Définition 1.1–

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LA THÉORIE GÉNÉRALE DES GROUPES
GUILLAUME RICOTTA
A BSTRACT. L’objectif de ce polycopié est de rassembler les diverses notions sur
les groupes découvertes au fil des chapitres de mon cours. Toutes les notions
décrites ici sont au programme du devoir surveillé et a fortiori de l’examen final.
Je vous demande de bien méditer ce polycopié et de me faire part de toutes vos
remarques et corriger mes erreurs par courriel à guillaume.ricotta@math.
u-bordeaux1.fr.
C ONTENTS
1. Objets (ie groupes) et morphismes entre objets (ie morphismes de
groupes)
1.1. Définitions
1.2. Morphismes de groupes
1.3. Produit direct de groupes
2. Sous-objets (ie sous-groupes)
2.1. Définition
2.2. Image directe et réciproque
2.3. Groupes engendrés
2.4. Ordre d’un élément dans un groupe
2.5. Description des groupes monogènes
1
1
2
3
3
3
4
5
6
7
1. O BJETS ( IE GROUPES ) ET MORPHISMES ENTRE OBJETS ( IE MORPHISMES DE
GROUPES )
1.1. Définitions.
Définition 1.1– Un groupe est un couple (G, ∗) où G est un ensemble et ∗ est une
loi interne sur G telle que
• ∗ est associative ie
∀(x, y, z) ∈ G 3 ,
(x ∗ y) ∗ z = (x ∗ y) ∗ z.
• G possède un élément neutre e ie
∀x ∈ G,
x ∗ e = e ∗ x = x.
Un tel e est unique et on le note eG .
• Tout élément de G admet un symétrique dans G (il est unique) ie
∀x ∈ G, ∃x 0 ∈ G
x ∗ x 0 = x 0 ∗ x = eG .
Date: Version of October 19, 2010.
1
2
G. RICOTTA
Remarque 1.2– On dit que le groupe (G, ∗) est abelien ou commutatif si ∗ est
commutative ie
∀(x, y) ∈ G 2 ,
x ∗ y = y ∗ x.
Dans ce cas, la loi interne ∗ est souvent notée additivement +, le symétrique de x
est noté −x (on parle de l’opposé de x) et le neutre de (G, +) est noté 0G ou même
0.
Remarque 1.3– En notation multiplicative, c’est-à-dire lorsque ∗ est notée ., le
symétrique de x est noté x −1 et le neutre de (G, .) est noté 1G ou même 1.
Remarque 1.4– Un groupe n’est jamais vide car e ∈ G. Un singleton est muni
d’une unique structure de groupe: le «groupe nul» qui est abélien.
Remarque 1.5– Pour retenir la définition 1.1, (C)AINS.
Exemple 1.6– (Z, +), (Q, +), (R, +), (C, +) sont des groupes abéliens.
Exemple 1.7– (Q∗ , ×), (R∗ , ×), (R∗+ , ×), (C∗ , ×) sont des groupes abéliens.
Exemple 1.8– Si X est un ensemble alors on note σX l’ensemble des bijections
(ou permutations) de X dans X . (σ X , ◦) est un groupe. Il n’est abélien que si X
est un ensemble fini de cardinal inférieur à 2. Si X = {1, . . . , n} avec n un entier
naturel supérieur à 1 alors on note σ X = σn le groupe symétrique.
Exemple 1.9– Soit R n (n Ê 1) l’ensemble des racines n ièmes de l’unité dans C et
R := ∪nÊ1 R n
l’ensemble des racines de l’unité dans C. (R n , ×) et (R, ×) sont des groupes
abéliens.
Exemple 1.10– Soit M2 (C) l’ensemble des matrices carrées de taille 2 à coefficients complexes. (M 2 (C), +) est un groupe abélien. Par contre, (M 2 (C), ×) n’est
pas un groupe mais (GL 2 (C), ×) est un groupe abélien où
½
µ
¶
¾
a b
GL 2 (C) := A =
, ad − bc 6= 0 .
c d
1.2. Morphismes de groupes.
Définition 1.11– (G, .) et (H , ∗) désignent des groupes et f est une fonction de G
dans H . On dit que f est un morphisme de groupes lorsque
∀(x, y) ∈ G 2 ,
f (x.y) = f (x) ∗ f (y).
