Actes du colloque Landes 2040 relu GHA DP 17.06.09

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COLLOQUE
LANDES 2040
" Les dérèglements climatiques
constituent-ils une menace pour nos territoires ? "
Lundi 4 Mai - Morcenx - salle du Maroc
Ouverture du Colloque à 14 heures 30
DISCOURS D'OUVERTURE
Jean-Claude DEYRES, Maire de Morcenx
Mesdames messieurs, je suis très heureux de vous accueillir pour ce Colloque, dans cette salle
du Maroc, que certains connaissent, que d'autres ne connaissent pas, qui a l'originalité d'être
une salle récente, sauf qu'elle a été construite il y a 60 ans, en pin des Landes, d'où cette
charpente qui tient vraiment bien, utilisée comme salle de réunion et de rencontre.
Je vous remercie, avec Jean-Yves Montus, Président de l'Association départementale des
Maires des Landes, co-organisateur, avec le Conseil Général, de cette rencontre.
Nous sommes, ici, pour participer à ce Colloque, résultat de l'enquête menée durant l'été
2007, dont une présentation avait été faite en novembre et qui avait permis de mettre en
exergue les principales préoccupations des Landaises et des Landais, favorables au
développement mais aussi soucieux d'équilibre.
Ils réclamaient que les pouvoirs publics soient les garants des équilibres sociaux et
territoriaux.
Le développement économique et le maintien de l'emploi sont plus que jamais un souci
majeur. La crise économique, qui frappe douloureusement notre territoire, justifie d'autant
plus la nécessité d'anticiper aujourd'hui pour ne pas subir demain.
L'anticipation et la maîtrise du prix du foncier mais aussi des coûts publics passent par
l'élaboration d'un schéma d'aménagement prospectif, c'est l'objectif qui a été assigné aux
équipes de recherche de Landes 2040, qui vont rendre compte des premiers échanges qui ont
eu lieu ce matin avec les élus locaux ou les chefs d'entreprise.
Viendra, ensuite, la table ronde animée par Pierre-Luc Séguillon.
Mesdames messieurs, je laisse la parole aux rapporteurs des trois commissions qui se sont
tenues ce matin.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
1
PRESENTATION DES TRAVAUX
Animée par Pierre-Luc Séguillon, Journaliste
Pierre-Luc SEGUILLON
Je suis ravi de vous retrouver dans cette opération Landes 2040 car j'ai eu la chance et
l'honneur de participer à la première phase, celle dans laquelle vous avez dépouillé et étudié
les attentes des habitants de ce département.
Nous sommes aujourd'hui en deuxième phase, celle du diagnostic, pour aller vers la troisième
phase, celle des plans d'actions, scénarios et arbitrages.
Il est évident que, dans tous ce processus, il faut intégrer l'accident arrivé au mois de janvier,
dont on peut mesurer les conséquences lorsqu'on vient de Bordeaux et qu'on suit la route pour
venir jusqu'ici ; j'avoue que c'est assez impressionnant.
Donc il fallait intégrer ces conséquences ; ce sera le sujet de la table ronde de cet après-midi
avec la participation de :
Hervé LE TREUT, météorologue
. membre de l'Académie des Sciences
. directeur du laboratoire de météorologie dynamique du CNRS
. a participé aux travaux du Groupe intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), qui
a reçu le prix Nobel en 2007
. membre du Comité scientifique joint du Programme climatique mondial
. professeur à l'école Polytechnique.
Denis LOUSTAU, agronome
. directeur de recherche à l'INRA
. ses travaux visent à comprendre les processus physiques et biologiques qui conditionnent le
cycle carbone en forêt ; donc nous aurons matière à l'interroger.
Laurent DAVEZIES
. professeur à l'Institut d'urbanisme de Paris (Université Paris XII) et à Science-Po Paris
. expert indépendant
. ses travaux de recherche portent essentiellement sur les politiques régionales et les
politiques urbaines.
Avant que nous ouvrions cette table ronde, nous allons prendre connaissance des travaux
réalisés ce matin.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
2
ATELIER 1 : ECONOMIE, RESSOURCES ET COHESION
" Comment assurer la diversité économique et des richesses actuelles de façon
durable et à l'horizon 2040 ? "
Philippe ESTÈBE, Cabinet ACADIE
Les ateliers de ce matin étaient consacrés à une confrontation entre les premiers éléments de
diagnostics produits par les équipes sollicitées dans le cadre de Landes 2040 et des
participants majoritairement composés de Conseillers généraux.
Nous avons pu avoir une confrontation entre une lecture extérieure du territoire et une
lecture du dedans du territoire, un sentiment vécu.
L'atelier 1 était consacré à deux questions :
. Comment enrichir les Landes ?
En même temps,
. Comment fabriquer de la cohésion interne ?
En fait, on est bien sur ces deux questions :
. D'où vient l'argent ?
. Comment le distribue-t-on ?
sachant que pour le distribuer il faut aller le chercher mais qu'en même temps aller chercher
de l'argent ne suffit pas, qu'il y a véritablement un enjeu de cohésion sociale et territoriale
dans le département, et c'est aussi une tradition landaise.
Évidemment, toutes les questions et tous les enjeux d'ici à 2040 n'ont pas pu être explorés ;
on a traité deux points.
1°/ Quels sont les principaux moteurs sur lesquels le développement des Landes peut
s'appuyer dans une perspective de développement durable ?
Là non plus on n'a pas tout traité, en particulier on a eu un grand absent. Pour des questions
de composition de l'atelier, n'a pas été traitée la question de l'industrie au sens propre mais
l'avenir du tourisme et de la filière énergie.
2°/ Les questions de localisation.
Dans les Landes, comme dans tous les départements attractifs d'un point de vue
démographique, on est tendanciellement dans une espèce de hiatus entre le développement
démographique (les communes qui accueillent de la population) et les ressources de ces
communes, dont on sait bien que pour une très grande partie elles sont liées à l'activité
économiques.
Or, on a, aujourd'hui, potentiellement une crise entre les besoins des populations et les
capacités des communes d'y répondre.
La question de la répartition des fruits de la croissance (selon un vocabulaire ancien) est
particulièrement prégnante dans les Landes du fait de cette attractivité démographique.
Donc deux questions :
. les moteurs du développement, comment chercher de l'argent ?
. la localisation ou comment cela se répartit entre les territoires ?
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
3
Sur les moteurs du développement
Deux thèmes tourisme et énergie, dont les sujets ne sont pas épuisés :
1er thème : le tourisme
Le créneau des Landes, tourisme de plein air ou populaire, est un créneau d'avenir. Même s'il
y a de fortes mutations dans les offres, il n'y a pas de baisse de l'attractivité des Landes, au
contraire. Malgré un léger tassement de la création d'emploi dans le champ du tourisme, la
fréquentation se maintient, y compris en temps de crise.
Même si l'on constate un certain retard dans les réservations, les Landes continuent de tenir
leur créneau.
Toute une série de travaux montre que ce créneau de plein air, plutôt à vocation populaire,
est un créneau d'avenir pour autant qu'on soit capable d'accompagner un certain nombre de
mutations.
1ère mutation : aller, de plus en plus, d'un tourisme de farniente à un tourisme d'activités
Le tourisme de farniente, tout le monde sait le définir.
Le tourisme d'activités consiste à offrir aux consommateurs du territoire un certain nombre
d'activités qui permettent de sortir de la simple consommation passive du territoire.
Ceci correspond à une demande forte des touristes, ainsi qu'à un enjeu de solidarité entre le
littoral et l'intérieur puisque, pour partie, la question du tourisme actif c'est aussi la question
du passage du littoral à l'intérieur, donc du type de liaisons qu'on est capable de construire
entre les grands attracteurs touristiques et les lieux des gisements d'activités à l'intérieur.
Le modèle de la Vendée a été cité à plusieurs reprises, je ne sais pas si c'est un bon exemple,
mais pour moi il s'écrit avec trois petits points en tant qu'hypothèse d'école.
Première mutation, le passage d'un tourisme de pure consommation à un tourisme d'activités.
D'où la question : en quoi l'intérieur est-il capable de proposer de l'activité qui permette de
valoriser les attracteurs du littoral ?
2ème mutation, les Landes ce n'est pas simplement du tourisme de plein air, c'est
potentiellement -avec le développement de l'activité- du tourisme d'affaires
Il y a un gisement de tourisme d'affaires sur lequel on peut et l'on doit travailler, notamment
en liaison avec le développement économique, avec le développement de zones d'activités
économiques.
Dès lors qu'on prend résolument le parti du développement industriel, cela va avoir un effet
dans la circulation des personnes, des cadres, ingénieurs, techniciens, commerciaux…
Derrière, un programme est à développer sur l'hôtellerie et la restauration dédiée ou vivant,
en partie, du tourisme d'affaires.
3ème mutation, une interrogation forte sur l'avenir du tourisme vert
Un certain nombre de personnes se sont interrogés à haute voix sur : le tourisme vert, tel que
nous l'avons conçu depuis une vingtaine ou une trentaine d'années, est une bonne voie pour le
développement des territoires ?
Il y a un vrai souci là-dessus. Beaucoup d'investissements ont été faits. Or, les retombées sur
les territoires ne sont pas complètement évidentes.
Certains ont même parlé du mythe du tourisme vert, à une époque Graal du développement
territorial, aujourd'hui remis en question en tant que grand vecteur de développement,
notamment des territoires ruraux.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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4ème élément, les Landes ne sont pas seules à offrir cette potentialité
En matière de tourisme de plein air, il y a des concurrents, en particulier la Côte bretonne et
la Vendée constituent des concurrents sérieux pour les Landes. Il y a du benchmarking à
fabriquer.
Finalement, le positionnement des Landes et sa compétitivité par rapport à d'autres
territoires, offrant à peu près le même type de prestations, tiendraient à deux éléments
fondamentaux :
1°/ La capacité à offrir à des opérateurs touristiques du foncier accessible et pas cher, cela
renvoie à la capacité collective et publique de maîtrise du foncier.
2°/ La capacité à accompagner les opérateurs touristiques dans du marketing et de la
promotion du territoire, y compris de produits intégrés, qui feraient la différence entre les
Landes et, par exemple, le sud de la Bretagne.
2ème thème : l'énergie, notamment les énergies renouvelables
Au-delà des engagements collectifs liés au Grenelle de l'Environnement sur la progression de
la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique, quelles peuvent être
les potentialités des énergies renouvelables en matière de développement territorial ?
Premier chiffre, 95 % des besoins en électricité de l'Aquitaine sont couverts par la Centrale de
Blaye. A quoi bon faire du développement des énergies renouvelables dans un territoire
comme l'Aquitaine dès lors que les besoins sont couverts !
En fait, l'enjeu est bien sur les engagements nationaux et donc la contribution des Landes sur
les engagements nationaux mais, au-delà, sur la valorisation des potentialités des Landes :
bois, géothermie et solaire, trois qualités rarement réunies dans un même territoire.
Il y a là un véritable enjeu de développement territorial, la capacité à développer les
potentialités du territoire.
Certes, mais avec deux conditions :
1- être capable d'intégrer la chaîne de valeurs, aller au-delà d'un simple support de
production d'énergie
2- être capable, à partir de la production d'énergie, d'enclencher du développement
d'activités.
Exemples cités :
. Bien que peut-être un peu anecdotique, a été cité le rapport qui peut s'établir entre la
géothermie et la production dans des serres ou des piscicultures, la capacité qu'on a à partir
de la production d'énergie à enclencher la totalité de la chaîne de valeurs.
. En filière bois énergie, c'est important d'utiliser le bois tant que c'est possible aussi bien sur
les installations existantes que les nouvelles urbanisations comme source de chauffage, mais
là où il y a véritablement de la valeur ajoutée c'est dans la capacité d'aller au-delà et de
fabriquer de l'électricité à partir du bois.
On est sur des questions véritablement économiques, à la fois de chaîner différentes valeurs
ajoutées et de trouver les bons opérateurs qui vont permettre, à partir de la matière
première, de fabriquer de la valeur ajoutée locale.
Sur la question énergétique qui est tout à fait essentielle, apparaît aujourd'hui une espèce de
tentation extrêmement forte de la part des responsables territoriaux d'accueillir les fermes
photovoltaïques.
Chiffre qui a frappé l'atelier, un hectare de ferme photovoltaïque en location rapporte le coût
d'un élève en maternelle, soit à peu près 1 500 € en fourchette basse.
Du point de vue de l'enjeu des ressources des collectivités territoriales, il est clair qu'il y a
une très forte tentation d'accueillir du photovoltaïque sur des terrains communaux, pour
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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autant qu'ils aient été réservés ; ce qui permettrait d'alimenter des ressources municipales et
de répondre, en terme de services, aux besoins des nouveaux habitants accueillis dans ces
communes.
Là-dessus, la réaction de l'atelier 1 est que, certes, l'équation est belle mais qu'il faut s'en
méfier car le photovoltaïque c'est aussi toute une série de problèmes et de nuisances qu'il
faut maîtriser.
Cela renvoie, en fait, à la maîtrise de l'occupation et de l'usage des sols par les collectivités
territoriales.
L'atelier 1 est loin d'avoir épuisé la question des moteurs du développement.
Ayant juste esquissé ces deux pistes, les questions qui se posent sont : la prospective sur la
conciliation ou la hiérarchisation des contraires.
D'où la deuxième question, comment se localisent ces moteurs du développement ?
L'atelier 1 a traité de cette question car la localisation des activités détermine le périmètre
de la fiscalité des collectivités territoriales. En clair, si vous voulez répondre aux besoins de
votre population, il faut que vous ayez des impôts.
Cela a été énoncé par une participante, un résident supplémentaire vous rapporte en
moyenne à peu près 300 € de taxes (toutes taxes confondues), un élève en maternelle vous
coûte 1 500 €. Vous avez un gap, un vrai problème lié à la croissance et à l'attractivité
démographique.
Vous me direz qu'il suffit d'arrêter la croissance démographique dans certains endroits et de
la reporter là où il y a de la taxe professionnelle. Sauf qu'on n'arrête pas les habitants, on
n'est pas dans un régime de ce type, il y a donc une vraie interrogation sur la localisation
stratégique des activités qui permettent non seulement de créer de la valeur, de créer de
l'emploi mais aussi d'apporter des ressources aux collectivités territoriales.
Passons sur tous les débats à ce propos sur la hiérarchisation des zones d'activités.
Un consensus s'est fait jour autour de trois idées.
1°/ Un certain nombre d'activités doivent être concentrées pour être efficaces, mais aussi
pour des raisons d'acceptabilité sociale.
