VI. Les céramiques diélectriques linéaires et leurs applications

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MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
VI.1
VI. Les céramiques diélectriques linéaires et leurs applications
1. Introduction
Le sujet du chapitre précédent concernait les céramiques conductrices et semiconductrices, c’est-à-dire les
céramiques possédant des porteurs de charges mobiles. Ici, on va traiter des céramiques qui ne contiennent
que des charges liées, ou seulement très peu de charges mobiles. Ces matériaux ont une bande d’énergie
interdite large. Ils sont isolants et peuvent être employés comme isolateurs électriques (le plus souvent aussi
des isolateurs thermiques).
Tous les porteurs de charges réagissent au champ électrique. Si elles sont mobiles, le champ provoque un
mouvement dans la direction du champ (ou dans le sens opposé, ceci dépendant du signe de la charge), et
si elles sont liés, le champ provoque leur polarisation, induisant l’apparition de dipôles. Les dipôles sont
formés à cause du léger déplacement des charges positives dans la direction du champ, et de celui des
charges négatives (électrons et ions) dans le sens opposé au champ électrique, ce qui résulte en une
charge lié à la surface du diélectrique.
Cette polarisation a une importante conséquence : Pour contrebalancer la polarisation, la surface du
matériau métallique proche du côté positif du dipôle accumule des charges négatives et la surface
métallique proche du côté négatif du dipôle accumule des charges positives. Ainsi, le stockage des charges
est possible, ce qui signifie que l’on crée un condensateur. Les condensateurs sont des composants
importants dans la plupart des circuits électriques.
L’importance de la polarisation sous l’influence d’un champ électrique varie d’un isolant à un autre. C’est une
propriété spécifique du matériau. La polarisation de certains matériaux est proportionnellement linéaire au
champ appliqué, alors que d’autres matériaux possèdent une réponse non-linéaire. Les premiers sont
nommés diélectriques linéaires et les seconds nommés diélectriques non-linéaires.
En premier lieu, nous verrons les propriétés les plus importantes des diélectriques : la constante
diélectrique, la perte diélectrique et la résistance au claquage des matériaux diélectriques, et nous
étudierons des exemples importants d’applications pour les diélectriques linéaires. Quant aux diélectriques
non-linéaires, ils seront abordés dans le prochain chapitre.
Figure 1. Condensateur sans diélectrique : 2 plaques métalliques identiques séparées par une distance t. Une
source de tension charge le condensateur à une tension U.
2. Le condensateur
Le condensateur est un dispositif pour stocker des charges électriques (fig. 1). Dans le cas le plus simple, il
est constitué de deux plaques métalliques identiques (surface A) centrés et parallèles à une distance t.
Quand on applique une source de tension (U), une charge Q s’installe dans les électrodes à l’interface vers
l’autre électrode. La polarité est positive du coté de la tension positive et négative de l’autre coté. La
capacité C du condensateur est le quotient C=Q/U. L’unité de capacité électrique est le Farad (F=C/V
(coulomb par volt)). A l’intérieur d’un tel condensateur, le champ électrique est homogène (à part aux bords
des plaques métalliques) et vaut E=U/t. On introduit un champ de déplacement électrique D = ! 0 E , où
! 0 = 8.85"10 #12 F / m
(= C /V / m) est une constante universelle nommée permittivité diélectrique du vide
(= vacuum), quand l’espace entre les électrodes est vide de matière. D est rien d’autre que la densité de
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VI.2
2
charges dans les électrodes, i.e. D=Q/A (possède donc l’unité C/m ). Avec ces relations on peut déduire la
capacité : C0 = ! 0
A
.
t
A
+
t
-
E
V
Q0 = C0 V
C0 = ε 0 A/t
Q = k C0 V
Figure 2: Les charges s’accumulent sur deux plaques métalliques séparées : (a) vide entre les plaques (b) matériau
diélectrique entre les plaques.
3. Propriétés électriques des matériaux diélectriques
3.1 Constante diélectrique
Dans la suite, on va discute de l’introduction d’un matériau diélectrique entre les plaques d’un condensateur.
