra de faire face aux problèmes qu’elles rencontrent. L’appui de ce secteur
consiste à favoriser les liens existant entre l’économie formelle et informelle, de faciliter l’organisation du
crédit et l’accès à la microfinance mais également d’anticiper les nouveaux enjeux auxquels il devra faire face à
travers des politiques de formation professionnelle adaptées.
Les politiques publiques en faveur du secteur informel doivent favoriser à l’accès de ce secteur au financement
des collectivités locales, le rôle de l’Etat interventionniste apparait à ce niveau. En effet, un important défi est
posé à ces collectivités, le fait de se conforter à la légitimation de leur action, et cela implique une amélioration
de leur dépense. Car moins une collectivité locale dépense, moins elle est capable de convaincre le bien-fondé
des impôts et elle peut mobiliser des financements. Il serait possible d’augmenter les ressources locales sans
changer le niveau de la fiscalité. La mise en place d’un marché commun en Afrique, permet d’harmoniser les
politiques économiques et monétaires en vue de modifier les échanges informels. Le commerce est l’activité
prépondérante du secteur informel. Au niveau régional, les réseaux marchands exploitent plus les opportunités
créées par la disparité des politiques économiques et monétaires entre pays que celles liées au démantèlement
des barrières frontalières.
Dans l’espace CEMAC, le développement de fonds rotatif, communément appelé tontine, le système de
microfinance traditionnelle, un secteur qui peut évoluer vers une structure de microfinance moderne et
structurée, si l’on y met un accent particulier. Le rôle du secteur informel dans l’intégration régionale, qui doit
s’inscrire dans le cadre d’une proposition d’un programme d’urgence en Afrique. Puisqu'il peut favoriser un
instrument financier adéquat, un outil de promotion technique et productive, une stratégie des débouchés
commerciaux, la diversification des marchés et surtout, la promotion de groupements socioprofessionnels
autonomes et un nouvel acteur social.
De ce fait, les petits producteurs sont incités à travailler plus ou amenés à satisfaire leurs besoins. Les
organisations de microfinance telles que les fonds rotatifs «tontines» sont prêtes à se développer et à
4
Rapport économique sur l’Afrique 2012, P.128
8
s'orienter vers de véritables institutions de crédit, soucieuses de faire face aux besoins primaires de
consommation et d'épargne par précaution. Les micro-entreprises africaines se replient sur elles-mêmes et
restent isolées. Elles ne peuvent maîtriser les connaissances nécessaires et acquérir la capacité de construire
des réseaux de distribution régionaux, qui se limitent aux coûts de transaction et satisfaire les conditions de
croissance économique pour son intégration régionale.
Dans un contexte régional, le secteur informel joue d’important rôle, par la production artisanale d'huile de
palme en Côte d'Ivoire. Le rendement ivoirien du cacao de 400 kg est passé à 450 kg/ha en 2002, mais il reste
toujours faible selon l’analyse macroéconomique. Cependant en Malaisie, le rendement annuel était de 2000
kg/ha. Les rapports de clientèle traditionnels au sein d'activités informelles se localisent à divers niveaux :
local, national, régional au sein d'une filière structurée et organisée où l'État était présent, intervient en
subventionnant les producteurs afin de limiter les prix à l'exportation.
A Madagascar, une tentative a été envisagée d’une politique de l’Etat interventionniste dont les effets ont
toujours été moins probants. D’où, les autorités ont accordé un monopole d'achat du riz à des sociétés d'État.
Les bas prix pratiqués, inférieurs aux coûts réels, n'ont guère couvert les frais de charges dans le
développement de chaînes de valeur, depuis l'usinage, de stockage et à la commercialisation. Ainsi, l'exemple
de l'huile de palme en Côte-d'Ivoire, où le rendement moyen en hectare était de 1900kg contrairement à ce qui
se passe en Malaisie. La situation de Malaisie est une bonne illustration pour aider les Etats africains à
accroitre leur économie.
En Asie, les conditions fiscales sont souples pour stimuler la production et favoriser l'isolement du secteur
informel. Les exemples concrets cités en amont montrent que ce ne sont pas les dotations factorielles initiales
ou les conditions naturelles qui expliquent les écarts de compétitivité entre l'Asie et l'Afrique, mais bien plus,
dans les cadres plus ou moins réglementaires auxquels sont assujetties au développement de chaînes de
valeur.
Par ailleurs, on sait que les prélèvements des caisses de stabilisation sont élevés. Si les taux moyens officiels de
protection nominale directe des exportations agricoles étaient de 20,5 % en Côte-d'Ivoire, au Ghana et en
Zambie, ils étaient en moyenne de 14,6 %. Cela expliquait en partie les écarts de compétitivité au profit de
l'Asie du Sud-Est. Le retard accumulé ne peut guère favoriser le dynamisme de l'agriculture et la croissance du
secteur secondaire, source de recettes en devises.
En cela, on peut dire que le paradoxe vient du fait que les agriculteurs ne demandent rien d'autre qu'un
environnement économique interne plus favorable à leurs activités et plus stable dans le temps. Les circuits de
commercialisation Bamiléké informels n'ont guère de «leçon» à recevoir de l'Administration. Dans le Cameroun
de l'Ouest jusqu'à Douala, le développement de filière débute au stade de la production jusqu’à la
commercialisation, en passant par diverses petites villes intermédiaires, ce qui mériterait des infrastructures
routières et des entrepôts pour assurer la conservation des produits maraîchers et fruitiers ou l’on devrait
créer des centres de conditionnement comme des initiatives faites en Nairobi, au Kenya. L'État peut assumer
un tel rôle afin d'orienter les ressources vers des projets à long terme.
9
En somme, l'échec des tentatives d'intégration régionale en Afrique tient en partie à l'incapacité des États qui
n’assument pas pleinement leur rôle, en plus n’accordent pas d’importance au secteur informel. Le commerce
clandestin, les échanges frontaliers favorisés par la différenciation des taux de change, le détournement des
mécanismes de compensation, des coûts de transaction élevés, du fait du nombre des intermédiaires sont
autant de facteurs qui pénalisent le processus d'intégration.
Pour relever ce défi, les institutions économiques régionales peuvent fournir des informations adéquates sur la
structure d'incitation d'une économie sous régionale. Il est donc souhaitable de favoriser les activités
commerciales existantes même si elles sont informelles, de substituer à une réglementation administrative et
une législation adaptée au droit des affaires, un arbitrage fiable en cas de litige, une fiscalité stable qui ne
pénalise pas les acteurs producteurs et une gestion des affaires publiques saine. Il faut entreprendre des
nouvelles orientations, qui n’auraient le mérite de créer un environnement macro-économique et une
politique stable, puis créer un nouveau cadre juridique spécial.
En fait, les Etats africains doivent prendre l’exemple des pays asiatiques pour accroitre leur économie en vue
d’une intégration régionale, dont voici quelques pistes de solutions :