L'atelier est tombé d'accord pour dire qu'il n'y aura pas de grosses entreprises productrices de
valeur ajoutée et de taxe professionnelle (ou de l'équivalent dans une vingtaine d'années),
qu'il n'y en aura pas partout.
Nous avons donc collectivement intérêt à choisir quelques territoires sur lesquels nous allons
mettre le paquet de l'attractivité exogène des Landes vis-à-vis des gros porteurs de capitaux.
2°/ Derrière, bien sûr il y a un enjeu de répartition de l'activité de deuxième rang plutôt
autour des questions de desserte de la population en terme public mais aussi privé, c'est-àdire grosso modo artisanat et commerce.
La question est bien celle de l'organisation d'une sorte de charte de référence des zones
d'activités, de desserte de la population, à l'échelle des intercommunalités ou des bassins de
vie et des bassins d'emploi.
3°/ La répartition de la richesse, là-dessus il y a véritablement un travail d'innovation à faire.
Aujourd'hui, la répartition de la richesse fiscale est liée à la localisation des entreprises.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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D'ici une dizaine ou une quinzaine d'années, on peut imaginer que les Landes soient en pointe
d'une expérimentation d'une forme de répartition et de mutualisation de la richesse produite
à l'échelle du département, permettant de désindexer la localisation de l'activité de la
répartition de la richesse, de façon à pouvoir alimenter en revenus les collectivités qui ont
besoin de créer des services dès lors qu'elles accueillent des habitants.
Dernier point, non des moindres évidemment, à partir du moment où l'on raisonne en terme
de polarisation de grandes activités, on va maintenir le principe, actuellement celui des
Landes, de la circulation des personnes dans tous les sens.
Les Landes sont le département numéro 1 en terme de motorisation, en terme de kilomètres
parcourus un territoire extrêmement prolixe. Ceci est lié, de fait, à la spécialisation des
territoires et au fait que les gens circulent entre les pôles de résidence et les pôles d'emploi.
Dans cette perspective de concentration d'un certain nombre de pôles à l'échelle
départementale, on va maintenir la logique de circulation des personnes.
Il y a là une véritable interrogation, qui n'était pas l'objet de l'atelier 1, sur les modalités
d'une circulation et une mobilité nécessaire et problématique du point de vue de
l'environnement et du développement durable, et même du budget des ménages.
Un 3ème thème s'est fait jour, trois interrogations ont surgi renvoyant aux autres ateliers :
. Quelle cohabitation homme/nature ?
. Comment accueillir en préservant le milieu ?
. Quelle armature urbaine pour le département ?
1/ Nous avons été étonné de voir qu'on ne parlait pas des villes des Landes en matière de
développement économique ; les villes sont absentes. Est-ce un défaut de l'atelier ou un
problème plus général des Landes ?
2/ Le problème d'un département fortement irrigué par les mobilités, et donc d'une maîtrise
d'ouvrage et d'œuvre départementale ou interterritoriale des circulations, y compris en
articulant les différents modes.
3/ Une question revient en force, la maîtrise publique et l'usage des sols.
On l'a vu de matière très prégnante à propos de l'implantation des fermes photovoltaïques, on
le retrouvera dans les autres ateliers sur le modèle d'installation des populations et sur la
question de l'armature urbaine.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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ATELIER 2 : ACCUEIL, MILIEUX ET BIODIVERSITE
" Comment accueillir la population des Landes à l'horizon 2040 en organisant une
réponse aux besoins urbains et territoriaux respectueuse de l'environnement et
des coûts publics ? "
Jean-Claude COHEN, Cabinet PROSCOT
La réflexion de l'atelier 2 porte sur :
. Comment et quel accueil pour les nouveaux arrivants ?
. Quels services ?
. Comment assurer cet accueil dans le respect de la biodiversité ?
1er thème, quels sont les nouveaux arrivants dans les Landes ?
Si les choses se passent toujours au même rythme et avec les mêmes hypothèses de
migration, d'ici 2040 de 70 000 à 100 000 personnes arriveront dans les Landes (cf.
statistiques).
Est-ce important ?
Oui, car cela représente 20 à 25 % de la population mais le territoire étant peu dense cela
peut passer.
Qui sont ces arrivants et où vont-ils ?
Là où ils vont et s'installent, il y a un relatif consensus. Ils s'installent de façon privilégiée
vers les pôles urbains :
. dans le Nord-Ouest du département : Biscarrosse et Bordeaux
. dans le Sud-Ouest du département : Bayonne, Anglet, Biarritz (BAB)
. dans la « banane » entre Mont-de-Marsan et Dax.
La répartition de la population de ce territoire est relativement hétérogène.
Par contre, il n'y a pas eu consensus sur la nature de ces personnes.
Est-ce que ce sont des jeunes ou des vieux ?
Selon les chiffres actuels, les personnes qui s'installent sont plutôt des retraités, voire des
actifs, des seniors actifs, des gens de 40/50 ans.
D'ailleurs, le département des Landes est un des premiers en nombre de quinquagénaires. En
2040, dans 30 ans, ils seront octogénaires. Ils constituent, avec les seniors, les nouveaux
arrivants, ce ne sont pas eux qui vont repeupler le territoire, faire des enfants, rajeunir la
démographie. Une partie de l'atelier 2 a relevé ce constat démographique plutôt inquiétant.
Les migrants, qui arrivent et s'installent dans le territoire, sont plutôt des retraités, parfois
professions libérales ou gens aisés, qui souhaitent retrouver une qualité de vie en s'éloignant
de la ville.
Cela a été confirmé par certains des élus, chez eux des retraitées viennent s'installer, non
seulement ils s'installent sur le littoral mais ils repoussent une partie des jeunes actifs vers le
centre du territoire car ces derniers n'ont plus les moyens de payer les coûts du foncier sur le
littoral.
A contrario, d'autres ont indiqué que, pourtant, on crée des écoles, des classes de
maternelle, des collèges. Donc, il y a bien des jeunes quelque part. Oui, certes, mais
justement sur le littoral, Biscarrosse, du côté du Sud et dans les zones urbaines.
Par conséquent, une certaine population s'installe, plutôt des retraités et actifs assez âgés.
C'est hétérogène, tout n'est pas homogène, il y a aussi du côté de ces zones peuplées une
population plus équilibrée.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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2ème thème, dans l'avenir comment faire pour attirer de jeunes actifs ou pour les maintenir
sur le territoire ?
. Comment faire ?
. Quoi faire ?
1°/ Pour que les jeunes actifs s'installent et restent sur le territoire, il faut leur proposer des
services.
Leur proposer des services publics :
. culturels (il y en a déjà pas mal dans le territoire),
. de santé,
. pour les enfants : des crèches, des écoles.
Leur proposer des services privés :
. des services privés marchands, ils ont l'avantage de générer des emplois et de la taxe
professionnelle qui va, ainsi, permettre de financer les services publics.
On ne sait pas si la boucle vertueuse fonctionne, s'il y aura assez de revenus générés par les
emplois et par la taxe professionnelle pour payer les services publics, mais c'est une des
voies.
2°/ Pour que les jeunes actifs s'installent et restent sur le territoire, il faut leur trouver du
travail.
Leur proposer :
. du travail local : services publics, services marchands
. du travail à distance : l'accessibilité vers des lieux de travail.
Il n'est pas idéal pour le territoire que les gens y dorment et travaillent ailleurs, ce n'est pas
le modèle idéal concernant les charges des collectivités et la taxe professionnelle.
3°/ Outre les services et l'emploi, les jeunes actifs s'installent et restent sur le territoire pour
la qualité de vie (biodiversité et autres).
L'atelier 2 a défini le modèle landais, un maillage à différentes dimensions :
. les Landes sont le premier département en matière de solidarité intergénérationnelle,
notamment sur la proportion d'ascendants vivant au foyer de leurs enfants
. un maillage de type villes/réseau des airials qui irriguent toute la Haute Lande
. un maillage hydrographique, le réseau de fleuves
. un maillage ferroviaire
. le " maillage " de la forêt : elle joue un rôle de continuum, de pompe pour l'eau, de pompe
pour le CO2, donc un maillage écologique, qui joue pour beaucoup dans la qualité du
territoire.
L'atelier 2 considère que, parmi les différents maillages nécessaires, la forêt peut jouer un
rôle fondamental dans l'élaboration d'une trame verte qui viendrait compléter une trame
bleue.
En résumé,
L'atelier s'est interrogé sur l'avenir de ces gens qui vont s'installer :
. Qui sont-ils ?
. Comment faire pour les garder ?
En outre :
. Quoi leur offrir comme services publics et privés, en terme d'accessibilité, en matière de
cadre de vie dans la forêt (élément important) ?
Il n'a pas non plus manqué de s'inquiéter des conséquences du changement climatique et sur
la ressource en eau fondamentale.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Autrement dit, il y a beaucoup d'incertitudes.
Autre incertitude :
. Quels rôles joueront les infrastructures (LGV…) ?
Elles peuvent jouer dans un sens comme dans l'autre, elles peuvent être des voies de transit,
que tout passe à travers le territoire sans s'y arrêter, elles peuvent être un moyen de vider le
territoire, que les gens dorment là et travaillent ailleurs, mais elles peuvent aussi (si l'on en
trouve les moyens) faire en sorte que la valeur ajoutée reste sur le territoire.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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ATELIER 3 : ORGANISATION URBAINE ET MOBILITES
" Quel développement promouvoir sur quels territoires ? (Mobilités et armature
territoriale) "
Jean-Claude GIBLIN, Cabinet EDR
(Entreprises et Développement Régional)-RAMBOLL
Organisation urbaine et mobilités, ce titre recoupe certains points des autres ateliers.
En toile de fond, les grandes conclusions livrées par les trois Cabinets, avec des approches
différentes, se concentrent sur quelques points.
1°/ Les Landes sont un territoire à faible densité, ce qui représente une faiblesse, un manque
de poids, un vide au centre de l'Aquitaine mais, en même temps, une opportunité pour
l'avenir car l'espace est rare.
2°/ L'armature urbaine des Landes est légère, avec deux axes de développement :
. d'une part, le barreau entre Mont-de-Marsan et Dax jusqu'au BAB
. d'autre part, le littoral, ce qui dessine une sorte de "V" de développement.
3°/ La grande diversité de formes urbaines, assez originales dans les Landes, est due au
milieu (contraste Landes/Chalosse), à l'histoire (chemins de Compostelle, bastides, voies
ferrées, routes qui structurent toujours l'habitat).
4°/ Les Landes sont traversées par des infrastructures de transport, essentiellement nordsud, dont elles ne bénéficient qu'à faible proportion car elles ont plutôt comme dessein de
relier le Pays Basque à la Région parisienne ou l'Espagne à l'Europe.
Partant, la mobilité dans les Landes est très fondée sur la voiture et le camion.
5°/ Les infrastructures nouvelles, qui s'annoncent à horizon de 5 à 10 ans, sont une
opportunité à exploiter pour les Landes mais peuvent renforcer l'effet tunnel.
Sur cette base, l'atelier 3 a débattu.
Là aussi, je m'en tiendrai aux principaux points.
1er thème, il est ressorti un risque de polarisation par les agglomérations de l'extérieur :
Bordeaux, BAB, Pau et même Toulouse.
C'est ressenti, à la fois, comme une chance et un risque. Comme une chance dans la mesure
où il a été dit :
. on ne va pas concurrencer les grandes métropoles situées autour de nous, il serait vain
d'espérer édifier une université d'un poids égal à celles des agglomérations qui nous entourent
. en revanche, on peut tirer profit de cet environnement, réfléchir à une échelle différente,
et de nos atouts en les faisant mieux valoir dans cet environnement régional aquitain et
même midi-pyrénéen.
2ème thème, des bourgs et des petites villes très nombreux dans les Landes, richesse à
conserver et à revitaliser
L'atelier 3 a peu évoqué Mont-de-Marsan et Dax et a esquissé la question du littoral.
Un consensus s'est dégagé sur le fait d'aller vers la centralisation et la revitalisation des
centres plutôt que la dispersion et l'accentuation du mitage urbain.
Une sorte de vision équilibrée a été proposée pour réhabiliter des quartiers, revitaliser les
airials, avec une densité moyenne car il n'est pas question de créer des habitats collectifs,
comme dans les grandes villes ou la Région parisienne, mais de s'appuyer sur l'existant, en
n'excluant pas du tout l'habitat individuel ou les petits collectifs.
Ceci a paru propice non seulement à cause du coût des équipements et des services publics
(le mitage est de ce point de vue productif), ainsi que pour des questions d'équilibre social,
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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de solidarité, de réseaux sociaux, mêmes si les populations ont changé par rapport aux
quartiers d'origine.
Pour résumer : rassembler plutôt qu'isoler.
3ème thème, les infrastructures
Les infrastructures nouvelles sont perçues comme un danger : elles vont soit aspirer les
Landais dans les pôles périphériques soit attirer.
Impression dominante, c'est une condition nécessaire mais pas suffisante.
Pour réunir les deux et que ce soit une réussite, il faut organiser -autour des infrastructuresl'accueil, la logistique, les services, les gares, l'inter modalité…
La mobilité doit être pensée à différentes échelles, pas seulement nationale ou interrégionale
mais intra régionale ou intra landaise.
4ème thème, l'accord s'est fait pour développer les transversales
Tel que souligné par le diagnostic, les participants sont d'accord avec ces grandes
infrastructures, plutôt nord-sud.
Il faut transversaliser :
. retrouver des chemins anciens (le Chemin de Fer des Résiniers à usage touristique)
. recréer des transversalités (ferroviaires et routières, les détails n'ont pas été définis) pour
mailler le territoire, relier le littoral à l'intérieur et aux villes de l'intérieur, relier l'Ouest à
l'Est.
5ème thème, la conviction est qu'à l'échelle locale les transports automobiles (de façon
générale) et l'autocar demeureront importants dans l'avenir, même si les modes de
propulsion changent (voitures électriques, moteurs hybrides…)
C'est un domaine qu'il faudra traiter, nous avons été invités à l'approfondir en creusant
différents scénarios quant au coût du gasoil et de l'énergie, et en envisageant une nouvelle
forme d'organisation (toutes les façons de pratiquer le partage de l'automobile…).
