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ATELIER
Département thématique
Politiques structurelles et de Cohésion
GESTION DES STOCKS D’EAU PROFONDE
PÊCHE
Décembre 2007
FR
Direction générale Politiques internes de l'Union
Département thématique Politiques structurelles et de Cohésion
PÊCHE
GESTION DES STOCKS D’EAU PROFONDE
ATELIER
IP/B/PECH/IC/2007_93
PE 389.606
07/12/2007
FR
Cet atelier a été organisé à la demande de la commission de la pêche du Parlement européen.
Le présent document est publié dans les langues suivantes:
- Original: EN;
- Traductions: DE, ES, FR, IT, PT.
Auteur:
Antoine Dosdat, Ifremer, France
Philip A. Large, CEFAS, Lowestoft, Royaume-Uni
Pascal Lorance, Ifremer, France
Matthew Gianni, UICN
Fonctionnaire responsable:
M. Jesús Iborra Martín
Département thématique Politiques structurelles et de Cohésion
Parlement européen
B-1047 Bruxelles
E-mail: [email protected]
Manuscrit achevé en décembre, 2007.
Cette étude est disponible sur Internet:
http://www.europarl.europa.eu/activities/expert/eStudies.do?language=FR
Bruxelles, Parlement européen, 2007.
Les opinions exprimées sont celles de l'auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle du
Parlement européen.
Reproduction et traduction autorisées, sauf à des fins commerciales, moyennant mention de la source,
information préalable de l'éditeur et transmission d'un exemplaire à celui-ci.
Direction générale Politiques internes de l'Union
Département thématique Politiques structurelles et de Cohésion
PÊCHE
GESTION DES STOCKS D’EAU PROFONDE
ATELIER
Contenu:
Résumé des conclusions et des recommandations formulées sur la base des présentations et des
discussions de l'atelier Gestion des stocks d’eau profonde organisé à Bruxelles, le
22 novembre 2007.
Face à l’exposition particulière des poissons et écosystèmes d'eau profonde à la pêche, la CE et les
États membres de l'UE ont décidé de fixer des TAC pour les principales espèces cibles, de réduire
l'effort de pêche, de limiter la capacité des navires et de prendre des mesures techniques
supplémentaires telles que la création de zones d'interdiction. L'efficacité de la gestion actuelle est
aujourd'hui au cœur des débats et, à cet égard, la majorité des acteurs reconnaissent la nécessité de
poursuivre les efforts en vue de renforcer la dimension protectrice et préventive de la
réglementation actuelle. D'un point de vue scientifique, les données concernant la pêche en haute
mer restent insuffisantes. Les experts et les décideurs participant à l'atelier ont donc centré leurs
débats sur les mesures visant à améliorer la connaissance de l'état des stocks et de l'impact de la
pêche sur l'écosystème, de même que sur les mesures de gestion limitant l'effort de pêche (dont la
possibilité d'interdire le chalutage à des profondeurs > 2000 mètres), l'amélioration de la
surveillance des débarquements et des rejets (qui pourraient inclure une interdiction des rejets), la
gestion d'un plus grand nombre d'espèces sous le couvert des TAC (afin de réduire les fausses
déclarations et d'empêcher le développement de nouvelles pêcheries), l'amélioration du contrôle de
qualité des plans et performances d'échantillonnage des États membres, l'amélioration du
financement des enquêtes afin d'obtenir des données précises pour les évaluations, l'amélioration de
l'accès aux données sur les systèmes de surveillance des navires (SSN) et la définition de zones
d'interdiction ou protégées.
IP/B/PECH/IC/2007_93
PE 389.606
07/12/2007
FR
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Résumé de l'atelier
Le but de cet atelier était d'offrir aux députés du Parlement européen des informations plus
précises sur les caractéristiques biologiques des espèces d'eau profonde, les écosystèmes dans
lesquels elles vivent, la pêche, la répartition spatiale des espèces et les mesures de gestion.
La pêche en eau profonde est pratiquée dans tout l'Atlantique du Nord-est. Si l’essentiel de cette
pêche s’est développée au cours des 20 dernières années, une partie est toutefois plus ancienne.
On entend par «eau profonde» la partie de l'océan située à des profondeurs supérieures à
400 mètres. Cependant, pour de nombreuses espèces, le statut d'espèces d'eau profonde est sujet
à discussion car certaines vivent sur toute une plage de profondeurs ou à des profondeurs
variables selon leur répartition géographique. Les poissons d'eau profonde se caractérisent
toutefois par une faible productivité biologique, de sorte qu'ils ne supportent que de faibles taux
d'exploitation. Selon la zone, les pêches en eau profonde sont exploitées par des flottes de gros
chalutiers ou de petites flottes artisanales. La gestion de la pêche hauturière en eau profonde est
en outre compliquée par la nécessité de réglementer la pêche de fond afin d'éviter toute
conséquence négative sur les écosystèmes marins vulnérables tels que les coraux d'eau froide,
les monts sous-marins et les champs d'éponges. L'impact des engins de pêche de fond constitue
une menace pour les habitats d'eau profonde, en particulier ceux contenant des récifs et des
communautés benthiques denses. Quelques zones protégées ont été créées afin de préserver les
habitats d'eau profonde. Bien que les rejets d'espèces d'eau profonde représentent en moyenne
entre 40 et 45 % de la capture totale, les données temporelles actuellement disponibles sont
rares. La CE est en train de revoir sa politique en matière de rejets, l'une des options envisagées
étant leur interdiction totale. Une telle option pourrait jouer un rôle crucial dans la gestion future
des pêches en eau profonde.
L'une des solutions pour assurer la bonne gestion de ces pêches pourrait consister à combiner
efforts de pêche et contrôles des captures. Les facteurs affectant la rentabilité de la pêche
doivent toutefois encore faire l'objet d'un examen minutieux. Dans ce contexte, les mesures de
gestion introduites dans l'UE constituent clairement un pas dans la bonne direction, même si leur
portée et leur teneur ne sont pas suffisamment rigoureuses pour réduire l'exploitation à des
niveaux viables. La question des zones d'interdiction en tant qu'outil de gestion a également été
examinée. En cas d’adoption de cette mesure, ces zones devront être relativement petites,
conformément aux données des systèmes de surveillance des navires (SSN), et saisonnières. La
durée des fermetures devra par ailleurs être limitée afin de réduire l'impact sur d'autres
pêcheries. À cet égard, un meilleur accès aux données SSN est essentiel en vue de surveiller leur
impact.
La législation internationale récente en la matière a également été examinée et notamment la
résolution 61/105 de l'ONU sur la pêche hauturière adoptée en décembre 2006 et le récent
«Projet de directives internationales sur la pêche hauturière en eaux profondes» examinée en
septembre 2007 lors de la consultation d'experts de la FAO à Bangkok. Dans ce contexte, il
convient de mentionner les propositions relatives à des «quotas de prises accessoires» et des
incitations, tels que des droits de pêche exclusifs, pour les pêcheurs afin de faciliter la collecte et
l'accès des données. L'Assemblée générale de l'ONU de 2006 réclame une action de toute
urgence afin d'éviter que la pêche de fond n'ait un impact négatif sur les écosystèmes d'eau
profonde et de garantir la viabilité à long terme des stocks de poissons d'eau profonde. Toutes
les nations pratiquant la pêche hauturière se sont engagées à prendre de telles mesures par le
biais d'évaluations de l'impact sur l'environnement de la pêche de fond et à interdire la pêche de
fond dans les zones de haute mer où des écosystèmes marins vulnérables ont été repérés ou
pourraient exister. Pour l'atelier, l'application de l'interdiction du chalutage à des profondeurs
supérieures à 2 000 mètres ne devrait avoir qu'un impact minime sur le secteur. La question est
maintenant de savoir si l'application d'une telle interdiction pourra se faire de manière efficace,
iii
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
en particulier à la lumière de la demande de l'ONU, qui souhaite sa mise en œuvre totale d'ici
décembre 2008.
PE 389.606
iv
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Glossaire des abréviations et acronymes
PRB
Point de référence biologique
CCAMLR
Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l'Antarctique
COFI
Comité des pêches
CORALFISH
Évaluation de l'interaction entre les coraux, les poissons et la pêche (projet financé
par l'UE dans le cadre du 7e programme-cadre)
CPUE
Capture par unité d'effort. Généralement exprimée en kg par heure de pêche.
AC
Analyse des captures
DG FISH
Direction générale «Pêche et affaires maritimes» de la CE
AE
Approche écosystémique
CE
Commission européenne
ZEE
Zone économique exclusive
ES
Espagne
UE
Union européenne
F
Mortalité par pêche
FAO
Organisation pour l'alimentation et l'agriculture
FRS
Fisheries Research Services, situés en Écosse
CGPM
Commission générale des pêches pour la Méditerranée
RCC
Règle de contrôle des captures
CIEM
Conseil international pour l'exploration de la mer
UICN
Union internationale pour la conservation de la nature
Pêche INN
Pêche illicite, non déclarée et non réglementée
Lim
Limite
M
Mortalité naturelle
DMA
Dorsale médio-atlantique
ZMP
Zone marine protégée
EM
État membre
PME
Production maximale équilibrée, c'est-à-dire nombre maximal de poissons pouvant
être capturés de manière viable dans un stock
OPANO
Organisation des pêches de l'Atlantique du Nord-Ouest
NE
Nord-est
CPANE
Commission des pêches de l'Atlantique du Nord-est
OSPAR
Convention Oslo-Paris
v
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
AP
Approche de précaution
POORFISH
Modèle d'évaluation, de gestion et de conseil probabiliste pour la gestion des pêches
en cas de disponibilité de données insuffisantes (projet financé par l'UE dans le cadre
du 6e programme-cadre)
PT
Portugal
ORGP
Organisation régionale de gestion des pêches
OPASE
Organisation des pêches de l'Atlantique du Sud-est
SGDEEP
ICES Study Group on the Biology and Assessment of Deep-Sea Fisheries Resources
SGPA
ICES Study Group on the Precautionary Approach
SIOFA
Accord de pêche dans le sud de l'océan Indien
SPRFMO
Organisation régionale de gestion des pêches du Pacifique Sud
BSR
Biomasse du stock reproducteur
CSTEP
Comité scientifique, technique et économique de la pêche
TAC
Total admissible des captures
RU
Royaume-Uni
ONU
Nations unies
AGNU
Assemblée générale des Nations unies
USD
Dollar US
URSS
Union des républiques socialistes soviétiques
EMV
Écosystème marin vulnérable
SSN
Système de surveillance des navires
VPA
Analyse de population virtuelle
WGDEC
ICES Working Group on Deep-Water Ecology
WGDEEP
ICES Work Group on the Biology and Assessment of Deep-Sea Fisheries Resources
SMMD
Sommet mondial sur le développement durable
Z
Mortalité totale
PE 389.606
vi
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Table des matières
Résumé de l'atelier .....................................................................................................................iii
Glossaire des abréviations et acronymes................................................................................... v
1. Résumé des quatre présentations .......................................................................................... 1
1.1. Ressources halieutiques et écosystème d'eau profonde de l'Atlantique du Nord-est,
par Pascal Lorance .......................................................................................................... 1
1.2. Gestion des stocks d'eau profonde dans l'UE, par Philip Large........................................ 3
1.3. Gestion des pêches en eau profonde dans des zones situées en dehors de la
juridiction nationale, par Matthew Gianni ...................................................................... 4
1.4. Processus réglementaire en vue de la gestion des pêcheries d'eau profonde, par
Maria de la Fuensanta Candela Castillo.......................................................................... 6
2. Procès-verbal de la discussion................................................................................................ 8
2.1. Remarques formulées par les membres de la commission de la pêche: ........................... 8
2.2. Commentaires des experts aux questions soulevées par le président et le viceprésident .......................................................................................................................... 9
3. Conclusions et recommandations ........................................................................................ 10
3.1. Biologie des espèces d'eau profonde, stocks et niveaux d'exploitation, approche
écosystémique ................................................................................................................. 10
3.2. Réglementation: définition, application et contrôle ........................................................ 11
3.3. Collecte de données et amélioration des connaissances ................................................. 12
GESTION DES STOCKS D'EAU PROFONDE PAR L'UE
Philip A. Large .......................................................................................................................... 15
RESSOURCES ET ÉCOSYSTÈME DES PÊCHERIES D'EAU PROFONDE
Pascal Lorance........................................................................................................................... 57
GESTION DES PÊCHERIES D'EAU PROFONDE DANS DES ZONES SITUÉES EN
DEHORS DE LA JURIDICTION NATIONALE
Matthew Gianni......................................................................................................................... 83
vii
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
1. Résumé des quatre présentations
1.1. Ressources halieutiques et écosystème d'eau profonde de l'Atlantique du Nord-est,
par Pascal Lorance
Historique - Dans l'Atlantique du Nord-est, la pêche en eau profonde utilise des chaluts, des
filets dormants et des palangres. Les navires de pêche en eau profonde peuvent être tantôt des
chalutiers modernes, tantôt de petits bateaux artisanaux utilisant des palangres et des filets.
Certaines flottes de gros chalutiers débarquent du poisson frais tandis que d'autres possèdent des
congélateurs à bord. À l'ouest des Îles britanniques, les gros chalutiers hauturiers ont commencé
à exploiter des espèces d'eau profonde il y a une vingtaine d'années, avec pour principale cible le
grenadier de roche (Coryphaenoides rupestris), le sabre noir (Aphanopus carbo) et l'hoplostète
orange (Hoplostethus atlanticus). L'exploitation de la lingue bleue (Molva dypterygia) a débuté
plus tôt, à la fin des années 1950, tandis que la lingue (Molva molva) est une cible de longue
date de la pêche sur le plateau continental.
Définition - Pour simplifier les choses, les eaux profondes (ou «haute mer») peuvent être
définies comme la partie de l'océan située à des profondeurs supérieures à 400 mètres. Une
fraction des populations de certaines espèces du plateau continental sont présentes bien en-deçà
de cette profondeur (lotte (Lophius sp.) et merlu (Merluccius merluccius), par exemple).
Certaines espèces considérées comme d'eau profonde vivent à des profondeurs variables selon
leur répartition géographique et leurs schémas de migration (dorade rose (Pagellus bogaraveo)
et sébaste (Sebastes sp.), par exemple), de sorte que le «statut de poisson d'eau profonde» peut
être difficile à déterminer pour certaines espèces. La plupart des espèces capturées à de grandes
profondeurs se caractérisent par une longue durée de vie et une faible productivité biologique.
Dans le cadre du processus d'examen de la situation en cours, l'Organisation pour l'alimentation
et l'agriculture (FAO) propose aujourd'hui d'accorder une attention particulière aux espèces
«dont la biologie ne peut supporter que des taux d'exploitation de faible intensité» aux fins de
l'évaluation et de la gestion de la pêche, un trait que partagent les espèces considérées comme
d'eau profonde par le CIEM et l'UE, bien qu'on les retrouve à des profondeurs variables. En
résumé, les caractéristiques biologiques communes à prendre en compte sont: longue durée de
vie, croissance lente, maturité tardive, production d'un faible nombre de larves et frai
n'intervenant pas chaque année. Il convient de préciser que cette approche est dans la ligne des
recommandations et directives du CIEM (CIEM, 2007).
Mortalité par pêche - La pêche a généralement pour effet de réduire la biomasse du stock
exploité. D'après les modèles, la production maximale d'un stock (qu'il soit d'eau profonde ou
non) est équilibrée lorsque le niveau de la biomasse atteint 20-40 % de la biomasse non
exploitée. Cependant, compte tenu de la faible productivité des stocks d'eau profonde, la
proportion de la biomasse pouvant être capturée chaque année tout en garantissant la viabilité du
stock est faible. Plusieurs stocks de l'Atlantique du NE ayant fait l'objet d'une exploitation non
durable se situent aujourd'hui à des niveaux très bas. C'est notamment le cas de la lingue, du
brosme (Brosme brosme) dans les mers de Norvège et de Barents, de la dorade rose dans le
Golfe de Gascogne, de l'hoplostète orange et des requins d'eau profonde à l'ouest des Îles
britanniques. Le CIEM recommande dès lors l'adoption de mesures en vue de réduire certaines
de ces pêches. On a enregistré une diminution marquée de la quantité de poissons débarqués
en 2005 par rapport aux débarquements annuels à la fin des années 1990 et au début des
années 2000, sans doute en raison de l'introduction de TAC et de la diminution des stocks de
poissons. Il est actuellement impossible de procéder à des évaluations fiables de la PME pour la
plupart des stocks d'eau profonde, en raison du peu de données disponibles pour les évaluations
et de l'absence quasi totale de données temporelles issues d'enquêtes indépendantes pour affiner
les évaluations. En outre, la productivité de ces stocks est tellement faible que les niveaux
durables d'exploitation sont trop bas pour permettre une pêche économiquement viable de
1
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
certains stocks, en particulier hauturiers. Il convient de préciser à ce stade que les conseils en
matière de pêche fournis par le CIEM à ses clients n'ont actuellement pas pour objectif de fixer
la PME sur la base des stocks de poissons, mais s'appuient sur l'approche de précaution. Le point
de référence limite de la mortalité par pêche, «Flim», est le taux de mortalité par pêche qui risque
d'amener le stock à son niveau de biomasse limite s'il se maintient dans le temps (ICES 2006a).
Rejet et prise accessoire - Sur la base des observations réalisées à bord des navires
conformément au règlement (CE) n° 2347/2002, il apparaît que les rejets d'espèces d'eau
profonde mixtes de la pêche au chalut française représentent environ la moitié de la capture
totale (soit autant que les débarquements). Ce chiffre ne s'applique toutefois pas à la pêche
ciblée à la lingue bleue ou à l'hoplostète orange, où le nombre d'espèces indésirables capturées
est inférieur. À l'ouest des Îles britanniques, les rejets représentent 40-45 % de la capture totale.
La principale espèce rejetée est l'alépocéphale (Alepocephalus bairdii), un gros poisson qui n'est
généralement pas commercialisé en raison de sa teneur élevée en eau. Les rejets d'espèces
commerciales juvéniles ne concernent que le grenadier de roche et représentent entre 20 et 25 %
des captures totales de cette espèce. Les jeunes poissons de l'autre espèce cible principale ne
sont pas capturés. Il semble que la pêche à la palangre génère moins de rejets que le chalutage,
mais les données disponibles restent rares. Malgré le faible nombre de données disponibles, des
rejets ont également été signalés dans le cas des filets maillants d'eau profonde.
Impact environnemental – Les habitats d'eau profonde présentent une grande diversité. Les
principales préoccupations en termes d'impact de la pêche sur ses habitats concernent les coraux
d'eau froide, qui forment des récifs au niveau local, et les communautés d'éponges. Les gros
engins de pêche (plusieurs tonnes) traînés sur le fond marin (chaluts, par exemple) ont en effet
un impact majeur sur ces récifs. Dans les zones où le corail a été quantifié, la proportion de
corail affecté par la pêche s'est avérée élevée. Il semble que les engins traînants, mais également
les palangres et les filets, s'enchevêtrent dans les coraux et autres structures biogéniques
vulnérables en provoquant d'importants dégâts. Ces filets peuvent par ailleurs avoir un effet de
pêche fantôme majeur (l'engin de pêche perdu en mer continue de capturer des poissons,
lesquels sont mangés par des prédateurs qui nettoient le filet). Si les conséquences d'une
palangre unique sont mineures en comparaison avec un chalut remorqué, les engins passifs
peuvent néanmoins avoir un impact significatif à long terme. Les coraux d'eau froide et autres
communautés d'organismes benthiques créant des structures tridimensionnelles sur le fond
marin abritent une grande diversité d'espèces. Les écosystèmes particuliers générés par les
monts sous-marins sont encore méconnus, mais semblent favoriser les concentrations de
poissons (béryx communs (Beryx decadactylus) sur la dorsale médio-atlantique, qui ont été
exploités de manière non viable, par exemple). L'impact du chalutage sur les zones
sédimentaires n'est pas considéré comme un problème majeur.
Mesures réglementaires - Tant les zones marines protégées (ZMP) visant à protéger l'habitat
benthique (monts de Darwin, par exemple) que les fermetures spatiales à des fins de gestion de
la pêche (zones d'interdiction de pêche de l'hoplostète orange à l'ouest de l'Irlande, par exemple),
y compris en haute mer, assurent la conservation de tous ces habitats et de la diversité.
Il est probable que les prises accessoires capturées en petites quantités ne sont pas correctement
déclarées (en étant déclarées en tant qu'espèces diverses, par exemple). Les espèces hors quota
peuvent en outre favoriser la manipulation des chiffres des espèces soumises à quota. Au
paragraphe 96 des directives de la FAO (FAO, 2007), les experts laissent entendre qu'il est
possible de protéger les espèces non visées en recourant à des «quotas de prises accessoires», ce
qui pourrait contribuer à améliorer l'efficacité de la surveillance de ces espèces.
PE 389.606
2
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
1.2. Gestion des stocks d'eau profonde dans l'UE, par Philip Large
Définition - La plupart des espèces de poissons d'eau profonde se caractérisent par une longue
durée de vie, une croissance lente et une faible capacité de reproduction et sont adaptées aux
écosystèmes pauvres en énergie. L'hoplostète orange est souvent cité comme une espèce d'eau
profonde type. Si l'on considère sa durée de vie extrêmement longue (jusqu'à environ 200 ans) et
sa croissance très lente, il constitue toutefois un cas extrême. À titre comparatif, il existe des
espèces d'eau profonde affichant une croissance relativement rapide et une espérance de vie
moyenne (environ 20-30 ans; lingue bleue et sabre noir, par exemple). Certaines pêches sont
ciblées sur des espèces spécifiques, mais la plupart sont des pêches mixtes visent plusieurs
espèces. Certaines pêches au chalut visent une seule espèce et ont des taux de prises accessoires
d'autres espèces relativement faibles (pêches ciblées sur les regroupements de reproducteurs de
la lingue bleue et les regroupements de l'hoplostète orange à des fins de reproduction et
d'alimentation). Enfin, d'autres pêches au chalut sont des pêches d'espèces mixtes et visent des
stocks variant en fonction de la saison et de la profondeur de la pêche.
Efficacité des TAC – Le chalutage en eau profonde a connu une expansion rapide depuis les
années 1970, en raison, d'une part, de l'amélioration des marchés et, d'autre part, de la surpêche
des stocks de poissons traditionnels du plateau continental et du cadre de gestion toujours plus
restrictif. En revanche, les stocks d'eau profonde sont restés dans une large mesure inexploités et
non réglementés jusqu'en 2003. De ce fait, ces pêches ont été très mal gérées par le passé et la
décision de les gérer avec plus de prudence a souvent été prise une fois les stocks épuisés. Une
solution pour assurer la bonne gestion de ces pêches pourrait consister à combiner efforts de
pêche, contrôles des captures et gestion spatiale. L'effort de pêche en eau profonde doit faire
l'objet d'une attention beaucoup plus importante que la pêche sur le plateau continental, compte
tenu du caractère limité des résultats des évaluations des stocks et des problèmes que pose la
gestion de pêches mixtes à l'aide de TAC. En effet, l'amélioration de la rentabilité de la pêche
doit encore faire l'objet d'un examen minutieux. Dans ce contexte, les mesures de gestion
introduites dans l'UE constituent clairement un pas dans la bonne direction, même si leur portée
et leur teneur ne sont pas suffisamment rigoureuses pour réduire l'exploitation à des niveaux
viables.
En vue de répondre aux préoccupations concernant la réglementation des pêches nouvelles et
existantes, la Commission pourrait envisager d'élargir la réglementation actuelle en matière de
TAC à l'ensemble des espèces répertoriées à l'annexe II du règlement CE n° 2347/2002 du
Conseil du 16 décembre 2002. Cela permettrait de diminuer le nombre de fausses déclarations
tout en empêchant le développement de nouvelles pêches. Tous les TAC concernant des espèces
qui ne sont actuellement pas exploitées doivent être fixés à des niveaux très bas jusqu'à ce qu'il
soit établi qu'une capture plus importante est viable.
Comportement des stocks - Le rythme de reconstitution des stocks est tellement lent que toute
réduction de l'exploitation de certaines espèces doit être considérée comme une mesure
permanente et non comme un moyen de restaurer les stocks dans la perspective d'accroître, à
plus long terme, leur taux d'exploitation. D'après les avis entendus lors de l'atelier, cette stratégie
doit être complétée par l'identification des espèces qui, compte tenu de leur vulnérabilité, ne
doivent pas être exploitées, ainsi que des espèces moins vulnérables à l'exploitation et capables
de soutenir une exploitation à plus long terme (lingue bleue, par exemple).
Accès aux données – L'expérience acquise lors des évaluations des stocks d'eau profonde a
démontré que les évaluations étaient plus fiables lorsque des données d'enquête indépendantes
étaient disponibles. Ces données sont toutefois rares dans l'Atlantique du NE. Le CIEM a
notamment proposé d'enregistrer les principales zones et espèces par le biais d'enquêtes dédiées
coordonnées au niveau international, avancé des propositions en vue de coordonner les enquêtes
3
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
existantes sur les eaux profondes et formulé des recommandations pour le développement de
nouvelles enquêtes. Des progrès dans ces différents domaines sont en effet nécessaires en vue
d'accroître la fiabilité et la solidité des évaluations et d'atteindre la PME. Sans cela et si la pêche
se poursuit sans relâche, la qualité de la gestion des stocks d'eau profonde par l'UE risque d'être
gravement menacée.
L'un des principaux défauts de la législation européenne en matière de licence des eaux
profondes est l'absence de stratégie d'échantillonnage pour les stocks d'eau profonde, ce qui
signifie que même si les exigences relatives à la mise en œuvre d'un plan d'échantillonnage sont
remplies, les données recueillies risquent d'être de mauvaise qualité ou difficiles à obtenir auprès
des différents États membres. Une amélioration des méthodes d'évaluation est nécessaire. À
cette fin, il est impératif que les États membres et la CE allouent des ressources suffisantes pour
l'échantillonnage. Enfin, il est proposé d'interdire progressivement la pêche d'espèces/stocks
vulnérables et/ou qui ne peuvent pas être contrôlés de manière efficace.
Mesures techniques - Les organes de gestion de la pêche de l'Atlantique du NE reconnaissent
que des mesures techniques telles que la réglementation du maillage et les grilles de sélectivité
ont peu de chances d'être efficaces pour la pêche en eau profonde, compte tenu de la forme et de
la taille inhabituelles de certaines espèces et des blessures subies par un grand nombre des
poissons pénétrant dans les chaluts et s'en échappant ensuite par les mailles.
Toutes les espèces de poissons d'eau profonde ramenées à la surface de la mer risquent en outre
de mourir d'un choc bathymétrique dû au changement de pression. Les données chronologiques
sur les rejets d'espèces d'eau profonde sont cependant rares. La CE est en train de revoir sa
politique en matière de rejets, l'une des options envisagées étant l'interdiction totale de ceux-ci.
Une telle option pourrait jouer un rôle crucial dans la gestion future de la pêche en eau profonde.
Interdiction - En ce qui concerne les navires de haute mer de l'UE pêchant dans l'Atlantique du
NE, la Commission pourrait examiner la faisabilité ou l'opportunité d'interdire la pêche à l'aide
d'engins de fond à des profondeurs supérieures à 2000 mètres. Une telle mesure irait dans le
sens de l'approche de précaution et des mesures de gestion similaires adoptées dans d'autres
parties du monde. Elle n'aurait en outre aucun impact sur le secteur dans la mesure où la pêche
est quasiment inexistante à de telles profondeurs.
Pêche à petite échelle - D'après les commentaires entendus, de nombreuses pêches artisanales
en eau profonde existent de longue date et pourraient être viables à l'échelle locale. Il est
important de ne pas y mettre fin de manière sommaire sans avoir mûrement réfléchi à leurs
bienfaits sociaux à cause de l'application de mesures de gestion générales visant à contrôler
d'autres pêches hauturières hautement mécanisées dans d'autres parties de l'Atlantique du NE.
1.3. Gestion des pêches en eau profonde dans des zones situées en dehors de la juridiction
nationale, par Matthew Gianni
Historique - Ces dernières années, la pêche en eau profonde hauturière s’est principalement
étendue du côté du Japon et de l'ex-URSS. Dans le Pacifique Sud, la Nouvelle-Zélande s'est
montrée particulièrement active dans ce domaine. En termes de volume, la majorité des captures
démersales hauturières se font toujours dans l'Atlantique du Nord, principalement par des
navires de pêche de la Communauté européenne. La pêche démersale par les chalutiers de fond
se déroule essentiellement en haute mer. Outre la pêche palangrière à la légine australe dans les
mers australes, la pêche hauturière à la palangre et à la ligne de fond d'espèces d'eau profonde
(flétan noir, vivaneau laflamme et rouffe à nez bleu, notamment) s'est développée dans
l'Atlantique NE, l'océan Indien et le Pacifique Sud. Des biologistes du secteur de la pêche, des
scientifiques spécialisés dans les eaux profondes, des écologistes, etc. ont fait part de leur
PE 389.606
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
inquiétude croissante face à l'absence de viabilité des pêches en eau profonde et des dégâts
provoqués par celles-ci sur les espèces et écosystèmes d'eau profonde sensibles tels que les
coraux d'eau froide, les monts sous-marins et les éponges, en particulier dans les hautes mers où
les niveaux de réglementation et de contrôle sont très faibles.
Les déficiences et lacunes de la législation suscitent également de nombreuses inquiétudes. En
effet, seules 5 zones de haute mer sont couvertes par des ORGP (OPANO, CPANE, CCAMLR,
OPASE et CGPM). Le rapport conclut que la pêche hauturière au chalut de fond en eau
profonde se caractérise par un épuisement périodique des stocks de poissons visés; une pêche
non réglementée et non déclarée; l'absence de contrôle des pêches nouvelles et exploratoires;
des engins et pratiques nuisibles à l'environnement; et l'absence quasi totale de protection des
habitats sensibles ou de la biodiversité. Ce type de pêche a été mené en totale contradiction
avec, ou en violation de, l'accord des Nations unies sur les stocks de poissons de 1995 et le Code
de conduite pour une pêche responsable de la FAO. Ainsi, dans l'océan Indien, la pêche du
béryx commun se poursuit en dehors de toute réglementation, malgré une amélioration de la
situation grâce au récent accord de pêche dans le sud de l'océan Indien.
Niveau de capture - D'après un rapport publié par l'UICN sur la pêche hauturière au chalut de
fond, les captures totales de cette pêche s'élevaient à environ 170 000 mt – 215 000 mt en 2001
(ce qui représente environ 0,2 % des captures mondiales de poissons en mer en 2001) pour une
valeur d'environ 280-320 millions USD (soit moins de 0,5 % de la valeur des captures
mondiales de poissons en mer pour 2001). Le rapport estime à environ 300 le nombre de
chalutiers de fond en haute mer en 2001 (contre environ 3,1 millions de bateaux de pêche au
niveau mondial) et affirme que la contribution de ce type de pêche à la sécurité alimentaire
mondiale est quasiment nulle. Le rapport conclut en indiquant que onze pays étaient à l'origine
de 95 % des captures au chalut de fond en haute mer en 2001, les États membres de l'Union
européenne (États baltes compris) réalisant environ 60 % de ces captures. D'après les
estimations, les prises accessoires non déclarées seraient très élevées. D'une manière générale,
les données disponibles sur les stocks d'eau profonde (biologie, reproduction, identité des stocks
et pêche) sont très peu nombreuses.
Subventions – D'après les estimations, les subventions versées aux flottes de chalutiers de fond
de haute mer s'élèvent à environ 150 millions USD par an. L'étude conclut que, sans
subventions, ces flottes subiraient des pertes d'environ 50 millions USD par an. La plupart des
subventions semblent destinées à l'approvisionnement en carburant.
Vulnérabilité des écosystèmes – La haute mer présente un large éventail de caractéristiques
topographiques, dont des récifs coralliens, des champs d'éponges et des écosystèmes de monts
sous-marins. On entend généralement par monts sous-marins des montagnes d'une hauteur d'au
moins 1000 mètres situées sous l'eau. Si l'on s'en tient à cette définition, il y aurait entre 50 000
et 100 000 monts sous-marins de par le monde, dont la moitié en haute mer. Bien que très peu
de monts sous-marins aient été étudiés, il semble qu'ils présentent une très grande biodiversité.
On estime qu'environ 30-50 % des récifs coralliens Lophelia d'eau froide de la ZEE norvégienne
ont été endommagés ou détruits par le chalutage de fond. En un an, les chalutiers pratiquant la
pêche de l'hoplostète orange en Australie ont ramené deux fois plus de coraux que de poissons.
Or la restauration de ces coraux peut prendre des centaines d'années.
Résolution des Nations unies – Rares sont les réglementations qui s'appliquent aux eaux
profondes des hautes mers. Après une première résolution publiée en 2004, l'Assemblée
générale de l'ONU a adopté en décembre 2006 une résolution invitant les pays pratiquant la
pêche en haute mer et les organisations régionales de gestion des pêches à réaliser des
évaluations des impacts négatifs sur les écosystèmes marins vulnérables d'eau profonde et la
viabilité à long terme des stocks de poissons d'eau profonde. La résolution réclame l'interdiction
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
de la pêche de fond dans toutes les zones de haute mer où de tels écosystèmes ont été repérés ou
pourraient exister, à moins que les pays concernés par ce type de pêche ne démontrent que leurs
navires de pêche n'auront aucun impact négatif sur les écosystèmes d'eau profonde.
L'avenir - Au travers de la résolution de l'Assemblée générale, l'ensemble des pays pratiquant la
pêche en haute mer s'engagent à gérer la pêche en eau profonde et à protéger la biodiversité des
eaux profondes conformément à la législation internationale. Reste à voir si et dans quelle
mesure les États pavillons et les organisations régionales de gestion des pêches (ORGP)
appliqueront la résolution. Certaines ORGP ont adopté des mesures pour protéger certaines
zones de haute mer de la pêche au chalut de fond. Ainsi, en 2004, la Commission des pêches de
l'Atlantique du Nord-est (CPANE) a accepté de fermer temporairement cinq zones - quatre
zones de monts sous-marins et une partie de la dorsale médio-atlantique - à tout type de pêche
de fond jusqu'en 2007. La CPANE a en outre accepté de fermer plusieurs zones le long des
bancs Hatton et Rockall en 2005 et 2006 afin de protéger des zones connues de coraux d'eau
froide, bien que le CIEM et la Commission OSPAR lui aient conseillé de fermer d'autres zones.
En 2005, la Commission générale des pêches pour la Méditerranée (CGPM) a interdit le
chalutage de fond en-dessous de 1000 mètres et, en 2006, elle a fermé trois zones
supplémentaires à ce type de pêche – un mont sous-marin à l'est de la Méditerranée, un
suintement froid au large des côtes d'Égypte et un récif corallien d'eau froide au large des côtes
italiennes.
L'Assemblée générale a demandé l'application de l'intégralité de la résolution d'ici
décembre 2008 à toutes les pêches de fond en haute mer et pourrait recommander d'autres
actions, dont des moratoires, dans les zones ou les cas où les États ou les ORGP n'ont pas
introduit des mesures efficaces à l'occasion d'un nouvel examen de la situation par l'Assemblée
générale de l'ONU prévu en 2009.
La proposition de la CE adoptée en octobre 2007 en vue de protéger les écosystèmes d'eau
profonde est la bienvenue et constitue un pas dans la bonne direction. Il est impératif d'adopter
une approche de précaution vis-à-vis de la gestion des stocks d'eau profonde. La position de
leader adoptée par l'UE par rapport à la future législation sur la pêche illicite, non déclarée et
non réglementée, aux rejets et à la protection des écosystèmes d'eau profonde est capitale pour
donner un nouvel élan au niveau international et doit continuer dans cette voie.
1.4. Processus réglementaire en vue de la gestion des pêcheries d'eau profonde, par Maria
de la Fuensanta Candela Castillo
Directives de la FAO - Lors de la deuxième consultation d'experts sur les directives
internationales concernant la gestion de la pêche hauturière en eaux profondes (Bangkok, 1114 septembre 2007) organisée par la FAO, le Comité des pêches a publié un projet de document
visant à conseiller les États et les organisations régionales de gestion des pêches (ORGP). Ce
document, qui contient 138 recommandations, représente la contribution de la FAO à la mise en
œuvre de la résolution 61/05 des Nations unies (ONU), qui vise à protéger les écosystèmes
marins vulnérables. Il s'intitule: «Projets de directives internationales sur la pêche hauturière en
eaux profondes».
Processus de la FAO et de l'UE - Ce processus de la FAO, initié en 2003, a été précédé d'un
paquet législatif préliminaire de l'Union européenne en 2001-2002 qui fait de l'UE un précurseur
dans ces domaines. Le problème au cours de cette phase préliminaire, où les connaissances
scientifiques étaient peu nombreuses, était de parvenir à instaurer une approche plus préventive
vis-à-vis de la gestion des stocks de poissons d'eau profonde. La FAO ne s'est attaquée de façon
sérieuse à ce problème que lors du 25e Comité des pêches en 2005, à l'occasion duquel elle s'est
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
penchée sur les conséquences environnementales potentiellement nuisibles de la pêche en eau
profonde afin de préparer des directives préliminaires sur leurs impacts sur la biodiversité.