On note Hom(G, H ) leur ensemble.
Remarque 1.12– Certains disent homomorphisme de groupes ce qui explique la
notation.
Exemple 1.13– Si (G, .) est un groupe et a est un élément de G alors le morphisme
d’exponentiation
ϕa : (Z, +) → (G, .)
n
7→ a n
est un morphisme de groupes.
Un morphisme de groupes vérifie les propriétés suivantes.
LA THÉORIE GÉNÉRALE DES GROUPES
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Proposition 1.14– Si f ∈ Hom(G, H ) alors
f (1G ) = 1H ,
¡
¢
f x −1 = f (x)−1 ,
¡ ¢
f x n = f (x)n
pour tout x dans G et tout entier relatif n.
Définition 1.15– On dit que f est un isomorphisme de groupes lorsque f est un
morphisme de groupes bijectif.
La terminologie est la suivante. Hom(G, H ), End(G) si G = H , Isom(G, H ),
Aut(G) si G = H . On dit que G et H sont isomorphes lorsqu’il existe un isomorphisme de G sur H .
1.3. Produit direct de groupes.
Définition© 1.16– Soient (G, .)ªet (H , .) deux groupes. On définit une loi interne sur
G × H := (g , h), g ∈ G, h ∈ H par
(g , h) ∗ (g 0 , h 0 ) = (g .g 0 , h.h 0 ).
(G × H , ∗) s’appelle le produit direct de G et de H .
Proposition 1.17–
• (G × H , ∗) est un groupe. Il est abélien si et seulement si G et H le sont.
• Le neutre de (G × H , ∗) est (1G , 1H ) et le symétrique de (g , h) est (g −1 , h −1 ).
• Les applications dites de projection
πG : (G × H , ∗) → (G, .)
(g , h)
7→
g
et
πH : (G × H , ∗) → (H , .)
(g , h)
7→
h
sont des morphismes de groupes surjectifs.
Exemple 1.18– Z2 , R2 , C2 , R∗+ × S 1 , R∗+ × Z/2Z, R∗+ × R 2 , Z/n Z × Z/m Z, R n × R m
sont des groupes abéliens. R∗ × SL 2 (R) est un groupe qui n’est pas abélien.
2. S OUS - OBJETS ( IE SOUS - GROUPES )
2.1. Définition.
Définition 2.1– Soient (G, .) un groupe et H ⊂ G une partie de G. On dit que H est
un sous-groupe de G lorsque le neutre de G appartient à H ie
1G ∈ H
et H est stable par produit et par passage à l’inverse ie
∀(x, y) ∈ H 2 ,
x y ∈ H , x −1 ∈ H .
Exemple 2.2– Z est un sous-groupe de (Q, +), (R, +), (C, +).
Exemple 2.3– R∗+ est un sous-groupe de (R∗ , ×). {−1, +1} est un sous-groupe de
(Q∗ , ×). S 1 est un sous-groupe de (C∗ , ×). R n et R sont des sous-groupes de
(S 1 , ×).
Exemple 2.4– Les sous-groupes de (Z, +) sont exactement les n Z, n ∈ N.
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G. RICOTTA
Exemple 2.5– Les entiers de Gauss Z[i ] := a + bi , (a, b) ∈ Z2 sont un sous-groupe
©
ª
de (C, +).
Exemple 2.6– R n est un sous-groupe de (R m , ×) si et seulement si n | m.
Exemple 2.7– SL 2 (R) est un sous-groupe de (GL 2 (R), ×).
2.2. Image directe et réciproque.
Proposition 2.8– Soient G et H des groupes, f ∈ Hom(G, H ), K un sous-groupe
de G et L un sous-groupe de H .
• L’image directe de K par f ie
©
ª
f (K ) := f (k), k ∈ K
est un sous-groupe de H et l’image réciproque de L par f ie
©
ª
−1
f (L) := g ∈ G, f (g ) ∈ L
est un sous-groupe de G.