6ème thème, le développement possible des modes doux, présents dans les Landes mais, pour
l'instant, surtout à usage touristique
Ils pourraient être développés dans ou autour des villes pour les déplacements à petites
distances, à condition qu'il soit parfaitement sécurisés, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
En conclusion,
. le message est de développer mais en complémentarité avec l'extérieur, et pour cela on ne
peut pas uniquement parler des Landes,
. en préservant, autant que possible, spécificité, richesse et originalité des Landes.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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TABLE RONDE
Pierre-Luc SEGUILLON
A travers votre réflexion sur le développement économique, la cohésion sociale, l'accueil, le
respect du milieu, les centres urbains, vous ne pouviez pas faire l'économie d'une réflexion
sur l'accident advenu, cette tempête du 24 janvier dernier (beaucoup plus grave semble-t-il),
10 ans après une première tornade en 1999.
Ceci pose trois questions :
. Y a-t-il un lien entre l'évolution ou la transformation du climat et ces évènements qui vous
ont frappés ?
. Ces événements, qui ont frappé la forêt landaise et amputé son patrimoine forestier, vontils avoir des répercussions à rebours sur le climat lui-même ?
. A partir du moment où disparaît une partie de ce patrimoine, quelles sont les conséquences
économiques et quelles décisions économiques convient-il de prendre ?
Pour traiter ces trois questions : Hervé Le Treut, Denis Loustau et Laurent Davezies.
On dit beaucoup de choses sur l'évolution du climat.
On en discutait tout à l'heure avec Hervé Le Treut, vous me faisiez un peu grief à propos de la
presse qui quelquefois a tendance à dire tout et peut-être n'importe quoi.
Concernant le contexte général, qu'est-ce qui est aujourd'hui et qu'est-ce qu'on peut
anticiper pour demain si on fait la distinction entre ce que vous observez aujourd'hui et ce
que vous pouvez dire sur demain ?
Hervé LE TREUT, météorologue
Pour répondre à cette question très large du changement climatique, les illustrations sont
plus frappantes que les discours (cf. power point).
1er transparent
Chaque diagramme représente de 10 000 ans d'histoire de différents gaz à effets de serre.
. Premier tableau : sur 10 mois, le CO2 est resté confiné entre 270 et 280 par million. A la fin
de cette période, l'augmentation est brutale.
2ème transparent
Non seulement brutale à la fin de cette période mais depuis 1950.
Les émissions de gaz à effets de serre sont d'environ 1,5 milliard de tonnes par an dans les
années 1950 contre plus de 8 milliards maintenant. En ajoutant la part de la déforestation, on
arrive l'an dernier à 10 milliards de tonnes d'émissions de CO2.
L'augmentation est extraordinairement récente et forte en terme de gaz à effets de serre.
Cela ne peut pas avoir d'effets, mais ce sont pour l'essentiel des effets futurs.
Le gros de l'augmentation des gaz à effets de serre concerne les années 70 et 80. Le climat
réagit avec un délai d'une vingtaine ou une trentaine d'années, nous sommes au tout début
d'effets qui sont appelés à se poursuivre, d'abord parce qu'on continue d'émettre des gaz à
effets de serre et que ceux émis (CO2, méthane, CO2 nitreux, fréon…) se stockent dans
l'atmosphère. Le CO2 y reste une centaine d'années, au bout de 100 ans plus de la moitié est
toujours là.
Ces gaz ont une très longue durée de vie et vont avoir une action sur le climat. Depuis des
années, on fait des modèles pour essayer de quantifier cet effet.
Ils montrent qu'à l'échelle du siècle qui vient on aura un réchauffement de la planète, qui
pourrait atteindre de 2 à 6 degrés de réchauffement, ce qui est énorme parce que ce qui
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
13
nous sépare d'un âge glaciaire (en terme de variation globale de la planète) est de 5 à
6 degrés ; on est dans de très fortes modifications du système climatique.
Toutes les fluctuations connues au cours du dernier millénaire (optimum médiéval, petit âge
de glace) représentent des fluctuations de quelques dixièmes de degré.
Depuis quelques années, on a commencé à vivre cela, on a un réchauffement sensible,
surtout :
. dans les régions de haute altitude, dans les régions arctiques, sentinelles du changement
climatique, avec une fonte de la banquise très forte ces dernières années, dans les régions de
montagne,
. mais aussi sur la France, en particulier sur le Sud-Ouest où les températures estivales ont
régulièrement augmenté d'un degré de manière très cohérente à ce qu'on attend dans le futur
et qui est appelé à s'amplifier.
A partir d'un effort d'observation très précis et très méticuleux, on voit les débuts d'un effet
appelé à se prolonger dans le futur, mais bien sûr tout n'est pas appelé à changer de manière
prévisible. On a un effet très spécifique, un effet sur la température globale de la planète,
qui va s'accompagner ensuite de modifications des précipitations et d'un relèvement du
niveau de la mer, les deux plus grosses conséquences associées à ce réchauffement.
Pierre-Luc SEGUILLON
Il y a eu d'autres modifications climatiques importantes dans l'histoire (Sahara), elles
n'avaient pas pour cause les gaz à effets de serre.
Pourquoi aujourd'hui attribuer aux gaz à effets de serre, ce que certains contradicteurs vous
reprochent, ce qui dans l'histoire a été attribué à d'autres causes ?
Hervé LE TREUT, météorologue
Ce sont des problèmes un peu différents : le Sahara s'est asséché il y a 5 000 ans, on sait qu'il
y a une dizaine de milliers d'années on était au plus près du soleil en été, qu'on avait
d'énormes moussons qui venaient couvrir l'Afrique ; on est maintenant au plus loin du soleil en
été, les moussons ont disparu.
Ce sont des phénomènes qu'on comprend et qui sont naturels.
De même, les fluctuations (petit âge de glace, optimum médiéval) sont liées fortement à la
modification des taches solaires, qui reflètent la densité du soleil.
Ces effets naturels existent !
Nous disons simplement qu'à ces effets naturels viendra se superposer une variation qui sera
extrêmement brutale et très rapide liée aux activités humaines, qui bien sûr ne rendra pas la
planète inhabitable, qui bien sûr ne provoquera pas l'extinction de la vie humaine sur Terre
mais qui aura des conséquences fortes en modifiant quand même sensiblement notre
environnement.
Pierre-Luc SEGUILLON
Cette variation brutale est à quelle échéance, à l'échéance du siècle ?
Hervé LE TREUT, météorologue
Elle est à l'échéance du siècle mais on en voit déjà les premiers effets, ces effets vont grandir
tout au long du siècle.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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On peut penser qu'une partie du problème (combustion du charbon, du pétrole, des gaz
naturels…) se résoudra de lui-même puisque ces ressources-là vont commencer à manquer
très sérieusement.
Pierre-Luc SEGUILLON
Tous ceux qui sont ici se posent la question… Ils ont connu la tempête de 1999, une nouvelle
tempête en 2009. Y a-t-il un lien de cause à effet entre ces évolutions climatiques et ces
tempêtes ou tornades ?
Hervé LE TREUT, météorologue
C'est peut-être contradictoire avec ce que je viens de dire mais, en fait, pas de manière
claire. Aucun mécanisme ne permet de lier les tempêtes, qu'on a connues en hiver dans les
Landes, au problème de réchauffement climatique global de la planète.
Autant une canicule, comme celle de 2003, donc un épisode très chaud, ressemble à ce qu'on
attend dans le cadre du réchauffement de la planète, autant une tempête hivernale est très
difficile à lier au réchauffement de la planète.
Les circulations d'hiver sont très fortement liées au(x) gradient(s), au(x) contraste(s) de
températures entre le pôle et l'équateur ; c'est cela qui fait tourner très rapidement les vents
de la planète, qui crée des tempêtes.
Il y a toujours des tempêtes, généralement elles vont plus au nord, mais de temps en temps
elles s'égarent vers la route du sud.
On est malheureusement bien en peine de savoir quand ces accidents se produisent. Pour le
moment, cela relève plutôt de hasards. Un peu comme les accidents sismiques, ce sont des
choses qui se produisent rarement, mais violemment et de façon peu prévisible.
En météorologie, on a un petit avantage sur les épisodes sismiques, on a quelques jours de
prévision possible, sans être capable d'anticiper ces événements.
Malheureusement, dans le futur, il faudra les prendre comme des aléas qui peuvent survenir à
nouveau.
Pierre-Luc SEGUILLON
Les effets de cette tempête, qui a détruit une partie du patrimoine forestier, ont-ils des
conséquences sur le microclimat d'une région, comme celle des Landes ?
Hervé LE TREUT, météorologue
Le couvert végétal, est une composante très forte d'un microclimat régional.
La forêt joue sur les régimes de vents, quand le vent n'est pas suffisamment fort pour la
casser, en tous cas pour arrêter et canaliser le vent.
On l'a vu avec le démembrement en Bretagne, dès que les forêts cessent d'être là le régime
du vent change.
La forêt joue un rôle hydrique considérable, qui dépend ensuite de la géologique du terrain,
qui peut être très souvent d'amener l'eau en surface pour favoriser un recyclage qui permet
ensuite des précipitations à échelle régionale, qui permet aussi dans le cadre de régions
marécageuses, comme les Landes, d'assainir le sol.
Donc, la forêt joue bien un rôle climatique considérable. Il n'a pas été étudié de manière
spécifique dans le cas des Landes. On pourrait effectivement en savoir plus.
Cependant, de manière générale on peut dire qu'elle joue un rôle très important.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Pierre-Luc SEGUILLON
Demandons au Conseil Général de financer un thésard qui travaillerait 2 ou 3 ans sur ce
sujet...
Hervé LE TREUT, météorologue
Ce serait tout à fait possible.
Pierre-Luc SEGUILLON
Et ce serait efficace.
Henri EMMANUELLI
La République est morte ?!
Pierre-Luc SEGUILLON
Avec la modification du climat, le réchauffement climatique, c'est la montée des eaux.
La mer, monte-t-elle oui ou non ?
Si oui, de combien de centimètres ?
Quelles sont les anticipations et les répercussions pour une région comme les Landes ?
Hervé LE TREUT, météorologue
La mer monte ; on le constate par les graphes et les données satellitaires de 3 mm par an
depuis une quinzaine d'années, soit 30 cm par siècle.
Les causes en sont doubles :
. la dilatation des océans qui commencent à se réchauffer
. la fonte d'un certain nombre de glaciers, d'abord les glaciers de montagne et depuis
quelques années la fonte du Groenland qui n'était pas attendue si tôt.
L'estimation est difficile à faire, cependant nombre de scientifiques pensent qu'on va plutôt
aller vers l'accélération de cette tendance.
3 mm par an soit 30 cm par siècle, on s'attend plutôt de 50 cm à 1 m du relèvement du niveau
de la mer à la fin de ce siècle.
Ce n'est pas suffisant pour une submersion massive des régions littorales mais cela provoque
une pression très forte sur le milieu littoral. Il n'y a pas simplement la submersion, mais aussi
la pression mise aux débouchés de certains fleuves et la salinisation des eaux, donc il y a
d'autres formes d'actions.
On est en région landaise dans un domaine particulièrement complexe, difficile à étudier, un
milieu où la côte bouge tout le temps puisque les courants amènent des bancs de sable, cette
côte se meut de manière constante.
Oui, on aura une pression sur toutes les régions littorales, y compris la Région landaise.
Pierre-Luc SEGUILLON
On a demandé à ceux qui le souhaitaient d'envoyer leurs questions sur le site du Conseil
Général. Françoise Demugron pose la question suivante : " J'ai récemment constaté
l'apparition de minis tornades au dessus des champs de maïs nus. Ces tornades vont-elles
s'intensifier ? ".
Hervé LE TREUT, météorologue
On n'a pas forcément de réponse aux questions locales.
On comprend les évolutions à l'échelle globale du climat ; on a du mal à savoir ce qui peut se
passer dans de grandes régions comme le Sahel, ce niveau de détail nous échappe.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Tout ce qui est mouvement tourbillonnaire est relativement naturel dans l'atmosphère et peut
se développer en fonction d'une rugosité du sol… On peut imaginer des raisons très locales qui
favorisent ces situations.
Pierre-Luc SEGUILLON
On a évoqué l'amputation de la forêt. Sur 700 000 ha de forêts, de lande, a-t-on mesuré
l'ampleur des dégâts ?
Denis LOUSTAU, agronome
Après mesure, le triangle aquitain représente 900 000 ha de pin maritime pur, plus 400 000 ou
500 000 ha de forêt qui ne sont pas du pin maritime ; il y a pas que du pin maritime dans la
Région.
L'Inventaire Forestier National (Service d'inventaire forestier) vient de terminer son enquête,
dans des délais très rapides. Il conclut à environ 43 M de m³ de bois par terre, soit cinq et six
fois la récolte annuelle de pin maritime, avec des conséquences très importantes sur la forêt.
Les deux tempêtes de 1999 et 2009 ont frappé, l'une la partie nord, l'autre la partie sud, de
façon presque juxtaposée. L'ensemble de la forêt a été affecté en l'espace de 10 ans par une
tempête où que l'on soit dans cette forêt, donc des conséquences très importantes.
Pierre-Luc SEGUILLON
Avec une tempête ayant un aspect particulier, le vent était non unidirectionnel mais a vrillé,
si bien que les bois cassés sont souvent inutilisables.
Denis LOUSTAU, agronome
Des bois par terre connaissent, de toute façon, une dévalorisation considérable des prix
pratiqués à l'achat, par rapport aux bois sur pied coupés dans des conditions normales.
Une tempête se caractérise par des tourbillons qui soufflent dans toutes les directions, avec
pas mal de bois cassés, soit environ 30 % des dégâts. Pour 70 %, l'arbre complet avec sa
souche tombe par terre. Lorsque l'arbre bascule en entier, on peut en récupérer une partie,
mais c'est un basculement dans des conditions très dangereuses et difficiles à exploiter, de
type mikado d'arbres enchevêtrés.
En outre, d'un seul coup, il y a un apport massif de bois que la filière n'est pas capable
d'absorber, sauf en période de crise.
On sait maintenant mieux stocker ces bois-là puisqu'on a appris en 1999, mais cela pose des
problèmes considérables de stockage, de transport et de commercialisation, donc de
dévalorisation.
Pierre-Luc SEGUILLON
Quand ils restent 3 à 4 mois sur place, quelle est l'échéance d'utilisation des troncs brisés ?
Denis LOUSTAU, agronome
En tout état de cause, le plus vite possible !
Car, au-delà de l'exploitabilité, il y a un risque incendie, un risque de propagation d'insectes
avec les attaques de scolytes qui font des dégâts considérables. La dégradation est
continuelle, elle a déjà commencé et ne fait que s'accentuer.
On sait conserver, dans d'assez bonnes conditions humides, le bois en l'aspergeant.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Des aires de stockage importantes sont aménagées en Gironde et dans les Landes pour le
conserver, mais il sera très fortement dévalorisé par rapport à sa valeur en exploitation
normale.