On fait la différence entre la capacité sans diélectrique C0, la charge sans diélectrique Q0 (Fig. 2a) et les
valeurs avec un diélectrique C et Q. En écrivant la charge
Q0 = C0V =
A
ε 0V = Aε 0 E
t
(1)
La charge totale sur la surface divisée par la surface donne la densité de charge, ou le déplacement
2
diélectrique D [C/m ] (comme défini en haut)
D0 =
Q0
= !0E
A
2
[C/m ]
Quand un isolant est inséré entre les plaques métalliques, l’isolant se polarise
sous l’influence du champ
!
appliqué, à cause des charges liées aux surfaces traversées par le champ D . Parfois, on parle de dipôles à
l’intérieur du diélectrique (strictement parlé c’est souvent pas vrai). Pour compenser ces charges de
polarisation, des charges de signe opposé s’accumulent à la surface des plaques métalliques (électrodes)
(Figure b). Ces charges sont des charges libres du métal et doivent être fournies par une source extérieure.
Grace à la polarisation du diélectrique il y en a beaucoup plus que Q0. Le rapport entre les charges
accumulées avec l’isolant Qtot = Q0+Qd et celles sans l’isolant est nommé la constante diélectrique k (ou
parfois ε r) de l’isolant. La permittivité de l’isolant est notée ε est égale à k
La capacité du condensateur avec le diélectrique est donc : C
Le champ Dtot est aussi une somme de deux contributions :
Dtot =
ε o en [F/m].
= k C0 = k ε 0 A/t [F].
Qtot
Q Q
= k! 0 E = 0 + d = ! 0 E + P
A
A
A
Le champ P est nommé polarisation. De l’équation (2), on obtient donc pour P :
(2)
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VI.3
P = ! 0 (k " 1)E ou P = #! 0 E
χ
(3)
représente la susceptibilité diélectrique du matériau.
De l’équation (3), on constate que la constante diélectrique et la susceptibilité expriment la facilité avec
laquelle un matériau devient polarisé sous un champ électrique externe appliqué.
3.2 Pertes diélectriques
Nous considérons maintenant le comportement en fonction du temps. Ceci est important car les
diélectriques sont le plus souvent utilisés dans des circuits avec du courant alternatif (AC). Dans le cas idéal,
toute l’énergie stockée dans un condensateur peut être récupérée. C’est pourquoi on peut obtenir des
résonateurs LC, ceci en mettant une bobine d’inductance L en parallèle avec un condensateur (C). L’énergie
oscille entre la forme électrostatique dans le condensateur, et la forme magnétique dans la bobine (tout à fait
équivalent au résonateur ressort - masse qu’on a traité dans le chapitre sur la mécanique, ou les deux
formes d’énergie sont mécanique et cinétique). Mais il y a toujours des pertes. Dans la bobine c’est la
résistance électrique du fil, dans le condensateur c’est la perte diélectrique, parfois liée avec une fuite
électrique à travers le diélectrique.
Quand une tension sinusoïdale de fréquence angulaire ! = 2"f est appliquée sur un condensateur fait d’un
matériau diélectrique idéal, la polarisation est en phase avec la tension appliquée. Toutefois, dans chaque
matériau réel, il y a de la ‘friction’, de la viscosité, donc des mécanismes de dissipation d’énergie. La
polarisation est donc décalée (ou retardée) d’un certain temps !t , donnant lieu à un déphasage de
! = "#$t par rapport à la tension appliquée. Cet angle s’appelle angle de perte. La nature des mécanismes
de pertes d’énergie sera discutée plus tard. Si le champ sinusoïdal appliqué est exprimé comme dans
l’équation (4), le déplacement sera exprimé comme dans l’équation (5), et la permittivité diélectrique, qui est
le rapport entre les deux, sera exprimée dans l’équation (6)
E = E0ei!t
(4)
D = D0ei (!t"# )
(5)
!=
D0 "i#
e
E0
(6)
Im(Y)
Admittance Y
ωC'
δ
ωC
ωC’’
(
)
Y = i!C = i! C ' " iC '' = !C ' (tan # + i)
Re(Y)= conductance
Figure 3 : La capacité complexe comme admittance.