• En particulier, le noyau de f ie
©
ª
Ker( f ) := −1 f ({1H }) = g ∈ G, f (g ) = 1H
est un sous-groupe de G et l’image de f ie
©
ª
Im( f ) := f (G) = f (g ), g ∈ G
est un sous-groupe de H .
Remarque 2.9– Le noyau d’un morphisme de groupes mesure le défaut d’injectivité
d’un morphisme de groupes. En particulier, f est le morphisme de groupes constant si et seulement si Ker( f ) = G. Cela est précisé dans la proposition hyper
importante suivante.
Proposition 2.10– Un morphisme de groupes f : G → H est injectif si et seulement si son noyau est trivial ie
Ker( f ) = {1G } .
Remarque 2.11– Autrement dit, pour montrer qu’un morphisme de groupes
f : G → H est injectif, on procède comme suit: «Soit g dans G tel que f (g ) = 1H .
Montrons que g = 1G . . . »
Exemple 2.12– S 1 est le noyau du morphisme de groupes
(C∗ , ×) → (R∗+ , ×)
z
7→
|z|
et l’image du morphisme de groupes
(R, +) → (C∗ , ×)
θ
7→
eiθ.
Exemple 2.13– R n est le noyau du morphisme de groupes
(C∗ , ×) → (C∗ , ×)
z
7→
zn
et l’image du morphisme de groupes
(Z, +) → (C∗ , ×)
k
7→
ωk
où ω := e 2i π/n .
LA THÉORIE GÉNÉRALE DES GROUPES
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Exemple 2.14– SL 2 (C) est le noyau du morphisme de groupes
(GL 2 (C), ×) →
µ
¶
a b
7→
c d
(C∗ , ×)
ad − bc.
Exemple 2.15– Le groupe alterné An est le noyau du morphisme de groupes
ε : (σn , ◦) →
({−1, +1} , ×)
σ
7→ ε(σ) = signature de σ.
2.3. Groupes engendrés.
Définition 2.16– Soient G un groupe et A une partie quelconque de G. On appelle
sous-groupe de G engendré par A le sous-groupe
⟨A⟩ := ∩
H.
A⊂H
H sous-groupe de G
C’est le plus petit sous-groupe de G contenant A. On dit que A est un système de
générateurs de ⟨A⟩.
Remarque 2.17– La définition précédente est valide car une intersection quelconque de sous-groupes est un sous-groupe.
Remarque 2.18– Si A = {a} alors on note
⟨a⟩ := ⟨{a}⟩ .
Exemple 2.19– Dans un groupe (G, .), ⟨;⟩ = {1G }.
Exemple 2.20– Dans (C∗ , ×) ou dans (S 1 , ×). Soit ζ ∈ R n . On dit que ζ est une
racine n ième primitive de l’unité si
⟨ζ⟩ = R n .
L’ensemble des racines n
primitive de l’unité sont exactement les ωkn où k
décrit l’ensemble des entiers naturels compris entre 1 et n et premiers avec n. Il y
en a ϕ(n) où ϕ est l’indicatrice d’Euler définie par
µ
¶
Y
1
ϕ(n) := card ({1 É k É n, PGCD(k, n) = 1}) = n
1−
.
p
p∈P
ième
p|n
Exemple 2.21– De même, les générateurs de (Z/n Z, +) sont exactement les k où
k est un entier naturel premier avec n. Il y en a exactement ϕ(n).
Exemple 2.22– Si (G, .) est un groupe et g ∈ G alors
o
­ ® n k
g = g ,k ∈ Z .
En notation additive,
­ ® ©
ª
g = kg , k ∈ Z .
Par exemple, dans (Z, +),
⟨n⟩ = {kn, k ∈ Z} = n Z.
µ
¶
µ
¶
0 −1
1 1
Exemple 2.23– (SL 2 (Z), ×) est engendré par {S, T } où S :=
et T :=
.