Pierre-Luc SEGUILLON
Vous évoquez les conséquences considérables sur l'environnement. Peut-on -peu à peu- faire
l'inventaire de ces conséquences ?
Denis LOUSTAU, agronome
On peut les lier en négatif sur le rôle de la forêt sur le plan hydrologique, sur le plan
climatique et microclimatique, sur l'environnement, sur l'image de marque du territoire.
Sur le plan hydrologique, une tempête rajeunit, elle remet à zéro les exploitations. En 1999,
ceci a déjà été étudié.
On a un rajeunissement considérable, une forêt jeune ne se comporte pas du tout comme une
forêt âgée. Jeune, la forêt transpire un petit peu moins d'eau, elle émet plus de chaleur, elle
absorbe moins d'énergie(s).
En fait, sur le plan hydrologique, tout se passe comme si la forêt avait tendance à atténuer
son rôle, qui est de tampon, qui régule le cycle hydrologique en hiver et qui tamponne en
été. Ce rôle-là va disparaître, en partie, dans les zones très endommagées.
Elle va se comporter comme si on avait une culture en sol nu avec des crues assez
importantes en hier, aggravées par un réseau de drainage lui-même abîmé ; en été, au
contraire des sécheresses, en tous cas des évaporations sont plus faibles, donc des coups de
chaleur plus importants, d'où une accentuation des températures locales.
Pierre-Luc SEGUILLON
C'est une région initialement de marais…
Denis LOUSTAU, agronome
Oui.
Pierre-Luc SEGUILLON
On va voir l'eau réapparaître dans la région, notamment là où il y a eu une destruction forte
des nappes d'eau ?
Denis LOUSTAU, agronome
Mais depuis que le marais a disparu, la Région a complètement changé.
Il y a la forêt avec son réseau de drainage...
Dans la forêt strictement forestière, on va retrouver des conditions plus humides en hiver et
au printemps parce qu'on a plus de mal à évacuer le surplus d'eau, le drainage se fait
difficilement dans les Landes et en Gironde.
Ceci étant, le maïs s'est beaucoup implanté avec 250 000 ha de réseau de drainage plus
important, des forages.
D'où aussi une question d'équilibre de gestion de l'eau entre ces deux spéculations (forêt et
maïs ou culture en général) qui sont complètement différentes des conditions initiales des
marais il y a 250 ans.
Henri EMMANUELLI
Combien de litres d'eau par jour pompe un pin adulte ?
Denis LOUSTAU, agronome
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
18
Un pin adulte pompe 400 à 500 l d'eau par jour, mais cela dépend de la densité et de la taille
de l'arbre ; c'est considérable.
Pierre-Luc SEGUILLON
Dans cet univers plus humide, vous parlez de capacité d'accueil du département, ne risque-ton pas un retour des moustiques, des maladies attachées aux moustiques ? Il devait y en avoir
pas mal avant l'implantation de la forêt.
Denis LOUSTAU, agronome
Une question importante se pose pour l'avenir de l'agriculture et la sylviculture en Aquitaine,
celle du partage de la ressource en eau.
Les prévisions des modèles climatiques régionalisés valent ce qu'elles valent, il est très
difficile de faire des prévisions précises.
Cependant, on note une tendance à l'accentuation des contrastes saisonniers, avec moins
d'eau en été alors qu'il en faudrait plus et trop d'eau en hiver et au printemps alors qu'il y en
a déjà trop. Conséquence, la production végétale s'affaiblit.
Sur la répartition des ressources en eaux, dans les Landes il y a un besoin de ressources en
eau pour les cultures irriguées, la forêt est aussi grande demandeuses d'eau en été.
Un arbre qui n'a pas d'eau en été ne pousse pas. Lorsque le maïs manque d'eau, on le constate
immédiatement. Pour une forêt, on a la même perte de rendement mais on ne le voit pas, les
arbres restent verts et passent l'année ainsi. Seuls les cernes le mettent en évidence, les
années sèches les cernes sont petits, les années humides les cernes sont gros, donc l'arbre a
besoin d'eau pour pousser, comme le maïs.
Par ailleurs, il y a toutes les industries et l'urbanisme qui utilisent les effluents et les
écoulements du réseau hydrographique.
La ressource d'eau n'est pas limitée, il faut la partager de façon intelligente. Il est bien
d'anticiper les changements du régime hydrographique et du cycle hydrologique au niveau
régional pour l'aménagement.
Pierre-Luc SEGUILLON
Ces deux tempêtes doivent-elles conduire à changer la manière dont on plante les pins
aujourd'hui ?
Denis LOUSTAU, agronome
Oui, je le pense.
Le message ne découle pas des tempêtes mais aussi de ce qui a été dit du changement
climatique. On peut se dire : c'est sur un siècle, bon…
Mais à l'échelle de l'évolution des climats c'est extrêmement brutal, un siècle c'est très rapide
pour le climat, un arbre c'est immédiatement, la vie d'un arbre c'est de l'ordre du siècle, donc
c'est très concret.
L'arbre qu'on plante aujourd'hui connaîtra les scénarios climatiques annoncés pour 2050,
2070.
Pierre-Luc SEGUILLON
Un pin adulte, c'est 30 ans ?
Denis LOUSTAU, agronome
Plutôt 40 ans, même 50 ans ; on peut bien sûr le couper plus jeune.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
19
La recherche se mobilise depuis une dizaine d'années sur comment adapter la sylviculture, la
composition spécifique des forêts, la filière puisque les produits qui en sortent doivent être
pris en compte, à l'évolution du climat.
D'où deux messages importants.
1er message
1.a - Diversifier la forêt
Une forêt qui n'a qu'une seule espèce, voire qu'une seule variété avec des arbres du même
âge, est très vulnérable aux aléas climatiques, aux insectes, aux pathogènes, de nouveaux
insectes et de nouveaux pathogènes apparaissant avec l'évolution du climat.
1.b - Diversifier les sylvicultures
Il ne s'agit pas de réfléchir uniquement à des mélanges d'espèces, mais à spécialiser des
sylvicultures plus courtes pour la production intensive de biomasses ou de fibres à destination
des industries papetières (employeurs très importants dans la Région), et mélangées -mais
peut-être de façon moins intensive- pour la production du bois d'œuvre.
1.c - Réfléchir à son rôle de protection pour la biodiversité, pour les ressources génétiques, le
cordon dunaire littoral…
Pierre-Luc SEGUILLON
Les industries de la Région fonctionnent beaucoup sur le degré de résine des pins. Peut-on
changer des espèces sans amener des bouleversements des industries locales ?
Henri EMMANUELLI
On entend dire sans arrêt qu'il faut diversifier, mais les Instituts de recherche consultés
conviennent qu'ils y travaillent depuis 50 ans sans avoir trouvé mieux. J'aimerais donc savoir
si on a trouvé mieux !
Denis LOUSTAU, agronome
On a autre chose à proposer.
Pour trouver mieux, il faudrait qu'on ait vécu cette expérience de changement climatique.
Pour les conifères, des espèces comme le pin radiata et le pin teda sont expérimentés dans
les zones fertiles, elles sont proches du pin maritime, l'une plus vulnérable à la sécheresse,
l'autre au gel, mais elles pourraient être valorisées.
Henri EMMANUELLI
Avec le gel, c'est mort !
Denis LOUSTAU
Les périodes de gel vont devenir des évènements plus rares du fait du réchauffement.
Henri EMMANUELLI
On a essayé quatre fois l'eucalyptus, à chaque fois ça tombe car -sur 2 ans- il y a quasiment
un gel.
Denis LOUSTAU, agronome
Si l'eucalyptus est installé et a fait une souche, quand il gèle, ce n'est pas une perte
dramatique, il va repousser très vite, avec des rendements très importants.
On peut imaginer des mélanges d'espèces à croissance rapide, comme l'eucalyptus et cette
essence de pin qui pousse en taillis. Imagination et savoir-faire sylvicole sont à mobiliser. On
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
20
essaie, il faut continuer d'essayer avec de nouvelles variétés, avec d'autres espèces, des
mélanges de variétés.
C'est le moment de réfléchir à ces nouvelles options.
En terme de recherche, c'est la mise en place du réseau de démonstration et d'essai avec
différentes espèces, des réseaux distribués sur le massif, et, en terme de développement, des
projets sont mis en place avec les professionnels, les sylviculteurs et autres à l'échelle du
massif.
Il faut se projeter dans l'avenir.
2ème message
Par rapport au changement climatique, en sylviculture et foresterie on a longtemps raisonné
à l'identique : refaisons pareil.
Le climat tel que connu, les sols tels que connus, l'environnement des 50 dernières années,
nous prennent en défaut, on n'a pas imaginé que l'environnement allait changer.
Henri EMMANUELLI
On a essayé l'eucalyptus ! On a essayé le pin portugais ! On a même essayé le pin portugais
dont l'origine était le pin du Sud-Ouest !
Deux Instituts spécialisés disent ne pas savoir faire autre chose. Or, j'entends dire qu'il faut
faire autre chose, je ne comprends plus…
Pour essayer il faut 30 à 40 ans, ce n'est pas une variété de maïs qu'on peut essayer à l'année
et dire l'année d'après si ça marche ou pas. En l'occurrence, avant de savoir si ça marche ou
pas, il va falloir des volontaires pendant plusieurs décennies.
Le discours n'est ni clair ni précis, sauf à connaître les espèces et à les avoir essayées. Pour
l'instant, quand on s'adresse à l'Institut du pin maritime, il répond qu'il a essayé mais que ça
n'a pas marché.
Est-on cadré ou pas là-dessus ?
Il serait bon de le savoir, vous ne le savez peut-être pas !
Denis LOUSTAU, agronome
Si vous me demandez ce qu'il faut planter ici et là, je ne le sais pas.
Par contre :
1°/ Imaginer une sylviculture dynamique
Faire évoluer les peuplements au fur et à mesure de leur conduite, installer des mélanges
d'espèces, l'une récoltée assez jeune et bien adaptée au climat actuel, l'autre récoltée plus
tard et adaptée à un climat de sécheresse plus important.
Il faut sortir de l'idée de faire la même chose pendant 40 ans, penser de la sylviculture qui
évolue dans le temps avec des récoltes fractionnées.
2°/ Ne pas faire la même chose sur un million d'hectares
Prendre en compte les spécificités locales, les scénarios climatiques régionaux.
Entre le nord du Médoc et le sud des Landes, les différences de pluviométrie sont du simple
au double, les ressources biologiques et biotiques ne sont pas les mêmes, on ne peut pas faire
exactement la même chose. Or, actuellement, on fait un peu la même chose, on fait un peu
de la sylviculture de pin maritime.
Il n'y a pas de réponse toute prête, clé en main.
Il y a 10 ans, la question climatique était controversée, l'INRA était critiqué, y compris nos
propres programmes pour travailler sur ces questions-là. Il aurait fallu que nos prédécesseurs
des années 60 imaginent que ce climat allait évoluer, à l'époque rien ne permettait de le
dire. Donc, c'est vrai, on est pris en défaut.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Un réseau d'essai est développé, il produira en temps voulu des résultats (eucalyptus…).
Il faut essayer, ne pas avoir peur de développer les réseaux d'essai et d'expérimenter.
Pierre-Luc SEGUILLON
Lorsque vous dites d'expérimenter d'autres réseaux, vous êtes toujours dans le domaine de la
sylviculture.
Car, en fonction de ce qui vient de se produire, faut-il également cesser de privilégier la
sylviculture et développer d'autres cultures, au regard du scientifique que vous êtes et des
considérations sur les modifications climatiques ?
Denis LOUSTAU, agronome
Qu'entendez-vous par d'autres cultures ?
Pierre-Luc SEGUILLON
Faut-il développer maïs et autres ?
Il n'y a pas que la sylviculture !
Henri EMMANUELLI
Il a le droit de poser ces questions...
Denis LOUSTAU, agronome
Mis à part les questions économiques qui ne sont pas de mon ressort mais qui sont très
importantes dans ce domaine, sur le strict plan de l'utilisation des ressources en eau, le plan
climatique, le plan des sols, on ne peut pas développer sur un million d'hectares des modèles
de cultures extrêmement exigeants, polluantes aussi parce qu'on ne sait pas encore retenir
l'azote et les fertilisants apportés sur ces cultures-là, on ne peut pas imaginer développer ces
modèles-là pour des questions environnementales et de productivité.
La juxtaposition de productions forestières peu extensives et de productions intensives est
une nécessité impérative.
La combinaison dans le territoire de ces deux spéculations peut être faite de façon
intelligente, avec les forêts qui atténuent un peu les effets de pollutions et autres des
cultures.
Pierre-Luc SEGUILLON
Concernant le contexte général :
. Pensez-vous qu'il faut dès maintenant imaginer de nouveaux modèles économiques pour
freiner les phénomènes de réchauffement climatique ?
. Et en même temps s'y adapter ?
Laurent DAVEZIES
Cette histoire (qui nous tombe dessus) est affreusement compliquée, dans une ambiance
catastrophique, des problèmes climatiques, une crise économique, la grippe. Cela devient
très difficile dans un contexte mondial où les interactions sont de plus en plus complexes à
comprendre. Pour autant, on a connu un paquet de situations compliquées dans le passé et on
les a toujours surmontées, on en a connu de pires.
On est face à des paradoxes étonnants, on est sur un territoire qui, à beaucoup d'égards, est
très pénalisé, et le serait plus encore avec le réchauffement, outre la punition de la tempête
de l'hiver dernier.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
22
C'est un territoire assez industriel, 22 à 23 % des actifs sont employés dans l'industrie et sont,
pour beaucoup, des ouvriers, donc vulnérable. On a un recul d'activités industrielles dans le
secteur, même si de jolies choses se développent autour de l'aéronautique et de la chimie.
Globalement, l'industrie recule en France, ainsi que dans les Landes.
Selon les spécialistes, eu égard à la situation connue dans le passé, le bois n'a pas le vent en
poupe. L'industrie du bois des Landes, de 2000 à 2006 (en 6 ans) soit moins 1 000 emplois sur
5 000 qui restent aujourd'hui, la situation est inquiétante.
On parle d'un territoire, par rapport à la métropole, comme étant l'alpha et l'oméga du
développement d'un dispositif territorial de type industriel qui permet de faire face à la
mondialisation… C'est du baratin !
C'est un peu de la vantardise de dire que Mont-de-Marsan est une métropole… On n'a pas de
dispositif métropolitain dans le département des Landes !