Cette sensibilisation s'est encore renforcée en 2006 lorsque la FAO a défini quatre actions
prioritaires dans ce domaine: intensifier la collecte de données, améliorer les connaissances
relatives au comportement et à l'état des stocks, décrire correctement les écosystèmes et
développer un cadre conceptuel réglementaire pour la gestion des stocks en vue de leur
conservation.
L'avenir - Le projet va à présent être soumis aux États et à la Commission européenne. Après
une nouvelle consultation technique (février 2008) à laquelle l'UE sera associée, le projet sera
soumis au 28e Comité des pêches de la FAO à l'automne 2008, avant d'être officiellement adopté
par le Conseil de la FAO. Ces directives seront ensuite intégrées au «Code de conduite pour une
pêche responsable» global de la FAO.
Les recommandations - D'un point de vue pratique, ce projet de directives comprend
essentiellement des recommandations techniques et réglementaires. Il constitue en quelque sorte
un compendium d'outils existants et éprouvés. Les experts y ont toutefois introduit une nouvelle
proposition concernant l'évaluation des impacts. Les aspects techniques se penchent sur l'impact
de la pêche sur l'environnement et sur la gestion des stocks. Les principaux problèmes
techniques soulevés lors de la deuxième consultation étaient les suivants:
- Établir une définition commune de la pêche en eau profonde. Les experts ont comparé
les avantages d'une limite physique fixée à 400 mètres de profondeur, en-dessous de
laquelle un stock peut être considéré comme «d'eau profonde», avec une définition
biologique basée sur la vulnérabilité des stocks à la pêche. Il est ressorti des discussions
que la vulnérabilité, mesurée par la prédisposition à des altérations et par le temps
nécessaire pour la reconstitution, constituait un outil plus efficace que la profondeur pour
protéger les stocks menacés.
- Envisager l'éventuelle interdiction de tout dispositif de pêche (en particulier les engins)
susceptible d'entrer en contact avec le fond marin et de détruire des habitats fragiles.
Cette disposition vise plus particulièrement les activités de chalutage.
- Limiter l'effort de pêche, en particulier dans le cadre des pêches mixtes. L'absence de
données fiables permettant de garantir la gestion équilibrée des stocks constitue un
problème majeur. Des droits de pêche exclusifs et durables pourraient être accordés en
guise de mesure d’incitation afin d'encourager les pêcheurs à partager les données en
leur possession sur les pêches en eau profonde, à condition d'être conformes avec la
législation internationale et d'associer les ORGP. (Voir le paragraphe 87 des directives
de la FAO (FAO, 2007).)
- Étudier la possibilité d'établir des quotas pour les espèces non visées afin de limiter les
rejets.
Les principaux problèmes de gestion soulevés lors de la deuxième consultation étaient les
suivants:
- Élaborer des plans de gestion pluriannuels respectant les exigences minimales en matière
de pêche en eau profonde durable.
- Utiliser dans la mesure du possible le SSN pour surveiller et contrôler les activités de
pêche et amener les États à publier des informations sur les navires battant leur pavillon.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
- Amener les États et les ORGP à procéder à des évaluations d'impact afin de déterminer
si ces activités sont de nature à produire des effets négatifs sur les stocks visés, mais
aussi sur les écosystèmes vulnérables. À titre d'exemple, le paragraphe 66 des directives
de la FAO donne des conseils sur la manière de mener des évaluations d'impact afin de
protéger les écosystèmes marins fragiles.
- Interdire la pêche en l'absence de réglementation.
2. Procès-verbal de la discussion
2.1. Remarques formulées par les membres de la commission de la pêche:
Rosa Miguelez Ramos (ES, vice-présidente)
Cet atelier a été l'occasion d'émettre des avis parfaitement raisonnés. Il est clair que nous
opérons dans un contexte caractérisé par (i) des connaissances insuffisantes et (ii) la nécessité de
prendre des décisions afin de protéger à la fois les stocks de poissons et les pêcheurs. Le rapport
de la CE aborde la problématique de l'inefficacité des mesures de gestion existantes. Les experts
ont soulevé de nombreuses questions et il est de notre devoir de prendre des mesures dans le
cadre du principe de précaution. Les principales questions sont: comment déterminer les espèces
nécessitant un statut de protection particulier, comment améliorer la connaissance de ces espèces
afin d'optimiser leur niveau de capture, pourquoi les quotas ne sont dans bien des cas pas utilisés
et comment éviter les rejets.
Struan Stevenson (RU)
Cet atelier confirme que la pêche en eaux profondes est destructrice et non viable. Une
évaluation économique est toutefois nécessaire en vue de mieux comprendre les problèmes
auxquels sont confrontés les pêcheurs, qui n'étaient pas présents cette fois-ci.
Les rejets, qui peuvent représenter jusqu'à 90 %, constituent un problème très grave qu'il
convient de résoudre rapidement.
Les informations disponibles sont toutefois insuffisantes pour résoudre le problème de la gestion
des stocks et de la protection des écosystèmes.
Le zonage des pêches dans le but d'identifier les zones d'interdiction apparaît comme un outil à
développer plus avant. Dans certaines zones, il convient d'interdire les engins entrant en contact
avec le fond marin. À cet égard, l'interdiction du chalutage à des profondeurs supérieures à
2000 mètres constitue un pas dans la bonne direction. Cette mesure doit par conséquent être
rapidement mise en œuvre, avant que de nouvelles pêcheries ne se développent.
Paulo Casaca (PT)
Les Açores ont une longue tradition de pêche en eaux profondes et les nombreuses
améliorations apportées à la législation pourraient servir d'exemples pour les décisions futures
de l'UE. C'est notamment le cas de la pêche à l'hoplostète orange, qui a été interdite après qu'une
étude d'impact a démontré sa non-viabilité.
La pêche artisanale et le label écologique sont deux solutions en vue de garantir l'exploitation
viable de ces stocks.
Carmen Fraga Estévez (ES)
La pêche patagonienne dans les mers internationales au large des côtes d'Argentine, qui vise le
merlu et le calmar, pose un problème politique dans la mesure où aucune ORGP n'est chargée de
prendre des décisions à ce sujet.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Des mesures doivent par ailleurs être prises concernant le chalutage à des profondeurs
inférieures à 40 mètres visant des espèces non couvertes par les directives de la FAO.
2.2. Commentaires des experts aux questions soulevées par le président et le viceprésident
Q - Le cas patagonien: quels sont les outils disponibles?
* Candela Castillo: Les directives techniques élaborées par la FAO peuvent être
appliquées puisque ces pêches se déroulent en haute mer, utilisent des chalutiers et opèrent
dans des écosystèmes vulnérables. Les directives de la FAO ne constituent qu'un document
parmi d'autres et d'autres recommandations peuvent être utilisées (recommandation sur la
sélectivité des filets, par exemple).
Q - Comment faire face au problème des rejets, en particulier dans le cas de pêches mixtes
(pour passer à un modèle basé sur les flottes)? Quels sont les niveaux réels de ces rejets?
* Lorance: Le niveau indiqué a été déterminé par diverses études ponctuelles et plusieurs
évaluations scientifiques indépendantes. Un niveau de 90 % est considéré comme non
viable d'un point de vue économique et a peu de chances de pouvoir constituer une
moyenne.
* Large: Une telle estimation est difficile dans la mesure où elle varie en fonction des
saisons, du type d'engin utilisé et du type de navire. Le principal problème est que les
données temporelles concernant les évaluations des stocks sont insuffisantes et que les
évaluations actuelles sont vraisemblablement sous-estimées. Des enquêtes indépendantes
sont indispensables pour affiner les évaluations des scientifiques, de même que des
enregistrements plus précis des poissons qui n'ont pas été débarqués par les navires de
pêche.
Q - Le chalutage à des profondeurs supérieures à 2000 mètres doit-il être interdit?
* Large: Des discussions sont en cours au sein des ORGP. Les OPANO envisagent
d'adopter des mesures afin de limiter la pêche démersale à certaines profondeurs, mais
aucune décision n'a encore été prise. Des données SSN seraient très utiles pour rationaliser
ces données, mais elles sont indisponibles.
* Gianni: La CGPM (GFCM, 2007) a d'ores et déjà décidé d'interdire le chalutage à des
profondeurs supérieures à 1000 mètres. Le principe de précaution doit être utilisé de
manière étendue afin d'éviter la destruction irrémédiable de certains environnements. Quoi
qu'il en soit, des études complémentaires seront ensuite nécessaires pour déterminer les
endroits où la pêche n'est pas nuisible.
Q - Les zones d'interdiction semblent être un outil intéressant. Mais elles affecteront également
la disponibilité de données. Les zones d'interdiction doivent-elles être de taille réduite et/ou
temporaires?
* Large: Les zones d'interdiction pourraient avoir un impact, en particulier dans le cas de
regroupements de poissons (regroupement de lingues bleues à des fins de reproduction, par
exemple). Mais pour pouvoir surveiller cet impact, il est indispensable de disposer de
données SSN. Par ailleurs, une telle interdiction ne doit constituer un moyen d’émettre des
revendications politiques.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
* Représentant de la CE: La fermeture de certaines zones doit s'appuyer sur des données
pertinentes concernant les effets d'une telle interdiction et la reconstitution des stocks. Une
telle approche a été développée au Maroc, mais a rencontré l'opposition du secteur. Des
programmes tels que POORFISH devraient apporter des réponses à cet égard.
Q - Existe-t-il un quelconque type d'analyse socio-économique de ce segment (en cas de
réglementation supplémentaire)?
* Représentant de la CE: Un projet financé par le biais d'un marché de la DG FISH est
actuellement mis sur pied pour répondre à ce problème. La politique de l'UE consiste à
discuter de ces problèmes avec les ORGP grâce à des contacts permanents.
3. Conclusions et recommandations
3.1. Biologie des espèces d'eau profonde, stocks et niveaux d'exploitation, approche
écosystémique
Limites géographiques ou biologiques - La limite de 400 mètres généralement utilisée dans le
cadre de la gestion des espèces d'eau profonde doit être considérée avec prudence. Tout type de
généralisation doit par ailleurs être évité. Le fait qu'une espèce d'eau profonde soit également
présente à des profondeurs inférieures à 400 mètres ne doit pas empêcher sa réglementation par
des directives applicables aux espèces d'eau profonde. Une réglementation basée sur les
caractéristiques biologiques de la population visée plutôt que sur sa localisation géographique
habituelle serait sans doute plus efficace. Cela permettrait notamment d'éviter l'exclusion de la
liste de certaines espèces qui ne sont pas considérées comme vivant en eaux profondes.
Les principales caractéristiques biologiques à prendre en compte sont celles qui affectent la
PME. Compte tenu du peu d'informations recueillies sur ces espèces, un modèle permettant de
définir les valeurs de PME adéquates doit encore être développé. Des recherches
complémentaires sont clairement nécessaires. À cet égard, compte tenu de leur imprécision, il
convient d'adopter des niveaux bas de captures. Au vu des caractéristiques biologiques des
espèces d'eau profonde, qui expliquent le taux de reconstitution très lent après un impact, les
niveaux de capture doivent être envisagés sur le long terme et peuvent difficilement être
considérés comme une mesure transitoire en faveur de la reconstitution des stocks.
Spatialisation - Les mouvements de poissons, tels que le comportement et le regroupement de
poissons à des fins de reproduction (ligue bleue, par exemple) ou d'alimentation sur les monts
sous-marins (béryx, par exemple), doivent être pris en compte à l'heure d'élaborer des
réglementations en matière de gestion. Une fois de plus, les informations disponibles sont
insuffisantes pour décrire ces caractéristiques au sein de certains stocks et dans certaines zones.
Des études complémentaires doivent par conséquent être réalisées afin d'évaluer les relations
spatio-temporelles adéquates avant d'adopter une réglementation appropriée pour la gestion de
la pêche.
Impact sur l'environnement - De manière générale, on estime aujourd'hui que l'impact ne se
limite pas aux stocks de poissons visés par la pêche. Ce point de vue a donné naissance au
concept d'approche écosystémique de la pêche. Si les fonds de pêche des zones côtières sont
gravement affectés depuis des siècles, ce n'est que récemment que cet impact s'est fait ressentir
dans les eaux profondes. Il semble que les écosystèmes benthiques situés à de grandes
profondeurs soient plus vulnérables car ils reçoivent moins d'énergie de sources externes. De
même que les poissons d'eau profonde visés sont généralement plus vulnérables, certains des
écosystèmes qui les accueillent sont plus fragiles. Les mêmes directives de base doivent par
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
conséquent être appliquées aux écosystèmes, sur la base d'études approfondies de ces
écosystèmes et de la cartographie des écosystèmes devant faire l'objet d'une exploitation plus
prudente, le cas échéant. Par exemple, le chalutage dans des zones sableuses/vaseuses n'est pas
considéré comme nuisible. Les initiatives de l'UE en faveur du développement d'une
planification spatiale constituent un pas dans la bonne direction, mais exigeront un effort
important en termes de ressources dégagées. Par ailleurs, c'est à la réglementation d'imposer les
outils qui permettront de surveiller de près l'efficacité des mesures.
À cet égard, l'approche écosystémique doit impérativement être adaptée à ces zones car certains
impacts de la pêche sur l'environnement pourraient s'avérer irréversibles. Il est par conséquent
nécessaire de développer des indicateurs permettant d’évaluer l'impact existant, mais également
de permettre aux décideurs de déterminer la viabilité de tout impact supplémentaire. De tels
indicateurs sont actuellement développés dans le cadre du projet CORALFISH financé par le
7e programme-cadre et devraient être intégrés aux évaluations d'impact.
3.2. Réglementation: définition, application et contrôle
TAC - De l'avis de beaucoup, les TAC actuels ne sont pas parvenus, de manière générale, à
garantir l'exploitation viable des stocks d'eau profonde. Cela ne veut pas dire qu'ils doivent être
remplacés par d'autres mesures. Il semble au contraire qu'ils doivent évoluer dans deux
directions: (i) élargissement du nombre d'espèces couvertes par des TAC, même si le niveau de
capture est bas, et (ii) diminution des TAC. Une telle évolution devrait avoir un effet positif sur
les déclarations de débarquement. Il a par conséquent été recommandé de réduire de manière
significative le niveau des TAC, de fixer des TAC peu élevés pour les nouvelles espèces,
conformément au principe de précaution, et de surveiller la pêche de manière à préserver la
possibilité d'une augmentation ultérieure des taux de capture. Enfin, il est proposé d'interdire
progressivement la pêche d'espèces/stocks vulnérables et/ou qui ne peuvent pas être contrôlés de
manière efficace.
Réglementation de l'effort - Une plus grande réglementation de l'effort de pêche doit également
être envisagée dans la législation future, à l'instar des TAC et de la gestion spatiale, car la
plupart des pêches en eau profonde sont en fait des pêches mixtes (pour lesquelles il est
généralement difficile d'appliquer correctement les TAC, avec pour conséquence un nombre
élevé de rejets non déclarés de poissons commerciaux et autres) et couvrent des zones étendues
(où bon nombre des espèces cibles couvertes par des TAC et des quotas ne sont pas des espèces
d'eau profonde). Les sous-zones et les divisions établies par le CIEM présentent une résolution
spatiale inadaptée à la gestion de ces pêches, qui présentent des variations importantes au niveau
de la profondeur et des caractéristiques des écosystèmes. Une gestion spatiale plus précise
combinée à une interdiction des rejets permettrait de protéger les stocks tout en autorisant les
pêcheurs à capturer les quotas fixés. Tous les pays membres doivent être invités à déclarer les
captures et les efforts par rectangle statistique au CIEM.
Gestion spatiale - L'intérêt potentiel des ZMP n'est plus remis en cause. Les ZMP incluent des
zones de non-prélèvement, des zones d'interdiction temporaires pour toutes les espèces ou une
espèce particulière, des zones dans lesquelles certaines activités sont interdites, etc. Elles sont
essentiellement perçues comme un outil destiné à préserver l'environnement d'origine ou à
permettre la reconstitution de l'écosystème. Elles ont bien souvent été délimitées alors que
l'environnement avait déjà subi des impacts importants. Elles sont en outre rarement considérées
comme un outil de gestion de la pêche, ce qui n'aide pas le secteur de la pêche à en comprendre
le concept. Leur effet réel est toutefois remis en cause en raison du manque d'informations les
concernant et du fait qu'elles apparaissent essentiellement comme une application trop stricte du
principe de précaution. La taille, la localisation, la densité, les conséquences biologiques, les
activités à autoriser (enquête scientifique, par exemple), la durée et les objectifs de gestion sont
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
quelques exemples de caractéristiques qui n'ont pas encore été fixées et qui nécessitent des
recherches complémentaires.
Principe de précaution et évaluation d'impact - Des évaluations d'impact ont été proposées par
l'ONU afin de réglementer l'accès aux ressources halieutiques en haute mer. L'UE et ses États
membres ont introduit cette obligation pour toute une série d'activités sur terre ou dans la zone
côtière. La perspective de pouvoir appliquer cet instrument extrêmement performant à des cas
où une exploitation non viable est redoutée doit être développée, en utilisant par exemple le
modèle pressions-état-impact. Celui-ci est en effet à même de prendre en compte à la fois les
réponses de l'écosystème et le niveau d'exploitation grâce à la combinaison des connaissances
scientifiques, des besoins industriels et des obligations réglementaires.
Dans un tel contexte, la méthode d'exploitation sera un critère essentiel. La réglementation doit
viser à protéger une forme de pêche viable. La pêche artisanale peut par exemple être autorisée
là où le chalutage ciblé sur les mêmes espèces est interdit. Une telle décision pourrait facilement
être prise grâce à évaluation d'impact, alors que la mise en place d'une réglementation précise
constituerait un véritable défi. Toute réglementation doit prendre en compte les spécificités des
engins, les écosystèmes concernés et les espèces visées. Cela signifie que tous ces paramètres
doivent être connus simultanément, ce qui n'est pas toujours le cas.
En l'absence des informations nécessaires, le principe de précaution doit prévaloir. L'application
immédiate de ce principe pourrait se traduire par l'interdiction de la pêche au chalut à des
profondeurs supérieures à 2000 mètres. Compte tenu de l'effort de pêche relativement limité
dans ces zones, l'impact économique serait peu important, alors que les conséquences pour
l'écosystème pourraient être énormes. Des décisions de ce type ont d'ores et déjà été prises par
certaines ORGP et l'UE doit à présent faire en sorte que toutes les ORGP adoptent une telle
stratégie. Enfin, la réduction des subventions accordées aux pêches non viables en tant qu'outil
de gestion se doit d'être étudiée.
3.3. Collecte de données et amélioration des connaissances
Évaluations des stocks - La structure des stocks de la plupart des espèces reste méconnue, ce
qui affaiblit considérablement la qualité des évaluations. Les efforts de recherche en vue de
produire une évaluation quantitative des stocks de poissons d'eau profonde doivent se poursuivre
et être intensifiés. De même, les analyses des pêches mixtes doivent être approfondies en plaçant
des observateurs à bord des navires afin qu'ils collectent des données pertinentes sur le lieu
même des opérations de pêche (chalutiers individuels ou palangres) de manière à déterminer
dans quelle mesure la pêche d'une espèce individuelle ou d'un ensemble d'espèces peut être
autorisée. Dans ce contexte, les enquêtes indépendantes constituent un outil extrêmement
précieux dans la mesure où elles fournissent des informations capitales en vue de réaliser des
évaluations précises.
Calcul de la PME - Il est actuellement impossible de procéder à des évaluations fiables de la
PME pour la plupart des stocks d'eau profonde, en raison du peu de données disponibles pour
les évaluations et de l'absence quasi totale de données temporelles issues d'enquêtes
indépendantes pour affiner les évaluations. Il y a peu de chances que la PME de la plupart des
stocks puisse être déterminée au cours des prochaines années. Ces problèmes doivent être pris
en charge dès à présent si l'on veut pouvoir disposer d'estimations fiables de la PME d'ici
à 2015, ainsi que requis par la Conférence de Johannesburg. Ces données doivent être obtenues
par le biais de données indépendantes sur la pêche et d'enquêtes sur la ponte, le chalutage et
l'acoustique, lesquelles permettront de disposer d’une série chronologique. Des fonds et des
informations supplémentaires doivent par conséquent être mis à la disposition de la recherche.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Rejets - Il est impératif de collecter des données sur les rejets de manière plus large qu'à l'heure
actuelle et de les diffuser dans un format utilisable à des fins d'évaluation et d'analyse des
impacts de la pêche. Des estimations indépendantes des stocks visés et non visés doivent par
ailleurs être réalisées afin de consolider ces données commerciales.
Obtention de données SSN - Du point de vue de la gestion spatiale, les données SSN
constituent des outils extrêmement précieux en vue de réaliser des estimations plus précises de
la répartition des poissons (regroupement de lingues bleues pour la reproduction, par exemple)
et d'obtenir des estimations fiables sur la répartition de l'effort de pêche. Ces données sont
essentielles non seulement pour estimer la localisation géographique et saisonnière des poissons,
mais également pour évaluer le moment idéal pour appliquer l'interdiction et réduire ainsi la
mortalité des poissons lorsque celle-ci est trop élevée (lingue bleue, par exemple). Des
estimations précises de l'effort basées sur des données SSN permettraient en outre d'accroître
considérablement la fiabilité des évaluations des stocks de la plupart des espèces.
Zones protégées – Dans un tout premier temps, il est essentiel de cartographier avec précision
les zones à protéger, ainsi que de procéder à la description des ensembles concernés afin de
déterminer leur niveau de vulnérabilité. Une bonne connaissance de leurs caractéristiques
écologiques et de la dynamique des contraintes environnementales qui en résultent est la seule
manière de prédire la réponse de ces zones à différentes pressions. Le Livre bleu de la CE sur la
politique maritime propose de réaliser une telle cartographie des mers européennes. D'autre part,
la création de zones d'interdiction ou protégées doit s'accompagner de programmes chargés
d'évaluer leurs conséquences sur le déplacement de l'effort de pêche et sur les interactions et la
dynamique des stocks/habitats. Ces programmes devront par ailleurs déterminer si ces zones ont
un effet bénéfique sur les stocks de poissons.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Bibliographie
Commission européenne, 2007. Examen de la gestion des stocks de poissons d'eau profonde.
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FAO, 1995. Code de conduite pour une pêche responsable.
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GFCM, 2007. Resolution on the management of certain fisheries exploiting demersal and deepwater
fisheries. GFCM/2005/1.
Gianni, M., 2007. Management of deep-sea fisheries in areas beyond national jurisdiction. Document
d'information du Parlement européen, 34 p.
ICES, 2007. Report of the Working Group on Biology and Assessment of Deep-sea Fisheries Resources.
Conseil international pour l'exploration de la mer, Copenhague ICES CM 2007/ACFM:20, 486 p.
Large, P.A., 2007. EU management of deep-sea stocks. Document d'information du Parlement européen,
41 p.
Lorance, P., 2007. Deep-sea fisheries resources and ecosystems. Document d'information du Parlement
européen, 25 p.
ONU, 2006. La viabilité des pêches, notamment grâce à l'accord de 1995 aux fins de l'application des
dispositions de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 relatives à la
conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacement s'effectuent tant à l'intérieur
qu'au-delà de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de poissons grands
migrateurs, et d'instruments connexes. Assemblée générale des Nations unies, résolution 61/105.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
GESTION DES STOCKS D'EAU PROFONDE PAR L'UE
Philip A. LARGE
Contenu:
Cette présentation définit les stocks de poissons d'eau de mer et passe en revue les caractéristiques
biologiques des principales espèces. Elle résume également l'histoire des pêches en eau profonde
dans l'Atlantique du NE et décrit la situation des pêches européennes actuelles. Enfin, elle propose
une vue d'ensemble de la réglementation européenne en matière de stocks de poissons d'eau
profonde, en soulignant ses points forts et ses faiblesses. Des propositions y sont faites en vue de
l'étude de la structure des stocks, de la gestion des stocks d'eau profonde en général et de la lingue
bleue en particulier, de la gestion de la pêche et des rejets, de la réduction des fausses déclarations
de débarquement et de la gestion des engins de pêche démersale à des profondeurs supérieures à
2000 mètres.
IP/B/PECH/IC/2007-094
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PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Résumé
Cette présentation définit les stocks de poissons d'eau profonde et décrit l'étendue des
connaissances actuelles concernant la structure des stocks.
Elle passe par ailleurs en revue les caractéristiques biologiques et la répartition spatiale des
espèces de poissons d'eau profonde exploitées à des fins commerciales dans l'Atlantique du NE.
En effet, toutes les espèces d'eau profonde ne se caractérisent pas par une longue durée de vie et
une croissance lente, de sorte que certaines espèces peuvent supporter une pêche modeste. Cette
présentation se penche également sur les dernières recommandations du CIEM pour chaque
espèce, de même que sur les conseils applicables aux stocks d'eau profonde. Elle propose
ensuite un aperçu historique des pêches en eau profonde dans l'Atlantique du NE et examine,
pour chaque région, les pêches actuelles auxquelles participent des navires de l'UE.
Enfin, cette section propose une vue d'ensemble de la réglementation européenne présente et
passée en matière de stocks de poissons d'eau profonde, en soulignant ses points forts et ses
faiblesses. Une solution pour assurer la bonne gestion de ces pêches pourrait consister à
combiner efforts de pêche et contrôles des captures. L'effort de pêche en eau profonde doit faire
l'objet d'une plus grande attention que la pêche sur le plateau continental, compte tenu du
caractère limité des résultats des évaluations des stocks et des problèmes que pose la gestion de
pêches mixtes à l'aide de TAC. Les facteurs affectant la rentabilité de la pêche doivent toutefois
encore faire l'objet d'un examen minutieux. Dans ce contexte, les mesures de gestion introduites
dans l'UE constituent clairement un pas dans la bonne direction, même si leur portée et leur
teneur ne sont pas suffisamment rigoureuses pour réduire l'exploitation à des niveaux viables.
La présente section se penche ensuite sur le lien entre les évaluations des stocks par le CIEM et
la gestion des stocks d'eau profonde. L'expérience acquise lors des évaluations de ces stocks a
démontré que les évaluations étaient plus fiables lorsque des données d'enquête indépendantes
étaient disponibles. Le CIEM a notamment proposé d'enregistrer les principales zones et espèces
par le biais d'enquêtes spéciales coordonnées au niveau international, avancé des propositions en
vue de coordonner les enquêtes existantes sur les eaux profondes et formulé des
recommandations pour le développement de nouvelles enquêtes. Des progrès dans ces différents
domaines sont en effet nécessaires en vue d'accroître la fiabilité et la solidité des évaluations.
Sans cela et si la pêche se poursuit sans relâche, la qualité de la gestion des stocks d'eau
profonde par l'UE risque d'être gravement menacée.
Les organes de gestion de la pêche de l'Atlantique du NE reconnaissent que des mesures
techniques telles que la réglementation du maillage et les grilles de sélectivité ont peu de
chances d'être efficaces pour les pêches en eau profonde, compte tenu de la forme et de la taille
inhabituelles de certaines espèces et des blessures subies par bon nombre des poissons pénétrant
dans les chaluts et s'en échappant ensuite par les mailles.
D'après la Commission, la productivité de bon nombre de stocks d'eau profonde est tellement
faible que les niveaux durables d'exploitation sont trop faibles pour soutenir une pêche
économiquement viable. En outre, le rythme de reconstitution des stocks est tellement lent que
toute réduction de l'exploitation doit être considérée comme une mesure permanente et non
comme un moyen de restaurer les stocks dans la perspective d'accroître, à plus long terme, leur
taux d'exploitation. D'après les avis exprimés, cette stratégie doit être complétée par
l'identification des espèces qui, de par leurs caractéristiques biologiques et leur vulnérabilité à la
pêche, ne doivent pas être exploitées, ainsi que des espèces moins vulnérables à l'exploitation et
capables de soutenir une exploitation à plus long terme.
PE 389.606
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
D'un autre côté, le risque est grand pour l'ensemble des espèces de poissons d'eau profonde
ramenées à la surface de la mer de mourir d'un barotraumatisme (choc bathymétrique) dû au
changement de pression. Les données temporelles sur les rejets d'espèces d'eau profonde sont
cependant rares. Dans ce contexte, la CE est en train de revoir sa politique en matière de rejets,
l'une des options envisagées étant leur interdiction totale. Une telle option pourrait jouer un rôle
crucial dans la gestion future des pêches en eau profonde.
En ce qui concerne les points de référence de la biomasse des stocks d'eau profonde, le CIEM
n'est pas parvenu à se mettre d'accord sur les mesures à venir, de sorte que ce sujet devra sans
doute être soulevé par le CSTEP dans un proche avenir. La lingue bleue est généralement citée
en exemple lorsqu'il y a interaction entre la protection des habitats d'eau profonde vulnérables,
les zones d'interdiction visant à protéger le regroupement de reproducteurs et les problèmes de
gestion de la pêche sur le talus continental. Une étude récente a identifié les limites potentielles
maximales de reproduction de la lingue bleue du sud à l'ouest et au nord-ouest de l'Écosse.
Cependant, si des zones d'interdiction sont créées, il est probable qu'elles seront relativement
étendues et auront un impact considérable sur d'autres pêches essentielles. Une autre solution
consisterait à créer des zones d'interdiction beaucoup plus petites sur la base des données SSN
disponibles. L'une des zones proposées chevauche une autre zone d'interdiction existante
protégeant les coraux d'eau froide au niveau du banc Hatton. En cas d'introduction, ces zones
d'interdiction devront donc être saisonnières et avoir une durée limitée afin de réduire l'impact
sur d'autres pêches.
En ce qui concerne les navires d'eau profonde de l'UE pêchant dans l'Atlantique du NE, la
Commission pourrait examiner la faisabilité ou l'opportunité d'interdire la pêche à l'aide d'engins
de fond à des profondeurs supérieures à 2000 mètres. Une telle mesure irait dans le sens de
l'approche de précaution et des mesures de gestion similaires adoptées dans d'autres parties du
monde.
L'un des principaux défauts de la réglementation européenne en matière de licence des eaux
profondes est l'absence de stratégie d'échantillonnage pour les stocks d'eau profonde, ce qui
signifie que même si les exigences relatives à la mise en œuvre d'un plan d'échantillonnage sont
remplies, les données recueillies risquent d'être de mauvaise qualité ou difficiles à obtenir auprès
des différents États membres. Il est proposé aux responsables d'identifier les espèces/stocks
d'eau profonde devant faire l'objet d'une exploitation viable sur la base de leurs caractéristiques
biologiques. Le CIEM serait ensuite chargé d'identifier les méthodes d'évaluation pertinentes
(qui peuvent varier d'une espèce à l'autre) et de définir les niveaux d'échantillonnage minima
requis afin de garantir la précision et la fiabilité des évaluations par rapport aux critères fixés. Si
une telle procédure est suivie, les États membres et la CE devront veiller à allouer des ressources
suffisantes pour garantir le respect des objectifs en matière d'échantillonnage collectif. C'est sans
surprise aucune qu'il a été proposé d'interdire progressivement la pêche d'espèces/stocks
vulnérables et/ou qui ne peuvent pas être contrôlés de manière efficace.
En vue de répondre aux préoccupations concernant la réglementation des pêches nouvelles et
existantes, la Commission pourrait envisager d'élargir la réglementation actuelle en matière de
TAC à l'ensemble des espèces répertoriées à l'annexe II du règlement. Dans ce cas, tous les TAC
seraient fixés à des niveaux très bas jusqu'à ce que la viabilité d'une capture annuelle plus
importante ait été démontrée.
Lors du Sommet mondial sur le développement durable à Johannesburg en 2002, les États
membres de l'UE se sont engagés à protéger ou reconstituer les stocks de poissons de manière à
parvenir à une PME au plus tard en 2015. Il est actuellement impossible de procéder à des
évaluations fiables de la PME pour la plupart des stocks d'eau profonde, en raison du peu de
données disponibles pour les évaluations et de l'absence quasi totale de données chronologiques
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PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
issues d'enquêtes indépendantes pour affiner les évaluations. Ces problèmes doivent être pris en
charge sans perdre de temps si l'on veut pouvoir disposer d'estimations fiables de la PME d'ici
à 2015.
Enfin, d'après les commentaires entendus, de nombreuses pêches artisanales en eau profonde
sont pratiquées de longue date et pourraient être viables à l'échelle locale. Il est important de ne
pas y mettre fin de manière sommaire sans avoir mûrement réfléchi à leurs bienfaits sociaux à
cause de l'application de mesures de gestion générales visant à contrôler d'autres pêches
hauturières hautement mécanisées dans d'autres parties de l'Atlantique du NE.
Précisons toutefois que les informations présentées dans ce document n'ont pas encore été
examinées par le CIEM ou étudiées en détail par les scientifiques actifs dans le domaine des
pêches en eau profonde.
PE 389.606
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Chapitre 1. Généralités
1.1. Définition des stocks d'eau profonde
Bien que cela n'apparaisse pas clairement dans le titre, ce document est presque entièrement
consacré aux stocks d'espèces de poissons d'eau profonde. L'examen d'autres espèces se limite
au crabe rouge (Chaceon affinis), qui présente un grand intérêt commercial.
On entend généralement par stocks de poissons d'eau profonde les stocks présents à des
profondeurs supérieures à 400 mètres. Il s'agit toutefois d'une limite arbitraire car de nombreuses
espèces vivent dans des plages de profondeurs s'étendant du plateau continental aux eaux
profondes (Gordon et al, 2003). Au niveau de l'Atlantique du NE, les espèces concernées sont la
lingue (Molva molva), le brosme (Brosme brosme), la baudroie (Lophius spp.), le sébaste
(Sebastes spp.) et le flétan noir (Rheinhardtius hipploglossoides). Ce document de présentation
se penche principalement sur les espèces couvertes par l'actuel règlement fixant les TAC pour
les espèces d'eau profonde (CE, 2006a) et, à ce titre, exclut quasi totalement les espèces dont la
distribution s'étend au plateau continental, ainsi que d'autres espèces considérées comme des
espèces d'eau profonde occasionnelles, telles le merlan bleu (Micromesistius poutassou).
1.2. Structure des stocks/unités de gestion de l'UE
Malgré de fréquentes références aux stocks d'eau profonde, on sait en réalité très peu de choses
sur leur structure, ce qui se répercute sur la qualité des évaluations des stocks et la gestion des
stocks en général. Pour de nombreuses espèces, les données scientifiques qui sous-tendent les
définitions des stocks sont relativement imprécises (ICES, 2007a) et s'appuient sur les
connaissances actuelles concernant la répartition géographique des espèces, les informations
biogéographiques disponibles (sens des courants, barrières naturelles et écologie des poissons,
par exemple) (ICES, 2007a) et la similitude de l'évolution temporelle des taux de capture entre
les différentes zones (ICES, 1998). Le CIEM a récemment examiné les méthodes disponibles
pour déterminer la structure des stocks (2007a). Il est probable que d'autres études1 sur
l'identité génétique des stocks d'eau profonde seront nécessaires. Le recours à des
méthodes alternatives, telles que la microchimie des otolithes, pourrait par ailleurs
s'avérer utile pour la discrimination des stocks. Des techniques de marquage sous-marin2
pourraient également être utilisées de manière plus étendue pour étudier les chemins de
migration des poissons. Les unités de gestion de l'UE, qui reposent sur les unités de stock
utilisées par le CIEM, sont relativement floues et, à ce titre, ne doivent pas être considérées
comme définitives. Elles seront en effet vraisemblablement affinées à mesure que de nouvelles
informations sur la structure et la migration des stocks seront recueillies.
1.3. Vue d'ensemble des principales espèces de poissons d'eau profonde exploitées au
niveau commercial dans l'Atlantique du NE, état des stocks et dernier avis du CIEM
par espèce (ICES, 2006b3)
La plupart des espèces de poissons d'eau profonde se caractérisent par une longue durée de vie,
une croissance lente et une faible capacité de reproduction. Ils peuvent par ailleurs vivre dans
1
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3
Un nouveau projet intégré financé par la Fondation européenne pour la science dans le cadre du programme
Eurocore/EuroDEEP a vu le jour en 2007 et utilisera des études génétiques, la microchimie des otolithes et la
modélisation de la circulation océanographique pour étudier des modèles de structure du stock pour une série
d'espèces d'eau profonde de l'Atlantique du Nord-est.
Les méthodes de marquage traditionnelles ne peuvent pas être utilisées pour les espèces d'eau profonde car les
poissons ramenés à la surface de la mer meurent d'un barotraumatisme (choc bathymétrique).
ICES, 2006 - sauf stipulation contraire. L'avis a été édité afin de mettre l'accent sur l'état des stocks et les
recommandations en matière de gestion.
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PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
des écosystèmes pauvres en énergie et peu sujets à des changements environnementaux majeurs
(Merrett et Haedrich, 1997; Koslow et al., 2000; ICES, 2001). L'hoplostète orange
(Hoplostethus atlanticus) est souvent cité en guise d'exemple d'espèce d'eau profonde. Si l'on
considère sa durée de vie extrêmement longue (qui peut atteindre environ 200 ans) et sa
croissance très lente, il constitue toutefois un cas extrême. À titre comparatif, il existe des
espèces d'eau profonde affichant une croissance relativement rapide et une espérance de vie
moyenne (environ 20-30 ans). C'est le cas notamment de la lingue bleue (Molva dypterygia) et
du sabre noir (Aphanopus carbo). Ces espèces sont cependant généralement citées dans le cadre
de commentaires généraux sur les caractéristiques biologiques et la vulnérabilité des espèces
d'eau profonde.
