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29/10/2015 |
Allemagne
Le concept géographique et politique d'A. (all. Deutschland; av. 1500 généralement sous la forme die
Deutschen Lande) désignait depuis le XIe s. l'entité étatique (Regnum teutonicum) issue du royaume de
Francie orientale (Saint Empire romain germanique). Depuis 1871 il s'applique au IIe Reich et aux Etats qui lui
ont succédé.
1 - De 1866 à 1918
1.1 - L'unification allemande (1866-1871)
La lutte pour la suprématie en A., scellée par la victoire prussienne sur l'Autriche à Königgrätz/Sadowa (juillet
1866), la dissolution de la Confédération germanique et la création (1866-1867) d'une Confédération de l'A.
du Nord sous l'hégémonie de la Prusse, liée par des conventions militaires aux Etats de l'A. méridionale
(grand-duché de Bade, royaumes de Bavière et du Wurtemberg), plaçait la Confédération devant une
situation nouvelle. Le processus d'unification suscitait de nombreuses inquiétudes. Toutefois, la Suisse
s'efforça d'entretenir de bonnes relations avec la Prusse, comme avec le Bade, le Wurtemberg et la Bavière.
Un ministre de Suisse fut accrédité dans chacun de ces quatre Etats dont les ministres s'installèrent à Berne.
La Confédération signa un traité de commerce avec la Confédération de l'A. du Nord (13 mars 1869).
Parallèlement des négociations se déroulaient pour parvenir à un accord sur le percement du tunnel du
Gothard, auxquelles participaient, à part la Suisse, l'Italie, le Bade, le Wurtemberg et la Confédération de l'A.
du Nord. Ces pays établirent les bases d'un traité (15 octobre 1869). Les Chambres se réunirent en juillet
1870 pour le ratifier mais la guerre Franco-allemande en retarda la signature.
Le conflit allait placer la Confédération devant des tâches diplomatiques, militaires et humanitaires
complexes. La Suisse réussit à gérer au mieux ses relations avec les belligérants. La menace militaire, vu les
victoires allemandes, fut très vite écartée même si de nombreux incidents se produisirent sur la frontière du
Jura dès novembre 1870, après que Belfort fut investi. Les mesures prises par le Conseil fédéral en faveur des
sujets allemands expulsés en septembre 1870 par le nouveau gouvernement français suscita un revirement
dans la presse germanique qui, jusque-là, avait accusé la Suisse de pratiquer une "neutralité malveillante". La
Suisse prit sous sa protection les ressortissants bavarois et badois en France et le Conseil fédéral intervint en
faveur des prisonniers allemands auprès de la Délégation de Tours. Ces "bons offices" ne valurent aucun
avantage à la Suisse et Bismarck se montra hostile à toute cession territoriale en Alsace en faveur de la
Confédération.
Auteur(e): Jean-Jacques Langendorf
1.2 - L'Empire
1.2.1 - Une ère de tensions
A la suite de la victoire allemande, la situation géostratégique de la Confédération se trouvait profondément
modifiée. Un puissant Etat venait de se former sur sa frontière nord et la ceinture d'Etats indépendants qui
l'isolaient de la Prusse avait disparu, tandis qu'à l'est l'Autriche était affaiblie et exclue du corps germanique
et qu'à l'ouest l'avenir de la jeune république française apparaissait incertain. Diplomatiquement, la Suisse
devait s'efforcer d'établir des relations correctes, sinon cordiales, avec le nouvel empire allemand, qu'elle
reconnut le 30 janvier 1871; elle félicita Guillaume Ier le 20 février. Le 4 avril, le général Max von Roeder fut
accrédité en Suisse comme ministre plénipotentiaire impérial. Les missions diplomatiques de Bade et du
Wurtemberg furent supprimées, celle de Bavière maintenue.