On constate que la permittivité diélectrique d’un matériau non idéal est un nombre complexe (équation 7). Le
rapport entre la partie imaginaire de la permittivité diélectrique et sa partie réelle est nommé l’angle de perte,
ou tgδ:
(7)
! = ! " # i! ""
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VI.4
" !! k !!
=
= tg#
" ! k!
(8)
L’admittance Y est en générale écrit : Y=g+ib, ou g est la conductance, et b la susceptance. Un
condensateur réelle n’est donc pas une susceptance pure (b=ωC’), mais contient aussi une conductance
g= ωC’tanδ (fig. 3). La partie réelle g peut aussi contenir une certain conductance de fuite g0, alors
g= ωC’tanδ+g0 . Notez que la fuite possède un comportement en fréquence tout différent.
La constante diélectrique et la tangente de l’angle de pertes de certains diélectriques à 100 kHz sont
données dans le tableau 1 pour quelques cas typiques. En règle générale on observe que les matériaux
avec des constantes diélectriques plus grandes possèdent aussi de plus grandes pertes.
Tableau 1: Constante diélectrique et tangente de pertes de certains matériaux à 100 kHz.
k
tg δ
Polypropylène
2.1
0.00025
Verre SiO2 pur
4.0
0.0002
Verre sodo-calcique
4-6
0.01
Porcelaine haute tension
5.5-7.5
0.0002-0.004
Al2O3 (99.96%)
9.4
0.0002
MgO
9.83
0.0003
TiO2
110
0.002
*BaTiO3
1000
0.02
Remarque : Les valeurs données ont une précision limitée sachant qu’elles dépendent de la pureté et de la
microstructure des céramiques. *BaTiO3 est un diélectrique nonlinéaire et sera exposé dans le chapitre 7.
3.3 Mécanismes de polarisation
Dans la section 2.1, la polarisation du matériau diélectrique, soumis à un champ électrique, a été supposée
comme étant à l’origine du comportement diélectrique, et la susceptibilité diélectrique a été définie par le
rapport entre le champ appliqué et la polarisation résultante (Equation (3)). A présent, nous allons discuter
de l’origine microscopique de la polarisation.
Le matériau est polarisé si les centres des charges positives q et négatives -q ne coïncident plus, et sont
séparés l’un de l’autre d’une distance d. Quand on peut identifier une unité qui est électriquement neutre,
comme un atome, une molécule, etc., la séparation des charges de cette unité cause la création d’un dipôle
de cette unité, avec valeur µ=q d [Cm]. La polarisation, qui a été définie précédemment comme le rapport
des charges liées par unité de surface, peut aussi être définie comme la densité de dipôles dans le
2
-3
matériau : P=N µ [C/m | (où N est la concentration des unités, donc de dipôles [m ]).
Le champ que chaque dipôle ressent n’est pas uniquement le champ électrique extérieur E appliqué, mais
également le champ qui est exercé sur ce dipôle par les dipôles qui l’entourent. On le nomme ‘’champ local’’
E’ qui est relié d’une manière complexe (que l’on ne présentera pas ici) au champ extérieur et à la structure
cristalline du matériau. Il est possible maintenant de relier le dipôle µ au champ local E’ en définissant la
2
polarisabilité α [m C/V] du matériau comme:
µ= α E’
(9)
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VI.5
La polarisabilité est une mesure de l’importance de la polarisation du matériau sous un champ extérieur
appliqué. De cette façon, la relation entre la constante diélectrique, qui est une propriété macroscopique
facilement mesurable, et la polarisabilité dans le matériau peut être déterminée en combinant (3) et (9) :
P = ! 0 (k " 1)E = N µ = N# E $
(10)
Il y a quatre types de mécanismes majeurs dans un matériau qui peuvent conduire à une polarisation:
polarisation électronique, polarisation ionique, polarisation d’orientation et polarisation par charges d’espace.