Presque toutes les pêches en eau profonde de l'Atlantique du NE se sont développées sans que
des programmes aient été mis en place afin de recueillir des données biologiques et sur la pêche.
Ce n'est qu'en 1994 qu'ont réellement commencé la collecte et l'examen des données avec la
constitution du groupe d'étude «Study Group on the Biology and Assessment of Deep-Sea
Fisheries Resources» (SGDEEP) du CIEM et d'un groupe de travail d'évaluation du même nom
(WGDEEP) en 2000.
Malgré une augmentation du nombre d'études biologiques visant les espèces d'eau profonde au
cours des dix dernières années, la connaissance de processus biologiques tels que la croissance,
l'alimentation, la maturation et la fécondité continue d'accuser un important retard par rapport à
celle des espèces du plateau continental exploitées à des fins commerciales. On sait en effet très
peu de choses sur les processus de régénération, la variation, l'identité des stocks, la migration
des poissons et leur comportement.
En dépit de certains progrès au niveau de l'échantillonnage de la taille et de la durée de vie des
espèces d'eau profonde débarquées à des fins commerciales, des améliorations majeures restent
possibles pour de nombreuses espèces. Les données concernant la durée de vie des poissons
d'eau profonde sont rares. Il est en effet difficile de déterminer leur âge car les structures
calcifiées (otolithes, par exemple) affichent souvent un grand nombre d'anneaux, ce qui rend
l'interprétation et la validation de l'âge très compliquées. Parmi toutes les espèces d'eau profonde
actuellement étudiées dans l'Atlantique du NE, c'est pour le grenadier de roche (Coryphaenoides
rupestris), l'hoplostète orange, le sabre noir et la lingue bleue que les progrès les plus importants
ont été enregistrés. Les pages suivantes présentent un bref résumé des informations disponibles
pour les principales espèces de poissons d'eau profonde exploitées commercialement4 dans
l'Atlantique du NE, à savoir:
Grenadier de roche (Coryphaenoides rupestris)
Sabre noir (Aphanopus carbo)
Lingue bleue (Molva dypterygia)
Hoplostète orange (Hoplostethus atlanticus)
Béryx commun (Beryx decadactylus) et béryx long (Beryx splendens)
Grande argentine (Argentina silus)
Dorade rose (Pagellus bogaraveo)
Mostelle de fond (Phycis blennoides)
Requin portugais (Centroscymnus coelolepis)
Squale chagrin de l'Atlantique (Centrophorus squamosus)
Diverses autres espèces de poissons d'eau profonde
4
Certaines photos de poissons présentées dans cette section proviennent de «Fishbase» - Froese, R. et D. Pauly.
Editors. 2007.FishBase. Publication électronique. www.fishbase.org, version (01/2007).
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Grenadier de roche (Coryphaenoides rupestris)
(Photo de la Scottish Association of Marine Science (SAMS)
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Longue durée de vie, jusqu'à 60 ans (Bergstad, 1990; Kelly et al., 1997; Lorance et al.,
2001).
Âge de maturité: 9-14 ans (Bergstad, 1990; Allain, 1999).
Frai essentiellement en hiver/au début du printemps dans la plupart des régions.
Présent à des profondeurs comprises entre 180 et 2200 m, mais le plus souvent entre 500
et 1880 m.
Espèce benthopélagique, rencontrée près du fond marin, mais également à plusieurs
centaines de mètres du fond.
Faible taux de fécondité: 9000-56 000 œufs (Kelly et al., 1996)
(Carte de la Scottish Association of Marine Science (SAMS)
(tirée de Cohen et al., 1990)
État des stocks
L'état des stocks de grenadiers de roche dans l'Atlantique du NE est plus qu'incertain, mais se
situe probablement à un niveau faible. Des données d'enquêtes menées à l'ouest de l'Écosse (VI)
montrent que la composante la moins profonde du stock a été épuisée. La répartition par taille
des débarquements français fait apparaître une tendance au débarquement de poissons plus
petits. Les résultats d'une évaluation exploratoire structurée par âge du stock présent dans les
sous-zones VI et VII et dans la division Vb montrent que la biomasse totale a diminué de
manière constante depuis 1996. Les données relatives aux captures par unité d'effort (CPUE)
dans la dorsale médio-atlantique indiquent un déclin général des taux de capture depuis les
années 1970. Il n'existe aucune information sur les CPUE pour les autres zones.
Dernier avis du CIEM
Les captures dans la division IIIa ont considérablement augmenté et sont estimées à environ
12 000 tonnes. L'effort de pêche de cette espèce doit être réduit de manière significative jusqu'à
atteindre un niveau bas et une réintroduction progressive ne devra être autorisée que lorsque des
indicateurs fiables démontreront la viabilité d'une augmentation des captures. Le CIEM
recommande une réduction de 50 % de l'effort par rapport au niveau atteint avant l'expansion de
cette pêche (1991-1999). Cette réduction de 50 % concerne les débarquements et correspond à
un taux de capture d'environ 1000 tonnes en 2007.
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PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Sabre noir (Aphanopus carbo)
(Photo de la Scottish Association of Marine Science (SAMS)
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Données contradictoires sur la durée de vie, faisant tantôt état de 8-12 ans (pour
l'ensemble des otolithes) ou de 22-32 ans (pour certaines sections d'otolithes) (MoralesNin et Carvalho, 1996; Kelly et al., 1998).
Âge de maturité: 7 ans (sections d'otolithes) (Anon, 2000).
Croissance relativement rapide.
Présent à des profondeurs comprises entre 550 et 1600 m.
Frai au large des côtes de Madère de septembre à décembre (Carvalho, 1998) et dans le
banc Hatton tout au long de l'hiver.
Poissons essentiellement immatures trouvés à l'ouest des Îles britanniques.
(Carte de la Scottish Association of Marine Science (SAMS))
(tirée de Nakamura and Parin, 1993)
État des stocks
La structure du stock n'est pas connue avec certitude. Cette espèce est distribuée sur une large
zone géographique, qui pourrait comprendre plusieurs populations. Deux unités sont prises en
compte par le CIEM: nord (sous-zones V, VI, VII et XII) et sud (sous-zones VIII et IX). Dans la
zone nord, des données sur les CPUE des chalutiers montrent un déclin constant des stocks, qui
ont atteint leur niveau le plus bas en 1999. Il est peu probable que la récente augmentation
traduise une augmentation correspondante du stock. Les CPUE des palangriers dans la division
IXa sont restées relativement stables au cours de la dernière décennie.
Dernier avis du CIEM
Compte tenu de la diminution perceptible du stock dans les zones nordiques, le CIEM
recommande une réduction de l'exploitation pour revenir au niveau atteint avant l'expansion de
cette pêche (1990-1996) dans les sous-zones V, VI, VII et XII, ce qui correspond à des
débarquements ne dépassant pas 3500 t. Dans les zones du sud (sous-zones VIII et IX), un statu
quo de l'exploitation est conseillé.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Lingue bleue (Molva dypterygia)
(Photo de la Scottish Association of Marine Science (SAMS)
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Durée de vie jusqu'à 30 ans (Bergstad et Hareide, 1996; Magnusson et al., 1997).
Âge de maturité: 6-8 ans.
Frai en avril et en mai dans l'Atlantique du Nord.
Taux de fécondité élevé: 1-3,5 millions d'œufs (Gordon et Hunter, 1994).
Présent entre 400 et 1200 m; le plus souvent à 1200 m.
La plupart des pêches visent traditionnellement les regroupements de reproducteurs.
(Carte de la Scottish Association of Marine Science (SAMS)
(tirée de Cohen et al., 1990)
État des stocks
Les informations scientifiques disponibles sont insuffisantes pour établir l'étendue des éventuels
stocks. La lingue bleue pourrait néanmoins être suffisamment isolée dans des fonds de pêche
distincts pour que ceux-ci soient considérés comme des unités de gestion individuelles. Sur cette
base, le CIEM a émis des avis pour les unités de gestion suivantes: zones CIEM Va et XIV
(Islande et dorsale de Reykjanes); Vb, VI et VII (Feroes, Rockall et plateau celtique); et I, II,
IIIa, IVa, VIII, IX et XII.
Sur la base des CPUE des chalutiers islandais, il apparaît que le nombre de lingues bleues dans
les zones Va et XIV a diminué de manière ininterrompue entre 1991 et 2000 et est resté à un
niveau faible depuis lors. Dans les zones Vb, VI et VII, les informations sur la CPUE laissent
entendre que les stocks de lingues bleues restent faibles. Les tendances qui se dégagent des
débarquements dans d'autres zones font apparaître une diminution locale notable, voire un
épuisement des stocks, à tout le moins dans les divisions IIa et IIb.
Dernier avis du CIEM
Au niveau des zones Va et XIV, mais aussi Vb, VI et VII, il convient d'éviter la pêche dirigée et
de mettre en place des mesures pour réduire/minimiser les captures dans les pêches mixtes. Les
zones d'interdiction visant à protéger les regroupements de reproducteurs doivent être
maintenues et développées, le cas échéant. Dans les autres zones, toute pêche dirigée doit être
évitée et des mesures doivent être prises pour réduire au niveau minimum les prises accessoires
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PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
de la lingue bleue dans les pêches mixtes. Ces mesures pourraient notamment inclure la
fermeture de zones de frai connues durant la période de reproduction.
Hoplostète orange (Hoplostethus atlanticus)
(Photo de la Scottish Association of Marine Science (SAMS)
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Très longue durée de vie (le spécimen le plus vieux est âgé de 187 ans) (Allain et
Lorance, 2000; Francis et Horn, 1997; Talman et al., 2002).
Âge de maturité: 25-30 ans.
Croissance très lente.
Frai dans l'Atlantique du NE en janvier et février.
Régénération épisodique, parfois décennale.
Présent à des profondeurs comprises entre 500 et 2000 m; principalement aux environs
de 1200 m.
(Carte de la Scottish Association of Marine Science (SAMS)
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Regroupements associés à des monts sous-marins, des talus escarpés et d'autres
caractéristiques topographiques.
Fécondité de 20 000-385 000 œufs par femelle (Minto et Nolan, 2003).
État des stocks
On ignore si les regroupements individuels présentent des différences d'un point de vue
reproductif. L'état des populations varie selon les zones CIEM. Les captures totales ont connu
des fluctuations en raison d'un déplacement de l'effort de pêche entre les différents fonds de
pêche. Dans la sous-zone VI, les captures d'hoplostète orange ont connu une augmentation
rapide, avant de chuter jusqu'à environ 5 % de la capture maximale, ce qui donne à penser que
les regroupements ont été entièrement pêchés. La pêche de l'hoplostète orange dans la souszone VII présente un schéma d'évolution similaire à celui de la sous-zone VI. Les flottes
individuelles ne sont pas parvenues à maintenir des taux de capture élevés, ce qui laisse entendre
que les stocks s'épuiseraient peu à peu. La présence de regroupements non exploités dans la
sous-zone VII n'a pas pu être déterminée de manière claire. Il n'existe par ailleurs aucune
information sur l'état des stocks dans les autres sous-zones.
PE 389.606
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Dernier avis du CIEM
L'hoplostète orange ne peut supporter qu'un taux d'exploitation très bas et, à l'heure actuelle, la
gestion d'une pêche viable est tout à fait impossible. Le CIEM recommande par conséquent
d'éviter toute pêche dirigée et de limiter au maximum les prises accessoires dans les pêches
mixtes.
Béryx commun (Beryx decadactylus) et béryx long (Beryx splendens)
Beryx decadactylus
(Photo de Pedro Monteiro, Universidade do Algarve)
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Bathydémersal, plage de profondeur: 180-800 m.
Démersal à l'âge adulte, pélagique durant sa jeunesse.
Longueur maximale: 100 cm.
Durée de vie jusqu'à environ 13 ans (Krug et al., 1998).
Croissance relativement rapide.
Taux de fécondité élevé (aucune donnée exacte n'est disponible, mais il est de l'ordre
millions d'œufs).
Âge de maturité: 2 ans (Medonca et al., 1998).
Beryx splendens
(Photo de C. L. Fernández-Ovies, Espagne)
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Longueur maximale: 70 cm.
Durée de vie maximale enregistrée: 11 ans (Krug et al., 1998).
Présent sur le plateau continental extérieur (180 m) et les pentes jusqu'à au moins
1300 m.
Souvent rencontré au-dessus des monts sous-marins et des dorsales.
Les jeunes poissons sont pélagiques.
Taux de fécondité élevé (aucune donnée exacte n'est disponible, mais il est de l'ordre
millions d'œufs).
État des stocks
Les espèces Beryx splendens et B. decadactylus sont distribuées sur une large zone, qui pourrait
comprendre plusieurs populations, et la structure de leur stock reste incertaine. Les CPUE
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PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
standardisées de palangriers commerciaux des Açores font apparaître une lente diminution du
Beryx decadactylus.
Dernier avis du CIEM
Compte tenu de leur répartition spatiale liée aux monts sous-marins, de leur biologie et de leur
comportement de regroupement, les béryx sont facilement surexploités par le chalutage. Ils ne
peuvent en effet supporter que de faibles taux d'exploitation. La pêche de ces espèces ne peut en
aucun cas être autorisée à se développer au-delà des niveaux actuels à moins que la viabilité
d'une telle expansion ne soit démontrée. Pour éviter la décimation de sous-populations entières
qui n'ont pas encore été cartographiées et évaluées, l'exploitation de nouveaux monts sousmarins doit être interdite.
Grande argentine (Argentina silus)
(Photo de D. Flescher (Fishbase)
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Espèce pélagique.
Présent entre 150 et 700 m, mais surtout entre 200 et 500 m.
Durée de vie jusqu'à 35 ans (Bergstad, 1993).
Âge de maturité: 6-9 ans (Magnusson, 1998; Berstad, 1993; Gordon, 1999).
Croissance relativement lente.
La période de frai est très longue et peut se prolonger toute l'année dans certaines zones.
Faible taux de fécondité (jusqu'à 6000-30 000 œufs) (Wood et Raitt, 1968).
État des stocks
Les informations scientifiques disponibles sont insuffisantes pour établir l'étendue des éventuels
stocks. La grande argentine pourrait néanmoins être suffisamment isolée dans des fonds de
pêche distincts pour que ceux-ci soient considérés comme des unités de gestion individuelles.
Sur cette base, le CIEM a émis des avis pour les unités de gestion suivantes: sous-zone Va
(Islande) et sous-zones Vb, VI, VII I, II, IIIa, IVa, VIII, IX et XII. Il n'existe aucun indicateur
fiable permettant de déterminer l'état des stocks de grande argentine dans la sous-division Va.
Dans les autres zones, les seules sources d'informations concernant les stocks sont des données
des CPUE, dont les tendances varient selon les zones. Cependant, dans la mesure où la grande
argentine est pélagique et a tendance à se regrouper, l'utilisation de données des CPUE pour
déterminer l'abondance des stocks est discutable. La taille moyenne des poissons capturés dans
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
la sous-division Vb diminue depuis 1995, un phénomène qui pourrait s'expliquer par un taux
d'exploitation élevé.
Dernier avis du CIEM
Compte tenu de sa faible productivité, la grande argentine ne peut supporter que de faibles taux
d'exploitation. Le développement de la pêche ne doit pas être autorisé, à moins que sa viabilité
ne puisse être démontrée.
Dorade rose (Pagellus bogaraveo)
(Photo de Shibl Dammous (Fishbase)
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Longueur totale pouvant atteindre 70 cm.
Durée de vie maximale enregistrée: 16 ans (Menezes et al., 2001).
Présent au large des côtes de Norvège, du détroit de Gibraltar au Cap Blanc en
Mauritanie, des Açores, de Madère, des îles Canaries et aussi de la Méditerranée
occidentale.
Également signalé en Islande et, par le passé, dans les parages Ouest et dans le golfe de
Gascogne (pêché intensivement dans les années 1960 et 1970, il semble ne pas avoir
survécu à l'exploitation intensive (débarquements annuels maxima d'environ 20 000 t)).
Trouvé dans l'Atlantique à des profondeurs pouvant atteindre 700 m.
Jeunes poissons dans les eaux côtières, adultes sur les talus continentaux, en particulier
dans les substrats vaseux.
Hermaphrodite protandrique, devenant femelle lorsqu'il atteint une longueur de 2030 cm.
Frai de janvier à juin, lorsque les adultes se déplacent du talus continental vers les côtes.
Taux de fécondité: 25 000-1 900 000 œufs (Gil et Sobrino, 2001).
État des stocks
La structure du stock n'est pas connue avec certitude. Cette espèce est distribuée sur une large
zone géographique pouvant comprendre plusieurs populations. Trois unités sont prises en
compte: les sous-zones VI, VII et XII; la sous-zone IX; et la sous-zone X. L'évolution des stocks
de dorade reste en grande partie inconnue. D'après des analyses exploratoires, le stock de la
zone IX est resté stable ou a connu un lent déclin au cours de la dernière décennie. En raison des
captures passées, les stocks des sous-zones VI, VII et VIII semblent épuisés.
Dernier avis du CIEM
La dorade rose est hermaphrodite et particulièrement vulnérable à la surexploitation, de sorte
qu'il est essentiel de prendre des mesures afin de garantir une exploitation équilibrée entre les
jeunes poissons (mâles) et les poissons plus âgés (femelles). La pêche de la dorade rose doit
s'accompagner de programmes visant à recueillir des données sur les poissons visés et les prises
accessoires. Le développement de la pêche ne doit pas être autorisé, à moins que sa viabilité ne
puisse être démontrée.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Mostelle de fond (Phycis blennoides)
(Photo de la Scottish Association of Marine Science (SAMS)
•
•
•
•
•
•
Durée de vie jusqu'à 15 ans (Gordon, 1999).
Frai de mars à juillet dans la plupart des zones.
Taux de fécondité inconnu.
Distribution à grande échelle dans l'Atlantique du NE et la Méditerranée.
Vaste plage de profondeurs : 60-1000 m.
Les jeunes poissons vivent sur le plateau continental.
(Carte de la Scottish Association of Marine Science (SAMS)
État des stocks
Aucune information permettant d'évaluer l'évolution des stocks n'est disponible. L'état du stock
est par conséquent inconnu.
Dernier avis du CIEM
Le développement de la pêche ne doit pas être autorisé, à moins que sa viabilité ne puisse être
démontrée.
Requin portugais (Centroscymnus coelolepis)
(Photo de D. Flescher (Fishbase)
•
•
•
•
•
•
Durée de vie jusqu'à 60-70 ans (Gordon, 1999; Tanaka, 1990; Guillart, 1998).
Croissance lente.
Longueur pouvant atteindre 120 cm.
Maturation tardive (mâles 85 cm, femelles 100 cm) (Girard et Du Buit, 1999).
Les adultes portent jusqu'à 8-19 jeunes par portée (Girard et Du Buit, 1999).
Présent entre 600 et 1750 m, avec un pic à 1000 m.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
•
•
Trouvé sur les talus continentaux et les plaines abyssales.
Identifié en tant qu'espèce quasi menacée d'extinction sur la liste rouge de l'UICN1.
(Carte de la Scottish Association of Marine Science (SAMS)
État des stocks
Les stocks de requin portugais et de squale chagrin de l'Atlantique (ci-dessous) seraient épuisés
si l'on en croit la diminution substantielle des CPUE dans les sous-zones VI, VII et XII. Les
captures annuelles totales de ces espèces au niveau mondial ont augmenté pour passer d'un
niveau très bas à environ 8000 t. On ne connaît pas l'état des stocks d'autres requins d'eau
profonde.
Dernier avis du CIEM (ICES, 2005a)
Il est impossible de quantifier les taux d'exploitation et l'importance des stocks des requins d'eau
profonde. Cependant, d'après les informations des CPUE, les stocks de requin portugais et de
squale chagrin de l'Atlantique sont considérés comme épuisés et probablement inférieurs à tout
point de référence limite éventuel. Compte tenu de leur très mauvais état, le CIEM recommande
l'absence de toute capture de requins d'eau profonde.
Squale chagrin de l'Atlantique (Centrophorus squamosus)
(Photo de Cambraia Duarte (Fishbase)
• Longueur maximale: 160 cm.
• Ovovivipare: porte généralement 7-11 jeunes par portée (Girard et Du Buit, 1999).
• Présent sur ou à proximité du bas des talus continentaux, à des profondeurs de 1451250 m.
• Également trouvé dans les eaux profondes, à une profondeur de 1250 à 4000 m.
• Identifié en tant qu'espèce vulnérable sur la liste rouge de l'UICN.
1
Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
(Carte de la Scottish Association of Marine Science (SAMS))
État des stocks
Voir le requin portugais ci-dessus.
Dernier avis du CIEM (ICES, 2005a)
Voir le requin portugais ci-dessus.
Crabe rouge (Chaceon affinis)
•
•
•
•
Vit au niveau des monts sous-marins océaniques, à travers tout l'Atlantique de l'Est, de
l'Islande au Sénégal, et autour des îles de la Macronésie.
Les informations biologiques disponibles proviennent essentiellement d'études autour
des Canaries. (Lopez Abellan et al., 2002; Fernandez-Vergaz et al., 2000; Pinho et al.,
1998.)
Essentiellement présent entre 600 et 900 m
Longue période de frai: octobre-mai
État des stocks
Inconnu. Deux espèces étroitement liées (Chaceon quinquedens et Chaceon maritae) de
l'Atlantique du Nord et du Sud sont pêchées depuis les années 1970 et, dans les deux cas, il est
apparu qu'un taux d'exploitation élevé n'était pas viable en raison de la croissance et de la vitesse
de maturation très lentes et, vraisemblablement, d'une régénération peu fréquente (Steimle et al.,
2001; Hastie, 1995; Duggan et Lawton, 1997).
Avis actuel du CIEM
Le CIEM n'a émis aucun avis concernant cette espèce.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Parmi les autres espèces d'eau profonde pêchées dans l'Atlantique du NE, mais ne faisant
pas l'objet de TAC européens, figurent:
Grenadier à tête rude (Macrourus berglax)
Alépocéphale (Alepocephalus spp.)
Chimère commune (Chimaera monstrosa et Hydrolagus spp.)
Moro commun (Mora moro) et moridés
Cernier atlantique (Polyprion americanus)
Sébaste chèvre (Helicolenus dactylopterus)
Sabre argenté (Lepidopus caudatus)
Apogon noir (Epigonus telescopus)
État des stocks
Cette section regroupe plusieurs espèces qui sont capturées dans diverses pêches en eau
profonde et dont on ignore pour l'essentiel la vulnérabilité à l'exploitation. Dans certains cas, les
données des débarquements ne reflètent pas les captures réelles en raison des taux élevés de
rejet.
Dernier avis du CIEM
Aucune évaluation de ces stocks n'a été réalisée. Les connaissances disponibles concernant la
biologie de ces espèces, de même que leur vulnérabilité à l'exploitation, sont insuffisantes. Lors
du développement de nouvelles pêches ou de l'extension des pêches existantes dans de nouvelles
zones, il convient d'identifier des indicateurs de pression, d'état et d'impact pertinents sur la base
de pêches initiales de faible envergure, qui ne pourront être autorisées à s'étendre
progressivement que lorsque des évaluations fiables démontreront la viabilité d'une
augmentation des captures.
Chapitre 2. Avis général et historique du CIEM concernant les espèces d'eau
profonde
2.1. Perspective historique
C'est en 1994 (ICES, 1994b) que le CIEM a émis son premier avis concernant les stocks d'eau
profonde. Celui-ci incluait la déclaration suivante:
«Il est impossible de dire si les stocks peuvent supporter ou non les niveaux actuels
d'exploitation, mais, compte tenu de leur vulnérabilité, le CCGP recommande le maintien de
l'effort de pêche à un faible niveau jusqu'à ce que des informations suffisantes aient été
recueillies auprès des pêcheries existantes pour permettre la prise de décisions de gestion à
caractère scientifique.»
Cette position a été réitérée en 1996 (ICES, 1996) avec la précision suivante:
«Le CIEM recommande l'adoption du principe de précaution.»
2.2. Dernier avis général du CIEM (ICES, 2006b)
«Pour émettre des avis, le CIEM s'appuie sur deux indicateurs: la biomasse (état) et la mortalité
par pêche (impact). Mais, dans le cas des espèces d'eau profonde, ces indicateurs sont difficiles à
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
mesurer. En outre, la longue durée de vie de ces espèces fait qu'il faut plus de temps pour
surveiller la réponse ou avant que des effets positifs ne soient constatés. Par conséquent, le
CIEM recommande l'utilisation d'indicateurs de pression, tels que l'effort, à titre complémentaire
dans le cadre de la gestion de ces stocks. À l'heure actuelle, le CIEM n'a accès à aucune donnée
d'effort susceptible d'être utilisée comme indicateurs de pression, mais de tels indicateurs
doivent être fournis de toute urgence. En l'absence d'indicateurs de pression, le CIEM
recommande, de manière générale, une réduction des débarquements, associée à une diminution
de l'effort de pêche.
La plupart des espèces d'eau profonde ne peuvent supporter que de faibles taux d'exploitation.
La pêche de ces espèces ne doit être autorisée que si elle s'accompagne de programmes visant à
recueillir des données et doit se développer à un rythme très lent jusqu'à ce que des indicateurs
fiables démontrent la viabilité d'une augmentation des captures.
La règle de base recommandée concernant le contrôle des captures des stocks d'eau profonde est
que l'extension de la pêche de ces espèces ne doit être autorisée que lorsque des indicateurs et
des points de référence pour les captures futures auront été identifiés et qu'une stratégie de
gestion, incluant des conditions pertinentes pour la surveillance, aura été élaborée et mise en
œuvre. Une stratégie de gestion adaptative pour ces pêches consisterait par conséquent à prévoir
une pêche initiale de faible niveau et étroitement surveillée, puis à définir, sur la base des
informations recueillies, une stratégie à long terme garantissant l'exploitation viable. L'extension
progressive de la pêche ne doit être autorisée que si une telle stratégie a pu être identifiée et mise
en œuvre. Elle doit par ailleurs s'accompagner d'une étroite surveillance, qui permettra d'adapter
le plan de gestion en fonction des résultats de la pêche.
La situation de départ des pêches existantes et nouvelles est différente:
•
Dans le cas des pêches existantes, l'effort de pêche doit, de manière générale, être
considérablement réduit jusqu'à des niveaux planchers et n'être autorisé à se développer à
nouveau progressivement que lorsque des indicateurs fiables auront démontré la viabilité
des captures.
•
Lors du développement de nouvelles pêches ou de l'extension des pêches existantes dans
de nouvelles zones, il convient d'identifier des indicateurs de pression, d'état et d'impact
pertinents sur la base de pêcheries initiales de faible envergure, qui ne seront autorisées à
s'étendre progressivement que lorsque des indicateurs fiables démontreront la viabilité
d'une augmentation des captures.
Dans le cas de plusieurs espèces, le maintien des taux de captures actuels risque de conduire à
l'épuisement progressif de concentrations/sous-unités relativement isolées d'un stock. La souszone ou division CIEM est l'unité la plus petite pour laquelle des données sont actuellement
transmises, une résolution spatiale qui pourrait s'avérer inappropriée pour la surveillance ou la
gestion de ce type d'activité de pêche. La plage de profondeurs au sein d'une même zone peut en
effet être très grande et la taille des zones, très différente. Il est par conséquent recommandé de
développer et de mettre en place des systèmes capables d'enregistrer l'effort de pêche et les
captures sur une plus petite échelle temporelle et géographique, de même que d'entreprendre des
actions prenant en compte une résolution spatiale de moindre échelle qu'à l'heure actuelle.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Chapitre 3. Pêcheries d'eau profonde dans l'Atlantique du NE
3.1. Aperçu historique
Les pêcheries d'eau profonde de l'Atlantique du NE ont été étudiées par Gordon (2001) et
Gordon et al. (2003) et résumées par Large et al (2003), de sorte que ce chapitre ne présente
qu'un bref aperçu historique.
Les pêcheries d'eau profonde les plus anciennes sont les pêcheries à la ligne à main et à la
palangre au large des Açores, qui visent une série d'espèces dont la dorade rose et le béryx
(Beryx spp.), et au large de Madère et du Portugal, qui sont essentiellement ciblées sur le sabre
noir. Les autres pêches à la palangre ayant une importance historique sont exploitées dans les
eaux profondes du plateau continental des pays du nord de l'Europe, et plus particulièrement de
la Norvège, de l'Islande et des îles Féroé. Ces pêcheries, qui ont vu le jour dans les années 1860,
ont pour principales cibles la lingue, le brosme et le flétan noir (Bergstad et Hareide, 1996).
Bien que ces espèces sortent du cadre du présent document, il est important de signaler que les
flottes participantes ont progressivement évolué depuis les années 1950 pour inclure des
palangriers hautement mécanisés équipés de systèmes de boëttage automatique et capables de
rester en mer entre 6 et 8 semaines, voire plus longtemps. De nombreux autres pays, dont la
Russie, l'Espagne et l'Irlande, ont ensuite adopté cette technologie pour la pêche en eau
profonde.
La pêche au chalut de fond visant des espèces d'eau profonde a débuté dans l'Atlantique du NE à
la fin des années 1960 et dans les années 1970, lorsque les Soviétiques et d'autres pays du bloc
de l'Est se sont lancés dans l'exploitation du grenadier de roche et du béryx dans les eaux
internationales à l'ouest des Îles britanniques et sur la dorsale médio-atlantique (Pechenik et
Troyanovsky, 1970; Troyanovsky et Lisovsky, 1995).
Entre le milieu et la fin des années 1970, les flottes d'Europe occidentale ont été encouragées à
se déplacer vers des eaux plus profondes, la pêche traditionnelle sur le plateau n'étant plus
viable. C'est ainsi que les chalutiers français ont été les premiers à entamer des opérations
commerciales de grande envergure dans les eaux profondes des sous-zones V et VI, puis dans la
sous-zone VII. Les chalutiers français, qui pêchaient traditionnellement des espèces telles que le
lieu noir le long du rebord continental (Pollachius virens), se sont déplacés vers des eaux plus
profondes pour exploiter la lingue bleue (Charuau et al., 1995). Au cours des premières années
de la pêche au chalut de fond en eau profonde, les prises accessoires de grenadier de roche, de
sabre noir, de requins d'eau profonde et de nombreuses autres espèces moins abondantes étaient
rejetées. Ce n'est qu'en 1989 que ces espèces ont commencé à être débarquées à la suite d'une
initiative de commercialisation de l'industrie française. Le chalutage en eau profonde a ensuite
connu une expansion rapide, en raison, d'une part, de l'amélioration des marchés et, d'autre part,
de la surpêche des stocks de poissons traditionnels du plateau continental et du cadre de gestion
toujours plus restrictif mis en place pour rectifier le tir. En revanche, les stocks d'eau profonde
sont restés dans une large mesure inexploités et non réglementés. Le chalutage en eau profonde
ne s'est pas beaucoup développé dans les parties australes de la zone CIEM (au large des côtes
d'Espagne, du Portugal, des Açores et de Madère), où la pêche à la palangre est exploitée depuis
de nombreuses années.
À mesure que l'intérêt des patrons de pêches pour le chalutage en eau profonde s'est développé,
ces derniers ont pris note des progrès dans d'autres pêcheries d'eau profonde de par le monde.
C'est ainsi que les pêcheries prospères de l'hoplostète orange dans l'hémisphère Sud ont stimulé
la quête de cette espèce dans l'Atlantique du NE par des chalutiers français et féroïens. Des
regroupements de reproducteurs ont ainsi été localisés dans la sous-zone CIEM VI et une pêche
s'est rapidement développée en 1991, ce qui a permis de capturer environ 3500 t. Les
33
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
débarquements d'hoplostète orange en provenance de la sous-zone VI ont toutefois connu une
importante diminution par la suite et, pendant quelques années, ce stock a été quasiment épuisé
(ICES 2002, 2003b). Ce schéma s'inscrit dans le cadre d'une approche d'«extraction minière»
adoptée pour exploiter certaines espèces d'eau profonde. Les regroupements sont localisés, puis
soumis à une pêche pulsatoire progressive jusqu'à épuisement. Depuis quelques années,
l'hoplostète orange est principalement capturé dans la sous-zone VII et fait l'objet d'une pêche
intensive, laquelle a ensuite à nouveau baissé en raison de l'épuisement progressif. Au niveau de
la dorsale médio-atlantique, une pêche féroïenne à l'hoplostète orange s'est brièvement
développée dans les années 1990 (Thomsen, 1998).
De nombreux signes semblent également indiquer l'épuisement d'autres espèces à cause de la
pêche. Ainsi, les débarquements de dorade rose des sous-zones CIEM VI, VII et VIII ont atteint
un niveau record de 24 000 t en 1974, pour ensuite diminuer jusqu'à environ 100 t ces dernières
années (ICES, 2006a). En comparaison avec les captures d'il y a 20 ou 30 ans, la pêche est
«quasiment épuisée» (ICES, 2006a).
Dans la seconde moitié des années 1990, le Royaume-Uni a développé la pêche à la palangre et
au filet maillant dans les sous-zones VI et VII en vue de capturer des requins d'eau profonde (le
squale chagrin de l'Atlantique et le requin portugais, principalement), en plus de faire des prises
accessoires d'espèces d'eau profonde dans des pêches à la baudroie et au merlu (Merluccius
merluccius). La pêche au requin a récemment été interdite à la suite de mesures de gestion
introduites par l'UE en réponse à un avis du CIEM (voir section 1.3).
Depuis les années 1980, une pêche dirigée danoise au grenadier de roche est exploitée dans la
partie plus profonde du Skagerrak, à des profondeurs de 400-650 m. La zone géographique
concernée par l'exploitation est très petite et ne comprend que quelques rectangles CIEM.
Avant 2002, la pêche dirigée danoise était essentiellement exploitée par un chalutier unique et la
plupart des captures étaient débarquées pour leur huile et leur farine. Cette pêche a connu un
développement remarquable au cours des dernières années. Les débarquements totaux sont
passés d'environ 2000 t jusqu'en 2002 à plus de 10 000 t en 2005. À la suite du renforcement des
mesures de gestion, les débarquements sont toutefois retombés à environ 2300 t en 2006.
Dans les années qui ont précédé l'introduction de mesures de gestion pour les espèces d'eau
profonde dans l'UE, avec notamment l'introduction des TAC en 2002, certaines flottes
nationales ont connu un développement considérable, notamment en Irlande et en Écosse, dans
une tentative pour accumuler de bons résultats. La plupart de ces pays ont toutefois reçu des
quotas inférieurs à leurs attentes, de sorte que leurs flottes se sont considérablement réduites par
la suite.
3.2. Pêcheries actuelles auxquelles participent des navires européens
Des informations détaillées sur les pêcheries d'eau profonde de l'Atlantique du NE figurent dans
les rapports du WGDEEP du CIEM, les dernières mises à jour ayant été effectuées en 2006 et
2007 (ICES, 2006a, 2007a). Les données présentées ici ne sont qu'un bref résumé de ces
informations et se limitent aux pêcheries auxquelles participent des navires européens dans les
eaux européennes et internationales.
Les pêcheries d'eau profonde dans l'Atlantique du NE affichent une grande diversité, avec une
prédominance de la pêche à la palangre et au chalut, qui va de la pêche artisanale à des activités
hauturières extrêmement mécanisées. Certaines pêches sont ciblées sur une espèce spécifique,
mais la plupart sont des pêches mixtes visant plusieurs espèces. Certaines pêches au chalut
visent une seule espèce et ont des taux de prises accessoires d'autres espèces relativement faibles
(pêche de la grande argentine et pêches ciblées sur les regroupements de reproducteurs de la
PE 389.606
34
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
lingue bleue et les regroupements de l'hoplostète orange à des fins de reproduction et
d'alimentation, par exemple). Enfin, d'autres pêches au chalut sont des pêches d'espèces mixtes
et visent des stocks variant en fonction de la saison et de la profondeur de pêche. Par exemple,
dans la sous-zone CIEM VI, la flotte française a souvent pour cible le grenadier de roche –
lorsqu'elle ne pêche pas la lingue bleue – et les quantités d'autres espèces débarquées (sabre noir
et requins d'eau profonde, par exemple) varient en fonction de facteurs tels que la profondeur de
pêche. La plupart des palangriers d'eau profonde visent des espèces benthopélagiques et plus
particulièrement des espèces qui se regroupent ou qui sont facilement attirées par un appât. On a
cependant également assisté au développement de pêcheries opportunistes utilisant des chaluts
semi-pélagiques ou pélagiques pour capturer des espèces mésopélagiques telles que la grande
argentine. Certaines pêches types au béryx au niveau des monts sous-marins ont également un
caractère semi-pélagique.
3.2.1. Pêcheries dans la mer Celtique (sous-zones CIEM VI et VII)
La pêche au chalut en eau profonde est pratiquée par des navires français, irlandais, espagnols,
écossais et anglais/gallois.
Les chalutiers français pratiquent une pêche en eau profonde mixte visant essentiellement le
grenadier de roche, le sabre noir et le requin portugais. Bien que quelques chalutiers se
consacrent exclusivement à la pêche en eau profonde, la plupart pêchent également le lieu noir
sur le plateau continental. Les navires peuvent se déplacer rapidement d'une pêcherie à l'autre et
pêchent souvent des espèces d'eau profonde et du plateau continental au cours d'une même
sortie.