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Dans les vingt années qui suivirent la fondation de l'empire, les tensions entre ce dernier et la Suisse se
situèrent surtout au niveau politique et diplomatique, quoiqu'on puisse aussi constater des sentiments anti-
allemands en Suisse (émeutes de la Tonhalle). Elles furent liées d'abord au Kulturkampf dont le chancelier
Bismarck s'était fait le champion dans son pays. La variante helvétique de cet affrontement entre Etat laïque
et Eglise catholique romaine avait repris de plus belle dès 1870; cela ayant suscité en France une vague de
protestations dans les milieux catholiques et gouvernementaux, Bismarck, en juin 1873, informa le ministre
de Suisse à Berlin, Bernhard Hammer, qu'il ne tolérerait pas de pressions françaises sur la Suisse et qu'il
répondrait par des pressions identiques sur la France. C'était là une immixtion dans les affaires intérieures
helvétiques qui ne pouvait qu'encourager les jusqu'au-boutistes dans leur politique anticléricale, laquelle allait
aboutir à la rupture des relations diplomatiques avec le Vatican (décembre 1873).
Mais c'est surtout dans la question des Réfugiés politiques que les pressions du chancelier s'avérèrent les
plus vives. Déjà bien avant la guerre de 1870-1871, la Suisse était devenue un refuge privilégié pour les
socialistes allemands qui y avaient fondé de nombreuses associations (21 en 1871). Pour se débarrasser de
ses principaux opposants, Bismarck fit voter en octobre 1878 une loi qui interdisait les organisations et la
presse socialistes. Les militants furent contraints à l'émigration et nombre d'entre eux s'installèrent en Suisse
où ils déployèrent une intense activité. Dès 1879, ils publièrent à Zurich le Sozialdemokrat qui s'en prenait
violemment à l'empereur et au chancelier et qui parvenait clandestinement en A. En dépit des protestations
du ministre d'A. auprès du Conseil fédéral, aucune mesure ne fut prise avant 1888. En avril de cette année, le
Conseil fédéral expulsa les rédacteurs qui avaient refusé un appel à la modération après une affaire délicate:
le chef de la police de Zurich avait découvert que la police impériale entretenait des agents provocateurs
dans les milieux de gauche et en avait averti, sans informer ses supérieurs, deux députés socialistes
allemands qui avaient divulgué le fait au Reichstag. La crise devait culminer une année plus tard avec l'affaire
Wohlgemuth (avril 1889). Bismarck tenta d'en finir avec l'émigration sociale-démocrate, mais ses menaces
contre la Suisse échouèrent. Changeant de tactique, il reprocha alors à la Confédération de ne pas appliquer
l'article 2 du traité d'établissement du 27 avril 1876 qui stipulait que les ressortissants allemands désireux de
s'installer en Suisse devaient produire, entre autres, un certificat de bonne vie et mœurs. Il allégua que
l'établissement d'un tel document conférait un droit de regard à l'A. Le Conseil fédéral répliqua que faire
dépendre d'un gouvernement tiers l'admission d'étrangers en Suisse constituait une atteinte à la
souveraineté. Le 20 juillet 1889, Bismarck dénonça le traité. Enfin, durant l'hiver 1889-1890, Guillaume II
décidait de convoquer à Berlin une conférence internationale sur la réglementation du travail; or Bismarck lui
avait caché que le Conseil fédéral avait entrepris une démarche analogue. Cet incident, s'ajoutant à de
nombreux autres relevant de la politique intérieure allemande, incita Guillaume II à demander à Bismarck sa
démission (19 mars 1890). Dès lors les relations avec l'A. se normalisèrent. De nouvelles négociations
aboutirent au traité du 31 mai 1890 qui reprenait celui de 1876 avec une modification de l'article 2. Il fut
renégocié en 1909 et entra en vigueur le 1er octobre 1911; l'article 2 y était aboli. Un des traités les plus
importants conclus entre l'A. et la Suisse -- et l'Italie -- fut le renouvellement en 1909 de la convention du
Gothard.
En mars 1893, le président de la Confédération reçut à Lucerne Guillaume II qui l'assura de ses sentiments
amicaux envers la Suisse. Les frictions entre les deux pays s'avérèrent désormais minimes: il s'est agi pour
l'essentiel de la "guerre des farines" (l'A. octroyant une prime à l'exportation pour ses farines, le Conseil
fédéral menaça de prélever sur celles-ci une taxe à l'importation, 1908-1909). Dans l'affaire Silvestrelli,
l'intervention allemande (1902) contribua à régler la crise italo-suisse. Du 3 au 6 septembre 1912,
Guillaume II entreprit une visite officielle en Suisse qui lui permit d'assister aux manœuvres du IIIe corps
d'armée et de s'assurer que le plan Schlieffen serait applicable. L'accueil de la population fut chaleureux mais
le séjour impérial suscita un malaise dans les milieux romands et d'acerbes critiques de la part de la gauche.