Ceci est illustré schématiquement dans la fig. 4.
champ E
Polarisation électronique (αe):, présente dans tous les
15
matériaux, jusqu'à la fréquence visible (10 Hz)
polarisation électronique
polarisation ionique
polarisation par
orientation des dipôles
Polarisation ionique (αi): importante dans les
matériaux où la liaison ionique est significative,
11
13
(<10 -10 Hz).
Polarisation dipolaire (ou d'orientation) (αd): présente
dans les matériaux où des moments dipolaires
9
10
permanents existent (<10 -10 Hz).
Polarisation des charges d’espace (ou d'interface)
(αs), dans les matériaux possédant des interfaces, ou
des impuretés (< 1kHz).
polarisation par
charges dʼespace
Figure 4 : Illustration schématique des mécanismes
de polarisation
• Sous l’influence d’un champ externe appliqué, les électrons seront légèrement déplacés par rapport au
noyau positif. Ainsi, des dipôles sont créés. La relation entre le champ électrique appliqué et le moment
dipolaire créé donne la polarisabilité électronique (αe) du matériau. Sachant que les électrons sont très
légers, ils vont répondre en phase au champ électrique jusqu’à de très hautes fréquences, même au-delà du
15
16
domaine visible (10 Hz). A environ 10 Hz, qui est la fréquence naturelle de vibration des électrons autour
du noyau, un phénomène de résonance va intervenir (« fréquence de plasma »). Au-dessus de cette
fréquence, le nuage d’électrons ne suivra plus le champ alternatif, et la polarisation électronique ne
contribuera pas à la permittivité (c’est pourquoi l’or est jaune pour donner un exemple).
• Dans les matériaux ioniques, les ions chargés négativement et positivement vont bouger dans des
directions opposées sous l’application d’un champ électrique externe. Le moment dipolaire résultant
représente la polarisabilité ionique (αi) du matériau. Ce type de polarisation va intervenir jusqu’à la région
11
14
des infrarouges 10 - 10 Hz. A ces fréquences, un phénomène de résonance (« phonon optiques ») va
intervenir à cause de la vibration naturelle des ions dans le cristal. Les ions ne répondent plus à un champ
alternatif d’une fréquence plus élevée.
• Certains matériaux, l’eau par exemple, possèdent des dipôles permanents qui existent même en l’absence
d’un champ électrique extérieur. Un champ électrique externe peut provoquer la rotation de ces dipôles pour
les aligner avec le champ. La capacité des dipôles permanents d’être alignés est reliée à la polarisabilité
dipolaire et d’orientation (αd) des matériaux. Comme le temps d’alignement du dipôle permanent est lent
9
10
(habituellement aux alentours de 10 - 10 Hz), la polarisabilité dipolaire va contribuer à l’ensemble de la
polarisabilité seulement jusqu’au domaine des micro-ondes. A une fréquence légèrement supérieure, les
dipôles seront en retard par rapport au champ électrique et seront finalement incapables de répondre. Ce
phénomène est nommé mécanisme de relaxation.
• Dans les diélectriques réels, spécialement dans les verres et les céramiques, il y a des charges libres,
habituellement associées à des impuretés, ou causées par un désordre structurel, ou reliées à la
microstructure, comme les joints de grains. Ces charges libres peuvent suivre un champ externe qui oscille.
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
VI.6
La polarisation ainsi créée est reliée à la polarisation par charges d’espace (αs). Ce phénomène persiste
seulement à basse fréquence, jusqu’à environ 1 kHz, et la relaxation va intervenir au-delà de cette
fréquence.
De la description précédente, on déduit que la polarisabilité totale (αtot), et avec elle la polarisation du
matériau et sa constante diélectrique, sont la somme des contributions des différents mécanismes de
polarisation :
α tot = α e +α i +α d +α s
3.4
(11)
Dépendance de la permittivité complexe par rapport à la fréquence et à la température.