La pêche irlandaise en eau profonde, qui est peu développée et qui exploite essentiellement des
fonds marins plats, est ciblée sur l'hoplostète orange, le sabre noir, le grenadier de roche et le
requin portugais.
Plusieurs navires écossais pêchent la lotte sur le talus continental de la sous-zone VIa et sur le
banc Rockall, une pêche qui entraîne la prise accessoire d'espèces d'eau profonde dont la lingue
commune, la lingue bleue et le requin portugais. Par ailleurs, un petit nombre de ces navires
pêchent occasionnellement dans des eaux plus profondes afin de capturer le grenadier de roche,
le sabre noir et le requin portugais. Aucun des navires écossais pêchant des espèces d'eau
profonde n'est dédié à ce type de pêche et les navires passent de la pêche traditionnelle aux
gadidés sur le plateau continental et dans la mer du Nord à la pêche à la lotte et à la cardine sur
les talus ou encore à la véritable pêche en eau profonde, selon les opportunités qui se présentent
à eux.
Les chalutiers espagnols qui pêchent le merlu dans les zones VII et VI effectuent des prises
accessoires d'espèces d'eau profonde, dont la lingue commune, la lingue bleue, la mostelle de
fond et le sébaste chèvre. Des chalutiers congélateurs de fond (pêche arrière) espagnols pêchent
également par intermittence dans les eaux internationales de la zone du banc Hatton (zones
CIEM XIIb et VIb1). Le grenadier de roche et l'alépocéphale (Alepocephalus bairdii) sont les
principales espèces capturées.
Une flottille de bateaux de pêche à filets maillants britanniques (Angleterre et Pays de Galles)
pêche la baudroie et le merlu, avec des prises accessoires de requins d'eau profonde et lingue
bleue. Les navires britanniques (Angleterre et Pays de Galles) et irlandais capturent le crabe
rouge à l'aide de pièges.
35
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
3.2.2. Pêcheries de la mer du Nord et du Skagerrak (sous-zone CIEM IV et division IIIa)
Nous avons déjà mentionné plus haut la petite pêche au chalut danoise ciblée sur le grenadier de
roche dans la partie profonde du Skagerrak, à des profondeurs de 400-650 m. Les prises
accessoires déclarées de cette pêche sont peu élevées et concernent la grande argentine, la
chimère commune (Chimaera spp.), la lingue bleue et le sagre rude (Etmopterus princeps).
3.2.3. Pêcheries au large du plateau continental d'Europe du Sud (sous-zones CIEM VIII et
XI)
Ces pêcheries consistent pour l'essentiel en des pêches à la palangre traditionnelles au sabre noir
et aux requins. De nouvelles pêcheries à la dorade rose ont également vu le jour au large des
côtes du sud de l'Espagne.
3.2.4. Pêcheries de l'Atlantique du NE océanique – Açores et dorsale médio-atlantique
(sous-zones CIEM X et XII)
La principale espèce cible de la pêche en eau profonde dans les Açores est la dorade rose, même
si d'autres espèces importantes d'un point de vue commercial y sont également capturées et si les
espèces visées peuvent changer en fonction de l'abondance saisonnière et des prix du marché.
Les petits navires (<12 m) sont majoritaires et utilisent principalement la palangre de fond
traditionnelle et plusieurs types de lignes à main. Les navires plus gros pêchent essentiellement à
la palangre dans les eaux profondes au large des côtes et principalement au niveau des monts
sous-marins.
Chapitre 4. Vue d'ensemble de la réglementation européenne en matière de
stocks de poissons d'eau profonde, points forts, faiblesses et
contexte historique
Jusqu'en 2003, presque toutes les pêcheries d'eau profonde de l'Atlantique du NE étaient
déréglementées. Les seules exceptions concernaient les pêches pour lesquelles des pays
individuels avaient introduit des mesures de gestion nationales visant des espèces spécifiques, la
délivrance de permis aux navires pêchant la grande argentine dans les eaux norvégiennes, par
exemple, et dans des zones où, pour des raisons historiques, des espèces individuelles avaient
fait l'objet d'une évaluation et d'une gestion au niveau international (flétan noir et sébaste, par
exemple). D'après les données disponibles, la plupart des autres pêches, en particulier celles en
haute mer, ont suivi, ou semblent avoir suivi, une trajectoire en dents de scie. En général, la
pêche exploratoire identifiait de nouvelles pêcheries, lesquelles étaient ensuite exploitées jusqu'à
épuisement des stocks, sans respecter aucune limite biologique de sécurité, sur des échelles de
temps variables: courte (<5 ans) pour les espèces vivant au niveau des monts sous-marins et
d'autres caractéristiques topographiques (hoplostète orange, par exemple) et plus longue (parfois
20-30 ans) pour les espèces à distribution plus large, comme la lingue bleue. Ici aussi, il existe
certaines exceptions à ces schémas. Ainsi, la pêche artisanale à la palangre au sabre noir qui est
pratiquée de longue date au large du Portugal et de Madère est considérée comme viable, si l'on
se réfère aux données disponibles. De manière générale, cependant, les organes de gestion de la
pêche dans l'Atlantique du NE, ainsi que dans de nombreuses autres parties du monde, ont mis
du temps à adopter l'approche de précaution (Garcia, 1994) et à prendre des mesures de gestion
pour les pêcheries d'eau profonde (Large et Bergstad, 2003).
La Commission a procédé à un examen de la gestion des stocks de poissons d'eau profonde
(ECCOM, 2007a), lequel sert de point de départ à cette discussion.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
C'est finalement en 2003 que la CE a introduit diverses mesures de gestion des stocks d'eau
profonde, dont des TAC pour les principales espèces d'eau profonde (CE, 2002a) et, en guise de
première étape vers une gestion de l'effort, un plan de délivrance de permis aux navires limitant
la puissance et la capacité globales des navires de pêche en eau profonde aux niveaux observés
au cours des années 1998-2000 (CE, 2002b). Les avis scientifiques concernant les stocks d'eau
profonde n'étant publiés que tous les deux ans, les TAC ont été fixés pour 2003 et 2004. Le
règlement relatif à la délivrance de permis visait à limiter l'expansion de l'effort de pêche des
espèces d'eau profonde en demandant à l'ensemble des navires capturant plus de 10 t d'espèces
d'eau profonde par an de se procurer un permis de pêche en eau profonde, à défaut de quoi leurs
débarquements d'espèces d'eau profonde seraient limités à 100 kg par sortie en mer. Par ailleurs,
la capacité totale des navires possédant un permis de pêche en eau profonde a été limitée à la
capacité cumulée des navires ayant débarqué plus de 10 t d'espèces d'eau profonde au cours
d'une des années 1998-2000 (2000-2003 pour les nouveaux États membres (EM)). Le plan de
délivrance des permis contenait également des exigences concernant l'élaboration de rapport et
les contrôles et demandait aux EM d'élaborer des plans d'échantillonnage et d'observation en
guise de condition préalable à l'octroi de permis, ainsi qu'une disposition autorisant uniquement
le débarquement dans les ports désignés. D'autres dispositions concernant la collecte des
données ont été prises en 2004 (CE, 2004).
Le règlement relatif aux TAC a été revu en 2004 (CE, 2004) afin de fixer les TAC des stocks
d'eau profonde pour 2005 et 2006. Ce règlement a par ailleurs introduit des TAC pour différents
stocks dont la capture n'était jusqu'alors pas limitée. En outre, à la lumière des avis scientifiques
indiquant que le stock de l'hoplostète orange dans la division VI était quasiment épuisé, ce
règlement a également introduit une zone d'interdiction de pêche de cette espèce à l'ouest du
Royaume-Uni et de l'Irlande. Les navires pêchant dans cette zone d'interdiction n'étaient pas
autorisés à débarquer cette espèce. Quant aux navires pêchant l'hoplostète orange et traversant la
zone d'interdiction, ils étaient tenus de maintenir une vitesse supérieure à 8 nœuds afin
d'empêcher toute activité de pêche dans cette zone. Les TAC pour 2007 et 2008 ont été fixés en
décembre 2006 (CE, 2006a).
Le CIEM publie des avis scientifiques concernant les stocks d'eau profonde tous les deux ans,
mais les organisations régionales de pêche peuvent introduire des réglementations sur la haute
mer exigeant l'adoption de mesures spécifiques par la CE dans des délais relativement courts.
En 2004, la Commission des pêches de l'Atlantique du Nord-est (CPANE) a adopté une
recommandation visant à réduire de 30 % en 2005 et 2006 l'effort de pêche des stocks d'eau
profonde dans la zone réglementaire de la CPANE. En vue de se conformer à cette
recommandation, la Commission a inclus des dispositions afin de réduire de 30 % l'effort de
pêche en kW/jour par rapport aux niveaux de 2003 dans ses propositions établissant les
possibilités de pêche pour 2005 et 2006. Le Conseil de ministres n'a toutefois accepté que deux
réductions successives de 10 % chacune de l'effort en 2005 et 2006 (CE, 2004, 2006a).
La Commission a reconnu que le respect de l'approche de précaution passait par la fixation de
TAC beaucoup plus bas et par des limitations plus strictes de l'effort, voire par l'interdiction de
certaines pêches (ECCOM, 2007a). Les maigres connaissances de base disponibles sur la
biologie des espèces d'eau profonde et sur l'état des stocks ont conduit à la définition de TAC et
de limitations de l'effort quelque peu arbitraires. Les TAC fixés pour 2003 et 2004 constituaient
un pas dans la bonne direction, mais, dans la plupart des cas, les captures restaient trop élevées
pour garantir la viabilité des stocks et étaient de surcroît largement supérieures aux captures
déclarées pour la plupart des stocks, ce qui laisse supposer que les TAC ne limitaient pas les
pêcheries. Lorsqu'elle a proposé des TAC applicables aux stocks d'eau profonde pour 2005 et
2006, la Commission a donc voulu s'assurer qu'ils étaient réellement restrictifs. Pour ce faire,
elle a utilisé comme données de base le niveau réel des captures et non les TAC existants.
Lorsque les avis scientifiques soulignaient la nécessité de réduire sensiblement l'effort de pêche
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PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
ou les captures sans donner de chiffre précis, une réduction de 30 % des possibilités de capture
était proposée. Lorsque les avis scientifiques donnaient un chiffre précis, celui-ci était utilisé
pour calculer les TAC proposés. Toutefois, afin d'atténuer les répercussions sociales et
économiques, les TAC proposés n'étaient jamais inférieurs à 50 % des prises enregistrées
en 2003.
Le Conseil de ministres n'a pas pu accepter la méthodologie proposée par la Commission et a
préféré opter pour des réductions plus modestes, atteignant au maximum 15 % des TAC
existants plutôt que des captures déclarées. Cette démarche a été motivée par la difficulté, sur le
plan politique, de présenter des réductions apparemment importantes des possibilités de pêche
de stocks d'eau profonde alors que ces dernières étaient perçues comme un moyen de compenser
le déclin des pêcheries exploitées sur le plateau continental (ECCOM, 2007a). Pour ce qui est
des stocks faisant pour la première fois l'objet d'une proposition de TAC en 2004, le Conseil
s'est par contre aligné sur la proposition de la Commission, à savoir des réductions comprises
entre 30 et 50 % du niveau effectif des captures déclarées (ECCOM, 2007a).
L'intérêt de l'utilisation des TAC en tant qu'instrument de gestion de la pêche est bien
documenté (Cochrane, 2002). La plupart des pêcheries ayant un caractère international, les
gestionnaires et les responsables politiques jugent les TAC intéressants dans la mesure où ils
permettent d'allouer des quotas nationaux par le biais d'un mécanisme simple. Il est par ailleurs
beaucoup plus simple d'identifier les résultats des quotas nationaux car les données concernant
les débarquements passés sont plus facilement accessibles que les données relatives à l'effort.
Quoi qu'il en soit, la gestion de la pêche en eau profonde dans l'Atlantique du NE à l'aide de
TAC et de quotas uniquement a peu de chances d'être couronnée de succès dans la mesure où on
ignore le rapport entre les captures et la mortalité par pêche (F) et où une réduction des TAC
risque fort de ne pas se traduire par une diminution proportionnée de la F. De surcroît, les TAC
récemment introduits par l'UE, bien que beaucoup plus bas que les récents débarquements
internationaux totaux pour certaines espèces, pourraient ne pas avoir d'effet conservateur très
positif car la plupart des stocks sont sur le déclin et la diminution des captures pourrait tout
simplement être liée à une baisse des taux de capture et non de la F.
On craint par ailleurs que les TAC ne conduisent à une augmentation des rejets dans les
pêcheries mixtes. De nombreuses pêcheries d'eau profonde capturent une série d'espèces d'eau
profonde ou une combinaison d'espèces d'eau profonde et du plateau continental (baudroie et
merlu, par exemple), comme c'est le cas sur le talus continental à l'ouest du Royaume-Uni. Dans
ces pêches, les TAC applicables aux différents espèces peuvent être atteints à des vitesses
variables, avec pour conséquence une augmentation des rejets des espèces excédant le quota par
les navires pêchant des espèces non couvertes. Une telle attitude devrait entraîner une
augmentation de la F des espèces d'eau profonde, car tous les poissons rejetés meurent des suites
des changements de pression subis lorsqu'ils sont ramenés à la surface de la mer (choc
bathymétrique) et des blessures dues aux filets, dans le cas de la pêche au chalut (Connolly et
Kelly, 1996; Koslow et al., 2000) (la plupart des espèces d'eau profonde sont dépourvues de
mucus protecteur et sont dès lors plus sensibles aux blessures par frottement). Ces prises
accessoires entraînent également la mort d'espèces dépourvues d'intérêt commercial, de sorte
que la pêche en général, et le chalutage en particulier, peuvent avoir un impact considérable sur
la communauté plus vaste des poissons d'eau profonde. Pour que les TAC soient efficaces dans
les pêcheries mixtes, les TAC applicables à des stocks individuels doivent être fixés les uns par
rapport aux autres à des niveaux permettant de réduire au minimum les rejets et les prises
accessoires. Cet objectif est extrêmement difficile à atteindre, même dans les pêcheries mixtes
des hauts fonds pour lesquelles on dispose pourtant de beaucoup plus d'informations sur les taux
de captures et de rejets. En ce qui concerne les stocks d'eau profonde, les TAC individuels ont
été fixés exclusivement sur la base des déclarations officielles de captures et des très rares
informations disponibles sur la composition des captures pour chacune des pêcheries concernées
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
ou sur les taux de rejets. En outre, sur les 48 espèces recensées dans le règlement CE relatif à la
délivrance de permis (CE, 2002b), seules 9 font l'objet de TAC. Pour la plupart des autres
espèces, la Commission a argué que les prises étaient trop sporadiques ou les quantités
capturées, trop faibles pour qu'il soit possible d'établir des TAC. Malheureusement, le fait que
les TAC ne s'appliquent qu'à un nombre limité d'espèces a encouragé les opérateurs à manipuler
les chiffres relatifs à la répartition des espèces dans les captures afin d'éviter qu'elles ne soient
déduites des quotas (ECCOM, 2007a).
En dépit des difficultés et des lacunes, la Commission a conclu que les TAC avaient
probablement permis de réduire quelque peu la F de certaines des principales espèces ciblées.
Elle a par ailleurs admis la nécessité de compléter les TAC par d'autres mesures, en particulier
des restrictions de l'effort de pêche, en vue d'assurer la gestion à long terme des stocks d'eau
profonde. La Commission a toutefois remis en cause l'efficacité des règlements relatifs à l'effort
de pêche adoptés par le passé. La capacité des navires détenteurs de permis de pêche en eau
profonde est limitée à la capacité globale de tous les navires qui, au cours de l'une des
années 1998, 1999 ou 2000, ont débarqué plus de dix tonnes d'un mélange d'espèces d'eau
profonde (CE, 2002b). Ce plafonnement de la capacité visait à limiter l'expansion de la pêche en
eaux profondes, mais n'a probablement eu aucun effet dans la pratique. Cela s'explique en partie
par le fait que certains stocks d'eau profonde sont exploités sous la forme de prises accessoires
dans le cadre de pêcheries ciblant des espèces des hauts fonds. C'est le cas notamment de la
lingue commune, du brosme et de la baudroie, mais également, dans des pêcheries beaucoup
plus larges, des prises accessoires d'argentine dans le cadre de la pêche du merlan bleu. Les
limites de capacité s'appliquent donc aussi à des navires qui ne ciblent pas les stocks d'eau
profonde et représentent une proportion bien plus élevée de la capacité totale de la flotte qu'on
pourrait le croire au vu de l'importance relative des pêcheries d'eau profonde. Un deuxième
problème tient au fait qu'en application de l'article 4, le calcul de la limite doit prendre en
compte la capacité globale de tous les navires qui, au cours de l'une des années de la période
allant de 1998 à 2000, ont capturé plus de dix tonnes. À supposer, par conséquent, qu'un navire
ait capturé 10 tonnes d'espèces d'eau profonde au cours d'une et une seule de ces années, et
qu'un autre navire en ait aussi capturé dix, mais au cours d'une autre année de la période et de
celle-là seulement, le calcul de la limite de capacité prendrait en compte la capacité de ces deux
navires. Fixées à des niveaux beaucoup trop hauts pour être réalistes, les limites ne permettent
donc pas de restreindre le nombre de navires ciblant les espèces d'eau profonde. Elles affectent
en outre considérablement l'efficacité des réductions de l'effort imposées en 2005 et 2006.
De manière générale, la gestion de la pêche en eau profonde dans l'Atlantique du NE par le biais
du contrôle de l'effort présente des avantages et des inconvénients. Le principal avantage est que
les réductions de l'effort de pêche auront un effet proportionné sur la F et permettront de gérer
les pêcheries en l'absence d'informations sur le rapport entre la F et les captures. Une
réglementation de l'effort par espèce pourrait convenir dans le cas des pêches dirigées, mais
pour les pêches mixtes, des mesures axées sur les flottes ou les engins pourraient s'avérer
nécessaires (ICES, 2003a). Le contrôle de l'effort présente toutefois un inconvénient majeur: en
cas de régime d'effort restrictif, les pêcheurs risquent de réagir en augmentant le rendement de la
pêche et des engins de pêche, un processus connu sous le nom de «technological creep»
(glissement technologique). Des améliorations au niveau de la conception des engins, des
équipements de détection des poissons et de navigation peuvent jouer un rôle déterminant dans
l'augmentation de la capacité de pêche des pêcheries côtières, artisanales et d'eau profonde,
tandis que dans les pêcheries hauturières, le développement des engins et techniques de pêche
est en cours. Des augmentations modestes de l'ordre de 2 à 4 % par an devraient se traduire par
une multiplication par deux du rendement de la pêche d'ici environ 36 et 14 ans, respectivement.
Les conséquences de ce glissement technologique peuvent être minimisées en surveillant les
caractéristiques des navires et des engins et en limitant les changements, mais une telle politique
étouffe l'innovation, nécessite la collecte de nombreuses données et a peu de chance d'être
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
efficace à 100 % car les pêcheurs essayeront toujours d'avoir une longueur d'avance sur leurs
concurrents, mais surtout sur les règlementations en matière de gestion (Pope, 2002). La
pratique européenne actuelle, qui consiste à limiter le nombre de kW/jour, devrait réduire
l'impact du glissement technologique dans la mesure où il a été démontré que, dans de
nombreuses pêcheries, il existait un lien étroit entre la puissance de pêche et celle des moteurs
(Large, 1986, 1992).
Par conséquent, une des solutions pour assurer la bonne gestion de ces pêcheries pourrait
consister à combiner efforts de pêche et contrôles des captures. L'effort de pêche en eau
profonde doit faire l'objet d'une attention beaucoup plus importante que la pêche sur le
plateau continental, compte tenu du caractère limité des résultats des évaluations des
stocks et des problèmes que pose la gestion de pêches mixtes à l'aide de TAC. Les facteurs
affectant la rentabilité de la pêche doivent toutefois encore faire l'objet d'un examen
minutieux. Dans ce contexte, les mesures de gestion introduites dans l'UE constituent
clairement un pas dans la bonne direction, même si leur portée et leur teneur ne sont pas
suffisamment rigoureuses pour réduire l'exploitation à des niveaux viables.
Chapitre 5. Lien entre gestion des stocks d'eau profonde et évaluations des
stocks
L'évaluation des stocks des principales espèces d'eau profonde exploitées à des fins
commerciales dans l'Atlantique du NE a été tentée pour la première fois par le CIEM en 1998
(ICES, 1998), les évaluations les plus récentes ayant été réalisées par le WGDEEP en 2006
(ICES, 2006a). Malgré les progrès réalisés au cours de cette période, bon nombre des problèmes
rencontrés lors des premières années sont toujours d'actualité. Ainsi qu'expliqué ci-dessus
(Section 1.2), on dispose de très peu d'informations sur la structure des stocks de la plupart des
espèces, ce qui affecte la qualité des évaluations. À cela s'ajoute le fait qu'il existe très peu
d'enquêtes indépendantes visant à recueillir des données temporelles sur l'abondance des stocks
aux fins des évaluations. L'expérience acquise dans le cadre de l'évaluation des stocks
d'hoplostète orange au large des côtes de Nouvelle-Zélande et d'Australie a montré que les
évaluations étaient plus fiables lorsque des données indépendantes (provenant d'enquêtes sur
l'acoustique, le chalutage ou la ponte, par exemple) étaient disponibles. La plupart des enquêtes
réalisées dans les eaux profondes de l'Atlantique du NE avaient un caractère exploratoire ou
avaient pour but de recueillir des données biologiques, de sorte que les évaluations s'appuient
sur des indices d'abondance dérivés de données sur l'effort et les captures commerciales. Ces
données sont souvent rares, parfois de mauvaise qualité, et ne sont pas toujours mises à la
disposition du WGDEEP. En réponse à une requête formulée par la CE, le CIEM a proposé,
en 2006, d'enregistrer les principales zones et espèces par le biais d'enquêtes spéciales
coordonnées au niveau international. En 2007, à la suite d'une requête de la CPANE, le CIEM
s'est penché sur la coordination des enquêtes existantes sur les eaux profondes et a formulé des
recommandations en vue du développement de nouvelles enquêtes. Des progrès dans ces
différents domaines sont en effet nécessaires en vue d'accroître la fiabilité et la solidité des
évaluations. Sans cela et si la pêche se poursuit, la qualité de la gestion des stocks d'eau
profonde par l'UE risque d'être gravement menacée.
Les méthodes utilisées pour les évaluations sont dans une large mesure choisies en fonction des
caractéristiques du cycle biologique des différentes espèces, de la disponibilité de données sur
les pêcheries et des données biologiques. En dehors des données sur les CPUE fournies par les
navires de pêche commerciaux, les seules autres données temporelles disponibles pour la plupart
des stocks sont les débarquements totaux au niveau mondial. Les données temporelles
concernant la taille sont bien souvent rares et celles concernant l'âge, lorsqu'elles existent, sont
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
souvent peu nombreuses ou incomplètes et n'ont généralement pas été validées. Les méthodes
d'évaluation n'offrent par conséquent que des options limitées, les principales méthodes utilisées
pour les évaluations exploratoires étant le modèle de production de Schaefer (Schaefer, 1954;
Hilborn et Walters, 1992), la procédure de Beddington et Cooke (Beddington, 1983), des
modèles des tendances à long terme des CPUE standardisées (Basson et al., 2002), le VPA
séparable (Pope et Shepherd, 1982), les méthodes de réduction des stocks (Francis, 1992, 1993;
ICES, 2004a) et l'analyse des captures (AC) (Mesnil,2003; ICES, 2006a). Les seules
informations actuellement disponibles sur le niveau de la F proviennent d'estimations de la
mortalité instantanée totale (Z) calculée à partir de courbes de capture adaptées aux
compositions annuelles de tailles ou d'âges d'espèces pour lesquelles des estimations de la
mortalité naturelle (M) sont disponibles, ainsi que de modèles de réduction des stocks.
Malheureusement, les méthodes d'évaluation utilisées ne sont actuellement pas en mesure de
fournir des informations fiables sur le rapport entre la F et les captures, une situation qui a des
répercussions majeures sur la gestion de la pêche, puisqu'il n'a pas été possible de déterminer si
les réductions des TAC et de l'effort de pêche avaient conduit à une diminution de la F.
Chapitre 6. Les mesures techniques sont-elles adaptées à la gestion des
stocks d'eau profonde?
Les organes de gestion de la pêche dans l'Atlantique du NE reconnaissent que des mesures
techniques telles que la réglementation du maillage et les grilles de sélectivité ont peu de
chances d'être efficaces pour les pêcheries d'eau profonde, compte tenu de la forme et de la taille
inhabituelles de certaines espèces et des blessures subies par bon nombre des poissons pénétrant
dans les chaluts et s'en échappant ensuite par les mailles.
Les gestionnaires sont également conscients de la possibilité d’utiliser des zones d'interdiction
pour protéger les regroupements de reproducteurs (lingue bleue, par exemple), ainsi que les
espèces de poissons et les communautés de coraux associées aux monts sous-marins. La
CPANE a d'ores et déjà créé des zones d'interdiction pour protéger les coraux d'eau froide au
niveau de la dorsale médio-atlantique (DMA) et du banc Hatton, et envisage en outre, avec le
concours de la CE, d'instaurer de telles zones pour protéger la lingue bleue. La création de zones
d'interdiction doit toutefois s'accompagner de programmes chargés d'évaluer leurs conséquences
sur le déplacement de l'effort de pêche et sur la régénération des stocks/habitats. Les zones
d'interdiction protégeant des habitats vulnérables doivent par ailleurs faire l'objet d'un examen
minutieux afin de déterminer si elles ont également un effet bénéfique sur les stocks de
poissons.
Chapitre 7. Problèmes actuels
7.1. Stratégie de gestion des stocks d'eau profonde
Il ressort des explications fournies ci-dessus que la gestion des stocks d'eau profonde accuse un
sérieux retard par rapport à l'exploitation. En outre, les tentatives de réduction des TAC et de
l'effort de pêche ont été dans une certaine mesure compromises par la nécessité d'atténuer les
répercussions sociales et économiques. La CE indique (ECCOM, 2007a) que:
«De nombreux stocks d'eau profonde ont une si faible productivité que les niveaux
d’exploitation soutenables sont probablement trop bas pour permettre l'activité d'une pêcherie
économiquement viable. Il faut donc admettre qu'on ne peut éviter de réduire les niveaux
d'exploitation actuels de ces stocks, soit par choix afin d'en assurer la préservation, soit parce
que la pêche les conduit au bord de l'épuisement. Par ailleurs, le rythme de reconstitution des
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
stocks est si lent que toute réduction de leur exploitation doit être considérée comme une mesure
permanente et non comme un moyen de restaurer les stocks dans la perspective, à plus long
terme, d'en accroître le taux d'exploitation.»
Cette stratégie doit être complétée par l'identification des espèces qui, de par leurs
caractéristiques biologiques et leur vulnérabilité à la pêche, ne doivent pas être exploitées, ainsi
que des espèces moins vulnérables à l'exploitation et capables de soutenir une exploitation à plus
long terme. Une telle politique dépasse de loin le cadre de cette présentation, mais je voudrais
néanmoins citer trois exemples pour illustrer ces deux stratégies.
L'hoplostète orange est une espèce à croissance lente et à très longue durée de vie et les
pêcheries visent essentiellement les regroupements de reproducteurs/à des fins d'alimentation au
niveau des monts sous-marins et d'autres caractéristiques topographiques. Cette espèce est par
conséquent hautement vulnérable à la pêche et sujette à un épuisement progressif des
regroupements. On sait très peu de choses sur la régénération, qui pourrait être épisodique et se
dérouler sur des dizaines d'années. Il est donc probable que la régénération des stocks épuisés
soit elle aussi très lente et nécessite plusieurs décennies. La pêche à l'hoplostète orange dans la
sous-zone VI a commencé en 1991 et environ 5000 t ont été débarquées les deux premières
années. Des évaluations exploratoires de ce stock réalisées à l'aide de méthodes de réduction du
stock indiquent que le taux de capture viable pourrait ne pas dépasser 1,5 % de la biomasse
vierge exploitable, soit moins de 100 t par an (Large, 2002). Le TAC pour l'hoplostète orange
dans cette sous-zone est fixé en 2008 à 34 t et constitue essentiellement une sorte d'indemnité
pour les prises accessoires. À l'inverse, le TAC pour les requins d'eau profonde, qui constituent
eux aussi une espèce à croissance lente et à longue durée de vie présentant en outre un faible
taux de fécondité, a été fixé à 1646 t, ce qui reste énorme, même si ce chiffre est
considérablement inférieur à celui de 2007 (2472 t).
La lingue bleue présente des caractéristiques biologiques très différentes de l'hoplostète orange
et des requins d'eau profonde dans le sens où, étant un gadidé type, sa durée de vie n'est pas
particulièrement longue, sa croissance est raisonnablement rapide et son taux de fécondité est
élevé. Cependant, contrairement à d'autres gadidés, la lingue bleue fraye dans des zones
discrètes d'un point de vue spatial et souvent associées à des bancs offshore. Compte tenu de ses
caractéristiques biologiques, elle pourrait donc sembler moins vulnérable à l'exploitation, ce qui
n'est pourtant pas le cas car les pêcheries de l'ensemble des zones de l'Atlantique du NE visent
essentiellement les regroupements de reproducteurs. Les stocks de lingue bleue des différentes
zones sont donc considérés comme quasiment épuisés, raison pour laquelle le CIEM a
recommandé le maintien des zones d'interdiction visant à protéger les regroupements de
reproducteurs, voire leur extension, le cas échéant.
7.2. Importance de la gestion des rejets
Toutes les espèces de poissons d'eau profonde ramenées à la surface de la mer meurent d'un
barotraumatisme (choc bathymétrique) dû au changement de pression. C'est particulièrement
vrai lorsque les engins ne sont pas spécifiquement adaptés à une espèce ou à une taille de
poisson données (chaluts, par exemple). Le chalutage en eau profonde pourrait par conséquent
avoir un impact majeur sur la communauté plus vaste des poissons d'eau profonde. Les
tentatives visant à démontrer cet état de fait dans l'Atlantique du NE se sont toutefois avérées
peu concluantes dans l'ensemble (Basson et al., 2002).
La collecte et la disponibilité des données constituent un autre problème. Il existe en effet très
peu de données temporelles sur les rejets aux fins de l'évaluation des stocks. Les seules données
généralement disponibles sur les captures concernent les débarquements totaux au niveau
mondial, de sorte qu'il est fort probable que les rejets de poissons d'eau profonde pêchés par les
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
chalutiers aient été largement sous-estimés. Il est par conséquent capital de collecter des
données sur les rejets de manière plus large qu'à l'heure actuelle et de les diffuser dans un format
utilisable à des fins d'évaluation et d'analyse des impacts de la pêche. Dans ce contexte, la CE
est en train de revoir sa politique en matière de rejets (ECCOM, 2007b), l'une des options
envisagées étant leur interdiction totale. Cette solution pourrait s'avérer particulièrement
appropriée pour les pêcheries d'eau profonde pour toutes les raisons exposées ci-dessus.
7.3. Rôle potentiel de l'approche écosystémique
Le CIEM (ICES, 2005b) a récemment émis un avis concernant l'application de l'approche
écosystémique (AE), qui est résumé ici. Cette section contient également une série de
propositions pertinentes pour la gestion des stocks d'eau profonde par l'UE.
L'AE est étroitement intégrée au concept de développement durable et met l'accent sur un
système de gestion préservant l'écosystème grâce à une utilisation appropriée par l'homme de
l'environnement marin, au profit des générations actuelles et futures. La mise en œuvre de l'AE
exige la définition d'objectifs écologiques et opérationnels clairs par le biais d'une procédure à la
fois inclusive et consultative. À cet égard, le rapprochement des objectifs économiques et
sociaux, d'une part, et écologiques, d'autre part, risque de se heurter à des défis majeurs.
Des indicateurs sont nécessaires afin de surveiller les progrès en faveur de la réalisation des
objectifs opérationnels et de soutenir les décisions de gestion. Ces indicateurs pourraient par
exemple décrire l'état de l'écosystème, des propriétés de l'écosystème axées sur l'activité
envisagée ou les impacts. S'ils veulent pouvoir s'appuyer sur des indicateurs pour prendre des
décisions, les gestionnaires doivent connaître les valeurs associées à des états spécifiques de
l'écosystème, lesquelles sont connues sous le nom de points de référence. Les points de
référence susceptibles de soutenir une gestion axée sur l'écosystème sont notamment les points
de référence relatifs à l'écosystème (ou composant) non exploité, les points de référence cibles,
liés à l'état considéré comme souhaitable de l'écosystème (compromis entre les avantages
environnementaux, sociaux et économiques), et les points de référence limites qui, lorsqu'ils
sont dépassés, indiquent que l'écosystème risque de subir des dommages graves ou irréversibles
ou que la société a été trop loin. Les estimations des indicateurs pouvant contenir des erreurs de
mesure, il est possible d'avoir recours à des points de référence de précaution afin d'éviter que le
point de référence limite ne soit dépassé. Les indicateurs doivent être évalués régulièrement par
rapport aux points de référence afin d'identifier tout changement au niveau de l'état du système.
Ce document n'a pas pour but de commenter plus avant les procédures et implications plus
larges liées à l'application de l'AE à l'écosystème des eaux profondes. L’analyse se limite ici à
examiner le développement et l'identification de points de référence biologiques en tant
qu'indicateurs de l'état des stocks et les progrès réalisés au niveau du développement de règles
de contrôle des captures (RCC), ainsi qu'à étudier les interactions entre les zones d'interdiction
existantes et proposées pour protéger les coraux d'eau froide du banc Hatton, les zones
d'interdiction potentielles pour protéger les regroupements de reproducteurs de lingue bleue et
les pêcheries existantes sur le talus continental au nord-ouest et à l'ouest de l'Écosse.
7.3.1. Points de référence de la biomasse et règles de contrôle des captures
En 2005, le WGDEEP a réexaminé les points de référence biologiques (PRB) utilisés par le
groupe de travail depuis 1998. Ceux-ci avaient été proposés par le groupe d'étude sur l'approche
de précaution (Study Group on the Precautionary Approach (SGPA)) du CIEM et l'Organisation
des pêches de l'Atlantique du Nord-Ouest (OPAN) en 1997 pour combler l'insuffisance de
données dans certaines situations et sont calculés comme suit:
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Ulim = 0,2 x Umax , c'est-à-dire, Ulim = 20 % de la biomasse vierge
Upa = 0,5 x Umax , c'est-à-dire, Upa = 50 % de la biomasse vierge
où U correspond à un indice de la biomasse exploitable généralement dérivé des CPUE
commerciales et Umax à la biomasse vierge.
Le WGDEEP a appliqué ces PRB à l'ensemble des stocks. Aucun point de référence de la F
(non illustré) n'a par contre été utilisé en raison de l'absence d'estimations fiables de la F.
En 2005, le WGDEEP a proposé d'adapter les PRB afin de prendre en compte les différences de
caractéristiques biologiques des diverses espèces (taux de croissance et âge de maturité, par
exemple). Les espèces ont ainsi été regroupées dans deux catégories, l'une reprenant les espèces
à croissance lente et à maturation tardive (catégorie 1: hoplostète orange, grenadier de roche et
requins d'eau profonde) et l'autre, les espèces à croissance relativement rapide et à maturité
précoce (catégorie 2: toutes les autres espèces). Il a été estimé que les seuils actuels de 50 % et
20 % étaient tout à fait pertinents pour définir les PRB de précaution des espèces de la
catégorie 2. Pour ce qui est des espèces de la catégorie 1, le WGDEEP a estimé que les seuils
devaient tenir compte de la vulnérabilité particulière de ces espèces à l'exploitation et de leur
capacité de régénération. Deux propositions différentes ont donc été émises pour quantifier ces
seuils:
1. Les seuils doivent être supérieurs à ceux proposés pour les espèces de la catégorie 2 et leurs
valeurs doivent être fixées par les gestionnaires;
2. Les seuils doivent être fixés de manière provisoire à 75 % et 50 % de la biomasse vierge
pour Upa et Ulim, respectivement, et pouvoir être adaptés en fonction de l'AP en l'absence de
données suffisantes.
Le WGDEEP n'étant pas parvenu à se mettre d'accord sur la méthode à adopter, cette question
devra par conséquent probablement être étudiée par le CSTEP.
À l'heure actuelle, le CIEM n'utilise pas les PRB dans ses avis officiels. Il craint en effet que les
estimations de l'Umax ne correspondent pas à la biomasse vierge pour certains stocks. Le
WGDEEP a d'ailleurs admis qu'à plus long terme, il serait préférable d'utiliser des PRB basés
sur la biomasse du stock reproducteur (BSR) et les taux de F, plutôt que sur les niveaux de
CPUE, dès que des évaluations plus fiables des stocks seront disponibles.