Avant de rentrer dans la déclinaison des effets prévisibles du réchauffement climatique ou
même de la crise économique actuelle, plusieurs univers sont devant nous.
Restons sur celui sur lequel on est en ce moment.
Nous sommes un département qui devrait être plutôt pénalisé. Bizarrement, c'est l'inverse.
Il est champion de France de la croissance démographique. Le développement territorial c'est
d'abord le peuplement, ceux desquels tout le monde part vont mal, ceux dans lesquels tout le
monde arrive vont bien !
Pierre-Luc SEGUILLON
J'ai cru comprendre qu'il s'agissait de cinquantenaires.
Laurent DAVEZIES
1- Un cinquantenaire, c'est superbe !
2- L'âge de la dépendance recule plus vite que celui de l'espérance de vie, on va faire des
vieux encore plus superbes en comparaison des quinquagénaires d'aujourd'hui.
3- Les quinquagénaires ont la retraite qui arrive derrière.
Même si les Landes ne vivent pas d'une économie résidentielle des retraités, si l'on enlevait
les retraites des Landes ce serait un vrai choc économique.
S'il fallait choisir entre la forêt et les retraités en terme économique, il faudrait sacrifier la
forêt ! Les chiffres le prouvent, selon une vision purement comptable.
On a du peuplement, le volume de revenus en milliards d'euros a augmenté très rapidement,
le volume par habitant a augmenté relativement par rapport à la moyenne de province donc
plus vite qu'ailleurs.
Phénomène paradoxal, aujourd'hui les Landes se portent étonnement bien.
Pierre-Luc SEGUILLON
Comment l'expliquez-vous ?
C'est un département qui devrait être pénalisé par l'évolution de l'industrie, qui va l'être par
la crise et les évolutions climatiques.
Par ailleurs, vous dites : je constate qu'elles se portent bien.
Laurent DAVEZIES
Pour l'instant !
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Pierre-Luc SEGUILLON
Comment l'expliquez-vous, pour l'instant ?
Comment voyez-vous ou que préconisez-vous pour l'avenir ?
Laurent DAVEZIES
C'est un département multicarte :
. Il a pas mal d'atouts, assez différenciés, dans différentes parties du territoire.
. Il bénéficie de proximités à Bordeaux : en matière d'actifs, de logements, d'activités.
. La partie sud marche plutôt bien.
. Son économie touristique sur le littoral fonctionne pas mal.
Les Landes sont un endroit où les gens ont envie d'habiter !
Le recensement 2005 fait état de 370 000 habitants. En fait, dans l'année il y a 16 %
d'habitants en plus, des habitants provisoires. Vous décomptez les départs des Landais, les
arrivées des touristes, venus de la France et du Monde, cela fait plus 16 % de population
recensée.
Vous avez plus d'emplois liés aux ménages, l'économie touristique joue son rôle.
Eu égard à l'économie des retraites, dans le solde migratoire, le retraité pèse un poids
significatif. Les retraités mobiles sont des gens solvables et riches, très souvent à revenus
moyens supérieurs à l'actif résident ; cela fait venir de l'argent.
L'axe du barreau Mont-de-Marsan Dax Bayonne, en passant par Tartas, fonctionne
relativement bien aussi. Il a de bonnes performances de créations d'emplois et joue
notamment un rôle assez important pour les services.
Tout cela mis bout à bout, apparemment de briques et de broc, finit par faire quelque chose
qui tourne.
Henri EMMANUELLI
Je reviens sur le de " briques et de broc ", ce n'est pas tout à fait comme ça, il y a 2 M de
touristes pour 370 000 habitants c'est énorme. L'agriculture est l'une des plus perforante :
premier producteur de maïs, premier producteur de foie gras…
Ce n'est pas de briques et de broc !
Laurent DAVEZIES
Je retire " de briques et de broc ", ce n'est pas péjoratif.
Henri EMMANUELLI
Je l'ai très mal vécu…
Laurent DAVEZIES
Je le retire et je présente des excuses…
C'est relativement composite : on a des systèmes qui sont relativement autonomes les uns par
rapport aux autres, on va dire qu’il s’agit d’un habit d'arlequin économique.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Pierre-Luc SEGUILLON
Cette économie composite fonctionne bien pour l'instant, en fonction des différents
évènements qui risquent de se produire : l'industrie du papier se porte de moins en moins
bien ; la crise ; les modifications politiques.
Comment voyez-vous, pour l'avenir, les modèles économiques de ce département ?
Laurent DAVEZIES
Donc, on a un département qui marche du feu de Dieu en terme de dynamique.
Première menace, celle de la crise économique qui est un fantastique accélérateur de
restructuration donc de déstructuration. Ainsi, l'emploi industriel en France et en Province,
en particulier dans les Landes, est très menacé par le choc actuel.
Déjà, il y a un accélérateur.
Dans une conférence récente, un Américain indiquait que le Michigan, qui vivait sur l'industrie
du bois et des meubles, est en train de se désertifier complètement, toutes les sociétés se
délocalisent en Chine.
L'avenir de l'industrie du bois et ses dérivés (pâtes à papier…) est inquiétant.
Pierre-Luc SEGUILLON
Fabrication de niches.
Laurent DAVEZIES
Un membre du Conseil Général me faisait part (à midi) d'un avantage génial concernant ce
fameux pin landais, qui est de l'ordre de la molécule et qui permet d'être assez compétitif
autour de la résine, ce que vous avez un peu évoqué tout à l'heure ; je ne sais pas, je ne
connais pas cette affaire-là.
Il n'empêche que l'industrie n'est pas terrible. En plus, il y a les problèmes de l'euro… Dans le
Sud-Ouest, même l'aéronautique est menacée, donc les équipementiers…
D'où une fragilité économique industrielle forte.
Si quelqu'un me dit aujourd'hui qu'il sait ce qui va se passer à 30 ans concernant tous les
changements climatiques, avec toutes les conséquences, éléments un peu impressionnistes,
je resterai ferme sur le plan global, prudent sur le plan local.
Ceux qui voient ce qu'il faut faire à ce jour comme ajustements majeurs pour adapter ce
territoire pour les 30 ans qui viennent et faire les énormes investissements qu'il faut faire
dans les 2 ans qui viennent, sont, à mon avis, des charlatans.
1- On n'en sait rien !
2- Je monte d'un cran, il me semble, parmi tous les soucis qu'on a à gérer dans ce pays, qu'il y
une espèce de frénésie « grenellisée ».
On nous dit : il faut être les meilleurs du monde, la France est le premier pays pour la
production de gaz à effets de serre par milliard de dollars de PIB. On est les seconds !
Quand on dit : il faut être les meilleurs du monde, on pense avoir un boulot monstrueux,
devoir doubler trente pays… Non, nous sommes déjà les seconds, les Suédois sont devant
nous, donc on va monter d'une marche sur le podium, cela va nous coûter une fortune.
Si la prise en compte des mécanismes qu'on nous a décrit un peu rapidement et que je trouve
très inquiétants, notamment climatiques, interrogent la France et ses territoires c'est en
terme d'apports technologiques.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Pour économiser une tonne de CO2 en France, il faut dépenser une fortune parce qu'on est
déjà très bons. Il n'y a pas de réunion sur n'importe quel canton où l'on n'en discute pas.
L'argent qu'on utilise pour économiser une tonne de CO2 en France permettrait d'économiser
500 tonnes de CO2 au Brésil ou en Chine.
Il me semble donc que nos apports sur nos territoires sont plutôt technologiques que sur des
réponses à apporter.
On entend parler partout de la croissance verte, je n'ai pas encore vu de quoi il s'agissait, de
quoi s'agit-il derrière concrètement : matériaux d'isolation, nouvelles technologies de
transports…
On a intérêt à faire, dans les territoires expérimentés, des initiatives transposables.
Qu'on économise des tonnes de CO2 dans les années qui viennent dans les Landes ne changera
rien à l'avenir du monde.
En revanche, le plan de relance, sorti il y a quelques mois, utilise les fonds de tiroir, tel que
signalait le Président de la République.
On prend des mesures et l'on fait des investissements accélérés à l'ancienne façon.
Si l'on croit ce que l'on vient de nous dire, sachant que l'on est à la veille de très gros ennuis,
même s'il n'y aura pas que des choses négatives, mais plus de choses négatives que positives,
les efforts qu'on doit faire aujourd'hui sont effectivement des efforts pour rentrer dans un
nouvel univers technologique.
Les Landes sont un endroit tout à fait intéressant, c'est l'Amérique du point de vue de la
voiture, le taux d'utilisation de la voiture et des distances parcourues quotidiennement est
l'un des plus élevés de France, c'est normal, c'est un département très rural avec très peu de
transports collectifs.
Toutes les initiatives à prendre et qui vont être prises sont moins pour limiter la casse dans le
territoire où l'on se trouve (même chose en Haute-Savoie) mais plutôt pour développer les
moyens (on est beaucoup plus riche que chez les Indiens, les Chinois et les Brésiliens), des
façons de faire face transposables, et peut-être donner un peu de concret à cette idée de
croissance verte, dont on entend parler tout le temps mais qu'on ne voit pas encore.
Pierre-Luc SEGUILLON
Le département fait un effort dans le domaine photovoltaïque, qu'en pensez-vous ?
Laurent DAVEZIES
Je suis un peu dubitatif, il y a limites terribles sur les coûts.
C'est extrêmement coûteux.
C'est artificiellement intéressant parce qu'EDF rachète l'électricité à des tarifs très
avantageux. Dans une région du sud de la France, tous les agriculteurs veulent arrêter pour
faire du photovoltaïque et de l'éolienne, eu égard au prix de rachat d'EDF.
Les Allemands ont fait la même chose, sauf que l'an dernier le Gouvernement allemand a
décidé d'arrêter de payer des prix insensés.
Si l'on aide aujourd'hui, cela va faire baisser les coûts des plaques photovoltaïques et ça
deviendra intéressant. Mais, en France on n'est pas les rois de la fabrication des plaques,
outre un coût plancher sur le silicium, c'est plus difficile.
Je serais maire d'une commune des Landes, où l'on sait que les finances locales ne sont pas
terribles, ayant la possibilité de ramener des revenus comme ceux indiqués par Philippe
Estèbe (payer la scolarité d'un enfant avec un hectare), peut-être que je craquerais, mais si
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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j'ai une conscience nationale je regarderai à deux fois, c'est un peu se tirer une balle dans le
pied au niveau national.
Au moment où l'on est en grande difficulté, il faut trouver une réponse durable.
On est face à une crise économique, on rentre dans des processus totalement antiéconomiques et qui ne tiendront que tant que le Gouvernement dira à EDF de racheter à ce
prix-là, sinon comme les Allemands la saison dernière ce sera la gueule de bois.
Pierre-Luc SEGUILLON
Réaction de Hervé Le Treut et Denis Loustau à ce qui vient d'être dit sur le plan économique…
Hervé LE TREUT
Pour ces problèmes de réponse au changement climatique à venir, il faut séparer bien
clairement deux choses.
D'abord, diminuer les émissions de gaz à effets de serre.
Je suis d'accord, la part de la France dans ces émissions est ce qu'elle est, elle est relative
aussi au poids géographique et démographique de la France, on émet 5 % des effets
planétaires.
Comme tout est mélangé, le CO2 est mélangé à l'échelle du globe, au-dessus de nos têtes,
l'effet de serre qu'on verra ici est le même qu'à Singapour, c'est-à-dire 5 % de gaz à effets de
serre français et 85 % qui viennent d'ailleurs.
Ce qu'on peut nous faire pèse au maximum 5 %.
Quand on redécline par habitant, c'est beaucoup malgré tout.
Si on regarde l'augmentation actuelle, 30 ans, 50 ans, ces augmentations d'émissions ont été
sur tous les pays occidentaux, on a des technologies un peu plus sobres en énergies
actuellement, c'est beaucoup plus l'Inde, la Chine, le Brésil qui émettent.
Les mesures que l'on peut prendre, si l'on veut limiter les émissions, sont des mesures de
développement technologique qui pourront être transférées dans les pays où les émissions des
gaz à effets de serre augmentent très fortement.
Ce mécanisme de transfert doit être pensé, quand on pense au solaire, quand on pense à
l'éolienne, on doit penser à cette idée qu'au bout du compte si l'on veut diminuer les
émissions ce n'est que dans un transfert de technologies vers ces pays-là que l'on pourra y
contribuer.
Les solutions qu'on prend au niveau national n'ont de sens que si elles doivent être transmises
vers ces pays.
Outre la limitation des gaz à effets de serre, il y a, ensuite, le problème de l'adaptation
locale à ce qui va se produire.
Il a été dit qu'il est difficile de le savoir dans le détail ce qui va se produire, je suis tout à fait
d'accord avec Denis Loustau.
Mais, on a le devoir de réfléchir au fait que les choses ne seront plus comme avant.
Quel que soit le chemin que cela prendra, même si ça coûte un peu cher, c'est un réflexe qu'il
faut malgré tout avoir.
On investit lourdement dans des constructions résistantes aux séismes, même dans des
régions où les risques sont faibles ; ça fait fonctionner le bâtiment.
Il y a toute une ingénierie d'adaptation à des situations différentes qui doivent se penser en
fonction d'un environnement qui peut changer.
Il faut clairement séparer ces deux problèmes :
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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. Comment contribuer à un problème global et mondial d'émissions de gaz à effets de serre ?
. Comment vivre localement ?
Ceci sera très différent selon les régions de France ou du monde, les impacts ne seront pas
les mêmes. Il faut bien séparer ces deux problèmes pour bien comprendre ce qu'on a à faire.
Denis LOUSTAU
Sur le premier point, il y a un devoir de solidarité, le changement climatique peut être
dangereux au niveau global ; une mobilisation globale doit se faire.
Bien sûr, on peut dire que la France n'est pas responsable de beaucoup d'émissions, donc
qu'on va attendre. Ce n'est pas tout à fait comme ça que les négociations internationales se
passent.
Les pays développés, dont nous faisons partie, ont fait leur part de déforestations, de
pollutions et d'émissions de gaz à effets de serre. Ils ne peuvent pas décemment arriver
devant des pays comme l'Inde, la Chine ou le Brésil, qui se développent de la même façon
que nous l'avons fait, pour leur expliquer qu'il ne faut pas qu'ils fassent comme nous, ce n'est
pas aussi simple que ça.
Si on veut arriver à quelque chose au niveau international et global, pour le futur de nos
enfants et petits-enfants, il faut montrer une attitude plus solidaire.
Si une bonne chose peut arriver à l'échelon global c'est peut-être cette solidarité, sans être
naïf, qui peut émerger au niveau international.