!’
optique
relaxations
Charges
d’espace
résonances
dipolaire
ionique
Conduction
DC
électronique
!’’
104
108
1012
1016
Fréquences Hz
Figure 5 : Le spectre diélectrique schématique. Noter que seule la polarisation électronique existe dans tous les
matériaux. Les autres mécanismes de polarisation qui contribuent à la permittivité diélectrique des matériaux
dépendent de la structure et de la microstructure. La conduction DC est due à une fuite, qui se manifeste avec un
comportement 1/f (f= fréquence).
Comme on l’a vu plus haut, les différentes polarisabilités sont actives dans plusieurs domaines de
fréquence. Alors que la polarisabilité par charge d’espace contribue à la permittivité seulement à basses
fréquences. Les dipôles ioniques vont suivre le champ extérieur jusqu’aux fréquences infrarouges, et ainsi
de suite. Par conséquent la permittivité du matériau dépend de la fréquence.
Des grandes pertes sont générés quand les différends mécanismes sont encore présents, mais ne suivent
plus tellement le champ d’excitation. Ceci donne des pics dans l’angle de perte. Souvent la transition montre
l’anomalie d’une résonance. Ceci veut dire par exemple que les ions négative oscillent contre les ions
positives en résonance à une fréquence bien définie, créant une augmentation de la réponse diélectrique
autour de la fréquence de résonance, partie réelle et imaginaire.
2
Remarque sur la figure 5: Notez que les équations de Maxwell exigent que k=n , oû n est l’indice de
2
réfraction. Cette relation est seulement valable pour une fréquence définie: k(ω)=n (ω). Un diélectrique avec
k de 1000 à 1 kHz, possède typiquement un indice de réfraction n de seulement (typiquement) 2.5 dans le
14
visible, par ce que toutes les contributions des dipôles et vibrations d'ions sont zéro à 10 Hz.
3.5
Court-circuit et dégradation diélectrique
Si un champ électrique suffisamment élevé est appliqué, tous les matériaux vont subir un court-circuit
électrique. Pour chaque matériau (dépendant de la composition, de la structure, de la microstructure et de
paramètres extérieurs tels que l’humidité), il existe un certain seuil, au-delà duquel le matériau ne sera plus
un isolant, mais permettra le passage du courant et un court-circuit électrique va se produire. Le champ
électrique minimal qui cause ce phénomène est défini comme la rigidité diélectrique (ou champ de claquage)
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
VI.7
du matériau. La rigidité diélectrique est importante pour les isolants, et pour les condensateurs haute
tension. Quelques exemples de rigidités diélectriques de divers matériaux sont donnés dans le Tableau 2.
Tableau 2: Rigidité diélectrique de certaines céramiques
Matériau
Al2O3
Alumine porcelaine
Porcelaine basse
tension
SiO2
BaTiO3
BaTiO3
Forme
Epaisseur
Température
film anodisé
Céramique/ verre
Céramique/ verre
6000 Å
0.63 cm
0.63 cm
25°C
25°C
25°C
Résistance au
8
claquage (10
V/m)
1.5
0.15
0.03
Verre
Cristal
Céramique
0.005 cm
0.02 cm
0.02 cm
20°C
0°C
25°C
6.6
0.040
0.117
Il y a trois types importants de claquage diélectrique : intrinsèque, thermique et par décharge. Quand le
champ électrique est assez élevé pour accélérer les porteurs libres existants à un point tel qu’ils excitent, par
des collisions les ions du réseau, créant ainsi de plus en plus de porteurs libres dans un effet d’avalanche,
un claquage électrique intrinsèque (accompagné souvent de ruptures mécaniques) va intervenir. Le champ
8
typique pour lequel une rupture intrinsèque intervient est de 1 à 10 10 V/m. Il commence à un point dans le
matériau où la concentration locale du champ est très grande, par exemple proche des microfissures ou des
inclusions d’impuretés. A cause de cela, il est évident que la qualité des céramiques et les paramètres
environnementaux vont avoir une très forte influence sur la valeur du champ de claquage intrinsèque : la
porosité, les inhomogénéités et la température vont influencer le seuil de claquage intrinsèque. Comme dans
le cas de la résistance mécanique des céramiques, la valeur théorique du champ de claquage intrinsèque
est bien plus haute que la valeur réelle. De plus, les couches minces en céramiques possèdent un champ de
claquage intrinsèque plus élevé par rapport aux éléments épais, parce que, dans ces derniers, la probabilité
d’avoir un défaut est plus grande.