En ce qui concerne les RCC, le WGDEEP estime que le CIEM pourrait, pour les espèces des
catégories 1 et 2, émettre des avis similaires à ceux publiés pour les stocks pour lesquels des
évaluations sont réalisées de façon systématique. Les RCC suivantes ont été identifiées:
• Si U < Ulim, la pêche doit être interdite
• Si Ulim < U < Upa, l'exploitation doit être réduite jusqu'à ce que U > Upa,
• Si U > Upa, le taux d'exploitation doit être fixé de manière à ce que U reste supérieur à Upa
La principale différence entre les avis concernant les espèces appartenant aux catégories 1 et 2
se situerait au niveau de la période de régénération. Dans le cas des espèces de la catégorie 2,
des RCC pluriannuelles pourraient être envisagées, de sorte que la période de régénération des
stocks pourrait dépasser un an. Des plans pluriannuels de régénération des stocks ne sont par
contre pas envisageables pour les espèces de la catégorie 1.
Les RCC ci-dessus peuvent également être appliquées à des pêches mixtes. D'un point de vue
biologique, mais surtout pour préserver la biodiversité, le WGDEEP a proposé d'utiliser le stock
le plus pauvre ou le plus vulnérable pour fixer la RCC. Il a toutefois estimé qu'il incombait aux
gestionnaires de décider de l'importance accordée à chaque stock. À plus long terme, il conseille
PE 389.606
44
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
d'élaborer les RCC sur la base des nouveaux PRB calculés, ainsi qu'expliqué ci-dessus. Par
ailleurs, les RCC doivent prendre en compte les facteurs environnementaux pertinents d'un point
de vue quantitatif.
7.3.2. Habitats vulnérables, zones d'interdiction et problèmes de gestion de la pêche sur le
talus continental
Ce document se penche sur la gestion des stocks d'eau profonde par l'UE et, à ce titre, exclut
toute discussion sur la gestion et la protection des habitats vulnérables des eaux profondes. Il est
néanmoins probable qu'il existe un chevauchement entre les zones d'interdiction existantes et
proposées visant à protéger les coraux d'eau froide du banc Hatton et les zones d'interdiction
potentielles destinées à protéger les regroupements de reproducteurs de la lingue bleue. Ces
dernières pourraient en outre avoir un impact sur les pêcheries existantes du talus continental au
nord-ouest et à l'ouest de l'Écosse. La Commission et la CPANE souhaitant toutes deux créer
des zones d'interdiction pour la lingue bleue, il n'est pas inutile de se pencher sur ces problèmes
de manière plus approfondie.
Les tentatives pour recueillir des informations sur la distribution spatiale et temporelle des
regroupements de reproducteurs, en réponse à des requêtes de la CPANE et de l'UE (voir
précédemment), ont en grande partie échoué parce que la plupart des zones générales dans
lesquelles fraie la lingue bleue ne font l'objet d'aucune enquête scientifique et, lorsque de telles
enquêtes existent, elles se déroulent en dehors des périodes de reproduction de cette espèce
(enquête des eaux profondes réalisée en automne par les Scottish Fisheries Research Services
(FRS) au NO de l'Écosse, par exemple). Les tentatives pour obtenir des informations
directement auprès des pêcheurs ont jusqu'à présent été tout aussi infructueuses car la
localisation des regroupements de reproducteurs est une information sensible d'un point de vue
commercial (ICES, 2004b; 2007a). Une nouvelle étude5 (Large et al., en préparation) basée sur
de nouvelles informations provenant de journaux de bord de navires européens,
d'enregistrements SSN et des pêcheurs est toutefois parvenue à identifier trois grandes zones de
reproduction de la lingue bleue australe:
•
le long du talus continental au NO de l'Écosse dans la zone VIa (eaux européennes);
•
sur, autour et au NO du banc Rosemary dans la zone VIa (eaux européennes);
•
sur les bords est et sud du banc Hatton dans les zones VIb et XIIb (eaux internationales).
Les limites spatiales maximales de reproduction sont présentées dans la Figure 1.
5
Dans le cadre d'un programme DGR spécifique de la Commission des Communautés européennes «Scientific
Support to Policies», SSP-2004-22745 «Probabilistic assessment, management and advice model for fishery
management in the case of poor data availability» (POORFISH). Les résultats ne reflètent pas nécessairement
l'avis de la Commission européenne et n'anticipent en aucun cas les politiques futures de la Commission.
45
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Figure 1. Distribution spatiale des zones de frai de la lingue bleue australe, telles que
renseignées par les questionnaires POORFISH complétés par des pêcheurs et
des scientifiques de la pêche
62
D0
-
D2
D4
D6
D8
E0
E2
E4
E6
300m
900m
1500m
IVa
52
51
(5)
(6)
50
60
(4)
49
VIb
VIa
48
(1)
47
58
Latitude
46
(3)
45
44
43
42
56
(2)
41
40
39
38
54
VIIc
Blue ling
spawning
-20
VIIb
-15
VIIa
-10
37
-5
Longitude
Remarque: les chiffres entre parenthèses correspondent aux bancs suivants:- (1) Rosemary, (2) Rockall, (3) Hatton, (4) Lousy,
(5) Bill Bailey et (6) Féroé.
Si l'on s'en tient uniquement à la lingue bleue, les zones devant être fermées doivent couvrir, en
termes de taille et de localisation exacte, toutes les régions où des preuves de la reproduction de
l'espèce ont été recueillies. D'après le graphique ci-dessus, ces zones seraient toutefois
relativement étendues et risqueraient d'affecter d'autres pêches majeures se déroulant sur et
autour du talus continental situé à l'ouest et au nord-ouest de l'Écosse (pêche britannique au
chalut et au filet maillant de la baudroie, par exemple). Une autre solution consisterait à définir
des zones d'interdiction beaucoup plus petites sur la base des données SSN recueillies par des
navires capturant des quantités substantielles de lingue bleue durant la période de frai (Figures 2
et 3).
Figure 2. Enregistrements SSN sur et au NO du banc Rosemary (47D9, 47E0) transmis
par des chalutiers britanniques (Angleterre et Pays de Galle), pour des sorties
pour lesquelles les débarquements de lingue bleue dépassent 10 t (2000-2001)
D5
D6
60.5
- 300m
- 900m
-+ 1500m
D7
D8
D9
E0
Vb
50
+
+
49
+
Latitude
60.0
+ +
++
+ ++ + +
+ +++++
++ + +
+++++
+
+ ++
++
++
+
+
++++
++++
+++ ++
+++
+
+
+
++ +
+ ++
++++
+
+ ++++++
+
+
VIb + + ++
VIa
+ + + +
+
+
+
+
+
+
+ +
+
+ +
+
+
+
+
+
+
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+
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+
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+
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+
+
+
+
+
+
+
++
+
+
+
+
+
+
+
+++ +
++
+
+
++
59.5
+
+
59.0
+
+
++
+ +++++ +
+
+
+
+++
+
+
++
+
+
++
++
+
++
++
+
++
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+ +++ +
+
+
+
+
+
47
+
+
+
+
VMS location
+
-14
-13
-12
Longitude
PE 389.606
48
46
+
-11
+
+
+
+
-10
+46
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Figure 3. Enregistrements SSN sur et autour du banc Hatton transmis par des chalutiers
britanniques (Angleterre et Pays de Galle), pour des sorties pour lesquelles les
débarquements de lingue bleue dépassent 10 t (2000-2001)
D0
57.5
58.0
Latitude
+
D1
D2
D3
+
300m
900m
1500m
58.5
59.0
-
VMS location
-20
+
+
+
+
++
+
+
+
++
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
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+ + ++ +
+
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+ +
+
+ ++
+
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+
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+ +
+
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+ ++++
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++
+
+ ++
+
+++++
+
+
++ + +
+++ ++
++
++
+++
+
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+
+ ++
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+ ++
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+ +++
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+ + ++
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+++
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+
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+
+++
+
+
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+
+
+
+ +
+++++
+
+
++
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+ +++++
++
+
++
+
+
++
++
+
+ + +
+
+
++ +
+
+
++ +
+
+
++++
+
+
+
++ +
+ ++
++
+
+
+
+
++
++
+
++
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
++++
+
XIIc
VIb
+
-19
-18
+
+
+
46
+
+
45
+
+
+
+
+
44
-17
-16
Longitude
Aucune donnée SSN concernant la pêche à la lingue bleue sur le talus continental à l'ouest et au
nord-ouest de l'Écosse n'était disponible pour l'étude. La CE a toutefois pu obtenir ces données
auprès du Royaume-Uni (Écosse), de la France et de l'Espagne et a transmis aux EM une
proposition de zones d'interdiction dans les eaux européennes pour discussion et commentaires.
Les zones d'interdiction proposées et les zones de frai identifiées/renseignées par les
questionnaires POORFISH et des scientifiques de la pêche sont comparées à la Figure 4.
62
Figure 4. Distribution spatiale des zones de frai de la lingue bleue australe, telles
qu'identifiées/renseignées par les questionnaires POORFISH complétés par des
pêcheurs et des scientifiques de la pêche, proposée par la CE aux EM en
septembre 2007 pour discussion et commentaires
D0
D2
D4
D6
D8
E0
E2
E4
E6
IVa
52
51
50
60
49
VIb
VIa
48
47
45
58
Latitude
46
44
43
42
56
41
40
39
54
VIIc
-20
Blue ling spawning
Proposed VIIa
Closure
VIIb
-15
-10
38
37
-5
Longitude
Les zones proposées, quoique plus petites, sont presque entièrement situées à l'intérieur des
limites spatiales identifiées ici pour les regroupements de reproducteurs sur et autour du talus
continental.
47
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
La zone au niveau et autour du banc Hatton Bank se situe dans des eaux internationales, de sorte
que toute proposition de zone d'interdiction devra être examinée par la CPANE. Notez qu'il
existe déjà une zone d'interdiction sur le banc Hatton afin de protéger les coraux d'eau froide
(NEAFC, 2006) et que le Working Group on Deep-water Ecology (WGDEC) du CIEM a
récemment proposé l'extension de la zone (ICES, 2007b). La zone d'interdiction existante et la
zone étendue proposée doivent toutefois faire l'objet d'un examen minutieux afin de déterminer
l'étendue de la protection qu'elles offrent aux regroupements de reproducteurs de la lingue bleue
et la nécessité de les élargir davantage.
Toute zone d'interdiction créée doit par ailleurs être limitée dans le temps. Dans sa proposition
actuelle, la CE prévoit de fermer les deux zones envisagées (Figure 4) de mars à juin. D'après
les informations obtenues ici, la période de reproduction maximale s'étend de février à juin et le
frai dans la zone VIa aurait lieu un peu plus tard que dans la zone VIb. Quoi qu'il en soit, et si
l'on veut réduire l'impact de la fermeture des zones sur d'autres pêches, il conviendrait de fermer
la zone située dans, sur et autour du banc Rosemary (Figure 2) de mars à mai et celle du banc
Hatton (Figure 3) en mars et en avril.
La question se pose également de savoir quels engins de pêche interdire dans les zones
d'interdiction. La plupart des lingues bleues sont capturées par des chaluts de fond et, dans une
moindre mesure, par des filets maillants, lesquels joueraient un rôle important car des données
non publiées recueillies par des observateurs du Cefas lors de sorties de bateaux britanniques à
filets maillants pêchant la baudroie en mai et en juin dans des fonds de pêche situés au NO de
l'Écosse, dans la zone couverte, font apparaître des prises accessoires importantes de lingue
bleue. La lingue bleue peut également être capturée accessoirement par des palangriers pêchant
la lingue commune, le brosme et d'autres espèces. Il semble dès lors raisonnable d'exclure tout
engin de pêche démersal dans les zones d'interdiction créées, à l'exception des pièges destinés au
crabe rouge, qui n'affectent pas la lingue bleue.
7.4. Chalutage de fond en eaux profondes
La Commission a récemment présenté une stratégie pour la protection des écosystèmes
vulnérables d'eaux profondes contre les pratiques de pêche destructrices, et notamment les
engins de fond et les chaluts (ECCOM, 2007c). Cette initiative concorde parfaitement avec les
recommandations formulées par l'Assemblée générale des Nations unies (AGNU, 2006).
La plupart des navires communautaires qui pêchent en haute mer opèrent dans les zones où des
organisations régionales de gestion des pêches (ORGP) sont déjà en place ou dans lesquelles le
processus lié à leur création est bien engagé. Dans ces zones, la Commission fera en sorte que
des mesures soient mises en œuvre pour garantir la protection des écosystèmes marins
vulnérables d'eaux profondes conformément au principe de précaution et sur la base d'une
évaluation d'impact préalable. C'est le cas, par exemple, de l'Atlantique du NE, où l'UE travaille
en tant que partie contractante au sein de la CPANE.
Toutefois, dans plusieurs zones des océans de la planète, aucune ORGP n'est actuellement
opérationnelle. Dans ces eaux, les mesures proposées par la Commission exigeraient que les
navires communautaires pêchant au moyen d'engins de pêche de fond sollicitent un permis
spécial auprès de leur État membre. Ces permis ne seraient délivrés qu'après la réalisation par
l'État membre d'une évaluation des effets potentiels des activités de pêche prévues des navires
concluant que ces activités ne sont pas susceptibles d'avoir des effets néfastes notables sur les
écosystèmes marins vulnérables (EMV). Ces évaluations devront s'appuyer sur les meilleures
informations scientifiques disponibles et appliquer le principe de précaution. La Commission
propose, à titre de mesure complémentaire, l'interdiction absolue d'utiliser des engins de pêche
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48
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
de fond à des profondeurs supérieures à 1000 mètres dans toutes les zones où le nouveau
règlement s'applique.
En ce qui concerne les navires d'eau profonde de l'UE pêchant dans l'Atlantique du NE, la
Commission pourrait examiner la faisabilité ou l'opportunité d'interdire la pêche à l'aide d'engins
de fond à des profondeurs supérieures à 2000 mètres. La pêche à de telles profondeurs étant
rare, une telle interdiction n'aurait qu'un faible impact sur les pêcheries existantes, mais
empêcherait le développement de nouvelles. Une telle mesure irait dans le sens de l'approche de
précaution et des mesures de gestion similaires adoptées dans d'autres parties du monde, telles
que l'interdiction du chalut de fond à des profondeurs >1000 mètres dans la Méditerranée
introduite par la Commission générale des pêches pour la Méditerranée (GFCM, 2005).
7.5. Gestion des plans d'observation et d'échantillonnage des eaux profondes de l'UE
En vertu de la réglementation sur la délivrance de permis de pêche en eau profonde (CE,
2002b), chaque EM est tenu de préparer un plan d'échantillonnage pour le déploiement
d'observateurs et l'échantillonnage des débarquements dans les ports et doit s'assurer que les
données recueillies sont pertinentes pour l'évaluation et la gestion des stocks de poissons d'eau
profonde. Les plans d'échantillonnage devaient être évalués par la Commission dans les 6 mois
suivant l'entrée en vigueur du règlement. La plupart des EM n'ont cependant pas respecté cette
échéance, une situation qui s'est améliorée après plusieurs rappels à l'ordre de la Commission,
même si certains EM n'ont toujours pas transmis leur plan d'échantillonnage.
L'un des principaux défauts du règlement relatif à la délivrance de permis de pêche en eau
profonde est l'absence de stratégie d'échantillonnage pour les stocks d'eau profonde, ce qui
signifie que même si les exigences relatives à la mise en œuvre d'un plan d'échantillonnage sont
remplies, les données recueillies risquent d'être de mauvaise qualité ou difficiles à obtenir auprès
des différents États membres (ECCOM, 2007a). Le problème de l'approche actuelle est qu'elle
est essentiellement ascendante et en grande partie déterminée (et limitée) par les fonds et les
effectifs des différents EM. Les modifications apportées au règlement européen relatif à la
collecte des données devraient améliorer la situation et faire en sorte qu'une plus grande priorité
soit accordée aux stocks d'eau profonde.
Une procédure descendante est cependant également nécessaire. Dans le cadre de celle-ci, les
gestionnaires seraient chargés d'identifier et de déterminer les espèces/stocks d'eau profonde
devant faire l'objet d'une exploitation viable. Sur la base des caractéristiques biologiques de ces
espèces/stocks, le CIEM serait ensuite chargé d'identifier les méthodes d'évaluation pertinentes
(qui peuvent varier d'une espèce à l'autre) et de définir les niveaux d'échantillonnage minima
requis afin de garantir la précision et la fiabilité des évaluations par rapport aux critères fixés.
Dans la plupart des cas, ces tâches nécessiteront la présence d'observateurs, en particulier si la
surveillance des rejets doit être maintenue. Si cette proposition est suivie, les EM et la CE
devront veiller à allouer des ressources suffisantes pour garantir le respect des objectifs en
matière d'échantillonnage collectif. La pêche d'espèces/stocks vulnérables et/ou qui ne peuvent
pas être contrôlés de manière efficace devra ensuite être progressivement interdite.
7.6. Pêches nouvelles et existantes
Les conseils actuels concernant les pêches nouvelles et existantes sont présentés à la section 2.2.
La CE a d'ores et déjà entrepris de s'attaquer à ce problème en allouant de faibles TAC pour les
principales espèces dans les zones où la pêche ne s'est pas encore développée (hoplostète orange
au niveau de la dorsale médio-atlantique, par exemple).
49
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
La Commission a dû reconnaître que le fait que les TAC ne s'appliquent actuellement qu'à un
nombre limité d'espèces a encouragé les opérateurs à manipuler les chiffres relatifs à la
répartition des espèces dans les captures afin d'éviter qu'elles ne soient déduites des quotas. Pour
résoudre ce problème, elle pourrait envisager d'élargir la réglementation actuelle en matière de
TAC à l'ensemble des espèces répertoriées à l'annexe II du règlement sur la délivrance de permis
de pêche (voir annexe 1 de ce document). Dans ce cas, tous les TAC seraient fixés à des niveaux
très bas jusqu'à ce que la viabilité d'une capture plus importante ait été démontrée.
7.7.
Recours éventuel à l'approche de la PME
Lors du Sommet mondial sur le développement durable à Johannesburg en 2002, les États
membres de l'UE se sont engagés à protéger ou reconstituer les stocks de poissons de manière à
parvenir à une PME au plus tard en 2015. La PME correspond à la quantité maximale de
poisson pouvant être capturée dans un stock sans que le potentiel de production de ce dernier ne
soit compromis. La meilleure manière de parvenir à ce résultat consiste à exploiter les stocks à
des niveaux modérés. Si la pêche est trop importante, le stock concerné va diminuer, ce qui
entraînera également une baisse des captures (ECCOM, 2006).
Il est actuellement impossible de procéder à des évaluations fiables de la PME pour la plupart
des stocks d'eau profonde, en raison du peu de données disponibles pour les évaluations et de
l'absence quasi totale de données temporelles issues d'enquêtes indépendantes pour affiner les
évaluations. Ces problèmes doivent être pris en charge dès aujourd'hui si l'on veut pouvoir
disposer d'estimations fiables de la PME d'ici à 2015.
7.8. Gestion des pêcheries d'eau profonde artisanales
Les pêcheries artisanales européennes en eau profonde sont essentiellement localisées au niveau
et autour des Açores (dorade rose, principalement) et au large des côtes du Portugal et de
l'Espagne (sabre noir, requins d'eau profonde et dorade rose, essentiellement). On ignore si les
stocks capturés par ces pêcheries artisanales ont un lien avec les autres stocks de ces espèces
localisés dans l'Atlantique du NE. Bon nombre de ces pêcheries existent néanmoins de longue
date et pourraient être viables à l'échelle locale. Il est dès lors important de ne pas y mettre fin de
manière sommaire sans avoir mûrement réfléchi à leurs mérites sociaux à cause de l'application
de mesures de gestion générales visant à contrôler d'autres pêches hauturières hautement
mécanisées dans d'autres parties de l'Atlantique du NE.
PE 389.606
50
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Références
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
RESSOURCES ET ÉCOSYSTÈME DES PÊCHERIES
D'EAU PROFONDE
Pascal LORANCE
Contenu:
On retrouve des pêcheries d'eau profonde dans tout l'Atlantique du Nord-est. Si la plupart
d'entre elles se sont développées au cours des 20 dernières années, certaines sont toutefois
plus anciennes. Selon la zone, ces pêcheries sont exploitées par des flottes de gros chalutiers
ou des flottilles artisanales. Les poissons d'eau profonde se caractérisent toutefois par une
faible productivité biologique, de sorte qu'ils ne supportent que de faibles taux
d'exploitation, un trait que partagent les espèces considérées comme d'eau profonde par le
CIEM et l'UE, bien qu'on les retrouve à des profondeurs variables. L'impact des engins de
pêche de fond constitue une menace pour les habitats d'eau profonde, en particulier ceux
contenant des récifs et des communautés benthiques denses. Dans les zones où le corail a été
quantifié, la proportion de récifs et de communautés affectés par la pêche s'est avérée élevée.
Quelques zones protégées ont donc été créées afin de préserver les habitats d'eau profonde.
IP/B/PECH/IC/2007-096
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Résumé
Dans l'Atlantique du Nord-est, la pêche en eau profonde utilise des chaluts, des filets dormants
et des palangres. Les navires pratiquant cette pêche sont tantôt des chalutiers modernes, tantôt
de petits bateaux artisanaux utilisant des palangres et des filets. Enfin, certaines flottes de gros
chalutiers débarquent du poisson frais tandis que d'autres possèdent des congélateurs à bord.
On entend par «eaux profondes» la partie de l'océan située à plus de 400 mètres de profondeur.
Cependant, pour de nombreuses espèces, le statut d'espèces d'eau profonde est sujet à discussion
car certaines vivent sur toute une plage de profondeurs ou à des profondeurs variables selon leur
distribution géographique. La plupart des espèces capturées à des profondeurs importantes se
caractérisent par une longue durée de vie et une faible productivité biologique. Dans le cadre du
processus d'examen de la situation en cours, l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture
(FAO) propose aujourd'hui d'accorder une attention particulière aux espèces «dont la biologie ne
peut supporter que des taux d'exploitation de faible intensité (généralement à croissance lente,
maturité tardive et qui vivent longtemps, etc.)» aux fins de l'évaluation et de la gestion de la
pêche.
La pêche a généralement pour effet de réduire la biomasse du stock exploité. D'après les
modèles, la production maximale d'un stock (qu'il soit d'eau profonde ou non) est équilibrée
lorsque le niveau de la biomasse atteint 20-40 % de la biomasse non exploitée. Cependant,
compte tenu de la faible productivité des stocks d'eau profonde, la proportion de la biomasse
pouvant être capturée chaque année tout en garantissant la viabilité du stock est faible. Plusieurs
stocks de l'Atlantique du NE ont fait l'objet d'une exploitation non viable et le CIEM
recommande aujourd'hui l'adoption de mesures pour réduire certaines pêcheries.
Les habitats d'eau profonde présentent une grande diversité et les principales préoccupations en
termes d'impact de la pêche sur ces habitats concernent les coraux d'eau froide, qui forment des
récifs au niveau local, et les communautés d'éponges. Les engins de pêche traînés sur le fond
marin (chaluts, par exemple) ont en effet un impact majeur sur ces récifs. Dans les zones où le
corail a été quantifié, il est apparu que la proportion de corail affecté par la pêche était élevée.
Les engins traînants, mais aussi les filets dormants et les palangres, peuvent en effet être
préjudiciables aux coraux d'eau froide. Les filets perdus au fond de la mer continueraient
notamment à capturer des poissons, un effet connu sous le nom de «pêche fantôme». Les coraux
d'eau froide et autres communautés d'organismes benthiques créant des structures
tridimensionnelles sur le fond marin abritent une grande diversité d'espèces. Tant les zones
marines protégées (APM) visant à protéger l'habitat benthique que les fermetures spatiales à des
fins de gestion de la pêche contribuent à préserver ces habitats et la diversité.
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
Chapitre 1. Principales pêcheries d'eau profonde de l'Atlantique du Nord-est
La plupart des pêcheries d'eau profonde types actuellement exploitées dans l'Atlantique du
Nord-est ont vu le jour il y a une vingtaine d'années, même si quelques-unes sont plus
anciennes. Ce chapitre se penche sur les principales pêcheries d'eau profonde en termes de
zones, de flottes et de développement dans le temps. Les espèces visées sont citées, mais feront
l'objet d'une analyse biologique plus détaillée au chapitre 2. L'analyse est réalisée sur la base des
écorégions proposées par le CIEM pour la mise en œuvre d'une approche écosystémique des
pêcheries situées dans les eaux européennes (Figure 1.1). Les zones et divisions CIEM sont
également utilisées pour préciser la distribution des stocks (Figure 1.2).
Figure 1.1. Écorégions proposées pour la mise en œuvre de l'approche écosystémique
dans les eaux européennes.
Les écorégions sont: les mers du Groenland et d'Islande (A), la mer de Barents (B), les îles
Féroé (C), la mer de Norvège (D), les mers celtiques (E), la mer du Nord (F), le plateau
continental atlantique sud-européen (G), le mer Méditerranée occidentale (H), les mers
Adriatique et Ionienne (I), les mers Égée et Levantine (J) et l'océan Atlantique du Nord-est (K)
(ICES 2006a).
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Figure 1.2. Cartes des sous-zones et divisions CIEM utilisées pour les statistiques des
captures de la pêche et la définition des stocks
Source: http://www.ices.dk
Chapitre 1.1. Pêcheries d'eau profonde dans les mers du Groenland et d'Islande
(écorégion A)
Cette écorégion comprend la sous-zone CIEM XIV, la division Va et les parties nord des souszones I et II. La pêche au chalut et à la palangre visant le flétan noir et le sébaste est pratiquée au
sud de cette écorégion (CIEM XIVb). Les sébastes comptent trois espèces (Sebastes spp.). Ces
pêcheries sont à l'origine de petites prises accessoires de grenadiers de roche et à tête rude et de
brosmes. La pêche au sébaste est très développée dans les eaux islandaises, en particulier celle
du sébaste atlantique (Sebastes mentella), qui est capturé par des chaluts pélagiques et de fond.
La pêche au flétan noir se fait quant à elle au chalut de fond. En 2006, environ 100 000 t de
sébaste et 20 000 t de flétan noir ont été débarquées pour l'ensemble de l'écorégion. Les sébastes
et le flétan noir ne sont pas traités comme des espèces d'eau profonde par le CIEM mais peuvent
néanmoins être considérées comme telles (voir chapitre 2).
La lingue bleue, la lingue commune et le brosme sont des espèces cibles des pêcheries d'eau
profonde islandaises très anciennes. Les prises accessoires d'autres espèces d'eau profonde de
ces pêcheries sont faibles. Au total, les débarquements de ces trois espèces ont atteint entre
10 000 et 15 000 t par an au cours des 20 dernières années. Une pêcherie ciblée sur la grande
argentine a vu le jour à la fin des années 1990 et génère des débarquements de l'ordre de 30005000 t ces dernières années. Les captures d'autres espèces d'eau profonde autour de l'Islande
sont essentiellement des prises accessoires mineures.
Les débarquements d'espèces d'eau profonde autour de l'Islande sont gérés par le biais d'un
système de quota individuel transférable (QIT). Ces dernières années, environ 120 navires
islandais ont participé à des pêches à la lingue commune, à la lingue bleue et au brosme, les
débarquements annuels par navire étant compris entre 100 et 1000 t. La contribution des flottes
européennes à la capture d'espèces d'eau profonde en Islande est marginale (division CIEM Va).
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
Chapitre 1.2. Pêcheries d'eau profonde dans les mers de Barents et de Norvège
(écorégions B et D)
Ces écorégions couvrent la partie sud des sous-zones CIEM I et II. Trois espèces, la lingue
(Molva molva), le brosme (Brosme brosme) et la grande argentine (Argentina silus),
représentent presque 99 % des captures d'eau profonde de cette zone débarquées (ICES 2006c).
Les pêcheries sont essentiellement norvégiennes avec une contribution mineure des flottes
européennes, russes et féroïennes. La lingue et le brosme sont essentiellement pêchés par des
palangriers et des navires à filets maillants norvégiens, tandis que la grande argentine est
capturée à l'aide de chaluts pélagiques et de fond. Les prises accessoires d'autres espèces sont
faibles. La pêche à la lingue et au brosme est pratiquée de longue date dans ces zones. Au cours
des vingt dernières années, les débarquements annuels totaux de lingue sont restés relativement
stables (légèrement supérieurs à 5000 t), tandis que ceux de brosme ont diminué, passant de
presque 15 000 t à un niveau similaire à celui de la lingue. La pêche à la lingue bleue a connu un
important essor en 1998 (environ 3000 t), mais n'a cessé de décliner depuis lors pour atteindre
un niveau inférieur à 200 t par an aujourd'hui, de sorte que ce poisson ne constitue plus une
espèce cible majeure dans les mers de Barents et de Norvège. La pêche à la lingue bleue par les
palangriers norvégiens est fonction de la taille du stock de cabillaud (leur principale cible) et du
quota alloué à cette espèce. Enfin, la pêche à la grande argentine a fluctué au fil du temps (entre
4000 et 16 000 t par an), en raison principalement des variations de la demande du marché
(ICES 2006c).
La pêche au sébaste et au flétan noir est également pratiquée dans ces zones. C'est ainsi
qu'en 2006, 39 000 t de sébaste et 18 000 t de flétan noir ont été débarquées.
Chapitre 1.3. Pêcheries d'eau profonde sur le plateau des îles Féroé (écorégion C)
La pêche à la palangre à la lingue et au brosme est pratiquée dans cette écorégion, même si ces
espèces ne représentent qu'une partie mineure de l'activité des navires féroïens. Pendant
quelques années, un palangrier féroïen a exploité les requins d'eau profonde (Centroscymnus
coelolepis et Centrophorus squamosus). La principale flotte de chalutage de fond féroïenne est
constituée d'une dizaine de gros chalutiers de fond et a pour principales cibles le sébaste, le
flétan noir et la lingue bleue, ainsi que le sabre noir et le grenadier de roche. Depuis les
années 1990, il existe une pêche au filet maillant ciblée sur la lotte et le flétan noir, avec des
prises accessoires de crabe rouge (Chaceon affinis) et de lingue bleue. Depuis peu, une pêche au
chalut ciblée sur la grande argentine est exploitée par six gros chalutiers (ICES 2006c).
Chapitre 1.4. Pêcheries d'eau profonde dans les mers celtiques (écorégion E)
Cette écorégion comprend les eaux situées autour des îles Britanniques (parties des sous-zones
CIEM VI et VII) et s'étend à l'ouest jusqu'au banc Rockall et à la partie est du banc Hatton. Elle
inclut également une partie de la zone économique exclusive (ZEE) de l'Union européenne et
des eaux internationales plus à l'ouest. Au sein de la ZEE de l'UE, la pêche au chalut de fond
dans les sous-zones CIEM VI et VII est essentiellement exploitée par des flottes françaises,
irlandaises et écossaises (ICES 2006c). La flotte française, qui possède un permis de pêche
européen en eau profonde, est constituée de 45-50 gros chalutiers de pêche fraîche (navires qui
effectuent des sorties en mer relativement courtes de maximum 12 jours car ils ne possèdent pas
de congélateur à bord). Les gros chalutiers français (environ 50 m et plus) opèrent
essentiellement dans les zones les plus au nord (nord-ouest de l'Écosse, îles Féroé), tandis que
les navires de plus petite taille (25-40 m) pêchent à l'ouest de l'Irlande (division CIEM VII) et
dans la partie sud de la division CIEM VI. La plupart des navires de la flotte pêchent sur le talus
et le plateau continentaux. Seule une poignée de chalutiers débarque exclusivement des espèces
d'eau profonde.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Depuis 1996, une flotte de chalutiers congélateurs de fond espagnols pêche également dans les
eaux internationales au large du banc Hatton (zones CIEM XIIb et VIb1). En 2005, 29 chalutiers
ont participé à cette pêche, quoique de façon discontinue. Les navires effectuent des sorties en
mer de durée variable et pêchent à des profondeurs comprises entre 800 et 1600 m.
Une flotte enregistrée au Royaume-Uni de navires à filets maillants a opéré dans les zones VI et
VII jusqu'en 2005, avec pour cibles le merlu, la lotte et les requins d'eau profonde. En 2006, la
Communauté européenne a introduit une interdiction temporaire de l'utilisation de filets
maillants de fond à plus de 200 m de profondeurs (règlement (CE) n° 51/2006 du Conseil du
22 décembre 2005). Cette mesure a été revue en 2007 et certains filets maillants ont été autorisés
à des profondeurs inférieures à 600 m (règlement (CE) n° 41/2007 du Conseil du
21 décembre 2006). L'état de cette pêche en 2007 n'est pas connu.
Des navires français pratiquent une pêche en eau profonde mixte visant essentiellement le
grenadier de roche, le sabre noir et le requin portugais sur la pente continentale et des bancs
offshore des sous-zones VI et VII. La pêche irlandaise en eau profonde vise quant à elle
l'hoplostète orange, le sabre noir, le grenadier de roche et le requin soyeux. Plusieurs navires
écossais exploitent la lotte (Lophius spp) sur le talus continental de la sous-zone VIa et sur le
banc Rockall, avec des prises accessoires d'espèces profondes de grenadier de roche, de lingue
bleue, de sabre noir et de requins d'eau profonde (Gordon, 2001). Un petit nombre de ces
navires pêchent occasionnellement à des profondeurs supérieures afin de capturer le grenadier
de roche, le sabre noir et le requin portugais. Les principales espèces capturées par le chalutier
congélateur espagnol sont le grenadier de roche et l'alépocéphale.
Outre ces pêcheries d'eau profonde, les chalutiers espagnols pêchant le merlu dans les zones VI
et VII effectuent des prises accessoires d'espèces d'eau profonde, dont la lingue commune, la
lingue bleue, la mostelle de fond et le sébaste chèvre.
Le taux de capture d'espèces d'eau profonde dans ces écorégions a fluctué au fil du temps. Les
tendances en matière de capture de la lingue commune et de la lingue bleue depuis les
années 1950 montrent qu'elles ont été exploitées par une succession de flottes nationales. Depuis
les années 1980, les débarquements des deux espèces sont clairement en baisse. De leur côté, les
débarquements de grenadier de roche, de sabre noir, de requins d'eau profonde et d'hoplostète
orange sont restés quasiment nuls jusqu'à la fin des années 1980. Leur pêche s'est développée
dans le courant des années 1990 et les débarquements ont alors augmenté de manière générale
jusqu'en 2003, année où des TAC ont été introduits pour plusieurs espèces. Depuis 2005,
l'hoplostète orange est protégée par des zones de protection où les captures sont interdites
(Figure 5.2). En 2005, environ 20 000 t de lingue bleue, d'hoplostète orange, de grenadier de
roche, de sabre noir et de requins d'eau profonde ont été capturées dans cette écorégion.
D'importants débarquements de prises accessoires de mostelle de fond (>2000 t) sur le plateau et
le talus continentaux ont par ailleurs été constatés.
Sur la base des observations réalisées à bord des navires conformément au règlement (CE)
n° 2347/2002, il apparaît que les rejets d'espèces d'eau profonde mixtes de la pêche au chalut
française représentent environ la moitié de la capture totale (soit autant que les débarquements).
Ce chiffre ne s'applique toutefois pas à la pêche ciblée à la lingue bleue ou à l'hoplostète orange,
où le nombre d'espèces indésirables capturées est inférieur. La principale espèce rejetée est
l'alépocéphale, un gros poisson qui n'est généralement pas commercialisé en raison de sa teneur
élevée en eau (Okland et al., 2005). Les rejets d'espèces commerciales juvéniles concernent
uniquement le grenadier de roche et représentent entre 20 et 25 % des captures totales de cette
espèce. Les jeunes poissons des autres espèces cibles principales n'étant pas capturés, il n'y a pas
de rejets de lingue bleue, de sabre noir et d'hoplostète orange. Toutes les captures de requins
d'eau profonde à valeur commerciale sont également débarquées. On assiste par contre à des
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
rejets d'autres espèces de requins non commercialisables (requins à valeur non commerciale à
l'annexe I). Outre l'alépocéphale, les rejets comptent également quelques raies et chimères
(toutes les espèces ne sont pas commercialisées) et une série d'espèces d'eau profonde de petite
taille.
Chapitre 1.5. Pêcheries d'eau profonde de la mer du Nord (écorégion F)
Cette écorégion couvre la mer du Nord, le Skagerrak et le Kattegat. Certaines pêcheries de ces
régions enregistrent des prises accessoires d'espèces d'eau profonde. C'est notamment le cas
d'une petite pêche au chalut britannique au flétan noir dans la partie nord de la mer du Nord, à
l'ouest des îles Shetland. Des prises accessoires de lingue et de brosme sont également réalisées
dans les pêcheries au chalut de fond britanniques. Il existe par ailleurs des pêcheries danoises,
norvégiennes et suédoises à la crevette nordique (Pandalus borealis) dans le Skagerrak (division
CIEM IIIa) et la fosse norvégienne (partie orientale du nord de la mer du Nord). Les engins
(chaluts) utilisés dans ces pêcheries sont à petites mailles (maillage étroit de 35-45 mm).
Certaines prises accessoires d'espèces de poisson démersales et d'eau profonde sont débarquées.
Le grenadier de roche capturé dans cette pêcherie est de temps à autre débarqué afin de
fabriquer de la farine. Il est probable que l'introduction de grilles de tri il y a quelques années a
réduit le volume de certaines de ces prises accessoires (ICES 2006c). Quelques pêches au chalut
de fond dans le nord-est de la mer du Nord et le Skagerrak visant des espèces démersales mixtes
enregistrent également des prises accessoires d'espèces d'eau profonde, dont la lingue et le
brosme.