On voit ici s'esquisser le fossé entre Suisse romande et Suisse alémanique qui deviendra patent durant la
Première Guerre mondiale.
Auteur(e): Jean-Jacques Langendorf
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1.2.2 - Les relations économiques
La Constitution de 1874 ayant considérablement étendu les compétences de la Confédération, cette dernière
fut contrainte de trouver des ressources supplémentaires. Elle éleva dès 1878 ses tarifs douaniers et adopta
en cette matière, dans les années 1880 (plus tard donc que la plupart des autres pays) une politique qui
amena l'A. à accuser le Conseil fédéral de pratiquer une forme de protectionnisme. Le traité de commerce de
1869, basé sur la clause de la nation la plus favorisée, fut renégocié et signé en 1881 et renouvelé en 1891.
La même année 1891, la France s'engagea dans une stricte politique protectionniste qui poussa la Suisse
dans les bras de l'A., d'autant plus que cette dernière, depuis le départ de Bismarck, pratiquait une politique
commerciale plus libérale. Jusqu'au traité de 1891, les exportations suisses en A. avaient été faibles, mais à
partir de 1896, importations et exportations ne cessèrent d'augmenter. En 1892, les exportations suisses se
montaient à 162 millions de francs (horlogerie, machines, broderie, textiles, etc.) pour passer à 306 millions
en 1913. L'A. devint le premier partenaire commercial de la Suisse. Entre 1911 et 1913, le tiers des
importations suisses provenait du Reich. Un tel développement n'alla pas sans susciter la protestation des
industriels helvétiques qui accusaient l'A. d'inonder le pays de produits bon marché. Grâce à une habile
politique douanière et commerciale, la Suisse réussit néanmoins, après le tournant du siècle, à mieux
défendre ses intérêts, dans l'ensemble. Un traité complémentaire (novembre 1904) garantit de meilleures
conditions aux produits helvétiques exportés en A. C'est toutefois celui de 1910 qui marqua un tournant dans
les relations économiques germano-suisses. Il introduisait une série de réductions de tarif et réglait les
relations en ce qui concerne les trafics de perfectionnement (admission temporaire de biens -- textiles --
devant être réexportés après finissage) et frontaliers. Dans le domaine militaire enfin, de 1904 à 1912, la
Confédération équipa son artillerie presque exclusivement de canons Krupp, ce que les Etats de l'Entente
cordiale tendirent à interpréter comme un signe de rapprochement avec la Triplice .
Auteur(e): Jean-Jacques Langendorf
1.2.3 - La colonie allemande
Avant 1914, les Allemands constituaient la colonie étrangère la plus importante de Suisse (Etrangers). En
1870, 57 000 d'entre eux séjournaient sur le territoire de la Confédération. En 1910, ce nombre atteignait
quelque 220 000 unités, les concentrations les plus considérables se trouvant à Zurich, Bâle-Ville et Saint-
Gall, alors que 15 000 Suisses environ étaient établis en A. La colonie allemande était très active dans les
domaines industriels, commerciaux, techniques ou intellectuels. En 1905, 6% des propriétaires d'entreprises
et de négoces étaient allemands et certains d'entre eux avaient développé de véritables empires industriels:
Carl Franz Bally (chaussures), Henri Nestlé, Georg Wander (produits alimentaires), Christian Gröninger
(produits métalliques), Gustav Henckell (conserves Hero), Walter Boveri (Brown-Boveri) sans oublier le
médecin Alexander Spengler, le "créateur" de Davos, ou Wilhelm Girardet et Jakob Friedrich Walz, les
fondateurs du Tages-Anzeiger (1893). La colonie s'était organisée dans de nombreuses associations
(professionnelles, féminines, de vétérans, de sociétés chorales, de gymnastique, d'étudiants, de mutuelles ou
de groupes nationalistes glorifiant le Reich et la germanitude). Les socialistes possédaient leurs propres
organisations et leurs associations ouvrières qui, jusqu'à la chute de Bismarck, s'étaient efforcées de soutenir
leurs camarades demeurés en A. (Associations ouvrières allemandes). Ils exercèrent également une influence
non négligeable au sein de l'Union syndicale suisse et du parti socialiste. En règle générale, la colonie
allemande se montra loyale à l'égard de la Suisse qu'elle appuya, entre autres, lors de l'affaire Wohlgemuth.