Sur le plan local, je ne crois pas que le changement climatique soit une catastrophe, au
contraire, les Landes peuvent être une région favorisée.
Dans le changement il n'y a pas que du mauvais, l'environnement peut être amélioré pour un
certain nombre de cultures et de forêts.
Il faut saisir les opportunités offertes ; les périodes de gel diminuent déjà et vont continuer
d'une façon ou d'une autre.
Il faut saisir ces opportunités en matière d'améliorations génétiques, de matériel végétal, de
culture, et les anticiper.
On ne peut pas être trop précis, au niveau local c'est difficile.
Mais dans les modèles régionalisés, les Landes, en particulier le sud des Landes, ne sont pas
extrêmement défavorisés.
Pierre-Luc SEGUILLON
La difficulté consiste entre le temps de la recherche et le temps politique, sans parler du
temps médiatique.
Denis LOUSTAU
En matière de recherche, deux choses :
C'est grâce à la recherche qu'on sait que le climat est en train de changer, de changer
rapidement et changera encore.
On n'a pas toutes les réponses et les solutions à apporter, mais on n'a jamais été autant en
mesure d'anticiper ce qui va se passer qu'aujourd'hui dans les pays développés, en sylviculture
et au niveau global.
Devant nous, on a un monde d'incertitudes mais beaucoup moins qu'avant. On était plus
ignorant avant, on se trompait. On continue de se tromper mais un petit peu moins qu'avant.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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DEBAT
Laurence ROTOMAN, représentante des Amis-de-la-Terre-Landes
Lecture :
" S'ils ne sont pas précurseurs, ils sont, en tous cas, force de proposition depuis de
nombreuses années concernant le dérèglement climatique puisqu'ils ont, dès 1990, ont
organisé dans les Landes les premières conférences sur l'effet de serre et seul un élu s'était
alors déplacé. 20 ans après, nous sommes heureux de voir que le Conseil Général prend en
considération ce problème, qui appelle des politiques d'adaptation et d'anticipation. Mieux
vaut tard que jamais !
250 millions de personnes sont actuellement touchées par des catastrophes liées au climat.
D'ici 2015, c'est-à-dire dans 6 ans, ce nombre pourrait s'accroître de 50 %, atteignant une
moyenne de 375 millions de personnes.
Comme la tempête Klaus l'a montré, nous ne sommes malheureusement pas à l'abri de ce
genre de problème, les dérèglements climatiques ne sont peut-être pas imputables aux
activités humaines, ne sont peut-être pas dus aux gaz à effets de serre, en tous cas avec le
dérèglement climatique on aura de plus en plus ce genre de problème, avec des intensités
sûrement plus importantes, sans vouloir faire du catastrophisme.
La solidarité et l'humanitaire ne pourront pas éternellement compenser des désordres
engendrés par de mauvais choix.
Est-ce anticiper le dérèglement climatique que de privilégier les infrastructures polluantes
et inutiles au lieu de développer les pistes cyclables et les transports collectifs de
proximité ?
Citons, entre autres, l'A65, voie commerciale avant tout régionale dont l'existence va
totalement à l'encontre de la lutte contre les gaz à effets de serre.
Les investissements de l'avenir iront-ils aux modes de transports réellement écologiques,
améliorant le quotidien des Landais ?
Le dossier parle d'éthique environnementale…
Où est la cohérence entre prévisions d'experts et décisions politiques quand, face à la
raréfaction de l'eau douce, on persiste dans une monoculture avide d'eau et de pesticides,
polluant jusqu'aux nappes phréatiques ?
N'est-ce pas aberrant d'organiser les marchés de l'éthanol de maïs au mépris du fait qu'un
litre d'éthanol de maïs consomme 900 litres d'eau ?
Rien que pour sa culture, car après il y a la transformation qui rajoute encore un peu d'eau
pour un litre d'éthanol de maïs !
Depuis 15 ans, les Amis-de-la-Terre demandent l'utilisation des bois locaux dans les
aménagements publics.
Cependant, encore dernièrement, du bois africain et du bois amazonien ont été importés
pour la réfection de la place Saint Roc à Mont-de-Marsan ou des berges de l'Adour à Dax.
Apparemment, il y a maintenant une volonté de développer la filière bois-énergie, ce qui est
très bien. Est-ce qu'elle s'organisera dans un souci de rentabilité à court terme ou bien dans
une logique naturelle ?
C'est une grande question…
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Il y a 20 ans, les Amis-de-la-Terre envoyaient une lettre aux trente Conseillers généraux leur
demandant d'inclure un projet bioclimatique dans leurs appels d'offres.
Un seul y répondait, sur trente c'était déjà un.
Est-il désormais d'actualité d'adapter les bâtiments publics et de les équiper d'énergies
renouvelables ?
On a parlé d'éolien, on a parlé du solaire.
Mais il y a également la méthanisation qu'Hervé Le Treut connaît bien puisque j'ai pu lire
dans un de ses documents, au niveau des gaz à effets de serre, que le méthane est 21 fois
plus impactant dans l'atmosphère que le CO².
Il n'y a aucune politique européenne sur le méthane. Par contre, la méthanisation permet de
récupérer le méthane et d'en faire de l'énergie.
Pas mal de systèmes se mettent ainsi en place à travers le monde, récupérant la pollution
pour en faire de l'énergie ; ce qui à mon avis est une bonne solution.
La surface agricole utile en agriculture biologique est de 1 % dans les Landes, tandis que la
moyenne nationale est de 2 % et qu'il est annoncé par le Gouvernement 20 % en France pour
2020.
Envisagez-vous de mettre en œuvre de réelles politiques d'adaptation et d'apporter un
soutien effectif en faveur d'une agriculture vivrière écologique dépolluant les cours d'eau et
revitalisant les sols ?
Les décisions prises aujourd'hui sont d'une importance vitale pour le monde de demain.
L'eau et l'air sont essentiels à notre survie et la technologie ne peut pallier à toutes nos
erreurs.
Si le but de cette étude est d'anticiper les dérèglements climatiques et leurs conséquences, il
faudra alors réinventer l'espace rural et urbain en transformant l'économie avec éthique et
raison.
Au-dessus des intérêts personnels et des clivages politiques, il y a l'intérêt général de tous.
Soumettre la nature ou coopérer avec elle, telle est la question principale sur l'avenir des
Landes en 2040.
Les déclarations d'intentions d'aujourd'hui seront elles suivies d'actes demain ? ".
Pierre-Luc SEGUILLON
Il y a beaucoup de choses dans votre exposé, je ne sais pas si ce sont des questions ou un
programme. On est remonté à une vingtaine d'années...
Henri EMMANUELLI
Je connais ce discours…
On nous dit : " On était les seuls "… Quand j'ai demandé, en 1996, l'intervention des
éoliennes, il a fallu des années avant que cela ne devienne le sujet à la mode. Lorsqu'on a
commencé à faire les premières chaudières à bois dans les collèges, je n'ai pas remarqué
d'intérêt particulier autour de nous. Etc, etc…
Je trouve ce discours intéressant, excepté que je reste frustré sur les modalités pratiques et
concrètes. Il y a 370 000 personnes à faire vivre, des emplois à créer, de l'activité…
On ne peut pas dire simplement il n'y a qu'à, il n'y aurait qu'à.
Qu'est-ce que cela veut dire concrètement ? Je suis d'accord pour que l'on soit contre
l'autoroute A65 et la LGV, mais on ne va pas réinventer la voiture à cheval !
Donc, tout cela est intéressant mais ça ressemble un peu à une catéchèse.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Laurence ROTOMAN
C'est un peu court comme réponse.
Catherine VILLEMIN, élue à Morcenx
Dans les Landes, nous avons beaucoup de petits propriétaires. Comme certains ont dit, ils ont
souvent la cinquantaine. Leurs petites forêts de pin étaient leur future retraite.
Que peut-on maintenant leur proposer de planter aujourd'hui pour pouvoir vivre dans
quelques années ?
Pierre-Luc SEGUILLON
On nous disait, ce matin, que ces quelques hectares ont payé les impôts -sur ces hectaresavant même que le bois soit arrivé à maturité.
Donc, avec la tempête, des gens qui ont payé des impôts pendant des années sur ce petit
patrimoine se retrouvent, à l'arrivée, avec du bois qui est par terre.
Laurent DAVEZIES
Ce propriétaire forestier de 55 ha à Sabres a effectivement signalé ce paiement par
anticipation.
De ce fait, lors de la vente du bois, au bout de 30 ans, aucun impôt n'est payé.
Si c'est vrai, - car c'est singulier, mais je ne vois pas pourquoi cette femme nous aurait menti,
Philippe Estèbe l'a entendu comme moi -, une démarche est à faire auprès de Bercy pour leur
dire : vous ne pouvez pas anticiper le paiement d'un impôt sur une assiette qui a disparue.
Avant de savoir s'il faut planter tomates ou eucalyptus, il serait bien que ces propriétaires
puissent récupérer leurs impôts.
Pierre-Luc SEGUILLON
Faut-il développer des mécanismes de solidarité après une situation de ce type, dont les
victimes de dérèglements climatiques à tous les niveaux ?
Laurent DAVEZIES
D'autant que très peu d'exploitants étaient assurés, 5 à 6 % (paraît-il) avaient des assurances.
Henri EMMANUELLI
Contre l'incendie…
Laurent DAVEZIES
Contre la tempête même pas ! Donc, là, on a vraiment un problème majeur de solidarité.
Henri EMMANUELLI
La loi 2001 n'a pas tranché sur la question de l'assurance tempête. Un rapport a été fait
ultérieurement en 2005, signé par Dominique Bussereau. La conclusion était simple,
juridiquement et économiquement le prix de l'assurance serait incompatible avec l'activité
sylvicole.
Donc, aujourd'hui, il n'y a pas d'assurance.
Ce qui amène à penser que cette assurance, première nécessité si l'on veut un
développement durable du massif, ne peut se faire que par cotisation publique et privée.
Un certain nombre de choses sont en train d'être revues à Bruxelles, dont la PAC.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Je l'ai dit à trois Commissaires européens, je veux bien qu'on parle d'environnement, je veux
bien qu'on parle d'éco-développement, je veux bien qu'on parle de développement durable,
mais ni la République française ni la Communauté économique européenne n'ont de politique
forestière !
Il serait intéressant et concret de commencer par là.
Denis LOUSTAU
Il est impossible de donner une réponse générale à ce type de problématique, tout dépend de
la structure de la propriété, de la superficie, des types de terroirs, des sols.
Je vous renvoie aux réseaux de Conseillers forestiers (CRPF, Maison de la Forêt) qui existent
en Aquitaine sont dynamiques et informés, en particulier des changements climatiques.
Nous travaillons avec eux sur cette question, ils ont vraiment la réponse à apporter.
Catherine VILLEMIN, élue à Morcenx
Quand vous proposez de faire différentes essences dans les Landes, il faudra que mon voisin
de gauche plante une essence, moi une autre, mon voisin de droite encore une autre, et l'un
des trois réussira ?
Denis LOUSTAU
Ce n'est pas tout à fait ça, mais en fonction de ce que vous voulez faire : du bois d'œuvre ou
de la fibre, si vous disposez d'une chaudière alimentée à proximité, s'il s'agit de faire du bois
pour vos petits enfants ou si vous voulez récolter dans 5 ans, si vous avez des sols profonds,
drainés, pas de sols, des sols dégoûtants, superficiels, peu riches…
Les réponses varient, donc je ne peux pas donner de réponse.
Ce n'est pas : votre voisin réussira et pas vous… Tout le monde réussira, mais il faut adapter
localement les sylvicultures au contexte local, et ça je ne peux pas le faire maintenant.
Jean BALARIN, représentant les sylviculteurs du Sud-Ouest
Merci de m'avoir invité à ce Colloque dont le programme a été prévu avant Klaus, la tempête
a dû en perturber quelque peu le contenu.
Parler aujourd'hui du territoire landais sans évoquer la tempête ni les propriétaires serait une
impasse énorme et qui ne viendrait pas à l'idée.
Vous dites, Monsieur l'économiste, qu'il serait aberrant que la forêt supporte un impôt
forfaitaire annuel et préalable à la récolte, c'est la loi forestière, on peut s'en plaindre, mais
elle est ainsi.
1,5 millions d’ha en Aquitaine et toute la France fonctionnent ainsi, nous payons l'impôt
forfaitaire et nous ne récoltons qu'au bout de 40 ans pour le pin maritime, encore plus pour
les autres essences. L'injustice est d'autant plus grande quand une tempête passe par là. Nous
avons payé l'impôt, c'est pour cela qu'à corps et à cris nous demandons des indemnités.
Les sylviculteurs réclament une politique forestière générale, le Président Emmanuelli en a
parlé, nous sommes orphelins en la matière. Nous avons trouvé peu d'écho à la demande
d'une loi forestière qui en soit une.
Aujourd'hui, la profession dans les Landes a su faire preuve de pas mal de responsabilité,
notamment face à l'incendie, en faisant de la prévoyance.
La profession sylvicole cotise annuellement.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Nous voudrions compléter cette architecture de la production forestière par un Fonds de
calamité forestière auquel cotiseraient tous les gens qui profitent de cette filière, donc un
mixe privé/public car la forêt ce n'est pas que le privé c'est aussi le public.
Les consciences se réveillent, privées mais surtout publiques, j'espère qu'on aboutira.
En tous cas, je ne vois pas comment sortir de l'ornière si l'on ne met pas en place ces Fonds
de calamité forestière.
Des aides seront apportées pour reconstituer la forêt.
Nous attendons des réponses de la recherche.
J'ai entendu beaucoup de questionnements, c'est bien. Ce ne sont pas des sciences exactes, il
serait imprudent de votre part de dire que la solution se situe dans tel ou tel domaine.
La solution se trouve certainement dans l'évolution des essences, également dans des mix.
On parle du vent mais pas des insectes… S'il y réchauffement, il y aura augmentation des
insectes. La profession des sylviculteurs suit les recherches, vous avez apporté des réponses
avec les écrans végétaux, tels les feuillus et autres, qui se mettent en place depuis une
dizaine d'années.
Et donc, je vous reprendrai sur ce point Messieurs les chercheurs, la sylviculture n'est pas le
prolongement des pratiques du passé.
Nous avons suffisamment de créativité, cette branche professionnelle a su multiplier par
deux, voire par trois, sa productivité forestière en l'espace de 20 ans. Ce n'est pas faire
preuve du prolongement du passé mais de beaucoup de créativité, et grâce à vous, grâce à
votre recherche.