6
A des fréquences plus hautes (>10 Hz), et en raison de l’augmentation des pertes diélectriques proche de
la fréquence de relaxation, l’échantillon s’échauffe. Ce chauffage par effet Joule, couplé à la faible
conductibilité thermique dans les céramiques isolantes, augmente la conductibilité électronique du matériau,
augmentant ainsi les pertes, jusqu’à ce que le claquage se fasse. Des claquages thermiques typiques vont
6
intervenir vers 10 V/m. Ce phénomène est influencé aussi bien par les défauts de la microstructure que par
une température élevée.
Le claquage par décharge est important, spécialement dans les matériaux poreux. Le gaz (ou l’humidité) à
l’intérieur des pores tend à s’ioniser avant que le solide se rompe, ce qui cause à son tour des dégâts en
surface, qui vont ensuite accélérer le claquage.
Définition: La rigidité diélectrique = résistance au claquage, indiqué en champs de claquage (V/m)
La rigidité diélectrique globale (résistance au claquage) des céramiques est complexe, et dépend de
nombreux paramètres liés au matériau et à l’environnement : la composition, la porosité, la qualité de
surface des composants (une surface irrégulière va provoquer une distribution inhomogène du champ
électrique), la température et l’humidité influencent la force diélectrique. En conséquence, des céramiques
d’une haute densité, sans défauts, qui ne sont pas exposées à une forte humidité auront de meilleures
performances.
4. Applications particulières des diélectriques linéaires
Les matériaux diélectriques sont utilisés dans de nombreuses applications, comme celles décrites dans le
Tableau 3. Les applications les plus importantes sont les condensateurs et les isolants. Ces applications
sont décrites ci-dessous de manière plus détaillée.
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
VI.8
4.1 Isolants électriques
Des applications importantes des céramiques isolantes sont les isolateurs pour des lignes à haute tension,
pour les bougies dans les moteurs électriques et dans les disjoncteurs de circuit et les interrupteurs. Alors
que les isolateurs des fils électriques de basse tension sont faits en polymère (plus facile mis en œuvre pour
de longs câbles), les isolateurs pour haute tension sont faits en céramique, à cause de leur meilleure
imperméabilité à l’humidité, leur meilleure protection mécanique et leur résistance supérieure aux hautes
températures.
Tableau 3: Applications des matériaux diélectriques linéaires
Application
Matériaux (Exemples)
Isolant électrique
Porcelaine, Al2O3
Substrat pour circuits hybrides
Al2O3, AlN
Encapsulation des circuits hybrides
Verre
Résonateurs et filtres diélectriques micro-ondes
Ba(Mg1/3Ta2/3)O3
Condensateurs
SiO2 , Al2O3, ,Si3N4
Domaine UV, IR, et MW
SiO2 , Al2O3
Les propriétés électriques les plus importantes requises pour un isolant sont une haute résistivité et une
rigidité diélectrique élevée pour résister à la fois aux tensions AC et DC. Il y a une autre condition importante
à remplir : la puissance dissipée à travers les isolants doit être minimale.
Quand une tension alternative est appliquée sur un diélectrique non idéal, des pertes sont produites et il y a
3
une densité puissance dissipée pd (W/m ) dans le matériau qui peut s‘exprimer comme :
pd = !