La colonie allemande en Suisse
Année Chiffres absolus
En % des
étrangers
1880 95 262 45,1%
1910 219 530 39,7%
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Année Chiffres absolus
En % des
étrangers
1920 149 833 37,2%
1930 134 561 37,8%
1941a78 274 35,0%
1950 55 437 19,4%
1960 93 406 15,9%
1970 118 289 10,9%
1980b87 913 9,3%
1990 84 485 7,4%
1995 91 976 6,7%
2000 109 785 7,7%
a y compris Autrichiens
b 87 389 selon l'annu. stat. de 1997
Sources:Annu. stat.
Auteur(e): Jean-Jacques Langendorf
1.2.4 - Les relations culturelles
Après 1871, l'influence intellectuelle et culturelle allemande se fit fortement sentir en Suisse alémanique, plus
modérément en Suisse romande. Nombreux furent les professeurs allemands enseignant dans les universités
helvétiques ou les Suisses dans les allemandes. Fribourg, par exemple, comptait à sa fondation en 1889
douze Allemands sur vingt-sept professeurs, quatorze sur septante-trois en 1914. Dès 1902, Lausanne
possédait sa chaire de droit allemand et Genève ne tarda pas à suivre son exemple. Les universités suisses
qui s'étaient tôt ouvertes aux femmes (Zurich dès 1864) attirèrent de nombreuses Allemandes. A l'inverse,
beaucoup de Suisses fréquentèrent les universités, les écoles des beaux-arts et les conservatoires
germaniques, particulièrement à Berlin et Munich, les artistes choisissant de préférence cette ville. Bien que
surtout tournés vers Paris, les Romands séjournèrent aussi en A. (Ernest Ansermet à Berlin, Jaques-Dalcroze à
Hellerau, Charles Ferdinand Ramuz à Weimar). Des écrivains et des intellectuels allemands s'installèrent en
Suisse pour des périodes plus ou moins longues (Hermann Hesse, Ricarda Huch, Carl et Gerhard Hauptmann,
Erich Mühsam, Gustav Landauer, August Bebel) alors que les Suisses subirent fortement les influences
philosophiques germaniques, notamment de Friedrich Nietzsche. Gottfried Keller, Conrad Ferdinand Meyer,
Carl Spitteler, mais aussi Johanna Spyri et Ernst Zahn, connurent une grande vogue en A., au même titre que
des peintres tels qu'Arnold Böcklin ou Ferdinand Hodler, chargé de décorer l'université d'Iéna alors que le
Hambourgeois Gottfried Semper établissait les plans de l'EPF de Zurich. En règle générale, ces relations
intellectuelles et artistiques s'avérèrent extrêmement vivantes et fructueuses. Il était également courant
d'envoyer des officiers suisses faire des stages militaires en Prusse.
Jusqu'à la Première Guerre mondiale, des germanophiles alémaniques, à vrai dire peu nombreux et
marginaux, souhaitèrent le rattachement de la Suisse à l'A. Du côté allemand, la "Ligue pangermaniste"
(Alldeutscher Verband, fondée en 1891) considérait les Alémaniques comme des Allemands. Mais cette
organisation n'exerça d'influence en Suisse qu'au sein de la colonie allemande. Parallèlement, mais dans un
esprit différent, l'"Association pour la germanité à l'étranger" (Verein für das Deutschtum im Ausland, fondé
en 1880) plaidait pour une unité exclusivement culturelle. N'exerçant elle aussi qu'une influence réduite, elle
soutint entre autres financièrement les germanophones du Jura.