1 0
0 1
Exemple 2.24– (σn , ◦) est engendré par les transpositions alors que (An , ◦) est
engendré par les tricycles.
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G. RICOTTA
Définition 2.25– On dit qu’un groupe G est monogène si G est engendré par l’un
de ses éléments. Si a désigne un tel générateur alors
n
o
G = ⟨a⟩ = a k , k ∈ Z .
Un groupe monogène est donc abélien.
Exemple 2.26– (Z, +), (Z/n Z, +) et (R n , ×) sont des groupes monogènes.
2.4. Ordre d’un élément dans un groupe.
Définition 2.27– Soient (G, .) un groupe et a dans G. On dit que a est d’ordre fini
dans G si le sous-groupe engendré par a est un groupe fini. Dans ce cas, on appelle
ordre de a noté ω(a) le cardinal de ⟨a⟩.
Exemple 2.28– Tous les éléments d’un groupe fini sont d’ordre fini.
Exemple 2.29– 1 est d’ordre fini dans (Z/n Z, +) et ω(1) = n.
Exemple 2.30– 0 est le seul élément d’ordre fini dans (Z, +).
p
Exemple 2.31– (1 + i )/ 2 est d’ordre fini dans (C∗ , ×). Son ordre vaut 8.
Exemple 2.32– Les éléments d’ordre fini de (C∗ , ×) sont exactement les racines
de l’unité.
Une caractérisation intéressante des éléments d’ordre fini d’un groupe est
donnée dans la proposition suivante.
Proposition 2.33– Soient G un groupe et a ∈ G. a est d’ordre fini si et seulement
si le morphisme d’exponentiation ϕa n’est pas injectif. Dans ce cas,
Ker(ϕa ) = ω(a)Z.
Ce corollaire permet de déterminer en pratique l’ordre d’un élément d’un
groupe.
Corollaire 2.34– Soit a ∈ G d’ordre fini.
• Son ordre est le plus petit entier naturel n Ê 1 tel que a n = 1G en notation
multiplicative (ou na = 0G en notation additive).
• Pour tout entier relatif n,
a n = 1G
si et seulement si
ω(a) | n.
Ce théorème est le théorème le plus important du semestre.
Théorème 2.35 (Théorème de Lagrange)– Soit G un groupe fini. Le cardinal de
tout sous-groupe de G divise le cardinal de G. En particulier, tout élément de G est
d’ordre fini et son ordre divise le cardinal de G.
Corollaire 2.36–
• Un groupe fini de cardinal un nombre premier p est isomorphe à (Z/p Z, +).
• Tout élément x de G vérifie x card(G) = 1G .
• Le théorème de Fermat: si p est un nombre premier et n est un entier relatif
alors
n p ≡ n (mod p).
• Le théorème d’Euler: si q Ê 2 est un entier naturel et n est un entier relatif
premier avec q alors
n ϕ(q) ≡ 1 (mod q).
LA THÉORIE GÉNÉRALE DES GROUPES
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2.5. Description des groupes monogènes.
Définition 2.37– Un groupe monogène fini est dit cyclique.
Exemple 2.38– (Z/n Z, +) et (R n , ×) sont des groupes cycliques.
Proposition 2.39– Soit G un groupe cyclique de cardinal n engendré par a. On a
n
o
G = ak , 0 É k É n − 1 .
Les autres générateurs de G sont les a k avec PGCD(k, n) = 1. Le nombre de générateurs de G est l’indicatrice d’Euler ϕ(n) définie par
µ
¶
Y
1
.
ϕ(n) = n
1−
p
p premier
p|n
Proposition 2.40– Un groupe monogène infini est isomorphe à (Z, +) alors qu’un
groupe cyclique de cardinal n Ê 1 est isomorphe à (Z/n Z, +).
Remarque 2.41– Il n’y a que deux types de modèles de groupes monogènes:
• (Z/n Z, +) si G est fini de cardinal n,
• (Z, +) si G est infini.
Exemple 2.42– (R n , ×) est isomorphe à (Z/n Z, +) alors que (⟨e i ⟩, ×) est isomorphe
à (Z, +).
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