Fonctions à variation bornée Francinou-Gianella-Nicolas, Oraux X-ENS Analyse 1, page 276 Exercice : Soit une application f : [a, b] → R. À toute subdivision σ = (a = x0 < x1 < . . . <n = b) de [a, b], on associe la variation totale de f sur σ : n−1 X V (f, σ) = |f (xk+1 − f (xk )| k=0 On pose Vab (f ) = sup V (f, σ) σ ∈ [0, +∞] que l'on appelle la variation de f sur [a, b]. Si Vab (f ) est ni, on dit que f est à variation bornée sur [a, b]. 1. Montrer que si f est C 1 sur [a, b], f est à variation bornée sur [a, b], et calculer sa variation. Examiner le cas où f est lipschitzienne ou monotone. 2. Comparer Vab (f + g) à Vab (f ) + Vab (g). 3. Pour c ∈]a, b[, comparer la variation de f sur [a, b] à la somme de ses variations sur [a, c] et [c, b]. 4. Montrer que f est à variation bornée sur [a, b] si et seulement si f est somme de deux fonctions monotones sur [a, b]. 1. Pour toute subdivision σ = (a = x0 < x1 < . . . < xn = b) de [a, b] et k ∈ {0, . . . n − 1}, on a ¯Z xk+1 ¯ Z xk+1 ¯ ¯ 0 ¯ |f (xk+1 ) − f (xk )| = ¯ f (t)dt¯¯ ≤ |f 0 (t)|dt xk Z et donc V (f, σ) ≤ Z b |f 0 (t)|dt. a b xk |f 0 (t)|dt. La fonction f est donc à variation bornée sur [a, b] et Vab (f ) ≤ a Z Montrons qu'en fait Vab (f ) est égal à b a |f 0 (t)|dt. Si σ est une subdivision de [a, b] alors, pour tout k ∈ {0, . . . , n − 1}, il existe, d'après la formule des accroissements nis, ξk ∈ [xk , xk+1 ] tel n−1 X que f (xk+1 ) − f (xk ) = (xk+1 − xk )f (ξk ). On obtient V (f, σ) = (xk+1 − xk ) |f 0 (ξk )|. On k=0 recconaît une somme de Riemann. Lorsque le pas de la subdivision tend vers 0, V (f, σ) tend Z b |f 0 (t)|dt, puisque |f 0 | est continue. Pour tout ε > 0, il existe une subdivision σ telle que vers a Z b Z b V (f, σ) ≥ |f 0 (t)|dt − ε. On peut conclure que Vab (f ) = |f 0 (t)|dt. a a Si f est α-lipschitzienne, on a, avec les notations précédentes, pour toute subdivision σ de [a, b], n−1 X α(xk+1 − xk ) = α(b − a). Ainsi f est à variation bornée sur [a, b] et Vab (f ) ≤ α(b − a). V (f, σ) ≤ k=0 Ainsi f est à variation bornée sur [a, b] et Vab (f ) ≤ α(b − a). Si f est croissante sur [a, b], on obtient, pour toute subdivision σ de [a, b], V (f, σ) = n−1 X k=0 (f (xk+1 ) − f (xk )) = f (b) − f (a). Ainsi f est à variation bornée sur [a, b] et Vab (f ) = f (b) − f (a). On démontre, de même qu'une fonction décroissante est à variation bornée et que Vab (f ) = f (a) − f (b). 1 2. Montrons que si f et g sont deux fonctions dénies sur [a, b], on a Vab (f + g) ≤ Vab (f ) + Vab (g). L'inégalité est évidente si Vab (f ) ou Vab (g) est inni. Supposons donc f et g à variation bornée. Alors, pour toute subdivision σ de [a, b], V (f + g, σ) = ≤ n−1 X k=0 n−1 X |(f + g)(xk+1 ) − (f + g)(xk )| |f (xk+1 ) − f (xk )| + k=0 n−1 X |g(xk+1 ) − g(xk )| k=0 ≤ V (f, σ) + V (g, σ) ≤ Vab (f ) + Vab (g) On en déduit que f + g est à variation bornée et que Vab (f + g) ≤ Vab (f ) + Vab (g). 3. Soit σ une subdivision de [a, b], σ 0 = (a = x0 < x1 < . . . < xn = b) la subdivision de [a, b] obtenue en rajoutant à σ le point c s'il n'y est pas. Notons p l'enier tel que xp = c; σ1 = (a = x0 < x1 < . . . < xn = b) est une subdivision de [a, c] et σ2 = (xp < . . . < xn = b) une subdivision de [c, b]. On a V (f, σ) ≤ V (f, σ 0 ) : on rajoute au plus un point dans la subdivision et l'inégalité résulte de l'inégalité triangulaire. D'autre part, V (f, σ 0 ) = V (f, σ1 ) + V (f, σ2 ). On en déduit V (f, σ) ≤ V (f, σ1 ) + V (f, σ2 ) ≤ Vac (f ) + Vcb (f ) On a donc Vab (f ) ≤ Vac (f ) + Vcb (f ). Montrons qu'il y a égalité. Supposons que f est à variation bornée sur [a, c] et sur [b, c]. Soit ε > 0. On peut trouver des subdivisions σ1 et σ2 de [a, c] et [c, b] ε ε respectivement telle que : V (f, σ1 ) ≥ Vac (f )− et V (f, σ2 ) ≥ Vcb (f )− . Considérons la subdivision 2 2 σ de [a, b] obtenue en faisant la réunion de σ1 et σ2 . On a alors V (f, σ) = V (f, σ1 ) + V (f, σ2 ) ≥ Vac (f ) + Vcb (f ) − ε. On obtient nalement Vab (f ) = Vac (f ) + Vcb (f ). Si Vac (f ) ou Vcb (f ) est inni, alors Vab (f ) est inni, car si σ1 est une subdivision quelconque de [a, c], σ2 une subdivision quelconque de [b, c] et σ la réunion des deux, alors V (f, σ) = V (f, σ1 ) + V (f, σ2 ), quantité qui n'est pas bornée. 4. D'après ce qui précède, une fonction monotone est à variation bornée et la somme de deux fonctions à variation bornée est une fonction à variation bornée : la somme de deux fonctions monotones est donc une fonction à variation bornée. Réciproquement, supposons que f est à variation bornée sur [a, b]. Alors pour tout x ∈ [a, b], f est à variation bornée sur [a, x]. Soit g la fonction dénie sur [a, b] par g(x) = Vax (f ). Si 0 a ≤ x ≤ x0 ≤ b, alors g(x0 ) = g(x) + Vxx (f ) ≥ g(x) ; g est donc croissante. D'autre part, avec 0 les mêmes notations, Vxx (f ) ≥ |f (x0 ) − f (x)| (on prend la subdivision σ = (x < x0 )). On en déduit g(x0 ) ≥ g(x) + f (x0 ) − f (x), c'est-à-dire f (x0 ) − g(x0 ) ≤ f (x) − g(x). La fonction h = f − g est décroissante. La fonction f = g + h est somme d'une fonctionc croissante et d'une fonction décroissante. 2