La pêcherie d'eau profonde la plus importante est une pêche au chalut danoise visant le
grenadier de roche dans les parties plus profondes du Skagerrak (400-650 m). Cette pêche
dirigée a vu le jour en 1987 et enregistré des débarquements annuels totaux inférieurs à 2500 t
jusqu'en 2001. Elle s'est ensuite développée et plus de 10 000 t ont été débarquées en 2005.
Cette pêche n'est exploitée que par quelques navires danois (certaines années par un seul)
principalement dans trois rectangles CIEM (rectangles d'un degré de longitude et d'un demidegré de latitude définis aux fins de la déclaration des captures de poissons et de l'effort de
pêche). En dehors de la vente de quelques poissons vidés pour la consommation humaine, les
débarquements sont essentiellement destinés à un usage industriel (huile et farine de poisson).
Cette pêcherie constitue également un exemple de dysfonctionnement de la gestion. L'UE a
introduit des TAC pour le grenadier de roche dans cette zone en 2004 et 2005, mais comme
cette restriction ne s'appliquait pas dans la zone économique exclusive norvégienne, la flotte
européenne a pu continuer à pêcher dans cette ZEE sans être limitée par les TAC. Le traité du
Skagerrak ratifié par l'UE et la Norvège autorise en effet les navires européens à opérer
librement dans la ZEE norvégienne et aucun TAC norvégien ou autre réglementation n'ayant été
fixé pour la pêche au grenadier en 2004-05, les captures européennes totales ont pu augmenter
jusqu'à environ 12 000 tonnes. Des mesures ont par la suite été prises pour limiter la pêche
en 2006 et le TAC s'applique désormais à l'ensemble de la zone et des flottes.
Chapitre 1.6. Pêcheries d'eau profonde du golfe de Gascogne et de l'Ibérie occidentale
(écorégion G)
On ne dénombre actuellement qu'une seule pêcherie significative d'espèces d'eau profonde dans
le golfe de Gascogne (sous-zone CIEM VIII) et l'Ibérie occidentale. Il s'agit d'une pêche à la
palangre artisanale au sabre noir localisée au sud-est du Portugal (sous-zone CIEM IX), dont les
débarquements ont fluctué dans une fourchette de 2500 et 4000 t entre 1988 et 2005. Les rejets
de cette pêcherie sont mineurs: quelques requins et alépocéphales à valeur non commerciale,
ainsi qu'un petit nombre de sabres noirs blessés par des mammifères marins (ICES 2006c).
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Dans le passé, la dorade rose (Pagellus bogaraveo) était une espèce cible et une prise accessoire
importante de plusieurs flottes et engins de pêche dans le golfe de Gascogne. Le stock est
aujourd'hui épuisé après s'être effondré entre 1975 et 1985. Cette espèce fait par contre toujours
l'objet d'une exploitation intensive dans le golfe de Cadix.
La pêche à la dorade rose du golfe de Cadix est exploitée par des navires espagnols et portugais.
Environ 70 % de tous les débarquements de dorade rose dans les eaux ibériques occidentales
(division CIEM IXa) sont imputables à une seule et unique flotte de navires espagnols utilisant
une sorte d'engin à hameçons avec une sardine en guise d'appât appelé «voracera». Le reste est
presque entièrement capturé par des palangriers portugais. Depuis les années 1990, la flotte
espagnole est constituée d'une centaine de petits bateaux (moins de 10 m de long). Aucune
information sur le nombre et la taille des navires portugais n'est par contre disponible. La pêche
se déroule à des profondeurs de 400-700 m. Les captures totales de dorade rose dans le golfe de
Cadix s'élèvent à environ 500 t par an. Il n'existe aucune donnée sur les rejets de cette pêche,
mais une pêche à la palangre artisanale de ce type n'occasionne généralement pas des taux de
rejet élevés. En cas de rejet, les poissons décrochés des hameçons pourraient avoir de meilleures
chances de survie que ceux pris dans les chaluts.
Dans le golfe de Gascogne, la dorade rose a figuré parmi les principales espèces débarquées
jusque dans les années 1980. Entre 1960 et 1975, les captures représentaient entre 15 000 et
20 000 t par an, environ 2/3 étant capturés par l'Espagne et 1/3 par la France. À partir de 1975,
les débarquements totaux ont commencé à chuter pour atteindre des niveaux planchers (moins
de 1000 t) en 1985 et sont restés très bas depuis lors (base de données fishstat+ de la FAO, base
de données des statistiques de pêche de l'IFREMER, Sanchez 1982, Guéguen 1969, ICES 2007).
À l'échelle de l'Atlantique du NE, ce stock est l'un des premiers à s'être effondré au cours de la
période 1970-2002 (Caddy et Surette 2005). À l'époque de cet effondrement, aucune
réglementation concernant les captures ou l'effort de pêche n'était en vigueur dans cette zone.
Cette espèce est pourtant vulnérable à la pêche de par ses paramètres biologiques. Il s'agissait
également d'une espèce recherchée, dont le prix élevé peut expliquer la surpêche. Le TAC
actuellement en vigueur dans la sous-zone CIEM VIII est atteint par les prises accessoires de
l'ensemble des activités de pêche, auxquelles s'ajoute une pêche ciblée exploitée par une
pêcherie de petite échelle.
Dans l'ensemble de cette écorégion, les captures d'autres espèces d'eau profonde prennent
essentiellement la forme de prises accessoires au niveau des pêcheries du plateau continental.
Elles représentent environ 1000 t par an, les principales espèces étant le béryx, l'argentine, le
sébaste chèvre, la mostelle de fond, la lingue et le cernier atlantique. Les informations
disponibles sur la biologie et l'état des stocks de la plupart de ces espèces sont rares et ne seront
pas examinées en détail ici.
Chapitre 1.7 Pêcheries dans les zones océaniques
Outre les composantes des stocks examinées dans les sections précédentes, la lingue bleue a
également été exploitée dans la sous-zone XII, qui inclut les dorsales médio-atlantique du nord
et de l'est. Les scientifiques ne disposent cependant d'aucune donnée sur les lieux de capture
pour les années antérieures à l'an 2000. Les débarquements annuels pour cette zone au cours des
20 dernières années ont fluctué de quelques tonnes à plus de 3000 tonnes (ICES 2006c). Les
captures de lingue bleue consistaient essentiellement en des prises accessoires lors de la pêche
au chalut d'autres espèces d'eau profonde.
Une pêche au chalut exploitée par des navires de l'ex-URSS a été particulièrement active dans la
dorsale médio-atlantique entre 1973 et 1991, avec un pic en 1975, lorsque les captures totales
ont atteint environ 30 000 t (Troyanovsky et Lisovsky 1995, Merrett et Haedrich 1997). Des
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
captures importantes ont été déclarées par la Pologne en 1996-98 et par la Lettonie en 1991-94.
Au moins une partie de ces captures proviennent de la dorsale et des monts sous-marins
avoisinants, mais certaines pourraient avoir été faites sur le banc Hatton occidental. Les navires
russes ont poursuivi leurs activités de pêche après 1996, mais celles-ci ont diminué ces dernières
années et seul un petit nombre de navires est encore actif aujourd'hui. Ces dernières années, des
captures inférieures à 1000 t par an ont été déclarées. Le CIEM craint toutefois que les captures
internationales ne soient sous-déclarées.
Dans les Açores (sous-zone CIEM XII), une pêche artisanale à la ligne à main et à la palangre
débarque environ 1000 t de dorade rose par an. Les ligneurs à ligne à main sont de petits (<12 m
de long) bateaux à pont ouvert qui opèrent à proximité des côtes à l'aide de plusieurs types de
lignes, tandis que les palangriers sont des bateaux à pont fermé (>12 m) qui pêchent également
au large, au niveau des bancs et des monts sous-marins. Cette pêcherie capture plusieurs autres
espèces, mais la dorade rose est sa cible principale (ICES 2006c).
Chapitre 1.8. Pêcheries dans des écorégions combinées
Conformément à l'avis du CIEM (2006c, 2007a), certaines pêcheries sont considérées ici comme
couvrant plusieurs écorégions en raison d'une connaissance insuffisante de la structure spatiale
de la population et d'une structuration spatiale de mauvaise qualité des pêcheries.
Chapitre 1.8.1 Lingue
La structure de la population de la lingue dans l'Atlantique du NE n'est pas connue. Sur la base
de données limitées en raison de différences dans l'évolution des CPUE (Bergstad et Hareide
1996) et d'analyses génétiques faisant apparaître une certaine structure de la population (Møller
et Nævdal 1967 dans ICES 2007a), le groupe de travail du CIEM pour la biologie et l'évaluation
des ressources halieutiques des eaux profondes (WGDEEP) distingue quatre unités de lingue
différentes: l'Islande (division CIEM Va, dans l'écorégion A), la côte norvégienne (sous-zone
CIEM II, dans l'écorégion D), les îles Féroé et le banc Féroé (division CIEM Vb, dans
l'écorégion C) et toutes les autres zones où la lingue est présente. Les pêcheries visant la lingue
sont abordées dans les chapitres sur les écorégions correspondantes consacrés à l'Islande, la côte
norvégienne et les îles Féroé. Celles examinées ici couvrent toutes les autres zones. Dans ces
zones, on retrouve la lingue le long du plateau continental à l'est et au nord des îles Britanniques
(sous-zones CIEM VI et VII), dans le Skagerrak et le nord de la mer du Nord (division
CIEM IIIa et sous-zone IV) et dans le golfe de Gascogne (sous-zone CIEM VIII). Partout
ailleurs, l'espèce est peu représentée, comme c'est sans doute le cas à l'ouest de la péninsule
ibérique (sous-zone CIEM IX), voire totalement absente (ce qui pourrait être le cas de certaines
parties océaniques de l'Atlantique du NE telles que la dorsale médio-atlantique, sous-zones
CIEM X et XII).
Dans le Skagerrak (IIIa), la mer du Nord (IV), l'ouest des îles Britanniques (VI et VII) et le golfe
de Gascogne, la principale pêche dirigée à la lingue est une pêcherie à la palangre norvégienne
principalement active dans le nord de la mer du Nord et à l'ouest de l'Écosse. À elle seule, cette
pêcherie enregistre entre un tiers et la moitié des captures totales de lingue. Les autres captures
sont essentiellement des prises accessoires réalisées par des chalutiers français, irlandais et
britanniques. Les captures totales de lingue dans ces zones ont chuté de 40 000 t en 1988 à
15 000 t en 2004-05. Dans le nord de la mer du Nord, les débarquements norvégiens de lingue
sont passés d'environ 7000 à 4000 t au cours des 20 dernières années, les débarquements
internationaux chutant quant à eux de plus de 11 000 t à environ 6000 t. À l'ouest de l'Écosse,
les débarquements internationaux entre 1988 et 2004-05 ont diminué de 16 000 à 4000 t et les
débarquements norvégiens, de 4500 à 2000 t. Les débarquements français ont également
diminué, tandis que les écossais ont augmenté au cours des 20 dernières années. La pêche
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
norvégienne à la lingue est à l'origine de prises accessoires de brosme et, dans une moindre
mesure, de lingue bleue (Gordon 2001).
La lingue constitue un composant de longue date des pêcheries dans les zones du plateau
continental. Elle a probablement été une prise accessoire de la pêche au chalut dans les
écorégions A-G tout au long du XXe siècle et était exploitée bien avant cela, à tout le moins
dans certaines zones. Une analyse historique récente donne à penser qu'elle était beaucoup plus
abondante qu'aujourd'hui dans le nord-est de la mer du Nord et le Skagerrak en 1872 (Taudal
Poulsen et al., 2007). Aucune étude similaire n'est disponible pour les autres zones et les
changements estimés pour une zone relativement petite ne peuvent être extrapolés à d'autres.
Cette pêche ancienne de la lingue montre que certaines espèces considérées comme d'eau
profonde sont probablement exploitées depuis longtemps. Dans le cas présent, les séries
chronologiques, qui ne couvrent que les 20 dernières années et qui sont essentiellement utilisées
par le WGDEEP, pourraient s'avérer insuffisantes pour évaluer le taux d'exploitation des stocks.
Cette limitation ne s'applique cependant pas aux espèces qui n'étaient pas exploitées avant les
années 1980. De surcroît, là où il serait opportun d'utiliser une perspective temporelle plus
longue, l'absence de données fiables sur les captures empêche le plus souvent une telle
approche. C'est le cas de la lingue, qui, dans la plupart des zones, était une prise accessoire qui
n'a pas toujours été enregistrée de manière appropriée dans les statistiques des captures. Dans
d'autres cas, les débarquements de lingue commune et de lingue bleue n'ont pas fait l'objet de
déclarations distinctes et les prises accessoires ont sans doute souvent été déclarées aux autorités
nationales et internationales en tant que «poissons divers». Une tendance à la baisse des
débarquements de lingue a toutefois été observée au cours des 20 dernières années, tandis que
les CPUE se sont stabilisées ces dernières années, mais à un niveau beaucoup plus bas que dans
les années 1970. Il est donc probable que le(s) stock(s) soi(en)t sur le déclin ou à un faible
niveau.
Chapitre 1.8.2 Hoplostète orange
Malgré quelques preuves témoignant de l'existence d'une pêche exploratoire et de l'attrait
considérable présenté par l'hoplostète orange, les pêcheries de cette espèce sont restées très
petites dans l'Atlantique du NE. Les seules exceptions semblent se situer à l'ouest des îles
Britanniques (sous-zones CIEM VI et VII abordées au chapitre 1.5) et, dans une moindre
mesure, dans la sous-zone CIEM XII. Dans la mesure où la sous-zone XII couvre une partie du
banc Hatton occidental et la dorsale médio-atlantique du nord, il est difficile de déterminer avec
certitude à quelle zone cette pêche doit être attribuée. Il est probable que ces petites pêcheries
ont exploité de petites concentrations locales situées au niveau des monts sous-marins ou
d'autres caractéristiques topographiques de l'océan. Il est aujourd'hui généralement admis que
l'hoplostète orange ne peut supporter que de faibles niveaux d'exploitation et que seuls 1 à 2 %
de la biomasse vierge peuvent être pêchés de manière viable chaque année (Koslow et al. 2000,
Clark et al. 2000, Hilborn et al. 2006). Une exploitation viable des stocks d'hoplostète orange est
néanmoins possible et aurait été quasiment atteinte dans les eaux néo-zélandaises (Hilborn et al.
2006). Toutes les données disponibles indiquent que les populations d'hoplostète orange de
l'Atlantique du NE sont petites. Les petites captures effectuées au niveau de la dorsale médioatlantique, voire dans le banc Hatton occidental, pourraient par conséquent être à l'origine d'un
épuisement significatif de la biomasse peu élevée de ces zones.
Des débarquements de captures provenant de la sous-zone XII ont principalement été déclarés
par les îles Féroé. Il n'existe aucune information sur la flotte, mais il est probable que les
captures d'hoplostète orange dans le banc Hatton occidental et/ou la dorsale médio-atlantique
sont le fait de quelques chalutiers, voire d'un seul. Dans les années 1990, 200 à 800 t étaient
déclarées par an, contre moins de 200 t en 2004 et 2005.
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Chapitre 1.8.3 Grande argentine
La pêcherie d'Islande (chapitre 1.1) exploiterait une unité du stock (ICES 2007a). Dans toutes
les autres zones, la structure des stocks de cette espèce n'est pas claire et est traitée comme un
stock unique. Après les pêcheries des écorégions A, B et D traitées dans les chapitres
correspondants, la plus grande pêcherie de la grande argentine est exploitée par de gros
chalutiers congélateurs néerlandais utilisant des chaluts pélagiques, principalement dans les
sous-zones CIEM VI et VII. Depuis quelques années, des débarquements importants sont
également déclarés par l'Écosse dans cette même zone. Les séries chronologiques des
débarquements fournies par plusieurs pays étant irrégulières, les données des débarquements ne
sont cependant pas considérées comme très fiables (ICES 2006c). D'après les données
disponibles, entre 2000 et 20 000 t de grande argentine sont capturées chaque année à l'ouest des
îles Britanniques et autour des îles Féroé. Les variations enregistrées d'une année à l'autre
pourraient s'expliquer par la demande du marché. Cette pêcherie, essentiellement exploitée par
de gros chalutiers pélagiques, diffère sensiblement des autres pêcheries d'eau profonde.
Chapitre 1.9. Pêcheries et distribution géographique des stocks de poissons
Il est important de garder à l'esprit que la distribution géographique de la plupart des stocks
d'eau profonde reste hypothétique. On connaît mieux la distribution géographique des espèces.
Par exemple, le grenadier de roche vit sur la dorsale médio-atlantique, très certainement au nord
du 44° N (Troyanovsky et Lisovsky 1995, Hareide et Garnes 2001), autour, mais surtout au sud,
de l'Islande (Magnússon et Magnússon 1995) et des îles Féroé, dans la fosse norvégienne et le
Skagerrak, dans les zones profondes du plateau continental, le long de la côte est de la Norvège
et dans certains fjords, et sur le talus continental et les bancs situés à l'ouest des îles
Britanniques. Il est également présent à de faibles densités dans le golfe de Gascogne et à l'ouest
de la Péninsule ibérique. Enfin, il a été signalé de l'ouest du Maroc au 20° N (Cohen et al. 1990).
C'est dans le Skagerrak, à l'ouest des îles Britanniques et sur la dorsale médio-atlantique du nord
qu'il est le plus abondant (abondance que l'on pourrait qualifier de «commerciale»).
La structuration spatiale de la plupart des espèces au sein de la distribution de l'espèce
(autrement dit, le poisson se mélange-t-il à l'échelle de la distribution géographique de l'espèce
et forme-t-il une population de reproducteurs uniques ou existe-t-il plusieurs populations
distinctes?) est par contre moins évidente. L'existence de populations distinctes peut être due à
l'environnement physique (limites naturelles à la dispersion des larves et à la migration des
adultes) ou au comportement de certains individus et populations (schémas de migration
différents débouchant sur l'apparition de groupes de reproducteurs distincts, par exemple). Par
exemple, une caractéristique bathymétrique telle que la crête Wyville-Thomson, qui sépare
l'Écosse des îles Féroé, constitue selon toute vraisemblance un obstacle à l'échange entre les
populations de grenadier de roche de l'Atlantique et celles distribuées au nord, le long de la
Norvège et dans le Skagerrak, car elle est moins profonde que la distribution bathymétrique
habituelle des espèces de cette zone. En outre, le grenadier de roche n'est pas présent au nord de
la crête Wyville-Thomson, dans la mer du Nord. Il existe par conséquent une discontinuité
géographique claire dans la distribution de l'espèce. L'effet barrière de ces particularités
physiques dépend toutefois des espèces. Sur la base de ces considérations, on estime à l'heure
actuelle qu'il existe trois grandes unités de stocks adultes de grenadier de roche dans l'Atlantique
du NE (dorsale médio-atlantique, talus continental et bancs à l'ouest des îles Britanniques et
Skagerrak). Les populations et les stocks (un stock de poissons est la fraction exploitée d'une
population de poissons, dont la taille se situe généralement au-dessus de la taille minimale que
peuvent capturer les engins de pêche) pris en compte par le CIEM et présentés ici s'appuient sur
l'ensemble des données disponibles et sur les hypothèses les plus vraisemblables.
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Dans la mesure où les écorégions ont été définies de manière à correspondre, dans la mesure du
possible, à des zones écologiques significatives, certaines limites des écorégions correspondent
aux limites de populations. Les limites de certaines écorégions ne reposent cependant pas
toujours sur des particularités topologiques significatives en termes bathymétriques ou
hydrologiques, de sorte que certaines populations peuvent dépasser ces limites. On estime par
exemple que la lingue bleue présente dans la division CIEM Vb et les sous-zones VI et VII (c.à-d. écorégions C, îles Féroé et E, mers celtiques) constitue une population (stock) unique.
Chapitre 2. Définition des espèces d'eau profonde d'après le CIEM et les
règlements de l'UE
Le CIEM entend par «pêcheries d'eau profonde» celles opérant à des profondeurs de plus de
400 m et par «espèces d'eau profonde» celles normalement présentes à ces profondeurs. Le
CIEM a par ailleurs établi une liste d'environ 35 espèces de poissons et de crustacés d'eau
profonde, qui reprend également certaines espèces pouvant être considérées comme d'eau
profonde mais qui ne sont pas traitées comme telles dans le cadre réglementaire et les avis du
CIEM (ICES 2005c).
À ma connaissance, la règlementation européenne ne contient aucune définition des espèces
d'eau profonde. Deux listes d'espèces ont toutefois été jointes à titre d'annexes I et II au
règlement (CE) n° 2347/2002 du Conseil, lequel réclame également la présence d'observateurs à
bord des bateaux afin de surveiller les activités de pêche en eau profonde et demande aux
observateurs de recueillir des informations sur les espèces répertoriées. L'annexe 1 répertorie
toutes les espèces figurant dans le règlement CE, ainsi que celles considérées comme d'eau
profonde par le CIEM. Leur statut commercial au sein des pêcheries (cible, prise accessoire,
rejet) est précisé chaque fois que possible. Notez qu'une espèce cible dans une pêcherie peut être
rejetée dans un autre.
Le grenadier de roche (Coryphaenoides rupestris), l'hoplostète orange (Hoplostethus atlanticus),
le sabre noir (Aphanopus carbo) et les requins d'eau profonde, dont deux espèces (le squale
chagrin de l'Atlantique (Centrophorus squamosus) et le requin portugais (Centroscymnus
coelolepis)) sont connues d'un point de vue commercial sous le nom de «requins siki», sont
incontestablement des espèces d'eau profonde. Ils vivent en effet généralement à plus de 400 m
de profondeur dans l'Atlantique du NE, où ils sont pêchés le long du talus continental et sur
d'autres caractéristiques bathymétriques profondes telles que les monts sous-marins.
Malheureusement, la nature fait qu'il est souvent difficile de classer ses objets dans des
catégories. Quelle que soit la limite choisie pour faire la distinction entre les eaux profondes et
les hauts fonds, il y aura toujours des espèces dont la distribution bathymétrique chevauche les
deux. Des espèces telles que la lotte (Lophius spp.) ou le congre (Conger conger) s'étendent de
la zone intertidale jusqu'au talus médio-continental à 1000 m de profondeur; une flotte de
chalutiers écossais vise d'ailleurs actuellement la lotte sur le talus continental (chapitre 1.4). Le
gros des débarquements de lotte et de congre pêchés dans l'Atlantique du NE provient toutefois
de pêcheries du plateau continental créées il y a longtemps, de sorte que le CIEM considère les
stocks de ces espèces comme des stocks démersaux du plateau continental. La dorade rose
présente le même type de distribution bathymétrique étendue. Dans le golfe de Gascogne, on
trouve de jeunes poissons le long de la côte en été et les adultes sont pêchés sur le plateau
continental, à 30 m de profondeur. En hiver, le poisson descend par contre beaucoup plus bas,
mais la surexploitation qui a conduit à l'épuisement du stock dans les années 1970-80
(chapitre 1.6) n'était cependant pas due aux pêcheries d'eau profonde. Certains autres stocks de
dorade rose présents dans la Méditerranée et aux Açores sont exploités dans des eaux
relativement profondes, ce qui explique que l'espèce a été traitée en tant que poisson d'eau
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
profonde par les scientifiques étudiant les poissons et les écosystèmes (Menezes et al. 2001,
Moura 1995). La responsabilité de l'évaluation de ces stocks a été confiée au WGDEEP. Ces
exemples montrent que les scientifiques, les gestionnaires et, dans une certaine mesure, les
pêcheurs ont classé les espèces en tant qu'espèces d'eau profonde de manière plus ou moins ad
hoc.
L'échelle de profondeurs des espèces peut également varier selon les régions. Par exemple, dans
le Skagerak, où la profondeur maximale est d'environ 700 m, on retrouve le grenadier de roche
dans toutes les zones dont la profondeur dépasse 300 m (Bergstad 1990). À l'ouest des îles
Britanniques, il descend jusqu'à 2000 m, son abondance maximale étant enregistrée à 1000 m ou
plus.
Toutes les espèces «d'eau profonde» présentent toutefois un trait commun: un faible taux de
productivité biologique. L'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a entrepris de
définir des directives pour la gestion de la pêche hauturière en eaux profondes (eaux
internationales). Ce projet de directives, tel qu'adopté lors de la consultation d'experts sur les
directives internationales concernant la pêche hauturière en eaux profondes (Bangkok,
Thaïlande, 11-14 septembre 2007), propose de prendre en considération les espèces «dont la
biologie ne peut supporter que des taux d'exploitation de faible intensité (généralement à
croissance lente, maturité tardive et qui vivent longtemps, etc.) et/ou subissent une mortalité
accidentelle». Nous avons vu que l'exploitation des espèces présentant une faible productivité
n'était pas fondamentalement différente de celles des espèces plus productives, à condition que
les stocks soient correctement évalués (chapitre 1.4). Malheureusement, les évaluations étant
imprécises, il convient de se montrer extrêmement prudent dans leur gestion. La proposition de
gérer les espèces faiblement productives de manière plus prudente semble donc relativement
raisonnable. Dans ce contexte, le groupe d'espèces considérées comme d'eau profonde par le
CIEM est relativement cohérent. Au sein de ce groupe, les espèces dont l'échelle bathymétrique
est la moins profonde seraient la dorade rose et la lingue, qui semblent toutes deux avoir une
productivité relativement faible. La dorade rose, en plus d'afficher une croissance modérée, est
hermaphrodite, ce qui signifie que les poissons sont d'abord des mâles avant de devenir des
femelles à l'âge de 8 ans environ.
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PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Chapitre 3. Impact des pêcheries sur les stocks d'eau profonde
Chapitre 3.1. Biomasse vierge et PME (production maximale équilibrée)
L'exploitation d'un stock a pour effet de diminuer sa biomasse. «[...] l'une des constatations
malheureuses concernant la capture de populations naturelles est qu'il est impossible d'effectuer
des captures à partir d'écosystèmes vierges; plus le rendement est maximisé, plus le stock
diminue. Peu de personnes comprennent que [...] une diminution du stock de 20-40 % par
rapport à son état initial est requise pour atteindre l'objectif de gestion qu'est la PME» (Hilborn
2006). Cette affirmation est tirée d'une analyse des stratégies de gestion de l'hoplostète orange
en Nouvelle-Zélande. La proportion de la biomasse vierge des stocks d'eau profonde permettant
d'atteindre la PME n'est pas différente de celle des autres stocks.
La différence entre les stocks d'eau profonde et ceux des hauts fonds est qu'ils sont souvent
moins productifs. Il est clair que les poissons d'eau profonde grandissent plus lentement et ont
un taux de reproduction plus faible que leurs congénères des hauts fonds. Une biomasse donnée
de poissons d'eau profonde grandira moins en un an que la même biomasse de poissons de haut
fond. De ce fait, la proportion de la biomasse actuelle (20-40 % de la biomasse vierge) pouvant
être extraite chaque année d'un stock d'eau profonde pour parvenir à la PME est beaucoup plus
petite que pour les poissons de haut fond. Dans le cas extrême de l'hoplostète orange, qui est
l'espèce présentant la durée de vie la plus longue et la croissance la plus lente actuellement
exploitée dans l'Atlantique du NE, les captures annuelles ne peuvent pas dépasser 2 % de la
biomasse vierge. Les stocks d'eau profonde doivent par conséquent être perçus comme des
espèces pouvant être exploitées de manière viable, mais qui ne supportent que de faibles taux
d'exploitation et dont la biomasse exploitée est nécessairement inférieure à la biomasse vierge.
Il convient de préciser à ce stade que les avis en matière de pêche émis par le CIEM à ses clients
n'ont actuellement pas pour objectif de fixer la PME sur la base des stocks de poissons, mais
s'appuient sur l'approche de précaution. Dans la pratique, l'approche de précaution adoptée par le
CIEM repose sur quatre points de référence: Blim (biomasse limite en-deçà de laquelle la pêche
doit être réduite au niveau le plus bas possible), Flim, Bpa (point de référence de l'approche de
précaution) et Fpa. «En-dessous de Blim, il existe un risque élevé d'«effondrement» du stock [...].
Le point de référence limite de la mortalité par pêche, Flim, est le taux de mortalité par pêche qui
risque d'amener le stock à son niveau de biomasse limite s'il se maintient dans le temps» (ICES
2006a). La biomasse du stock reproducteur et la mortalité par pêche ne peuvent pas être
estimées avec certitude. Les points de référence de précaution Bpa et Fpa sont des niveaux audessus desquels il est peu probable que le stock soit en fait en-deçà de Blim ou exploité au-delà
de Flim, respectivement. Flim et Fpa ne peuvent pas être utilisés pour les espèces d'eau profonde
dans la mesure où il est impossible d'obtenir des estimations de la mortalité par pêche F. Des
estimations de la biomasse étant également rarement disponibles, l'avis se base sur la formule
Upa=0,50 x Umax et Ulim=0,20 x Umax où Umax correspond à un indice de la biomasse non
exploitée ou la plus élevée dans la série chronologie disponible.
Enfin, si la biomasse du stock est proche de ou inférieure à Blim (ou Ulim) et/ou si la mortalité par
pêche est supérieure à Flim, l'adoption d'une stratégie d'exploitation PME exigera, à l'instar de
l'approche de précaution, une réduction de la pêche.
Chapitre 3.2. Informations fournies par les enquêtes scientifiques
À l'ouest des îles Britanniques, les données d'enquête disponibles montrent de manière
indiscutable que la biomasse des espèces de poissons d'eau profonde a diminué depuis le début
de leur exploitation. Sur une zone relativement petite située à l'ouest de l'Écosse (talus
continental hébridéen à une latitude comprise entre 54° 30' et 58° 45' Nord et à une longitude
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
allant jusqu'à 12° Ouest), pour laquelle des données d'observation de navires de recherche sont
disponibles pour les années 1973 à 1999, les variations interannuelles de la biomasse ont été
estimées pour toutes les espèces commerciales réunies et pour toutes les espèces non
commerciales (non capturées par des engins de pêche commerciaux ou rejetées en mer). La
même analyse a été effectuée pour le grenadier de roche uniquement, comme il s'agissait de
l'espèce commerciale la plus abondante dans les données de l'étude et de la seule espèce pour
laquelle une analyse séparée était possible. La biomasse totale estimée de toutes les espèces
commerciales en 1999 était d'environ 20 % de la biomasse avant exploitation. Pour les espèces
non commerciales, la biomasse en 1999 a été estimée à un peu plus de 40 % de la biomasse
avant exploitation. Enfin, pour le grenadier de roche, elle a été estimée à environ 15 à 20 % de la
biomasse avant exploitation (Basson et al. 2000). Ces estimations sont toutefois relativement
imprécises car les données étaient extrêmement hétérogènes et déséquilibrées du point de vue
des profondeurs et des âges. Elles ont toutefois clairement montré que les pêcheries d'eau
profonde pouvaient réduire considérablement la biomasse des poissons d'eau profonde en
quelques années. Ces résultats ne doivent pas être extrapolés en dehors de la zone d'étude, car le
chalutage commercial d'espèces d'eau profonde était très développé dans les années 1990 au
niveau du talus continental hébridéen, de sorte que les résultats risqueraient de ne pas traduire
l'épuisement de la population, la zone d'étude étant plus petite que la zone de distribution des
populations de poisson d'eau profonde exploitées.
La pêcherie d'eau profonde à l'ouest des îles Britanniques couvre aujourd'hui des zones
beaucoup plus larges. En raison des règlements en vigueur, les taux de capture sont cependant
inférieurs à ceux de la fin des années 1990 car les niveaux d'exploitation de l'époque n'étaient
pas viables.
Aucune autre zone de l'Atlantique du NE n'a fait l'objet d'une évaluation de la diminution de la
biomasse d'eau profonde due à la pêche sur la base de données d'étude. Une réduction évidente a
par contre été également observée dans les eaux canadiennes grâce à des données d'étude
(Devine et al. 2006).
Chapitre 3.3. Évaluations des principaux stocks par le CIEM
Les évaluations des stocks communiquées par le CIEM correspondent aux estimations les
meilleures de l'état des stocks exploités par les pêcheries. Le WGDEEP examine l'état des stocks
tous les deux ans (la dernière fois en 2006 (ICES 2006c)), une analyse qui sert ensuite de base à
l'avis rendu par le CIEM (ICES 2006b). Malheureusement, l'avis s'est appuyé sur des données
limitées pour la plupart des stocks. Ainsi, en 2006, le WGDEEP n'a pu appliquer un modèle
d'évaluation mathématique (conçu pour évaluer la mortalité par pêche et la biomasse du stock)
qu'à un seul stock, à savoir la lingue bleue du plateau continental des îles Féroé et des mers
celtiques. Pour diverses raisons techniques, ce résultat doit toutefois être considéré avec la plus
grande prudence (ICES 2006c). Pour quelques autres stocks (grenadier de roche sur le plateau
continental des îles Féroé et dans les mers celtiques, dorade rose dans le golfe de Cadix et aux
Açores), il a procédé à des évaluations exploratoires basées sur l'âge, mais les résultats sont
hautement incertains ou jugés non fiables. Dans le cas de l'hoplostète orange des mers celtiques
du sud (division CIEM VII), une enquête acoustique a permis d'obtenir des estimations de la
biomasse elles aussi incertaines. Enfin, l'état des stocks (et l'avis du CIEM) des autres stocks
s'est appuyé sur l'évolution des débarquements, les captures par unité d'effort (CPUE) et des
indices d'abondance tirés d'enquêtes scientifiques.
Chapitre 3.3.1 Lingue commune, brosme et lingue bleue
Selon la zone, les stocks de lingue commune et de brosme sont tantôt stables, mais à un bas
niveau comparé aux niveaux historiques, tantôt en baisse. Dans certaines zones, les captures ont
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
été réduites au cours des dernières années et l'on pense que les niveaux de capture actuels
(réglementés par le TAC ou la gestion de l'effort) devraient permettre au stock de se régénérer.
Concernant la lingue bleue, une importante réduction de la biomasse du stock est perceptible
dans toutes les zones, ainsi que l'indiquent les CPUE et les captures actuelles, qui sont largement
en-deçà des niveaux historiques. La plupart des captures passées de cette espèce visaient des
regroupements de reproducteurs. La pêche de regroupements de reproducteurs n'est pas une
mauvaise chose en soi dans la mesure où elle permet de limiter l'exploitation des poissons
adultes (les jeunes poissons immatures ne sont généralement pas présents dans les zones de
reproduction). Cependant, comme les poissons sont regroupés, le risque est grand de réduire la
biomasse à des niveaux bien en-deçà de ceux garantissant une production maximale équilibrée
(PME) et le respect des limites biologiques de sécurité (Bpa, voir section 3.1).
Pour ce qui est du stock de lingue bleue du plateau continental des îles Féroé et des mers
celtiques, les CPUE ont considérablement diminué depuis 1984, une baisse qui s'explique par la
forte réduction de la biomasse du stock reproducteur (Lorance et Dupouy 2001). Les évaluations
réalisées depuis 2000 n'ont cependant jamais été suffisamment fiables pour permettre une mise à
jour. Cependant, l'évolution marquée des CPUE au fil du temps montre invariablement que le
stock se situe ces dernières années en-dessous de 20 % de la biomasse vierge, ce qui correspond
à la biomasse limite en-deçà de laquelle la pêche doit être limitée à un minimum pour permettre
la régénération des stocks. Le stock islandais de lingue bleue semble lui aussi avoir baissé et
avoir atteint des niveaux comparables. L'évolution future de ces deux stocks pourrait poser
problème car, dans les deux cas, la pêche est passée de captures visant essentiellement les
regroupements de reproducteurs à des prises accessoires lors de la pêche d'espèces d'eau
profonde mixtes.
Chapitre 3.3.2. Grenadier de roche
Les captures de grenadier de roche depuis les années 1980 semblent avoir réduit de manière
significative la biomasse de ce stock dans toutes les zones. Toutes les méthodes d'évaluation
appliquées au stock situé à l'ouest des îles Britanniques ont mis en évidence une tendance au
déclin de la biomasse du stock. Ces évaluations n'étant pas totalement fiables, elles n'ont
toutefois qu'une valeur indicative. Des travaux complémentaires sont nécessaires afin d'adapter
les indices d'abondance basés sur les indices de CPUE des navires commerciaux et de prendre
ainsi en compte les changements intervenus au niveau de la distribution spatiale, saisonnière et
bathymétrique de la pêche. Pour l'heure, la pêche n'est pas stabilisée d'un point de vue spatial.
Ainsi, certains rectangles statistiques n'ont été exploités par des chalutiers français qu'à partir
des années 2000. L'évolution des CPUE observée est par conséquent le résultat de variations au
niveau de l'abondance et d'un déplacement des fonds de pêche (ICES 2006c). L'analyse de
l'ensemble des études réalisées donne toutefois à penser que la biomasse actuelle est inférieure à
50 % de la biomasse vierge et n'atteint probablement que 20 %.
Dans le Skagerrak, les captures effectuées au cours de la période 2004-05 n'étaient pas viables et
ont conduit à l'épuisement de la biomasse accumulée, car la taille du stock vierge nécessaire
pour soutenir un tel niveau de capture aurait dû être supérieure à 200 000 t, ce qui est impossible
dans une zone aussi petite. Des captures supérieures au niveau viable pendant quelques années
ne sont cependant pas un problème en soi, mais, en l'absence d'évaluations quantitatives, on
ignore l'étendue réelle de l'épuisement du stock. Le niveau viable des captures est lui aussi
inconnu, mais ne devrait pas dépasser quelques milliers de tonnes. Dans le cadre d'une approche
de précaution, les TAC pour 2007 et 2008 ont été fixés, respectivement, à 1060 et 1000 t.
