L’équilibre du marché est stable : si le prix s’en écarte, les forces du marché le ramènent à sa position d’équilibre.
Sur ce graphique on voit le point d’équilibre du marché : prix PxE et quantité.
L’équilibre d’un marché est appelé équilibre partiel, parce que sa réalisation
suppose que ses incidences sur les autres marchés sont négligeables.
A. MARSHALL (1842-1924) a analysé les équilibres partiels. On lui doit
notamment la représentation en termes de courbes d’offre et de demande (ci-
contre)
Cependant l’hypothèse d’indépendance d’un marché par rapport aux autres
n’est pas toujours possible. Ex. l’équilibre partiel sur le marché du pétrole aurait
de telles conséquences sur les autres marchés qu’il serait remis en cause.
Il faut alors envisager la question de l’équilibre général de tous les marchés.
• L’équilibre général a été théorisé par L. WALRAS (1834-1910) dans « Eléments d’économie politique pure » (1874).
Il construit un modèle mathématique : les relations entre les variables qui caractérisent les différents marchés sont
mises en équations, compte tenu de certaines hypothèses. L’ensemble de ces relations constitue un système d’équations,
au cœur duquel les prix (des biens et des facteurs de production) sont les variables d’ajustement. Le système admet une
solution unique - il existe donc un ensemble de prix qui assure l’équilibre général.
Ce modèle présente des insuffisances qui ont donné lieu à de nombreux travaux. On retiendra succinctement deux
problématiques, pour marquer des repères ;
- A quelles conditions existe-t-il un équilibre général ? Le modèle de Walras repose sur des hypothèses qui n’ont
été dégagées de façon précise qu’en 1953 par K. ARROW et G. DEBREU (respectivement prix Nobel d’économie en
1972 et en 1983). Ces conditions sont très restrictives, et ne montrent d’ailleurs que la possibilité d’un équilibre général.
En fait, dès le départ, le modèle de Walras n’a pas de prétentions réalistes : le propos est normatif. Il s’agit de montrer
que sous certaines conditions, un système de marché permet la coordination des choix individuels par les prix.
- Comment cet équilibre est-il atteint ? Walras imagine un équilibrage par tâtonnement. Des prix sont annoncés à la
criée par un commissaire-priseur (« crieur de prix »). Des projets d’offre et de demande se manifestent alors, ce qui
conduit le commissaire à ajuster les prix pour ajuster offre et demande (comme sur un marché boursier fonctionnant à la
criée). Aucune transaction effective n’a lieu avant d’avoir atteint l’équilibre. Ce processus converge-t-il forcément vers
un point d’équilibre ? Des travaux, au début des années 70, montrent que la convergence n’est pas assurée - et donc
remettent en cause l’unicité et la stabilité de l’équilibre général (théorème de SONNENSCHEIN).
b) La régulation comme apprentissage.
Comme on vient de la voir, l’approche walrasienne implique l’intervention d’un agent extérieur aux marchés, qui
calcule les prix d’équilibre en fonction des offre et des demandes, et qui annonce publiquement ces prix (le
commissaire-priseur) Elle débouche donc sur une contradiction : l’harmonieux fonctionnement d’une économie
parfaitement décentralisée a besoin de l’intervention d’un agent central situé au-dessus des marché pour faire
fonctionner l’ensemble. L’économie de marché implique une organisation centralisée.
F. HAYEK (1899-1992) pense autrement le fonctionnement du marché : n’y opèrent que des centres de décision
individuels, qui doivent apprendre à s’ajuster sans arbitre central - mandataire a priori de l’ordre idéal du marché. Son
approche part d’une conviction de philosophie politique : l’ordre social n’a pas de finalité latente - il n’y a pas un « bon
gouvernement » de la société, qui mènerait celle-ci selon une direction existant a priori. L’ordre de la société est un
ordre spontané, auto-poïétique - càd capable de produire les moyens de sa propre transformation, spontanément, càd par
hasard. Et donc imprévisible par nature.
NB - Un système auto-poïétique s’oppose à un système allo-poïétique, qui produit des éléments qui ne le transforment
pas : ex. une usine qui produit des biens qui ne la transforment pas.
Non intentionnel et imprévisible par constitution, la société partage ce caractère avec l’ensemble du vivant (systèmes
biologiques en évolution non finalisée et imprévisible par nature). La société est « ouverte » : elle évolue par les
interactions aléatoires d’acteurs égoïstes (càd myopes, dépositaires d’une seule vérité : la leur) dotés de mémoire et
suffisamment rationnels pour interpréter des signaux de leur environnement, et agir dans leur intérêt propre. Certes tout
champ d’interaction n’est pas producteur d’ordre. Selon l’auteur, un minimum de règles (« nomos » : règles de droit et
prescriptions morale) est nécessaire pour qu’un ordre émerge et évolue. C’est par le processus d’apprentissage des
comportements efficients que ces règles s’érigent petit à petit en traditions, et s’imposent efficacement.
Le marché, lieu de liberté, de contacts et d’échanges - lieu « ouvert » - apparaît ainsi comme le terrain sur lequel les
individus font l’apprentissage les uns des autres, et d’où émerge un ordre économique et social spontané, en continuelle
évolution.