Nous sommes les premiers interrogateurs, nous ne voulons pas d'une forêt comme hier ni
d'une forêt à laquelle on ne toucherait pas.
C'est là où nous ne pouvons pas être d'accord avec les Amis-de-la-Terre, nous voulons une
forêt faite par l'homme et pour l'homme, c'est celle-là que nous voulons, et donc cela passe
bien par une forêt cultivée qui produit du bois, du bois en quantité, à un prix économique et
qui favorise ainsi l'économie et les emplois.
Pierre-Luc SEGUILLON
Avez-vous un peu méconnu l'énergie et les capacités d'inventivité des sylviculteurs des
Landes ?
Denis LOUSTAU
Non, je ne crois pas, ce n'était pas mon intention.
Les premiers exposés climatiques que j'ai fait l'ont été à la demande des groupements de
propriétaires forestiers des Landes et de Gironde, j'ai toujours été bien reçu, nous avons un
dialogue assez soutenu et constructif.
Sur l'histoire de la recherche forestière et la sylviculture dans les Landes, la forêt landaise a
été pratiquement entièrement faite par la main de l'homme. Le pin maritime est l'essence
locale mise en valeur par la main de l'homme.
Il n'y a pas l'ombre d'un malentendu.
Disant qu'il faut apprendre à raisonner en se projetant dans un avenir qui ne sera plus celui
du passé, il me semble bien avoir dit aussi que c'est déjà le cas et que le sylviculteur est au
fait de ces questions-là.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
33
Philippe DUPOUY, élu à Tartas, sylviculteur et activité agricole
En tant que sylviculteur de Tartas, je suis tout à fait d'accord avec les propos de ma collègue
concernant les petits propriétaires qui sont une grande majorité et les gros propriétaires qui
ont tout perdu le 24, relié par l'économie sinistrée.
Faut-il replanter ou laisser la forêt telle quelle et se régénérer elle-même ?
Denis LOUSTAU
Je mentirais en disant que j'ai des solutions à vous apporter, que la recherche a tout proposé,
a tout trouvé, a tout anticipé… Non, ce n'est pas vrai, on a des questions.
Avec vous, vos représentants et vos conseillers, on essaie de mettre en place un système de
recherche/développement qui permette d'anticiper cela dans le futur.
Jusqu'à maintenant, on n'a pas su le faire.
L'idée est de développer des réseaux avec des dispositifs de recherche et des essais relayés
sur tout le massif ; ceci est un peu fait pour la fertilisation du phosphore dont les résultats
ont été rappelés précédemment.
Il faut le reprendre et la réflexion est en cours, avec en permanence :
. des observatoires des essences permettant de voir quelles essences s'en sortent mieux que
d'autres, déclinées par terroir,
. un système d'alimentation recherche/développement qui fonctionne en dynamique,
. intégrant tous les aspects génétiques, sanitaires, risque feu, risque incendie, sylviculture.
Au-delà de principes généraux comme sylviculture dynamique, diversification, mélange
d'espèces, il est difficile d'être d'aller plus loin aujourd'hui.
Il faut être un peu patient, bien sûr on aimerait avoir la réponse immédiate à donner à
l'ensemble des sylviculteurs qui ont leur forêt par terre et qui doivent replanter maintenant.
On n'a pas toutes les réponses, la meilleure réponse résulte d'un dialogue avec les conseillers
locaux et les représentants, le savoir du terroir qui reste la dominante majeure de l'aide à la
décision à prendre pour la sylviculture.
La recherche donne des balises, des repères pour le futur, des orientations, mais pour le
moment elle ne peut pas donner des solutions déclinées localement.
Pierre-Luc SEGUILLON
On comprend bien la question qui vient d'être posée…
Si l'on partage votre opinion sur la nécessité de prendre du temps et l'expérimentation, il y a
un problème d'urgence.
Le sylviculteur qui a ses arbres par terre, doit replanter rapidement, il a un problème
économique, c'est sa vie, c'est son existence, que doit-il faire ?
Denis LOUSTAU
Il doit faire évoluer sa sylviculture vers une sylviculture un peu plus mélangée et diversifiée,
en introduisant d'autres espèces, on en a cité quelques-unes.
Henri EMMANUELLI
Les filières industrielles sont adaptées en fonction de certaines espèces.
Faire de l'expérimentation, si c'est la puissance publique : oui. Pour le système privé, qui aura
des débouchés si ça marche ou qui n'aura que des pertes si ça ne marche pas, cela me semble
plus qu'aléatoire.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Denis LOUSTAU
L'adaptation sera celle de la filière. Cette discussion doit englober la filière de
transformation, qui doit aussi s'adapter.
Il y a un apport massif de 40 millions de m³ de bois abattus, il va falloir les transformer et les
utiliser. Du côté de la filière, l'orientation à donner est d'adapter les filières de
transformation à différentes catégories de produits et de matériaux ; c'est déjà un peu le cas.
Jean-Pierre SAINT-FELIX, sylviculteur à Tartas
J'ai 50 ans, donc une espérance de vie de 30 ans.
N'est-il pas temps d'envisager une reconversion vers l'agriculture plutôt que la poursuite
d'une activité sylvicole menacée par l'aléa climatique, de par la nécessité de se reconvertir
après une production ruinée pour 20 ou 30 ans ?
Faut-il continuer la sylviculture dans les Landes, n'est-ce pas une profession qui a vécue ?
Hervé LE TREUT
Il n'y a pas de raison que l'aléa météo, par rapport à ce problème des tempêtes d'hiver,
change brutalement. Deux tempêtes à 10 ans d'écart ne signifient rien. Pendant des années,
on a eu une situation sans tempête, il y a eu quelques incendies avant, d'autres aléas.
L'aléa était là, on ne le savait pas mais il était là, il s'est manifesté, il se manifestera peutêtre ou pas.
La situation n'a pas fondamentalement changé, en dehors des problèmes immédiats qu'elle
pose, en terme de perspectives d'il y a quelques années.
Par ailleurs, la forêt joue un rôle. Donc si, demain, les Landes étaient, à nouveau, un espace
sans forêt ce serait un espace différent, avec d'autres formes de risques, d'autres formes
d'inadaptations.
Par contre, cela appelle un problème de solidarité et de garantie du risque.
Dans une situation où le changement climatique va engendrer des mutations des espaces
naturels, et ce sera peut-être d'ailleurs plus dans les problèmes de partage de l'eau ou que
dans ces problèmes de tempêtes hivernales, dans les situations où de toutes façons notre
environnement naturel va changer, le problème du risque, de la solidarité face au risque,
donc de l'assurance, se pose de manière cruciale.
Effectivement, dans les Landes il faut continuer à planter des forêts, mais l'on voit ici une
forme d'inadaptation de la structure de solidarité face à des risques qui étaient présents sans
qu'on le sache bien et qui seront encore là.
Pierre-Luc SEGUILLON
La menace qui pèse sur l'industrie papetière n'est-elle pas, en réalité, plus dangereuse que
les aléas climatiques ?
Laurent DAVEZIES
Oui, c'est possible, l'industrie papetière est très menacée, alors que l'aléa reste un aléa, il
n'est pas sûr.
Sur le secteur, les experts s'entendent pour dire qu'à 10/20 ans le panorama est un peu
inquiétant, d'autant plus que beaucoup de ces industries sont possédées par du capital
international et ne sont pas des entreprises locales.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Georges CINGALL, Président de SEPANSO-LANDES & Secrétaire général de la
Fédération SEPANSO, représentant les associations au niveau des institutions
européennes à Bruxelles.
Je regrette que le message de la représentante des Amis-de-la-Terre n'ait pas été mieux
perçu, j'y entends un certain nombre de réflexions.
Lorsque le Président Emmanuelli dit qu'il y a un outil industriel et qu'il est adapté à ce qu'il y
a, oui, justement, il l'est à la forêt telle qu'on la connaît.
On est en train de parler de 2040, si la forêt ne peut perdurer il faudra bien adapter les outils
industriels.
Ce n'est pas cette dictature de la nature qui peut produire les bons effets économiques, ce
n'est pas possible. On a eu l'occasion d'en parler longuement en différentes sphères, tout le
monde est d'accord, il y a des limites. Effectivement, on peut optimiser, on peut dynamiser,
mais il y a des seuils qu'on ne peut pas franchir.
Ma question porte sur le risque.
Lorsque Klaus est passé, on a eu la chance " extraordinaire " que le coefficient de marée soit
extrêmement bas, sinon on aurait eu en plus des dégâts énormes sur le littoral.
A l'occasion de Klaus, on s'est aperçu qu'on avait de grosses difficultés de communication.
Peut-on imaginer d'autres modes de communication qui permettront une réactivité
supérieure pour répondre aux attentes des populations ?
Henri EMMANUELLI
Sur les Amis-de-la-Terre, je ne veux pas d'ambiguïtés, certains de leurs propos sont sûrement
très intéressants, que pour ma part j'ai essayé de ne pas négliger.
Les élus d'aujourd'hui, comme ceux d'hier ou de demain, ont des problèmes concrets à
résoudre, ils ne peuvent pas se contenter d'être contre tout et donc de ne rien faire.
Je peux comprendre qu'on soit contre l'autoroute A65, -ce n'est pas mon cas-, mais je
comprends difficilement que l'on soit en même temps contre la LGV/TGV. Contrairement à ce
que l'on nous dit cela a un rapport, car s'il y a une LGV/TGV la ligne traditionnelle pourra
servir aux transports de marchandises.
On a parfois le sentiment d'être face à des personnes absolument contre tout, c'est là qu'il y a
sans doute entre les élus et certaines associations quelques difficultés de communication.
En revanche, sur la question évoquée à l'instant, c'est exact, il y a eu un gros problème de
communication.
Il y a eu un trou noir du samedi au dimanche soir, la Préfecture de Mont-de-Marsan ne savait
pas ce qui se passait à 20 km de là. Trou noir !
La Gendarmerie qui, normalement, a des moyens de communication exceptionnels ne les
utilise que lorsque l'état d'urgence est décrété dans le pays. Autrement dit, toutes ces belles
antennes ne fonctionnent pas en temps ordinaire. Donc, on n'a pas pu compter sur le réseau
de radio de la Gendarmerie.
Les postes radio ne fonctionnaient pas, car il n'y avait pas d'électricité et qu'aucune dynamo
n'était prévue pour les recharger.
Le Premier ministre s'est engagé à le faire ; il y a tout un process de remise en place d'un
circuit de communication entre les Gendarmeries, les mairies et les Pompiers pour que, y
compris en cas d'absence d'électricité, car cela a été le problème, on puisse communiquer
quand même.
Il y a la théorie du téléphone satellite qui est hors de prix, on sait faire avec beaucoup moins
cher, on sait faire avec des postes radio qui, munis d'un système d'alimentation électrique
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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autonome, peuvent parfaitement fonctionner dans ces cas-là, ce qui n'était malheureusement
pas le cas cette fois-ci.
Pierre-Luc SEGUILLON
Par ailleurs, si l'on avait été en période de grande marée, les effets auraient-ils pu être
décuplés ?
Hervé LE TREUT
Je ne l'ai pas étudié en détail, mais les combinaisons de vents et de marées hautes peuvent
avoir des effets désastreux. La région du Bassin d'Arcachon en aurait beaucoup plus souffert,
j'en ai moins connaissance pour la Région du Sud-Ouest, mais l'aléa est l'aléa.
Quand on est confronté à une situation de catastrophe c'est aussi une manière de réfléchir au
fait que d'autres catastrophes peuvent survenir à nouveau et donc à mettre en place des
mécanismes de solidarité qui serviront aussi dans le futur.
Ces catastrophes sont toujours possibles, c'est un peu indépendant du sujet du changement
climatique qui est différent mais qui ne peut qu'y ajouter.
Roland DELANOE, Port estival de Seignosse
On a eu de la chance que Klaus, touriste hors saison, soit arrivé la nuit. Le jour, nous aurions
eu davantage de dégâts au niveau des personnes humaines.
Peut-on avoir (sur la revue XL ou ailleurs) l'avis des architectes sur le développement
durable ? Y a-t-il un architecte dans la salle ?... On va construire Landes 2040 sans
architecte, c'est merveilleux !
Henri EMMANUELLI
Il y a des architectes dans les équipes 2040, on ne leur a pas demandé de venir parler
aujourd'hui de climatologie, mais il y en a, je vous rassure.
Sur le plan de la construction, on a très peu de dégâts. Pour les huit départements, pour les
compagnies d'assurance ce chiffre est sans doute en milliards d'euros. Mais globalement, on a
constaté peu de dégâts.
De manière générale, attention à ne pas rentrer dans les " si " ! Tous les scientifiques du
monde savent qu'il y a des risques de fractures tectoniques au milieu de Los Angeles, la raison
voudrait qu'on s'en éloigne le plus vite possible.
On peut multiplier les " si " mais il faut savoir s'arrêter, à un moment les choses ne sont plus
gérables.
Participante
On parle de planter et de replanter avec de nouvelles essences.
Qui va nettoyer la forêt ?
Qui va payer ?
Combien de temps cela prendra ?
Henri EMMANUELLI
Des dispositifs sont prévus ; l'achoppement avec les sylviculteurs est sur le nettoyage et la
reforestation, mais le principal point, et ils peuvent le dire mieux que moi, porte sur
l'indemnisation.
L'Etat a prévu, avec les collectivités locales, mais surtout l'Etat car il s'agit de solidarité
nationale, des aides pour nettoyer et replanter.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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Problème actuel avec les pouvoirs publics au niveau national, les sommes mises à disposition
au nombre d'hectares prévus sont insuffisantes, à savoir grosso modo pour 200 000 ha, pour la
profession il y en a plus de 300 000.
Mais, il y a des dispositifs de nettoyage et de replantation, des aides au stockage et aux
transports pour amener les bois sur les aires de stockages, dans les deux cas jugées
insuffisantes.
Qui va nettoyer et replanter ?
En théorie, le sylviculteur qui, théoriquement, va recevoir des aides pour cela. Ce sont aussi
les organismes de stockage. Cela s'imbrique complètement, ce n'est pas une opération
séparée des autres, quand on enlève du bois pour le stocker on nettoie, ensuite il faut un
autre nettoyage pour préparer la forêt pour replanter.
Tout ça est dans les tuyaux, mais ce n'est pas ajusté pour l'instant, c'est le moins qu'on puisse
dire, les sommes ne sont pas en concordance avec les besoins.
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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DISCOURS DE CONCLUSION
Pierre-Luc SEGUILLON
Puisque vous êtes en charge de l'intendance et dans la cabine de pilotage, je vous demande
de conclure cette table ronde.