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
Chapitre 3.3.3. Sabre noir
Si l'on se fie à l'évolution des débarquements et aux CPUE, la situation du sabre noir semble
moins critique. Les CPUE ont diminué dans la pêcherie à l'ouest des îles Britanniques et sont
restées stables dans celle à l'ouest du Portugal.
Chapitre 3.3.4. Hoplostète orange
Dans deux zones, il apparaît clairement que la biomasse de l'hoplostète orange a été rapidement
épuisée par la pêche. Celles-ci sont situées à l'ouest de l'Écosse où, une fois que la pêche a
commencé, la biomasse a été épuisée en plus ou moins deux ans (Lorance et Dupouy 2001,
Basson et al 2002, ICES 2006c), et à l'ouest de l'Irlande, où les pêches françaises et irlandaises
ont enregistré des débarquements variant entre 1000 et 5000 t par an entre 1991 et 2002. Les
captures ont ensuite diminué à la suite de l'introduction d'un TAC (193 t en 2007 et 130 t
en 2008). La biomasse a été estimée à 19 000 t sur la base d'une étude acoustique réalisée
en 2005 (ICES 2006c). Bien que les estimations soient incertaines, cette étude a confirmé l'avis
selon lequel les populations d'hoplostète orange de l'Atlantique du NE sont petites et ne peuvent
supporter que des taux de capture très faibles pour rester viables. Le niveau actuel du TAC
semble par conséquent raisonnable et approprié pour garantir la viabilité des captures.
Chapitre 4. Habitats des eaux profondes et impacts des pêcheries
Les engins de pêche d'eau profonde traînants sont lourds et conçus pour rouler sur le fond
raboteux. Les panneaux de chalut peuvent quant à eux peser 1 t ou plus, tandis que les câbles de
fond sont dotés de diabolos en acier de 60 cm de diamètre. Le chalutage provoque notamment
un arrachement et un rabotage à long terme (Figure 4.1), le roulement de gros galets, une
resuspension des sédiments et des dégâts au niveau des espèces épibenthiques (Davies et al.
2007). Si ces impacts n'ont jusqu'à présent pas été jugés particulièrement importants pour les
fonds sédimentaires, ils constituent par contre une préoccupation majeure du point de vue des
communautés coralliennes.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Figure 4.1. Marques de chalut sur le fond marin sédimentaire du talus continental du
golfe de Gascogne à 1300 m
Source: ©Ifremer, VITAL cruise, 2002.
Les habitats des eaux profondes présentent une grande diversité et sont notamment constitués de
fonds plats sédimentaires, de canyons, de fonds rocheux et de falaises. La faune benthique d'eau
profonde est elle aussi très diverse: sur le fond sédimentaire plat, elle est essentiellement
constituée d'individus fixes et mobiles épars mais, dans certains endroits, des colonies d'animaux
couvrent 100 % du substrat et forment des récifs pouvant générer des monts biogéniques de
plusieurs dizaines de mètres de haut.
Il existe environ sept espèces de coraux scléractiniens (coraux durs) dans l'Atlantique du NE,
dont deux forment des récifs: Lophelia pertusa, le plus abondant, et Madrepora oculata. Les
coraux tels que Lophelia sont qualifiés de coraux d'eau froide plutôt que d'eau profonde car ils
sont présents sur une large échelle de profondeurs à l'échelle mondiale. Dans les eaux plus
froides, ils ont tendance à se développer dans des eaux moins profondes et la température élevée
de l'eau pourrait être un facteur limitant leur profondeur supérieure (Mortensen et Buhl
Mortensen 2004). Par exemple, sur le plateau continental norvégien médian, ils sont
particulièrement abondants à des profondeurs de 200-400 mètres (Fossa 2002). Outre les coraux
scléractiniens, les gorgones et les éponges forment des communautés denses dans certaines
zones. L'existence de coraux d'eau froide est connue depuis longtemps dans l'Atlantique du NE,
où ils sont considérés comme nuisibles pour les chalutiers de pêche (Joubin 1922). Le
développement de la pêche en eau profonde dans les années 1990 a fait naître certaines
inquiétudes quant à ses conséquences pour l'écosystème et réveillé l'intérêt pour les coraux d'eau
froide. Des études de la distribution des coraux d'eau froide ont montré qu'ils vivaient dans des
endroits individuels sur le talus continental européen (Friewald 1998, Rogers 1999, Mortensen
et al. 2001). Le long de la côte norvégienne, il est apparu que la pêche avait eu un impact majeur
sur les coraux (30 à 50 % de coraux affectés ou endommagés) (Fossa et al. 2002). Dans les eaux
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
islandaises, il est probable que de nombreuses zones de coraux ont été détruites par la pêche
(Steingrimsson et al. 2006). Bien qu'il n'existe aucune autre étude de grande envergure
concernant la proportion de coraux d'eau froide affectés dans l'Atlantique du NE, il ne fait aucun
doute que les engins de pêche les abîment et que, par le passé, des activités de pêche ont ciblé
les coraux. L'impact en termes de proportion des récifs touchés ou des conséquences sur
l'écosystème à l'échelle de l'Atlantique du NE ou de la ZEE européenne n'est toutefois pas connu
à l'heure actuelle.
Des impacts similaires sur les coraux d'eau froide dus à la pêche ont été constatés un peu partout
dans le monde. Ainsi, au large des côtes de Tasmanie, où une importante pêche à l'hoplostète
orange s'est développée dans les années 1990, des transects photographiques ont montré que
95 % du fond était constitué de roches nues sur un mont sous-marin exploité de manière
intensive, contre environ 10 % sur un mont sous-marin non exploité comparable (Koslow et al
2000). Les pêcheries d'hoplostète orange suscitent des inquiétudes similaires en NouvelleZélande et ailleurs (Clark 1999, Branch 2001).
Il semble que les engins traînants, mais également les engins passifs tels que les palangres (dont
la longueur peut atteindre 70 km) et les filets s'enchevêtrent dans les coraux et autres structures
biogéniques vulnérables en provoquant d'importants dégâts. Des filets de pêche perdus
enchevêtrés dans des récifs coralliens ont ainsi été observés à l'ouest de l'Irlande (Olu-Le Roy
2004, Figure 4.2). Or ils peuvent avoir un effet de pêche fantôme très important (l'engin de
pêche perdu en mer continue de capturer des poissons, lesquels sont mangés par des prédateurs
qui nettoient le filet) (Davies et al. 2007). Si les conséquences d'une palangre unique sont
mineures en comparaison avec celles d'un chalut traîné, les engins passifs peuvent néanmoins
avoir un impact significatif à long terme. Enfin, dans certaines zones, l'impact de la pêche sur
les coraux d'eau froide a commencé à se faire ressentir il y a bien longtemps dans les habitats les
moins profonds (Joubin 1922).
Figure 4.2.
Filet maillant perdu dans un mont corallien au sud-ouest de l'Irlande
Source: ©Ifremer, Caracole Cruise, 2001.
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Chapitre 5. Conservation de la biodiversité
En dehors des pêcheries, les autres activités humaines affectant la biodiversité et les habitats
d'eau profonde sont l'extraction du pétrole et du gaz et l'augmentation du pH de l'océan mondial
due à la hausse des niveaux de dioxyde de carbone dans l'atmosphère, ainsi que, sans doute, à la
proposition d'utiliser les eaux profondes en tant qu'environnement où le dioxyde pourrait être
stocké et d'exploiter les grands fonds marins afin d'extraire les ressources minérales (Davies et
al. 2007).
On entend par «biodiversité» la variation naturelle de la génétique et des formes de vie des
populations, des espèces, des communautés et des écosystèmes (MARBEF, MARine
Biodiversity and Ecosystem Functioning, réseau d'excellence, http://www.marbef.org, Hiddink
et al. approuvé). Rares sont les écosystèmes de la planète, s'il y en a, pour lesquels des données
sur la biodiversité au sens de cette définition sont disponibles. On connaît généralement avec
plus de précision la richesse des espèces et la diversité de certains groupes taxonomiques
(poissons, par exemple), les variations génétiques de quelques espèces ou la distribution
d'habitats et de communautés au sein d'un écosystème. La diversité des eaux profondes de la
planète n'est pas connue mais serait élevée. À l'échelle régionale et locale, les poissons d'eau
profonde présentent une grande diversité en termes de morphologie, de stratégie d'alimentation
et de comportement (Lorance et Trenkel 2006, Mauchline et Gordon 1985, Merrett et Haedrich
1997). Les communautés benthiques d'eau profonde sont elles aussi variées. Les coraux d'eau
froide, les gorgones et les éponges génèrent des structures tridimensionnelles sur le fond marin
et créeraient ainsi des points chauds de diversité. Leur biodiversité n'est pas quantifiée mais «ils
forment des structures physiques, y compris des récifs qui rivalisent en taille et en complexité
avec ceux d'eaux plus chaudes et moins profondes» (avant-propos de Friewald et al. 2004). Des
études de cas indiquent qu'ils sont associés à un large éventail d'autres espèces, telles le
macrobenthos (Henry and Roberts, 2007) et les éponges (Van Soest et al. 2007) à l'ouest de
l'Irlande. La composition et la densité des espèces de poissons varient également à l'intérieur et à
l'extérieur des récifs de coraux d'eau froide (Roos et Quattrini 2007, Costello et al. 2005). Les
coraux pourraient en effet jouer un rôle particulier pour certaines espèces de poissons, en
protégeant par exemple les femelles gravides de sébaste ou leurs progénitures (Husebo 2002).
Compte tenu de la longévité étendue de nombreux organismes d'eau profonde, les dommages
subis par les communautés et écosystèmes des eaux profondes devraient être permanents et leur
régénération, très lente. L'intensité et la fréquence des perturbations humaines que peuvent
supporter ces systèmes sont par conséquent très faibles.
Des mesures ont d'ores et déjà été prises dans l'Atlantique du NE pour réduire l'impact de la
pêche sur les eaux profondes. Après une série de mesures provisoires, les chaluts de fond ont été
définitivement interdits au niveau des monts Darwin (Figure 5.1) par le règlement (CE)
n° 602/2004 du Conseil du 22 mars 2004. Deux zones protégées interdisant les chaluts de fond
et les filets de pêche en dessous de 200 m ont par ailleurs été établies par le règlement (CE)
n° 1568/2005 du Conseil du 20 septembre 2005 (Figure 5.1). Depuis 2004, les règlements sur
les TAC appliqués aux poissons d'eau profonde (CE n° 2270/2004 et CE n° 2015/2006)
interdisent la pêche à l'hoplostète orange dans d'importantes zones situées à l'ouest de l'Irlande et
de l'Écosse (Figure 5.1). En plus d'être un outil de gestion de la pêche, ces fermetures assurent la
protection des habitats et communautés d'eau profonde. L'hoplostète orange a été la principale
espèce cible dans les deux rectangles les plus au sud et la fermeture devrait réduire l'effort de
pêche en eau profonde dans ces zones à un bas niveau, dans la mesure où aucune autre espèce
d'eau profonde n'y est capturée en grande quantité. Dans les eaux internationales de l'Atlantique
du NE, cinq monts sous-marins de la dorsale médio-atlantique sont actuellement fermés à la
pêche de fond afin de protéger des habitats d'eau profonde vulnérables. C'est également le cas de
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76
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
quatre zones au niveau des bancs Hatton et Rockall. L'utilisation de filets de fond dormants dans
les eaux profondes est également interdite dans certaines zones et à certaines profondeurs
(chapitre 1.4). La science n'a pas encore permis de déterminer quelle proportion du fond marin
nécessitait une protection. Un réseau de ZMP devrait néanmoins être constitué d'ici 2012,
conformément aux engagements pris au niveau international à la suite du sommet mondial pour
le développement durable (WSSD 2002). Les zones marines protégées existantes conçues pour
protéger l'habitat des eaux profondes et les zones d'interdiction destinées à gérer les pêcheries
dans les eaux profondes de l'Atlantique du NE constituent déjà un pas dans ce sens.
35°0'W
62°0'N
30°
20°
10°
0°
Vb1
XIIa4
XIVb1
Vb2
XIIa2 Vb1a
60°
IVa
Darwin mounds
60°
VIa
XIIb
VIb1
IVb
VIb2
Orange
roughy
closed
VIIc1 area
VIIc2 VIIb
XIIa1
IVc
VIIg
VIIk2
XIIc
50°
VIIj2
VIIe
VIIk1
VIIh
VIId
50°
VIIj1
VIIId1
VIIIa
Xb
VIIId2
VIIIe1
VIIIb
VIIIc
VIIIe2
Xa1
IXa
IXb1
Xa2
40°
IXb2
40°
Azores
30°
20°
10°
0°
2°30'E
Madiera
and Canaries
30°0'N
Figure 5.1. Zones marines protégées (ZMP) des eaux profondes de l'Atlantique du NE:
interdiction permanente des engins de pêche en contact avec le fond et d'autres activités
humaines sur le fond marin (Açores, Madère, Canaries: bleu), interdiction de toute activité de
pêche (monts Darwin: rouge), zone d'interdiction de la pêche à l'hoplostète orange (ouest de
l'Irlande, rouge).
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PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
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80
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
Annexe 1. Espèces considérées comme d'eau profonde par le CIEM et/ou la réglementation de l'UE -I- Poissons à
arêtes
Nom scientifique
Nom français
Nom anglais
Règlement CE
CIEM
Pêche dans l'Atlantique du
NE
Cible
Cible
Cible
Prise accessoire
Prise accessoire
Cible
Cible
Cible
Cible
Prise accessoire
Cible
Prise accessoire
Prise accessoire
Aphanopus carbo
Sabre noir
Black scabbardfish
Annexe I
Eau profonde
Coryphaenoides rupestris
Grenadier de roche
Roundnose grenadier
Annexe I
Eau profonde
Argentina silus
Grande argentine
Greater silver smelt
Annexe I
Eau profonde
Beryx splendens
Béryx long
Alfonsino, golden eye perch
Annexe I (1)
Eau profonde
Beryx decadactylus
Béryx commun
Alfonsino, red bream
Annexe I (1)
Eau profonde
Hoplostethus atlanticus
Hoplostète orange, empereur
Orange roughy
Annexe I
Eau profonde
Molva dypterygia
Lingue bleue
Blue ling
Annexe I
Eau profonde
Molva molva
Lingue
Ling
Eau profonde
Brosme brosme
Brosme
Tusk
Eau profonde
Phycis blennoides
Mostelle de fond
Forkbeards
Annexe I
Eau profonde
Pagellus bogaraveo
Dorade rose
Red (blackspot) seabream
Annexe II
Eau profonde
Macrourus berglax
Grenadier à tête rude, grenadier gris
Roughhead grenadier (Rough rattail)
Annexe II
Eau profonde
Mora moro
Moro commun
Common mora
Annexe II
Eau profonde
Antimora rostrata
Antimora bleu
Blue antimora (Blue hake)
Annexe II
Epigonus telescopus
Apogon noir, cardinal
Black (Deep-water) cardinal fish
Annexe II
Eau profonde
Prise accessoire
Helicolenus dactylopterus
Sébaste chèvre
Bluemouth (Blue mouth redfish)
Annexe II
Eau profonde
Prise accessoire
Lepidopus caudatus
Sabre argenté, Coutelas
Silver scabbard fish, Cutlass
Annexe II
Eau profonde
Cible
Alepocephalus bairdii
Alépocéphale, cassigné gulliver
Baird's smoothhead
Annexe II
Eau profonde
Lycodes esmarkii
Blennie vivipare
Eelpout
Annexe II
Rejet
Raja hyperborea
Raie arctique
Arctic skate
Annexe II
Rejet
Sebastes viviparus
Rascasse du Nord
Small redfish (Norway haddock)
Annexe II
Rejet
Hoplostethus mediterraneus
Hoplostète de Méditerranée
Silver roughy (Pink)
Annexe II
Eau profonde
Rejet
Trachyscorpia cristulata
Rascasse de profondeur
Spiny (Deep-sea) scorpionfish
Annexe II
Prise accessoire
Alepocephalus rostratus
Alépocéphale de Risso, cassigné commun Risso's smoothhead
Annexe II
Rejet
Polyprion americanus
Cernier atlantique
Wreckfish
Annexe II
Eau profonde
Prise accessoire
Trachyrincus scabrus
Grenadier-scie commun
Roughsnout grenadier
Eau profonde (2) Rejet
Micromesistius poutassou
merlan bleu
Blue whiting
Eau profonde (3) Cible
Reinhardtius hippoglossoides
Flétan noir
Greenland halibut
Eau profonde (3) Cible
Sebastes spp.
Sébastes
Redfishes
Eau profonde (3) Cible
Conger conger
Congre
Conger eel
Annexe II
dis. étendue (4) Cible
Merluccius merluccius
Merlu
Hake
dis. étendue (4) Cible
Lophius spp.
Lottes, baudroies
Monkfishes, Anglerfishes
dis. étendue (4) Cible
Lepidorhombus spp.
Cardines
Megrims
dis. étendue (4) Cible
(1) ainsi que Beryx spp.
(2) ainsi que Trachyrhynchus trachyrhynchus
(3) espèces à considérer comme d'eau profonde, mais traitées par des groupes de travail spécifiques dans le cadre du CIEM
(4) espèces «à distribution étendue» principalement pêchées sur le plateau continental et dont la distribution s'étend aux eaux profondes
81
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Espèces considérées comme d'eau profonde par le CIEM et/ou la réglementation de l'UE -II- Requins, raies et
chimères
Nom scientifique
Nom français
Centrophorus squamosus
Centroscymnus coelolepis
Centrophorus granulosus
Centroscyllium fabricii
Centroscymnus crepidater
Dalatias licha
Deania calceus
Galeus melastomus
Galeus murinus
Scymnodon ringens
Hexanchus griseus
Chlamydoselachus anguineus
Squale chagrin de l'Atlantique, siki
Requin portugais, siki
Squale chagrin commun
Aiguillat noir
Pailona à long nez
Squale liche
Squale savate
Chien espagnol
Chien islandais
Requin grogneur commun
Requin griset
Requin lézard
Oxynotus paradoxus
Somniosus microcephalus
Apristurus spp.
Etmopterus princeps
Etmopterus spinax
Nom anglais
Règlement CE
CIEM
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Humantin
Requin du Groenland
Holbiches
Sagre rude
Sagre commun
Leafscale gulper shark
Portuguese dogfish
Gulper shark
Black dogfish
Longnose velvet dogfish
Kitefin shark
Birdbeak dogfish
Blackmouth dogfish
Mouse catshark
Knifetooth dogfish
Six-gilled shark
Frilled shark
Sailfin roughshark (Sharpback
shark)
Greenland shark
Iceland catshark
Greater lanternshark
Velvet belly
Raja nidarosiensis
Raja fyllae
Pocheteau de Norvège
Raie ronde
Norwegian skate
Round skate
Annexe II
Annexe II
Prise accessoire
Rejet
Hydrolagus mirabilis
Rhinochimaera atlantica
Chimaera monstrosa
Chimère à gros yeux
Rhinochimère à nez droit
Chimère commune
Large-eyed rabbit fish (Ratfish)
Straightnose rabbitfish
Rabbit fish (Rattail)
Annexe II
Annexe II
Annexe II
Prise accessoire/rejet
Prise accessoire/rejet
Prise accessoire
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Annexe I
Requin d'eau profonde
Requin d'eau profonde
Requin d'eau profonde
Requin d'eau profonde
Requin d'eau profonde
Requin d'eau profonde
Requin d'eau profonde
Pêche dans l'Atlantique
du NE
Cible
Cible
Prise accessoire
Prise accessoire
Prise accessoire
Prise accessoire
Prise accessoire
Prise accessoire
Rejet
Rejet
Rejet
Rejet
Requin d'eau profonde
Requin d'eau profonde
Requin d'eau profonde
Eau profonde
Rejet
?
Rejet
Rejet
Rejet
Espèces considérées comme d'eau profonde par le CIEM et/ou la réglementation de l'UE -III- Crustacés
Nom scientifique
Aristeomorpha foliacea
Chaecon (Geryon) affinis
PE 389.606
Nom français
Crabe rouge
Nom anglais
Giant red shrimp
Deep-water red crab
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Règlement
CE
Annexe II
Pêche dans l'Atlantique du
NE
Eau profonde Prise accessoire
Eau profonde Prise accessoire
CIEM
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
GESTION DES PÊCHERIES D'EAU PROFONDE DANS
DES ZONES SITUÉES EN DEHORS DE LA
JURIDICTION NATIONALE
Matthew GIANNI
Contenu:
Ce document passe en revue la gestion des pêcheries d'eau profonde en haute mer, ainsi que l'état des
espèces exploitées à des fins commerciales et les informations disponibles sur les impacts de ces
pêcheries sur les écosystèmes d'eau profonde vulnérables. Il examine également les récentes
résolutions adoptées par l'Assemblée générale de l'ONU, dont la résolution de 2006 sur la viabilité
des pêches associées à la pêche hauturière de fond, et dans quelle mesure ces résolutions ont été
mises en œuvre jusqu'à ce jour par les États pavillons et les organisations régionales de gestion des
pêches.
IP/B/PECH/IC/2007-097
83
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Résumé
Les pêcheries d'eau profonde en haute mer ont connu un important développement ces dernières
années. Des biologistes du secteur de la pêche, des scientifiques spécialisés dans les eaux
profondes, des écologistes, etc. ont fait part de leur inquiétude croissante face à l'absence de
viabilité des pêcheries d'eau profonde et aux dégâts provoqués par celles-ci sur les espèces et
écosystèmes d'eau profonde sensibles tels que les coraux d'eau froide, les monts sous-marins et
les éponges.
En décembre 2006, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté une résolution invitant les pays
pratiquant la pêche en haute mer et les organisations régionales de gestion des pêches (ORGP) à
réaliser des évaluations des impacts négatifs sur les écosystèmes marins vulnérables d'eau
profonde et de la viabilité à long terme des stocks de poissons d'eau profonde. Cette résolution
réclame l'interdiction de la pêche de fond dans toutes les zones de haute mer où de tels
écosystèmes ont été repérés ou pourraient exister, à moins que les pays intéressés par ce type de
pêche ne démontrent que leurs navires de pêche n'auront aucun impact négatif sur ces
écosystèmes.
Au travers de la résolution de l'Assemblée générale, l'ensemble des pays pratiquant la pêche en
haute mer s'engagent à gérer la pêche en eau profonde et à protéger la biodiversité des eaux
profondes conformément à la législation internationale. Reste à voir si et dans quelle mesure les
États pavillons et les ORGP appliqueront la résolution. L'Assemblée générale a demandé
l'application de l'intégralité de la résolution d'ici décembre 2008 à toutes les pêches de fond en
haute mer et pourrait recommander l'adoption d'autres mesures, dont des moratoires, dans les
zones ou les cas où les États ou les ORGP n'ont pas introduit de mesures efficaces à l'occasion
d'un nouvel examen de la situation par l'Assemblée générale de l'ONU prévu en 2009.
PE 389.606
84
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
1.
INTRODUCTION
On entend généralement par «eaux profondes» la partie des océans de la planète située sous le
plateau continental, c'est-à-dire à plus de 200 mètres de profondeur. Les pêcheries visant des
espèces d'eau profonde opèrent généralement à des profondeurs inférieures à 400 mètres.1
De nombreuses espèces d'eau profonde visées à des fins d'exploitation commerciale sont
généralement considérées comme des espèces à longue durée de vie, à croissance lente, à
reproduction lente et à faible taux de fécondité, de sorte qu'elles sont plus vulnérables à la
surpêche et à l'épuisement que la plupart des espèces exploitées sur le plateau continental, sur la
partie supérieure du talus continental ou dans les écosystèmes pélagiques de pleine mer. La
plupart des espèces capturées dans les pêcheries de fond en haute mer affichent une majorité de
ces caractéristiques, voire toutes.
Les pêcheries mentionnées dans ce document sont des pêcheries de fond démersales en haute
mer visant principalement un(e) ou plusieurs des espèces ou groupes d'espèces suivant(e)s:
Nom scientifique
Nom commun
Principales espèces cibles – pêcheries au chalut de fond de haute mer2
Béryx
Beryx spp.
Sabre noir
Aphanopus carbo
Apogon noir
Epigonus telescopus
Flétan noir
Reinhardtius hippoglossoides
Crevette nordique
Pandalus borealis
Hoplostète orange
Hoplostethus atlanticus
Oréos
Famille Oreosomatidae
Tête casquée pélagique
Pseudopentaceros richardsoni
Alépocéphale
Alepocephalus bairdii
Sébaste
Sebastes spp.
Grenadier de roche
Coryphaenoides rupestris
Grenadier à tête rude
Macrourus berglax
Légine
Dissostichus spp.
Requins d'eau profonde
Principales espèces cibles – autres pêcheries de fond de haute mer
Rouffe à nez bleu
Hyperoglyphe Antarctica
Crabe rouge
Chaceon spp.
Flétan noir
Reinhardtius hippoglossoides
Ocean blue-eye trevalla (nom anglais)
Schedophilus labyrinthica
Vivaneau laflamme
Etelis coruscans
Requins d'eau profonde
Principales espèces cibles dans les pêcheries de fond de haute mer
Ce document n'aborde pas les grandes pêcheries hauturières d'espèces d'eau profonde capturées
dans le cadre de la pêche à la palangre ou au chalut pélagique et entre deux eaux, telles que les
pêcheries de merlan bleu et de sébaste «océanique» (Sebastes mentella) dans l'Atlantique du
1
2
Deep-water Fisheries Resources South of 63ºN. Advisory Committee on Fisheries Management. Volume 10.
2005.
p
1.
International
Council
for
the
Exploration
of
the
Seas
(ICES).
http://www.ices.dk/committe/acfm/comwork/report/2005/oct/Deep%20water.pdf
Cette liste reprend la majorité des espèces à valeur commerciale visées par la pêche de fond en haute mer ou
faisant l'objet de prises accessoires lors de celle-ci, mais n'est en aucun cas exhaustive.
85
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Nord. Il se penche en revanche sur la pêche hauturière aux crevettes nordiques dans l'Atlantique
du Nord-Ouest. En effet, bien que ces crevettes ne soient pas considérées comme des espèces à
longue durée de vie et à faible fécondité, cette pêcherie est exploitée par des chalutiers de fond
opérant à des profondeurs pouvant aller jusqu'à 1000 mètres et plus.
2.
DÉVELOPPEMENT DES PÊCHERIES D'EAU PROFONDE EN
HAUTE MER
La pêche à la ligne à main d'espèces d'eau profonde a vu le jour il y a au moins un siècle dans le
Pacifique Sud et autour de Madère et des Açores dans l'Atlantique. La pêche à la palangre en
eau profonde est quant à elle apparue en Norvège et en Suède au milieu des années 1800, tandis
que la pêche au chalut de fond en eaux profondes s'est développée à grande échelle dans les
années 1950 et 1960, avec l'avènement d'une pêche au chalut industrielle hauturière permettant
aux navires d'opérer loin de leurs ports d'attache grâce au traitement et à la congélation des
captures à bord.
Les principaux pays responsables du développement de pêcheries d'eau profonde en haute mer
étaient le Japon et l'URSS dans le Pacifique Nord et l'URSS et les pays d'Europe de l'Est dans
l'Atlantique du Nord et d'autres zones océaniques. L'adoption généralisée des ZEE à la fin des
années 1970, associée à la suppression du soutien du gouvernement central à la pêche hauturière
qui a fait suite à l'effondrement de l'Union soviétique à la fin des années 1980, a entraîné le
déclin de la pêche hauturière en eau profonde exploitée par les flottes russes et d'Europe de l'Est.
Cependant, dans les années 1980 et 1990, plusieurs pays côtiers ont commencé à développer des
pêcheries de fond en eau profonde le long du talus continental et sur des monts sous-marins à
l'intérieur de leurs ZEE. Bon nombre de ces pêches se sont progressivement étendues à des eaux
plus profondes et toujours plus au large, y compris dans les zones de haute mer.
Parmi les plus importantes figurent les pêcheries néo-zélandaises et australiennes à l'hoplostète
orange, qui se sont étendues aux hautes mers du Pacifique Sud et de l'océan Indien à la fin des
années 1980 et dans les années 1990, et l'expansion du chalutage de fond ayant pour cible le
grenadier de roche, la lingue bleue et des espèces associées par des chalutiers français et
espagnols dans l'Atlantique du Nord-est dans les années 1990. Dans l'Atlantique du Nord-est, la
pêche de fond en haute mer a connu une expansion considérable au début des années 1990 en
raison de l'épuisement des stocks d'espèces démersales traditionnelles sur le plateau continental
des Grand Bancs de Terre-Neuve.3
3.
PÊCHERIES DE FOND HAUTURIÈRES ACTUELLES
Ces dernières années, la pêche de fond hauturière a essentiellement été pratiquée dans
l'Atlantique du Nord et du Sud, le Pacifique Sud, le Pacifique du Nord-Ouest, l'océan Austral et
l'océan Indien du Sud. Elle semble par contre actuellement très peu développée dans le
Pacifique central et du Nord-est et l'Atlantique central. En termes de volume, la majorité des
captures démersales hauturières se font dans l'Atlantique du Nord, principalement par des
navires de pêche battant pavillon d'États membres de l'Union européenne.
On trouve, dans l'Atlantique du Nord-Ouest, d'importantes pêcheries hauturières de crevettes
nordiques, de sébaste, de flétan noir et de grenadiers le long du talus des deux extrémités des
Grands Bancs et du Bonnet Flamand au-delà de la ZEE canadienne. Dans l'Atlantique du Nord3
Gianni M. High Seas Bottom Trawl Fisheries and Their Impacts on the Biodiversity of Vulnerable Deep-Sea
Ecosystems: Options for International Action UICN 2004.
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86
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
est, les grenadiers, les alépocéphales, le sabre noir, le flétan noir, les requins d'eau profonde et
d'autres espèces sont exploités dans les hautes mers situées le long des bancs Hatton et Rockall,
de la dorsale de Reykjanes, de la dorsale médio-atlantique et de divers monts sous-marins.
L'hoplostète orange a été pêché en haute mer au cours des dix dernières années ou plus dans
l'Atlantique du Nord-est, mais les captures se sont récemment effondrées.
Les principales pêcheries de fond d'eau profonde en haute mer dans les océans Indien et
Pacifique sont des pêcheries au chalut au niveau des monts sous-marins, des dorsales, des bancs
et d'autres détails topographiques. Dans le Pacifique Sud et l'océan Indien du Sud, les pêcheries
visent l'hoplostète orange, l'oréos et le béryx, tandis que celles du Pacifique du Nord-Ouest ont
pour cible principale la tête casquée. Des informations isolées laissent entendre que la pêche de
fond au filet maillant en haute mer aux requins se serait récemment développée dans l'océan
Indien du Sud.
Dans l'Atlantique du Sud-ouest, plus de 100 navires participeraient à la pêche au chalut de fond
en haute mer visant le merlu et le calmar.4 Contrairement à la plupart des pêcheries de fond de
haute mer, celle de l'Atlantique du Sud-ouest semble se dérouler principalement sur le plateau
continental et sur le haut du talus de la partie du plateau patagonien qui s'étend au-delà des ZEE
des pays de la région. Dans l'Atlantique du Sud-Est, des pêcheries d'eau profonde visant
l'hoplostète orange se sont développées sur les monts sous-marins et les systèmes dorsaux de la
région, mais ont totalement disparu en haute mer ces dernières années, probablement en raison
de l'épuisement rapide des stocks. Cette région compte encore quelques petites pêcheries
exploitant le crabe rouge et la légine australe. Dans l'océan Austral autour de l'Antarctique,
presque toutes les captures hauturières d'eau profonde sont effectuées par des pêcheries à la
palangre de fond visant principalement la légine australe.
La pêche de fond en haute mer est essentiellement exploitée par des chalutiers de fond. Outre la
pêche palangrière à la légine australe dans l'océan Austral, la pêche hauturière à la palangre et à
la ligne de fond d'espèces d'eau profonde (flétan noir, vivaneau laflamme et rouffe à nez bleu,
notamment) s'est développée dans l'Atlantique du NE, l'océan Indien et le Pacifique Sud. Les
pêcheries de crabe rouge dans l'Atlantique du Sud-Est et ailleurs pratiquent principalement la
pêche au casier, tandis que les requins d'eau profonde sont souvent pêchés à l'aide de navires à
filets maillants ou de palangriers (en plus d'être des prises accessoires de la pêche au chalut de
fond en eau profonde).
4.
VOLUME ET VALEUR DES PÊCHERIES AU CHALUT DE FOND
EN HAUTE MER
D'après un rapport sur la pêche au chalut de fond en haute mer publié par l'UICN, onze pays ont
enregistré 95 % des captures au chalut de fond en haute mer en 2001, les États membres de
l'Union européenne
(États baltes compris) réalisant environ 60 % de ces captures. En 2001, les captures totales des
pêcheries au chalut de fond en haute mer se sont élevées à environ 170 000 mt – 215 000 mt (ce
qui représente environ 0,2 % des captures mondiales de poissons en mer en 2001) pour une
valeur d'environ 280-320 millions USD (soit moins de 0,5 % de la valeur des captures
mondiales de poissons de mer pour l'année 2001). Le rapport estime à environ 300 le nombre de
chalutiers de fond en haute mer en 2001 (contre environ 3,1 millions de bateaux de pêche au
4
Document de travail des services de la Commission: accompagnant la communication de la Commission au
Conseil et au Parlement européen. Pratiques de pêche destructrices en haute mer et protection des écosystèmes
vulnérables d'eaux profondes. Bruxelles, 17 octobre 2007. SEC(2007) 1314.
87
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
niveau mondial) et affirme que la contribution de ce type de pêche à la sécurité alimentaire
mondiale est quasiment nulle.
Le rapport conclut que la pêche hauturière au chalut de fond en eau profonde se caractérise par
un épuisement progressif des stocks de poissons visés; une pêche non réglementée et non
déclarée; l'absence de contrôle des pêches nouvelles et exploratoires; des engins et pratiques
sélectifs et nuisibles à l'environnement; et l'absence quasi totale de protection des habitats
sensibles ou de la biodiversité. Après examen de la gestion de ces pêcheries à la lumière du droit
international en vigueur, le rapport conclut que ce type de pêche a été mené en totale
contradiction avec, ou en violation de, l'accord des Nations unies sur les stocks de poissons
de 1995 et le Code de conduite pour une pêche responsable de la FAO, en autres instruments.5
Plus récemment, une étude publiée début 2007 par le Fisheries Centre de l'Université de
Colombie britannique a estimé que les subventions versées aux flottes de chalutiers de fond
hauturiers s'élevaient à environ 150 millions USD par an. L'étude conclut que, sans subventions,
ces flottes subiraient des pertes d'environ 50 millions USD par an. Au moins la moitié des
subventions semblent destinées à l'approvisionnement en carburant.6
Il semble que la pêche de fond en haute mer ait quelque peu diminué ces dernières années,
probablement pour une série de raisons: l'épuisement des stocks, l'augmentation des prix du
carburant et le renforcement de la pression réglementaire à la suite de développements politiques
au sein de l'Assemblée générale de l'ONU et d'autres instances internationales. La diminution de
la productivité des pêcheries du plateau continental et des ZEE devrait néanmoins accentuer la
pression sur le développement de pêcheries d'eau profonde en haute mer, ce qui signifie que
l'épuisement des stocks de poissons et la destruction de l'environnement marin devraient se
poursuivre inévitablement en l'absence de structures réglementaires efficaces pour la
conservation et la gestion des pêcheries d'eau profonde en haute mer.
5.
ÉTAT DES STOCKS DE POISSONS D'EAU PROFONDE EN HAUTE
MER
À l'occasion d'un examen global des pêcheries d'eau profonde, Koslow et al. ont conclu que les
stocks de poisson d'eau profonde étaient «généralement pêchés de manière intensive, le plus
souvent en 5-10 ans, jusqu'à l'extinction commerciale ou des niveaux très bas».7 Une étude des
pêcheries des monts sous-marins à l'échelle mondiale au cours des vingt dernières années a
conclu que les stocks de poissons associés aux monts sous-marins avaient été exploités sans
relâche jusqu'à des niveaux non viables en raison d'une connaissance insuffisante, voire nulle, de
la biologie des populations de poissons visées ou prises accessoirement. Les mesures de gestion
sont par ailleurs inexistantes ou souvent basées sur des données insuffisantes et la pêche au
chalut extrêmement performante des regroupements de poissons sur les monts sous-marins ou
juste au-dessus exerce une pression intense.8
5
6
Gianni M. High Seas Bottom Trawl Fisheries and Their Impacts on the Biodiversity of Vulnerable Deep-Sea
Ecosystems: Options for International Action UICN 2004.