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1.3 - La Première Guerre mondiale
Lorsque la guerre éclata, l'A. assura le Conseil fédéral qu'elle respecterait la neutralité helvétique, déclaration
renouvelée en mai 1915 et au printemps 1917 (Première Guerre mondiale). Le fossé qui s'était creusé entre
Alémaniques et Romandss'élargit dès le début des hostilités, notamment à cause du choix d'Ulrich Wille
comme général et de Theophil von Sprecher comme chef d'état-major général (Röstigraben). L'orientation
divergente des sympathies collectives allait mettre en question la cohésion nationale et exercer une influence
directe sur la politique de Neutralité, dans la mesure où les attaques virulentes de la presse romande -- qui
reprochait entre autres au Conseil fédéral de n'avoir pas protesté contre la violation de la neutralité belge par
l'A. --, soutenue par une opinion publique hostile, pouvaient indisposer le Reich. Dès septembre 1914, le
général Wille rendit le Conseil fédéral attentif aux conséquences que pourrait entraîner une telle attitude pour
la Suisse et, le 1er octobre, le gouvernement demanda à la population d'adopter un comportement conforme à
l'esprit de la neutralité. L'affaire des Colonels (fin 1915-1916) provoqua une vive émotion en Suisse romande
et dans les milieux de gauche qui accusaient l'armée d'être inféodée à l'A. Le 27 janvier 1916, à Lausanne, la
foule arracha le drapeau du consulat allemand, ce qui entraîna une très vive protestation de la part de l'A.
L'écart ne commença à se réduire que vers 1917: à la suite de l'affaire Grimm-Hoffmann, une large part des
Alémaniques prit ses distances envers les puissances centrales, tandis que l'élection de Gustave Ador comme
successeur d'Arthur Hoffmann au Conseil fédéral et la démission de Ludwig Forrer, soupçonné à tort de
sympathies pour l'A., signalaient, pour l'étranger également, une attitude plus critique des autorités
exécutives à l'égard de l'Empire.
Le règlement des questions économiques fut difficile. Pour survivre, la Suisse, entièrement entourée dès 1915
par les belligérants, dut souvent se soumettre aux conditions de ses voisins et nombreuses furent les
entorses infligées à son indépendance. L'A., qui souffrait du blocus maritime allié, s'employa à obtenir de la
Suisse la plus grande quantité de vivres et de marchandises possible. Les puissances de l'Entente quant à
elles, riches en matières premières, pouvaient abondamment fournir la Suisse. Celle-ci ne pouvait toutefois se
passer de certains produits allemands (chimie, médicaments, charbon) mais le Reich craignait qu'ils ne soient
réexportés vers les pays de l'Entente, ces derniers manifestant les mêmes craintes pour leurs produits.
L'interdiction générale d'exporter imposée par l'A. le 31 juillet 1914 ne tarda pas à être considérablement
adoucie. Les traités de commerce germano-suisses restèrent en vigueur et, jusqu'au printemps 1915, les
échanges entre les deux pays furent intenses. De nouvelles interdictions d'importer et d'exporter toujours
plus nombreuses obligèrent les deux pays à établir des traités de compensation qui fixaient exactement la
quantité de marchandises à échanger et définissaient la nature des diverses marchandises compensatoires.
En mai 1915, un Office fiduciaire suisse pour le contrôle du trafic des marchandises fut créé à Zurich pour
régler ces problèmes. Divers accords économiques furent signés avec l'A. entre 1916 et 1918 et le Reich,
dans la mesure où la Suisse avait un besoin pressant des marchandises qu'il exportait, put émettre ses
propres exigences. La situation se compliqua pour la Suisse dès le printemps 1915, l'Entente ayant exigé que
les matières premières livrées ne parviennent pas sous forme de produits manufacturés aux puissances
centrales. Finalement, le Conseil fédéral approuva, en septembre 1915, la création d'une Société suisse de
surveillance économique (SSS). A la veille de la guerre, les importations en Suisse provenant des futurs Alliés
et des empires centraux étaient équilibrées; en 1917, les Alliés contrôlaient la majorité des exportations vers
la Suisse (903 millions de francs contre 504 pour les puissances centrales).
Auteur(e): Jean-Jacques Langendorf
2 - De 1918 à 1945
2.1 - La République de Weimar
L'A., au moment où elle signa l'armistice le 11 novembre 1918, était secouée par une agitation
révolutionnaire qui inquiéta la Suisse, elle-même en proie à des convulsions sociales (Grève générale). Non
seulement l'anarchie menaçait de s'installer dans l'ex-empire mais encore son effondrement économique
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