Organiser des rencontres de haut niveau afin de dégager des solutions relatives au problème du
développement du secteur informel;

Redéfinir le rôle des différents acteurs, notamment : l’Etat interventionniste et les producteurs dans le
contexte de l’intégration régionale en Afrique actuelle ;

Créer un nouveau partenariat avec les pays à l’économie émergente pour financer le secteur informel.
Enfin, l’Afrique doit créer ses propres circuits économiques en mettant l’accent sur le secteur informel, elle doit
commercer par l’économie à petite échelle pour une croissance véritable. A cela, la mis en place d’un
observatoire économique dans la sous région serait un succès, dont sa mission est de produire des statistiques
fiables sur des questions relatives aux échanges économiques, ensuite l'ouverture de pôles régionaux de
formation pour les cadres africains, puis l’organisation des rencontres d’échanges biannuelles des experts
africains pour dégager des solutions sur les enjeux du développement économique de l’Afrique. Pour une
véritable intégration régionale, l’Afrique doit désormais coopérer avec des nouveaux partenaires financiers.
Qu’au cours de cette conférence, que les Commissions économiques régionales, notamment la CEA, l’Union
Africaine, et la BAD mettent en place un Fonds africain pour accélérer l’intégration régionale. Ensuite redéfinir
le rôle des différents acteurs dans le contexte de l’Afrique actuelle. Puis, favoriser l’accès des Etats africains aux
investissements étrangers directs, Enfin, instituer un cadre juridique commun pour toute l’Afrique.
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