E02
E2
" !! = ! 0 " ! tg#
2
2
3
[W/m ]
(12)
où ω = 2 π f (s )
-1
De l’équation (12), pour de faibles pertes de puissance, on a besoin d’un faible k’’. Par ailleurs k” = k’ tgδ, et
ainsi, un bon isolant pour les hautes fréquences et/ou les hautes tensions doit avoir une faible constante
diélectrique et une faible tangente de perte. De plus, les isolants doivent avoir une bonne résistance à la
dégradation électrique, une bonne résistance mécanique et une haute densité pour éviter l’absorption
d’humidité si l’application se situe dans un environnement humide. Une bonne résistance aux chocs
thermiques est aussi requise, sachant que la chaleur peut être générée localement par effet Joule. Pour les
isolants de grande taille, les porcelaines riches en alumine et en magnésium et pauvres en sodium et en
potassium sont employées.
4.2 Substrats pour circuits intégrés et électronique à haute fréquence
Le rôle des substrats dans les circuits intégrés et dans l’électronique de haute fréquence est de produire des
logements pour les puces, supporter les connections entre les différents éléments et faciliter la dissipation
de la chaleur dans les composants. Le substrat porte les puces, les résistances, les condensateurs, les
conducteurs métalliques et les connecteurs. Les substrats doivent être de bons isolateurs (faible constante
diélectrique, faibles pertes diélectriques et haute résistivité). De plus, ils doivent avoir une haute conductivité
thermique, dans le but de dissiper la chaleur qui peut être générée durant le fonctionnement, être résistants
au niveau mécanique et facilement polissables (pour permettre l’impression de fines lignes conductrices).
Une constante diélectrique très faible est requise pour les circuits à haute fréquence. Dans ce cas, les ondes
électromagnétiques se propagent dans des matériaux diélectriques et la vitesse de la propagation du signal
est inversement proportionnelle à la racine carrée de la permittivité diélectrique. Une autre propriété
importante est un coefficient d’expansion thermique similaire à celui du silicium, ce qui permet d’éviter la
fissuration des puces lors de changements de température durant la fabrication et l’utilisation.
Le Tableau 4 montre des propriétés de certains matériaux. L’alumine est largement employée en tant que
matériau de base. AlN est employée pour les applications à hautes fréquences et hautes puissances, à
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
VI.9
cause de sa constante diélectrique relativement basse, de sa haute conductivité thermique et de son
coefficient d’expansion thermique proche de celui du silicium Si.
Tableau 4: Propriétés de certains matériaux utilisés en tant que substrats électroniques Source: U. Chowdhry and A.
Sleight, Ann. Rev. Mat. Sci. 17,323-340 (1987)
Matériau
Alumine (Al2O3)
Mullite (Al6Si2O13)
Glucine (BeO)
Nitrure d'Aluminium (AlN)
Silice (SiO2)
Cordiérite
(Mg2Al4Si5O18)
Nitrure de Silicium
(Si3N4)
Carbure de Silicium
(SiC)
Diamant (C)
Silicium (Si)
Polyimide
(nC23H12N2O4)
Constante
Diélectrique k
Dilatation
thermique
(10-6/C°)
9.6
6.6
6.9
8.8
3.8
5.5
7.8
5.5
9.0
4.5
0.6
1.5
Conductibilité
thermique
(W/mK)
50
4
370
320
2
2
6.0
3.0
33
4.0
3.7
490
5.7
12
3.5
1.5
3.5
35
2000
130
0.2
Les céramiques frittées à basse température (LTCC pour Low Temperature Cofired Ceramics) sont un
exemple de la réduction de taille et d’une amélioration des fonctionnalités gagnée dans le domaine des
RF/micro-ondes depuis quelques années. Il s’agit de modules de multi-chips basées sur des multicouches
incluant des composants passifs et des interconnections denses, réduisant la surface occupée par les
circuits intégrés à micro-ondes monolithiques (MIMCs). Les LTCCs sont faites de couches de céramique en
bande, contenant souvent une phase vitreuse, et frittées à une température relativement basse, d’environ
900°C. Cette basse température permet l’emploi de conducteurs convenables tels que l’argent, l’or, et sous
certaines conditions, même le cuivre. Les inducteurs, les condensateurs, les résistances et autres
composants passifs sont intégrés entre les couches. Des modules avancés contiennent des couches de
différentes compositions frittées ensembles, et ayant des propriétés différentes telles qu’une faible ou haute
permittivité (fig. 6).
