PREFACE
Le concept ancien et noble de nécessité se déploie et se
prolonge dans l'histoire de la pensée en ceux de cause (un fait
ou un phénomène), de causalité (un principe), et de déter-
minisme (la prévision rendue possible par la générativité du
langage naturel et par le calcul). La méditation sur ces pro-
blèmes m'a conduit à une métaphysique du déterminisme cau-
saI, universel et absolu: pour tout système, rien de ce qui
arrive à un endroit et à un moment donné n'aurait pu arriver
autrement, étant donné son état à l'instant précédent infini-
ment proche de lui.
La série de principes qui constituent la présente théorie
du déterminisme causal est beaucoup moins la description
d'une connaissance prouvée ou démontrée, que l'expression
d'un besoin de rationalité. La philosophie comme sa fille, la
science, est avant tout une recherche d'intelligibilité. Admettre
d'emblée le caractère métaphysique de cette réflexion signifie
que les thèses principales sont des principes, des idéaux, ou, si
l'on veut, des croyances rationnelles, recevables dans la
mesure où elles tiennent ensemble et contribuent à reconnaître
un sens à l'évolution des systèmes du monde.
Parmi les exemples, discutables, que l'on donne cou-
ramment des phénomènes spontanés, certains ont été admis de
longue date, comme l'acte libre; d'autres sont récents, comme
le saut quantique. Mais si expliquer quelque chose veut dire
montrer ses causes, exposer les principes de son évolution,
alors les phénomènes spontanés, s'ils existent, sont inex-
plicables et indescriptibles. La raison en est que les systèmes
de symboles, indispensables à toute description, sont des
réseaux conceptuels servant à fixer les choses, à les classer et