Henri EMMANUELLI
Je ne crois pas qu'on puisse conclure.
Je remercie nos trois invités de cet après-midi et ceux de ce matin.
Il n'était pas prévu au départ, dans la prospective 2040, qu'on s'occupe de la tempête Klaus et
des changements climatiques, Monsieur Balarin a eu tout à fait raison de le souligner, sauf
que, compte tenu de la chronologie des événements, on ne peut pas faire aujourd'hui comme
si ça n'existait pas.
Il y a deux points de vue :
. soit ont fait comme si : si on essaie de se projeter à 2030 il ne faut pas s'arrêter à ce qui se
passe cette année ni l'année prochaine ni dans les 3 ans qui viennent,
. soit on fait comme si rien ne s'est passé : on a l'air de faire passer tout cela par pertes et
profits.
Donc, on a essayé d'en parler et de relier les choses.
Ce n'est pas évident ni facile, nos interlocuteurs ont dû le vivre un peu comme ça,
changement climatique oui, mais est-ce vraiment en rapport avec ce qu'ils veulent faire.
Il y a des rapports entre tout.
Il y a une prise de conscience forte.
Je partage assez cette opinion, on n'est peut-être que 5 % mais ou bien c'est une prise de
conscience générale ou bien elle n'aboutira pas.
Même si on est tout petit dans la prise de conscience générale et compte tenu de ce qu'est
notre place dans le monde politique, dans le développement, dans l'histoire, il faut qu'on soit
à l'avant de ce combat-là.
Je déplore qu'on en parle beaucoup mais qu'on agisse peu, cela a été dit d'ailleurs.
Prenons un exemple concret, il n'y a pas dans ce pays de politique industrielle des énergies
renouvelables, on le vérifie tous les jours.
1- En photovoltaïque, on ne produit pas de silicium en France, c'est la base.
A Morcenx, nous avons une expérience possible et potentielle, la production de silicium
électronique par une torche à plasma. Un industriel va la faire, cela coûte 100 000 €, il n'y a
pas un sou d'aide publique pour l'aider à faire la démonstration qu'on peut produire du
silicium électronique à 20 ou 30 % de moins par la torche à plasma que par les procédés
classiques.
On en est là, quand je dis qu'il n'y en a pas, c'est qu'on n'a même pas 100 000 €, on parle de
recherche, d'aides… L'expérience va être faite ici, à Morcenx, 100 000 €, c'est une entreprise
privée qui va le faire, elle va être aidée par le Conseil Général des Landes, point à la ligne,
ce n'est quand même pas tout à fait normal.
2- Quand on cherche un producteur d'éolienne, il n'y a pas de producteur français, ils sont
Allemands, Canadiens, Nordiques (Suédois…), mais pas Français.
Quand on cherche un opérateur pour la gazéification, ce à quoi pensait Madame Rotoman des
Amis-de-la-Terre, et bien sûr qu'on y a pensé et qu'on y pense, excepté que le seul opérateur
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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capable de répondre aujourd'hui concrètement sur le plan industriel est une société
américaine ; je pensais qu'elle serait allemande.
La vraie technologie de production d'énergie à partir du bois ce n'est pas le pellet, qui reste
un procédé intéressant mais assez rustique, le vrai processus technologique c'est la
gazéification.
Le seul interlocuteur qui répondre aujourd'hui, avec lequel un contact est prévu en juin c'est
une société californienne, on n'en a pas trouvé en Europe.
3- Il y a de façon relativement importante des sources et des nappes géothermiques, avec à
certains endroits les trois avec l'eau douce : l'eau froide, l'eau chaude et l'eau de mer en
nappes phréatiques.
Quand on pose des questions concrètes : combien ça coûte, combien ça peut coûter, on nous
répond qu'il faut faire des études parce qu'on n'est pas capable de vous répondre.
Il n'y a pas un opérateur industriel capable de répondre.
4- Mieux que ça, la Caisse des Dépôts achète des terrains pour faire une centrale
photovoltaïque mais elle n'a pas les panneaux.
Quand on propose deux projets pour faire de l'assemblage de panneaux, ça n'intéresse pas cet
opérateur.
Quand je dis qu'il n'y a pas au sens propre une politique industrielle des énergies
renouvelables, elle n'existe toujours pas.
Il y a des morceaux ici ou là, des laboratoires qui travaillent, l'école de Chimie de Paris, le
Commissariat à l'énergie atomique, des tas de gens qui travaillent dessus, mais il n'y a pas de
véritable filière.
Je trouve ahurissant, je l'ai déjà dit et le répète, qu'au moment où la préoccupation
environnementale est devenue si forte on ne se pose pas de questions dans ce pays pour
savoir si le plus simple, le plus rapide, le plus efficace ne serait pas d'avoir une politique
forestière, ni non plus au niveau de la Communauté économique européenne.
Avant de se préoccuper de la gazéification du bois, on pourrait tout simplement se dire : si on
plantait des arbres… eh bien, ce n'est pas le cas.
Il y a donc une vraie réflexion à mener.
D'autant plus qu'en France l'importation de bois est le deuxième poste déficitaire.
Même si l'on n'a pas de fantasme éco-environnementaliste, on peut au moins avoir des
réflexes comptables. Vu le prix que ça coûte, il faut s'y mettre tout de suite.
Je suis persuadé qu'on peut doubler les surfaces forestières en France pour peu qu'on mette
en place une politique forestière adaptée qui s'adresse au plus grand nombre, y compris au
particulier qui a un hectare à planter.
Cela n'existe pas, Monsieur Ballarin expliquait que ce qui est déterminant pour qu'on plante
dans ce pays et dans ce massif c'est l'assurance qu'un jour tout ne sera pas balayé par un coup
de vent. Mais il n'y a pas d'assurance.
Premier volet d'une politique forestière, mettre en place un système équivalent pour la forêt
du système des catastrophes naturelles pour l'agriculture.
Ensuite, il y aurait beaucoup de choses à dire.
Je n'ai pas la prétention de tout reprendre, mais je dirai avec une certaine force par rapport
à des interrogations qui ont surgies que je pense qu'il y a unanimité des élus landais pour dire
Myriam Pareau
[email protected] - pv in extenso retravaillé.
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que l'on ne veut pas voir disparaître le massif car on y tient, et que l'on ne veut pas le voir
reculer au profit, par exemple, du maïs.
Une des choses fortes qu'on demandera à l'Etat c'est de maintenir les interdictions de
défrichement.
Vous parliez de centrale photovoltaïque…
Si l'on prend 30 ha il faut en replanter autant, on n'a pas le droit d'enlever 30 ha de forêt pour
faire du panneau, non, il faut remettre en hectares, il y a toute une réglementation très forte
sur le défrichement.
Nous y tenons beaucoup, nous tenons au 1 300 000 ha de forêt dans le Sud-Ouest pour des
raisons économiques mais aussi environnementales, y compris pour des raisons de qualité de
vie.
Quelqu'un s'interrogeait sur l'attrait des Landes, je reviens à mon " briques et broc "… Figurezvous qu'on n'arrête pas de demander aux gens pourquoi ils viennent.
Je l'ai demandé, ce matin, à un couple de Belges non seulement venu dans les Landes mais
qui s'est fait naturaliser. Ils ont fait le tour de la France, le Sud-Est, la Bretagne, finalement
ils sont arrêtés dans les Landes pour la qualité de vie.
C'est un mixte : le climat n'est pas trop sec, l'état d'esprit des gens, le niveau de la sécurité,
les prix, le goût de la fête, le bien manger, un mixte de qualité de vie.
En arrière-fond, et la DATAR l'a très bien analysé, dans les 20 années qui viennent 7 à 8 M de
Français vont se déplacer vers les côtes, toutes les côtes, un peu plus sur la côté aquitaine
que vers Dunkerque. Tant qu'à aller sur la côte, on préfère des climats moins rudes, c'est un
phénomène général.
Les spécialistes de Braudel diront qu'il y a des cycles, l'urbanisation, puis le retour à la villa
romaine, en ce moment beaucoup de gens quittent les zones urbanisées pour trouver un
mode de vie plus calme, plus tranquille, plus aéré, moins bruité.
En tout cas, on l'enregistre, c'est l'élément déterminant plutôt que les conditions
économiques.
Les arrivants, qui ont en majorité entre 35 et 50 ans, sont pour la plupart des gens qui
viennent avec leur travail, c'est-à-dire des gens dont le travail n'est pas forcément lié à une
localisation précise, ceux que Monsieur Cohen appelle des concepteurs et non pas des
utilisateurs.
On était dans une situation tout à fait euphorique, de croissance de la population, du niveau
d'investissement, tout allait très bien il y a un an.
Brusquement, il y a eu la tempête, la crise économique et la réforme de la PAC, dont on
parle peu dans les Landes et qui va avoir aussi un effet économique sévère. Compte tenu que
les Landes avaient privilégié l'indemnisation du maïs irrigué, on a un triple choc, ça secoue.
Que fait-on ?
On s'assoie et on attend que ça passe ou bien on se projette au-delà, sachant qu'on aura des
années difficiles à passer, sans renoncer à se prolonger.
L'affaire 2040 a commencé, au départ, à cause de la côte.
Le responsable de la SEPANSO disait qu'on aurait pu avoir une catastrophe sur la côte, on y a
pensé, l'une des idées est de faire reculer l'urbanisation par rapport à la côte d'une vingtaine
de kilomètres, mais cela présuppose des infrastructures.
Les gens iront là où il y a des routes, ils n'iront pas à pied ni en vélo uniquement sur des
pistes cyclables, parce qu'on ne va pas tous les jours à l'école par des pistes cyclables, parce
qu'il n'y a pas beaucoup d'activités économiques qui transitent par les pistes cyclables.
Myriam Pareau
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En Europe, historiquement, deux grands aménagements du territoire ont fonctionné, où la
volonté de l'homme à modifier complètement la donne, les polders en Hollande où l'homme a
pris sur la mer, le massif forestier aquitain par la volonté humaine on a changé la topologie,
la climatologie, les conditions économiques et même les conditions sanitaires.
Nous sommes attachés à ce massif forestier parce qu'il est le produit de cette histoire, parce
qu'il a des conséquences économiques, parce qu'il a une importance qui va bien au-delà de
ces conséquences économiques.
Après, on rentre dans des tas de questions…
Un petit malentendu s'est produit avec le représentant de l'INRA disant qu'il faut diversifier.
Je ne comprenais pas ce qu'il voulait dire, nous nous sommes expliqués, maintenant je
comprends et il a raison quand il dit : sous tous ces pins on pourrait penser à faire pousser des
choses et à diversifier.
Je réagissais par rapport au discours qui apparaît à chaque catastrophe, déjà paru en 1999, il
réapparaît en 2009, et qui consiste à dire : plantez des pins comme vos parents l'ont fait.
D'ailleurs, on ne remonte pas très loin, aux arrière-grands-parents, avant il n'y en avait pas.
Quand on interroge les Landais, ils parlent de la forêt séculaire, en réalité elle date du
Second Empire dans sa configuration actuelle, donc ce n'est pas très vieux.
Pour les sylviculteurs, la question se pose, replanter quand et quoi.
Et ils ne peuvent pas faire une expérience à 30 ans pour savoir si l'essence prospère. Cela, la
puissance publique peut le faire, mais on ne peut pas demander à des particuliers de le faire.
Donc, nous sommes pour la reconstitution de ce massif, nous sommes pour garder les filières.
Il y a beaucoup de sujets, vous avez fait allusion à l'industrie. L'industrie landaise écope en ce
moment, mais l'industrie française aussi.
On a la revanche d'un discours qui fleurit depuis 25 ou 30 ans sur la société post-industrielle.
On ne sait pas ce qu'est la société post-industrielle, mais cela a été et est toujours très à la
mode. Quand on nous explique qu'on va remplacer des emplois industriels par des emplois de
services à la personne, c'est un non sens économique. L'un produit quelque chose, l'autre
consomme de l'impôt, ce n'est pas tout à fait le même circuit économique.
On a un problème d'industrie en France, on va l'avoir en Europe, nous l'avons évidemment
dans les Landes.
Des départements aquitains sont très touchés aujourd'hui, même si l'on n'a pas cette
impression quand on se promène, on est le plus industriel, pas en quantité mais en
pourcentage. La population active industrielle dans les Landes est à 22 à 23 points contre
19 points en France et à peu près pareil en Aquitaine.
Comme on est un peu plus industriel, on est évidemment plus touché que d'autres.
Mais on va essayer de faire face avec tout ça, l'idée de 2040 est effectivement d'anticiper.
J'écoutais avec beaucoup d'attention le professeur, on comprend qu'il ne puisse pas être plus
précis sur la climatologie, sauf à vouloir faire plaisir à tout prix et à prendre des risques
énormes avec sa discipline.
C'est dans les esprits quand même, donc je ne suggérerai pas le maïs pour l'avenir, pour la
raison simple qu'on a déjà beaucoup défriché, nous sommes déjà le premier département
producteur de maïs. Vu l'évolution des prix et l'évolution du marché mondial, je ne prônerai
pas d'enlever de la forêt pour refaire de grandes exploitations supplémentaires dans la Haute
Lande.
Les problèmes de pollutions ont été évoqués ; je veux bien qu'on entasse chaque année des
fortifiants pour la terre, mais au bout de 60 ans ça fait de sacrées couches. Dans certains
Myriam Pareau
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endroits, notamment la vallée de l'Adour, des nappes phréatiques commencent, par
moments, à être touchées par des excédents d'Atrazine…
Dans ce département, on surveille les nappes phréatiques depuis à peu près une vingtaine
d'années, ce qui ne se fait pas dans beaucoup d'endroits.
Nous sommes très au fait de leur niveau et de leur degré de pollution, et d'ailleurs on publie
régulièrement toutes ces informations.
En conclusion, je remercie ceux qui nous aident à réfléchir.
Et surtout, j'encourage les Landaises et les Landais, dans un moment qui est assez difficile, à
ne pas baisser les bras, à ne pas se dire : finalement cela arrivera, contentons-nous à essayer
de passer la crise et ses difficultés et pour le reste on verra plus tard.
Je pense, au contraire, qu'on passera d'autant plus de difficultés du moment présent qu'on
aura la capacité à garder le regard fixé un peu plus loin.
Bref, il est plus facile de bondir que de se traîner.
Donc, je vous encourage pour le grand bond en avant, mais qu'ils se rassurent la similitude
avec Mao Tsé Toung s'arrête là.
Pierre-Luc SEGUILLON
Merci à tous.
[Applaudissements].
Le Colloque est levé à 17 heures 30.
Myriam Pareau
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