Underfill
Printed resistor
Si-chip (flip-chip)
SMD
!r " 6
!r " 60
!r " 6
Burried resistor
RF filter structure
RF decoupling
capacitors
Figure 6: Modules LTCC avancés (Propriété de W.Wersing, Siemens)
Vias
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
VI.10
4.3 Condensateurs
Les condensateurs sont d’importants ‘’building blocks’’ de nombreux circuits électriques. Ils sont employés
en tant que filtres bloquants les signaux AC de différentes parties des circuits et sont aussi employés en tant
qu’éléments de stockage d’énergie. Les diélectriques pour condensateurs doivent avoir des faibles pertes.
En outre, ils doivent posséder une bonne stabilité en température et en fréquence ainsi qu’une rigidité
diélectrique élevée. Une haute constante diélectrique est importante, mais n’est pas le paramètre le plus
important. Le polystyrène possède une constante diélectrique de seulement 2,6; cependant il s’agit d’un
matériau extrêmement important pour les condensateurs en raison de sa stabilité aux fréquences ainsi que
ses faibles pertes. Sachant que la capacité est directement reliée à la constante diélectrique et à la surface
du condensateur, mais inversement proportionnel à son épaisseur (C=kA/t), un film de 10 microns
d’épaisseur possède la même capacité qu’un condensateur de 1mm avec une constante diélectrique valant
2600 pour une même surface. Ainsi, les condensateurs à base de films polymériques occupent environ 30%
du marché total des condensateurs. Les condensateurs électrolytiques en aluminium emploient un film
mince d’oxyde d’aluminium qui se forme sur une feuille mince d’aluminium. Les condensateurs
électrolytiques à base de tantale sont stables en température et possèdent une haute fiabilité. Ils sont ainsi
fortement employés dans les systèmes militaires et les télécommunications.
Outre les faibles pertes, les fuites en tension DC doivent aussi être faibles.
Pour insister sur le rôle fondamental joué par les condensateurs, on peut ajouter que l’élément de mémoire
le plus commun dans les ordinateurs se compose d’une structure possédant un transistor et un
condensateur. Cette mémoire, nommée DRAM (Dynamic random access memory) a été introduite en 1967.
Au fil des années, sa performance s’est considérablement améliorée et sa taille s’est réduite, provoquant le
remplacement du SiO2 (k=4) d'abord par un alliage d’oxyde de silicium et de nitrure de silicium (k=7), et
après par le Ta2O5 (k=25) (voir fig. 7). On développe aussi un remplacement par du SrTiO3 (k=100-200).
Figure 7. Le mémoire DRAM (Dynamic Random Accessible Memory) qui stock les informations sous
forme de charge électrique dans un condensateur. Le défi est de diminuer la taille et la tension
d’alimentation du chip, tout en gardant assez de charges sur le condensateur. L’agrandissement de la
surface en faisant des structures 3 dimensionnelles (comme les cylindres montrés ici, ou des fossés
profondes) est une mesure, mais n’est pas suffisant. On engage aussi de nouveau diélectrique avec
des permittivités (k) plus élevées.
Sommaire :
Applications des diélectriques linéaires et leurs exigences:
Isolateur
-Rigidité diélectrique élevée
-Constante diélectrique faible
Capacité
-Rigidité diélectrique élevée
-Constante diélectrique haute
-Pertes et fuites très faibles
-Perte et fuites faible dans la
mesure du possible.
Stable
en
température
si
constante diélectrique n'est pas
haute.
Substrat
-Rigidité diélectrique élevée
-Constante diélectrique plutôt
faible
-Pertes et fuites très faible, surtout
pour applications RF
-Conduction
thermique
élevé
surtout pour l'électronique
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