Sumaila, U.R., Pauly, D., 2006. Executive Summary. Dans Sumaila, U.R., Pauly, D. (eds.), Catching more bait:
a bottom-up re-estimation of global fisheries subsidies (2nd Version). Fisheries Centre Research Reports 14(6),
pp. 2. Fisheries Centre, University of British Columbia, Vancouver, Canada. Chapitre 3
http://www.fisheries.ubc.ca/publications/reports/14-6.pdf
7
8
Koslow JA, Boehlert GW, Gordon JDM, Haedrich RL, Lorance P, Parin N, Continental Slope and deep-sea
fisheries: implications for a fragile ecosystem. ICES Journal of Marine Science, 57: 548-557. 2000
Rogers AD, The Biology of Seamounts. Advances in Marine Biology Vol. 30, 1994, 305-350. p 339.
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88
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
On ignore dans une large mesure l'état des stocks de poissons d'eau profonde visés par les
pêcheries de fond en haute mer dans la plupart des zones, à l'exception des pêcheries de
l'Atlantique du Nord-Ouest et de l'océan Austral. Le rapport 2006 du comité scientifique de
l'Organisation des pêches de l'Atlantique du Sud-Est (OPASE) a indiqué que, compte tenu de
l'insuffisance de données aux fins de l'évaluation des stocks, il n'était pas possible d'émettre un
avis concernant la gestion des espèces pêchées dans la zone OPASE.9 Le nombre et l'état des
stocks cibles dans les pêcheries d'eau profonde de haute mer de l'océan Indien sont également
inconnus.10
D'après le comité consultatif de gestion des pêches du Conseil international pour l'exploration de
la mer (CIEM), les espèces de poissons visées ou capturées en tant que prises accessoires dans
les pêcheries d'eau profonde de l'Atlantique du Nord-est ont une longue durée de vie, une
croissance lente, une faible capacité de reproduction, sont extrêmement vulnérables à la
surexploitation et peuvent être rapidement épuisées, compte tenu de leur régénération très lente
(qui se mesure souvent en décennies). Le CIEM a exprimé à plusieurs reprises son inquiétude
face au développement rapide des pêcheries d'eau profonde dans l'Atlantique du Nord-est, à la
vulnérabilité extrême des espèces exploitées à la surpêche et à la difficulté d'évaluer l'état des
stocks cibles en raison de la rareté ou de l'inexistence d'informations de base sur les captures,
l'effort de pêche et la biologie des espèces. Le CIEM indique que les espèces d'eau profonde les
plus exploitées dans l'Atlantique du Nord-est seraient actuellement capturées «en dehors de
toute limite biologique de sécurité». 11
Des scientifiques néo-zélandais et australiens sont parvenus à des conclusions similaires
concernant les pêcheries d'hoplostète orange, qui constituent la principale pêcherie dans la
région du Pacifique Sud et de l'océan Indien. Une analyse des données concernant les captures
commerciales et l'effort de la pêche à l'hoplostète orange sur des monts sous-marins des eaux
néo-zélandaises a mis en évidence «une importante diminution des taux de capture au fil du
temps et un schéma d'épuisement progressif des populations des monts sous-marins, avec le
déplacement rapide des pêcheries… vers les monts sous-marins non exploités».12 Des
évaluations des stocks ont été tentées pour plusieurs pêcheries d'hoplostète orange en haute mer
du Pacifique Sud, mais aucune n'a été jugée suffisamment fiable en raison de la grande
variabilité des taux d'effort et de capture d'une année à l'autre dans les diverses pêcheries.13 Il
n'existe par ailleurs aucune estimation de la taille du stock, de la biomasse ou de la mortalité par
pêche de la rouffe à nez bleu - la principale espèce cible de la pêche hauturière à la palangre
9
Rapport du comité scientifique de l'OPASE, 2006. Organisation des pêches de l'Atlantique du Sud-Est (OPASE)
http://www.seafo.org/Scientific%20Committee/reports/SC%20Report%202006%20Eng.pdf
10
Shotton, R. (comp.). Management of demersal fisheries resources of the southern Indian Ocean. Report of the
fourth and fifth Ad Hoc Meetings on Potential Management Initiatives of Deepwater Fisheries Operators in the
Southern Indian Ocean (Kameeldrift East, South Africa, 12–19 February 2006 and Albion, Petite Rivière,
Mauritius, 26–28 April 2006) including specification of benthic protected areas and a 2006 programme of
fisheries research. FAO Fisheries Circular. N° 1020. Rome, FAO. 2006.
11
ICES Advisory Committee on Fisheries Management 2005. Volume 10. p 4.
http://www.ices.dk/committe/acfm/comwork/report/2005/oct/Deep%20water.pdf
Voir également Large, P. A., C. Hammer, O. A. Bergstad, J. D. M. Gordon et P. Lorance, Deep-water Fisheries
of the Northeast Atlantic: II. Assessment and Management Approaches. Journal of Northwest Atlantic Fishery
Science, Vol 31: 151-163. 2003.
12
Clark M, Fisheries for orange roughy (Hoplostethus atlanticus) on seamounts in New Zealand. Oceanologica
Acta (1999) 22, 6, 593-602. p 593.
13
Information describing orange roughy Hoplostethus atlanticus fisheries relating to the South Pacific Fishery
Management Organisation. Working Draft 04 May 2007. Third International Meeting on the Establishment of a
South Pacific Regional Fisheries Management Organisation. Renaca, Chili, 23 avril-4 mai 2007.
89
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
dans le Pacifique Sud.14 Les stocks de légine australe visés dans l'océan Austral sont considérés
comme totalement surexploités, en partie à cause du problème persistant de pêche INN dans
cette région.15
Dans l'Atlantique du Nord-Ouest, il semble que le stock de flétan noir pêché en haute mer ait
atteint son niveau le plus bas depuis que l'OPANO a commencé à l'évaluer.16 D'après l'OPANO,
la biomasse du principal stock de sébaste capturé par la pêche de fond de l'Atlantique du NordOuest diminue depuis le milieu des années 199017, tandis qu'une étude publiée par la FAO
estime que les populations de sébaste de la région sont épuisées.18 Seule la pêcherie de la
crevette nordique semble être restée relativement stable ces dernières années.19 Les
captures/prises accessoires de grenadier dans la pêcherie au chalut d'eau profonde dans
l'Atlantique du Nord-Ouest ne font quant à elles l'objet d'aucune réglementation (aucun quota n'a
été fixé pour la capture de cette espèce). Au vu des informations scientifiques récentes
concernant l'état des espèces de grenadier, ces données sont extrêmement préoccupantes (voir
encadré).
Encadré: Déclin des populations de grenadier dans l'Atlantique du Nord-Ouest20
Une étude publiée dans la revue Nature en janvier 2006 a mis en évidence une diminution importante des
populations de plusieurs espèces d'eau profonde visées à des fins d'exploitation commerciale dans des pêcheries
d'eau profonde de l'Atlantique du Nord-Ouest. L'étude s'est penchée sur l'évolution de la population de cinq
espèces de poissons d'eau profonde vivant le long du talus continental dans les eaux atlantiques du Canada et
capturées lors de recherches au chalut au cours de la période 1978-1994. Parmi les espèces étudiées, deux
(grenadier de roche et grenadier à tête rude) présentent une valeur commerciale. Les trois autres - grenadier bleu,
aiguillat et raie à queue épineuse - sont des prises accessoires, essentiellement dans les pêcheries au chalut d'eau
profonde du flétan noir et du sébaste.
L'étude a mis en évidence un déclin de ces espèces compris entre 87 et 98 % au cours des 17 années examinées –
ce qui équivaut plus ou moins à une génération si l'on considère la longévité de ces espèces à longue durée de
vie. Dans le cas des grenadiers de roche et à tête rude, des informations complémentaires ont permis à l'étude
d'examiner une période de 26 ans (1978-2003), ce qui a porté le déclin du grenadier de roche à 99,6 % et celui
du grenadier à tête rude à 93,3 %. L'étude conclut que le taux de déclin très rapide permet de considérer ces
espèces comme «gravement menacées» d'après les critères de la liste rouge de l'UICN.
Ces deux espèces sont essentiellement capturées par des navires de la CE pêchant en haute mer dans l'Atlantique
du Nord-Ouest. D'après des données de l'Organisation des pêches de l'Atlantique du Nord-Ouest (OPANO), les
deux espèces ont essentiellement été capturées en 2003 par des chalutiers de fond en haute mer dans la région
OPANO, la flotte espagnole ayant à elle seule capturé 4597 tonnes - soit environ 80 % des captures totales
déclarées de grenadier de roche et à tête rude dans l'ensemble de l'Atlantique du Nord-Ouest (y compris les
captures effectuées dans la ZEE canadienne).
14
Information describing bluenose (Hyperglophe Antarctica) fisheries information relating to the South Pacific
Regional Fisheries Management Organisation. Working Draft 22 June 2007. Third International Meeting on the
Establishment of a South Pacific Regional Fisheries Management Organisation. Renaca, Chili, 23 avri-4 mai
2007.
15
Maguire, J.-J.; Sissenwine, M.; Csirke, J.; Grainger, R.; Garcia, S. The state of world highly migratory,
straddling and other high seas fishery resources and associated species. FAO Fisheries Technical Paper. No.
495. Rome: FAO. 2006. 84p.
16
2006 - Greenland Halibut (Reinhardtius hippoglossoides) in Subarea 2 and Divisions 3KLMNO. (2006)
http://www.nafo.int/science/frames/science.html
17
2005 - Redfish (Sebastes spp.) in Division 3O. (2005) http://www.nafo.int/science/frames/science.html
18
Maguire, J.-J.; Sissenwine, M.; Csirke, J.; Grainger, R.; Garcia, S. The state of world highly migratory, straddling
and other high seas fishery resources and associated species. FAO Fisheries Technical Paper. No. 495. Rome:
FAO. 2006. 84p.
19
Northern Shrimp (Pandalus borealis) in Division 3M. (2006) http://www.nafo.int/science/frames/science.html
20
Devine J A, Baker K D, Haedrich R L, Deep-sea fishes qualify as endangered Nature Vol 439. 5 Janvier 2006.
p29.
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
La FAO a publié, en 2006, un rapport général sur l'état des pêcheries de stocks de poissons
grands migrateurs et chevauchants et d'autres espèces d'eau profonde, dans lequel elle conclut
que 58 % des stocks chevauchants examinés sont surexploités et que 6 % sont épuisés. Les
stocks dans presque toutes les pêcheries d'eau profonde identifiées dans le rapport ont été jugés
surexploités, épuisés ou inconnus mais probablement épuisés.21
L'examen de la gestion des stocks de poissons d'eau profonde réalisé par la Commission et
publié en janvier 2007 conclut que «De nombreux stocks d'eau profonde ont une si faible
productivité que les niveaux d'exploitation soutenables sont probablement trop bas pour
permettre l'activité d'une pêcherie économiquement viable. Il faut donc admettre qu'on ne peut
éviter de réduire les niveaux d'exploitation actuels de ces stocks, soit par choix afin d'en assurer
la préservation, soit parce que la pêche les conduit au bord de l'épuisement. En outre, le rythme
de reconstitution des stocks est tellement lent que toute réduction de l'exploitation doit être
considérée comme une mesure permanente et non comme un moyen de restaurer les stocks dans
la perspective d'accroître, à plus long terme, leur taux d'exploitation».22
Les informations disponibles sur les pêcheries d'eau profonde en haute mer dans le monde vont
dans le sens de cette conclusion.
«Les scientifiques, l'industrie de la pêche et les responsables politiques reconnaissent généralement que les
stocks d'eau profonde vulnérables sont gravement surexploités, mais les impératifs politiques font que l'on se
retranche derrière les incertitudes et les incohérences de l'évaluation scientifique pour différer l'adoption des
mesures urgentes qui s’imposent. C'est peut-être une maigre consolation mais, au moins, dans le fossé de
Rockall, nous possédons de nombreuses informations sur l'écosystème actuellement détruit, alors que dans
d'autres zones, telles le banc Hatton, nous ne saurons jamais ce qui est détruit.»
Dr John Gordon, Scottish Association of Marine Scientists, cité dans «End of the Line» par Charles
Clover. 2004.
6.
IMPACTS
DES
L'ÉCOSYSTÈME
PÊCHERIES
D'EAU
PROFONDE
SUR
Les pêcheries d'eau profonde affectent essentiellement l'écosystème à quatre niveaux:
premièrement, l'impact des pêcheries sur les stocks et espèces visées; deuxièmement, l'impact
des pêcheries sur les espèces faisant l'objet de prises accessoires; troisièmement, les impacts
trophiques sur les écosystèmes d'eau profonde résultant de la suppression d'une importante
proportion de la biomasse dans des environnements souvent pauvres en énergie et en aliments,
ainsi que l'impact potentiel de la capture de nombreux poissons appartenant à des espèces de
prédateurs supérieurs ou principaux; quatrièmement, l'impact physique des engins de pêche sur
l'environnement benthique – le fond marin –, en particulier sur les structures biogéniques ou
constituant l'habitat, tels que les coraux d'eau froide, les champs d'éponges, les gorgones, etc.,
qui sont considérées comme des écosystèmes marins vulnérables.
21
22
Maguire, J.-J.; Sissenwine, M.; Csirke, J.; Grainger, R.; Garcia, S. The state of world highly migratory,
straddling and other high seas fishery resources and associated species. FAO Fisheries Technical Paper. No.
495. Rome: FAO. 2006. 84p.
Examen de la gestion des stocks de poissons d'eau profonde. Communication de la Commission au Conseil et au
Parlement européen. Bruxelles, 29.1.2007 COM(2007) 30 final.
91
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Le problème des prises accessoires et des impacts sur les écosystèmes marins vulnérables est
examiné ci-dessous. On sait très peu de choses sur la structure générale et le fonctionnement des
assemblages d'espèces d'eau profonde et quasiment rien sur les impacts trophiques des pêcheries
d'eau profonde. Les conséquences de la disparition d'un grand nombre de prédateurs supérieurs
dans les écosystèmes d'eau profonde sont elles aussi méconnues et des interrogations majeures
concernant les implications écologiques à long terme de l'épuisement d'espèces trophiques de
niveau moyen à supérieur dans ces écosystèmes demeurent en suspens. Ce domaine doit faire
l'objet d'une attention scientifique urgente car il est probable que les réseaux trophiques et les
écosystèmes d'eau profonde récupéreront difficilement ou lentement, s'ils y parviennent, des
perturbations majeures provoquées par la pêche.23 À cet égard, outre les espèces constituant
l'habitat benthique, il convient de considérer les assemblages d'espèces d'eau profonde liés d'un
point de vue écologique comme des écosystèmes marins vulnérables.
6.1. Prises accessoires
La plupart des pêcheries hauturières sont des pêcheries d'espèces mixtes impliquant des prises
accessoires et le rejet d'une grande variété d'espèces d'eau profonde. D'après les déclarations,
plus d'une centaine d'espèces ont été capturées dans des pêcheries de fond d'eau profonde en
haute mer visant l'hoplostète orange dans le Pacifique Sud.24 Des données couvrant la
période 1972-2000 et provenant de pêcheries commerciales et exploratoires ukrainiennes ont
enregistré plus de 100 espèces ou groupes d'espèces ayant fait l'objet de prises accessoires dans
les pêcheries au chalut de fond dans l'océan Indien du Sud, même si certaines étaient pélagiques
(par opposition aux espèces d'eau profonde).25 Les pêcheries au chalut de fond dans d'autres
zones de haute mer semblent également enregistrer des niveaux substantiels de prises
accessoires d'espèces sans valeur commerciale, tout comme les pêcheries au filet maillant de
fond en eau profonde. Dans la plupart des cas, les informations sur l'état des populations des
espèces d'eau profonde faisant l'objet de prises accessoires sont encore moins nombreuses que
pour les espèces cibles des pêcheries.
Dans certains cas, les prises accessoires peuvent être relativement faibles. C'est le cas
notamment dans certaines pêcheries au chalut d'hoplostète orange et des pêcheries à la palangre
de légine australe. Cependant, dans la pêcherie au chalut d'hoplostète orange, les prises
accessoires pourraient inclure des espèces telles que des requins d'eau profonde et/ou des coraux
d'eau froide. Des albatros et d'autres oiseaux marins sont par ailleurs capturés dans des pêcheries
à la palangre de légine australe. Or des prises accessoires, même peu importantes, d'espèces à
longue durée de vie et à faible taux de fécondité ou affichant une distribution géographique
limitée peuvent avoir de graves conséquences pour ces populations.
6.2. Écosystèmes marins vulnérables
Outre l'exploitation non viable de la plupart des espèces d'eau profonde visées par les opérations
de pêche commerciale, l'impact de la pêche en eau profonde sur les habitats d'eau profonde
sensibles ou vulnérables tels que les récifs coralliens, les champs d'éponges et les écosystèmes
de monts sous-marins, suscite de plus en plus d'inquiétudes depuis quelques années. Les coraux
23
24
25
Butler AJ, Koslow JA, Snelgrove PVR, Juniper SK, Review of the benthic biodiversity of the deep sea. CSIRO
Marine Research, Australie 2001; Koslow JA, Boehlert GW, Gordon JDM, Haedrich RL, Lorance P, Parin N,
Continental Slope and deep-sea fisheries: implications for a fragile ecosystem. ICES Journal of Marine Science,
57: 548-557. 2000.
Information describing orange roughy Hoplostethus atlanticus fisheries relating to the South Pacific Fishery
Management Organisation. Working Draft 04 May 2007. Third International Meeting on the Establishment of a
South Pacific Regional Fisheries Management Organisation. Renaca, Chili, 23 avri-4 mai 2007.
Romanov, E.V. (ed.) Summary and review of Soviet and Ukrainian scientific and commercial fishing operations
on the deepwater ridges of the southern Indian Ocean. FAO Fisheries Circular. N° 991. Rome, FAO. 2003.
PE 389.606
92
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
d'eau froide sont très répandus dans les zones d'eau profonde, le long des talus continentaux et
des monts sous-marins, ainsi que d'autres particularités topographiques similaires rencontrées
dans les eaux profondes (bancs, guyots, collines, monticules, canyons, glacis et systèmes de
dorsale océanique).
On entend généralement par «monts sous-marins» des montagnes d'une hauteur d'au moins
1000 mètres situées sous l'eau. Si l'on s'en tient à cette définition, il y aurait entre 50 000 et
100 000 monts sous-marins de par le monde, dont la moitié en haute mer. Il existerait par
ailleurs entre 600 000 et 1,5 millions de reliefs moins élevés, dont beaucoup abriteraient, à
l'instar des monts sous-marins plus élevés, des écosystèmes spécifiques au plancher océanique
environnant. Malgré le nombre relativement faible de monts sous-marins examinés, ceux étudiés
présentent souvent un couvert corallien important sur les sommets et les talus supérieurs et ces
zones affichent des taux d'endémisme relativement élevés.26
D'après un récent rapport du PNUE, de la Commission océanographique intergouvernementale
et du projet Census of Marine Life, des coraux durs seraient présents sur les monts sous-marins
de l'Atlantique du Nord et du Sud, ainsi que dans le Pacifique Sud et l'océan Indien du Sud, sur
une vaste zone (20° à 60° Sud de latitude) à des profondeurs actuellement exploitées par des
pêcheries de fond d'eau profonde. Ce rapport est le premier du genre à se pencher sur la
localisation de ces écosystèmes (tels que débattus et définis lors de récentes négociations de
l'Assemblée générale de l'ONU) et procède essentiellement à une évaluation biogéographique
des corrélations probables entre les coraux durs d'eau froide formant des récifs (par exemple,
Lophelia pertusa) et les grands monts sous-marins (plus de 1000 m entre la base et le sommet)
dans les océans du monde entier, à l'aide d'une modélisation prédictive.27
Il est important de garder à l'esprit que ce rapport n'étudie qu'un seul type d'écosystème marin
vulnérable par rapport à un type unique de caractéristique topographique des eaux profondes.
Des évaluations similaires devront également été réalisées afin de déterminer l'étendue et la
distribution probables des coraux mous et autres espèces vulnérables à la pêche de fond
associées aux grands monts sous-marins, de même que des évaluations des coraux durs et mous,
des éponges et autres espèces vulnérables associés à d'autres reliefs sous-marins tels que des
monts sous-marins moins élevés (collines, monticules et glacis, par exemple), des canyons et le
talus/la marge continental(e) des hautes mers. Les conséquences destructrices de la pêche au
chalut de fond sur les écosystèmes de coraux d'eau froide associés aux monts sous-marins et au
talus/plateau continental sont bien documentées. Ainsi, l'institut norvégien de recherche
maritime estime qu'environ 30-50 % des récifs coralliens Lophelia d'eau froide de la ZEE
norvégienne ont été endommagés ou détruits par le chalutage de fond. D'importants dégâts dus
au chalutage de fond ont par ailleurs été enregistrés sur les récifs coralliens Solenosmilia des
monts sous-marins au large de la Tasmanie, le récif de Stone Fence dans l'Atlantique du NordOuest à l'intérieur de la ZEE canadienne, les récifs Oculina au large de la côte de Floride dans la
ZEE américaine, les jardins octocoralliaires dans les eaux alaskiennes, les récifs Lophelia au
large de l'Irlande de l'ouest et dans le fossé de Rockall dans l'Atlantique du Nord-Ouest.28
26
27
28
Rogers, A., The Biology, Ecology, and Vulnerability of Seamount Communities. UICN 2004.
http://www.iucn.org/themes/marine/pdf/AlexRogers-CBDCOP7-Seamounts-Complete1.pdf. Également Tony
Koslow, communication personnelle.
Clark MR, Tittensor D, Rogers AD, Brewin P, Schlacher T, Rowden A, Stocks K, Consalvey M (2006).
Seamounts, deep-sea corals and fisheries: vulnerability of deep-sea corals to fishing on seamounts beyond areas
of national jurisdiction. UNEP-WCMC, Cambridge, Royaume-Uni.
Friewald, A., Fosså, J.H., Koslow, T., Roberts, J.M. 2004. Cold-water coral reefs. UNEP-WCMC, Cambridge,
Royaume-Uni.
93
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
La pêcherie hauturière d'hoplostète orange dans le glacis sud Tasman (sud de la ZEE
australienne) est l'une des rares pêcheries d'eau profonde de haute mer, si pas la seule, où des
données d'observation ont été recueillies sur les prises accessoires de corail lorsque la pêche a
commencé à se développer à l'échelle commerciale, une pêche qui visait l'hoplostète orange sur
un système de dorsale et cinq petits monts sous-marins de la zone. Les observateurs présents à
bord des navires au cours de la saison de pêche 1997-1998 (première année de la pêcherie) ont
estimé que 1762 tonnes de coraux avaient été ramenées à la surface par les chaluts dans les
165 traits observés, soit une moyenne de plus de 10 tonnes par trait. Le nombre de traits
observés correspond à environ 14,5 % du nombre total de traits dans la pêcherie. Si l'on
extrapole ces chiffres, les chalutiers de fond auraient capturé plus de 10 000 tonnes de coraux au
cours de la première année de la pêcherie, même si les informations disponibles grâce aux
récentes négociations des ORGP du Pacifique Sud indiquent que les captures accessoires de
coraux seraient d'environ 2000 mt.29 Dans les deux cas, les chiffres n'incluent pas les coraux
endommagés qui n'ont pas été ramenés à la surface et observés dans les filets. En revanche, les
captures d'hoplostète orange dans cette pêcherie pour la même période se sont élevées à environ
4000 tonnes. Le chalut utilisé dans cette pêcherie a été décrit comme «généralement résistant,
conçu pour être utilisé sur les fonds durs et raboteux souvent rencontrés sur les monts sousmarins».30
L'importance des prises accessoires de coraux dans d'autres pêcheries d'hoplostète orange n'est
pas connue, mais il existe de nombreuses informations faisant état d'importantes «captures»
d'espèces de coraux lors des premières phases des pêcheries d'hoplostète orange dans la ZEE
néo-zélandaise. Des captures importantes ont par ailleurs été déclarées dans la pêcherie du
plateau Challenger nord-occidental dans la mer de Tasman et au niveau de petits monts sousmarins ou collines dans le complexe de monts sous-marins de Graveyard sur le glacis Chatham
du nord-ouest. En ce qui concerne cette dernière zone, des études photographiques sur des
monts sous-marins exploités et non exploités par la pêche [complexe de monts sous-marins de
Graveyard] «ont mis en évidence un important contraste dans la distribution des espèces de
corail…avec un couvert corallien proche de 100 % sur les monts sous-marins non exploités par
la pêche, contre seulement 2-3 % sur les monts exploités».31
En décembre 2002, le Conseil international pour l'exploration de la mer (CIEM) a étudié
l'impact de la pêche de fond sur les coraux d'eau froide, parmi d'autres problèmes
environnementaux liés à la pêche. Le rapport précise que «des informations récentes montrent
que le chalut de fond se déroule dans des habitats biogéniques d'eau profonde. Tout engin de
pêche affectant physiquement ces habitats, que ce soit à cause d'un contact direct ou d'effets
indirects tels que l'alluvion ou la sédimentation, aura des conséquences et suscite par conséquent
l'inquiétude». Le rapport conclut que bien que les filets maillants de fond affectent également les
coraux d'eau froide, le chalutage de fond constitue la menace la plus grave pour les coraux d'eau
froide et recommande dès lors: «Le CIEM estime que le seul moyen éprouvé d'empêcher les
activités de pêche d'endommager les récifs biogéniques d'eau profonde est la fermeture spatiale
de zones aux engins traînants susceptibles d'affecter le fond marin». 32
29
30
31
32
Information describing orange roughy Hoplostethus atlanticus fisheries relating to the South Pacific Fishery
Management Organisation. Working Draft 04 May 2007. Third International Meeting on the Establishment of a
South Pacific Regional Fisheries Management Organisation. Renaca, Chili, 23 avril-4 mai 2007.
Anderson O.F., Clark M.R., Analysis of the bycatch in the fishery for orange roughy, Hoplostethus atlanticus, on
the South Tasman Rise. Marine and Freshwater Research, 2003, 54 643-652. Table 5. CSIRO Publishing.
Ibid pg 651. Également Clark M. et O’Driscoll R., Deepwater Fisheries and Aspects of Their Impact on
Seamount Habitat in New Zealand. Journal of Northwest Atlantic Fishery Science, Vol 31: 151-163. 2003
http://www.nafo.ca/publications/Frames/PuFrJour.html
Rapport du ICES Advisory Committee on Ecosystems, 2002. ICES Cooperative Research Report n° 254.
International Council for the Exploration of the Sea, décembre 2002. Section 4.4.1 «Deep-water Biogenic
Habitats». p. 32.
PE 389.606
94
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
De la même manière, un rapport du PNUE sur les coraux d'eau froide publié en 2004 conclut
que les engins de pêche actifs entrant en contact avec le fond marin constituent la menace la plus
grave pour les récifs coralliens d'eau froide; et que si tous les engins de pêche de fond peuvent
endommager les coraux d'eau froide, les chaluts de fond sont les plus destructeurs pour le fond
marin en général et les écosystèmes coralliens en particulier.33
Un «exposé de la situation» adressé au Secrétaire général des Nations unies et signé par
140 scientifiques participant au 10e symposium sur la biologie des eaux profondes (août 2003),
une conférence internationale regroupant de nombreux éminents biologistes spécialisés dans les
eaux profondes, résume brièvement les inquiétudes concernant les pêcheries d'eau profonde et
leurs impacts sur les espèces visées et les écosystèmes d'eau profonde comme suit:
•
•
•
•
33
34
«les populations de nombreuses espèces de poissons d'eau profonde importantes d'un
point de vue commercial et de coraux associés à des monts sous-marins, des dorsales,
des plateaux, des talus continentaux, des récifs coralliens et des champs d'éponges des
eaux profondes ont été progressivement épuisées par la pêche;
les habitats et communautés benthiques ont été gravement endommagés par les activités
de pêche;
les caractéristiques biologiques de la plupart des espèces des eaux profondes rendent ces
eaux particulièrement sensibles aux perturbations et à l'exploitation d'origine
anthropique;
malgré une connaissance limitée de la biodiversité des eaux profondes, les données
actuellement disponibles laissent entendre que les habitats des eaux profondes, tels que
les écosystèmes des coraux, des monts sous-marins, des suintements et des cheminées,
abritent différents assemblages d'espèces diversifiées et hautement endémiques.»34
Friewald, A., Fosså, J.H., Koslow, T., Roberts, J.M. 2004. Cold-water coral reefs. UNEP-WCMC, Cambridge,
Royaume-Uni.
Exposé de la situation à l'Assemblée générale des Nations unies concernant les risques encourus par les monts
sous-marins, les coraux d'eau froide et d'autres écosystèmes vulnérables des eaux profondes transmis au
Secrétaire général de l'ONU le 7 octobre 2003 par les professeurs Hjalmar Theil, Andre Freiwald et Robert
George au nom des signataires participants au 10e symposium sur la biologie des eaux profondes, Coos Bay
Oregon, États-Unis, 25-29 août 2003. Deep-Sea Newsletter n° 33, février 2004 – p. 20
http://www.le.ac.uk/bl/gat/deepsea/DSN33-final.pdf
95
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Ci-dessus: Zones de haute mer actuellement régies par une ORGP ayant compétence pour
réglementer la pêche démersale en haute mer.
PE 389.606
96
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
Zones de haute mer où des ORGP sont en cours de
négociation ou attendent leur entrée en vigueur. Dans
le sens des aiguilles d'une montre en partant du coin
supérieur gauche: Pacifique Sud; Océan Indien du
Sud; Pacifique du Nord-Ouest.
7.
DÉVELOPPEMENTS POLITIQUES: ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE
L'ONU ET AUTRES FORUMS
À la suite des inquiétudes soulevées par des scientifiques, des ONG et d'autres entités, la
question des pêcheries de fond en haute mer et de leurs impacts sur les écosystèmes marins
vulnérables a fait l'objet de négociations étendues au sein de l'Assemblée générale de l'ONU au
cours des dernières années. C'est en 2002 que l'Assemblée générale de l'ONU a soulevé pour la
première fois ces préoccupations dans sa résolution annuelle sur les océans et le droit de la mer,
encourageant «les organisations internationales compétentes… à examiner d'urgence les
moyens d'intégrer et d'améliorer de manière scientifique la gestion des risques pour la diversité
biologique des montagnes sous-marines et de certains autres détails sous-marins dans le cadre
de la Convention (UNCLOS)».35 En 2003, elle a réitéré son appel à «un examen d'urgence…des
risques pesant sur la diversité biologique des montages sous-marines, des récifs de corail des
eaux froides et de certaines autres caractéristiques sous-marines».36
En février 2004, la septième Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique
s'est réunie à Kuala Lumpur et a demandé à l'Assemblée générale des Nations unies et aux
autres organisations internationales et régionales compétentes… «de prendre d'urgence toutes
les mesures à court, moyen et long terme qui s'imposent pour éliminer/éviter les pratiques
destructrices… par exemple, au cas par cas, l'interdiction provisoire de pratiques destructrices
ayant des effets négatifs sur la diversité biologique marine associée aux…» monts sous-marins,
aux coraux d'eau froide et aux autres écosystèmes d'eau profonde vulnérables.37
35
36
37
Résolution 57/141 de l'Assemblée générale des Nations unies. Les océans et le droit de la mer. Paragraphe 56.
http://www.un.org/Depts/los/general_assembly/general_assembly_resolutions.htm
Résolution 58/240 de l'Assemblée générale des Nations unies. Les océans et le droit de la mer. Paragraphe 51.
http://www.un.org/Depts/los/general_assembly/general_assembly_resolutions.htm
Décision VII/5 de la septième Conférence aux parties à la Convention sur la diversité biologique sur la diversité
biologique marine et côtière, par. 61. Voir également les paragraphes 57-62. Février 2004.
http://www.biodiv.org/decisions/default.aspx.
97
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
À la suite des préoccupations soulevées par des scientifiques de la pêche et des biologistes des
eaux profondes, plusieurs ONG, dont des organisations internationales telles que le WWF,
Conservation International, Greenpeace, Seas at Risk et Oceana, ont commencé à se pencher sur
la question des pêcheries d'eau profonde. En 2004, plusieurs organisations se sont regroupées
pour former la Deep Sea Conservation Coalition (DSCC), laquelle a estimé que l'Assemblée
générale de l'ONU devait adopter une résolution afin d'établir un moratoire sur le chalutage de
fond en haute mer jusqu'à la mise en place de règlements internationaux contraignants pour
protéger la biodiversité des eaux profondes contre le chalutage de fond et préserver et gérer les
pêcheries de fond en haute mer conformément au droit international, en particulier la
Convention de l'ONU sur le droit de la mer (UNCLOS), l'accord de l'ONU sur les stocks de
poissons et la Convention sur la diversité biologique.
En 2006, plus de 60 organisations avaient rejoint la coalition; non seulement des organisations
environnementales, mais aussi des organisations de pêcheurs telles que le World Forum of
Fisher People, le National Fishworkers' Forum (Inde) et la National Confederation of Artisanal
Fishermen (Chili), ainsi qu'Ecoceanos (Chili) et l'International Oceans Institute. Entre autres
activités, la DSCC a organisé une série d'événements scientifiques et politiques en Europe et en
Amérique latine, a participé régulièrement à des réunions du Processus consultatif informel des
Nations unies sur les océans et les mers, de la FAO et des parties et organes subsidiaires de la
Convention sur la diversité biologique, et a travaillé avec de nombreux gouvernements au
niveau international et national pour promouvoir une action internationale efficace visant à
protéger les écosystèmes d'eau profonde vulnérables.38
Dans le même ordre d'idée, l'UICN a commencé à travailler sur la question des impacts du
chalutage de fond sur les écosystèmes d'eau profonde dans le cadre de sa politique internationale
en matière de biodiversité des eaux profondes et de gouvernance des océans internationaux. En
novembre 2004, le World Conservation Congress de l'UICN a adopté une résolution réclamant
un moratoire sur la pêche au chalut de fond en haute mer jusqu'au développement et à l'adoption
de règlements juridiquement contraignants visant à préserver la biodiversité des hautes mers et à
la protéger contre les impacts des pratiques de pêche destructrices, dont le chalutage de fond,
ainsi qu'à protéger la biodiversité en général.39
En réponse à ces développements et à d'autres, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté en 2004
la résolution 59/25 sur la viabilité des pêches qui demande aux États, agissant directement ou
par l'intermédiaire d'organisations ou accords régionaux de gestion des pêches compétents pour
ce faire, d'intervenir d'urgence et d'envisager d'interdire à titre provisoire les pratiques de pêche
destructrices, y compris le chalutage de fond quand il a des effets nocifs sur les écosystèmes
marins vulnérables, dont les monts sous-marins, les cheminées hydrothermales et les coraux
d'eau froide, situés au-delà des limites de la juridiction nationale et ce jusqu'à ce que des
mesures de conservation et de gestion appropriées aient été adoptées conformément au droit
international.
La résolution demande en outre aux organismes ou accords régionaux de gestion des pêches
compétents d'adopter d'urgence des mesures de conservation et de gestion pour faire face à
l'impact des pratiques de pêche destructrices, y compris du chalutage de fond quand il a des
effets nocifs sur les écosystèmes marins vulnérables. Elle demande également la création de
nouvelles ORGP afin de gérer les pêcheries d'eau profonde dans les zones où de telles
organisations n'existent pas. L'Assemblée générale de l'ONU a par ailleurs convenu de procéder
38
39
Voir le site web de la Deep Sea Conservation Coalition à l'adresse www.savethehighseas.org
IUCN World Conservation Congress CGR3.RES051-Rev1.2 The protection of seamounts, deep sea corals and
other vulnerable deep sea habitats from destructive fishing practices, including bottom trawling, on the high
seas adopté en novembre 2004. http://www.iucn.org/themes/marine/Word/Res051ERev1.2final.doc
PE 389.606
98
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
en 2006 à un examen des mesures prises en vue de mettre en œuvre les dispositions de la
résolution de 2004.40
8.
MESURES ADOPTÉES PAR LES ÉTATS ET LES ORGP 2004-2006
En réponse aux résolutions de l'Assemblée générale des Nations unies, plusieurs États et ORGM
ont pris des mesures pour protéger les écosystèmes d'eau profonde vulnérables, tels que les
coraux d'eau froide et les monts sous-marins, et ont entamé des négociations afin de créer de
nouvelles ORGM chargées de réglementer la pêche hauturière d'espèces d'eau profonde. La
Nouvelle-Zélande, l'Australie et le Chili ont entamé des négociations pour la création d'une
nouvelle ORGP pour des espèces de poissons qui ne sont pas de grands migrateurs dans le
Pacifique sud, avec un premier round de négociations en février 2006. Le Japon, la Corée, la
Russie et les États-Unis ont quant à eux entamé des négociations pour créer une nouvelle ORGP
pour gérer les pêcheries d'eau profonde dans le Pacifique du Nord-Ouest en août 2006. Les
résolutions de l'Assemblée générale de l'ONU ont également permis de clôturer les négociations
de l'Accord sur les pêches dans le sud de l'océan Indien (SIOFA), qui avaient débuté en 2001 en
réponse à un boom du chalutage de fond déréglementé visant l'hoplostète orange dans l'océan
Indien du Sud-ouest entre 1999 et 2001. Les négociations du SIOFA sont à présent terminées et
l'accord a été ouvert à la signature en juillet 2006.41
Plusieurs ORGP ont par ailleurs adopté des mesures, quoique de portée limitée, afin de protéger
certaines zones de haute mer contre le chalutage de fond. En 2004, la Commission des pêches de
l'Atlantique du Nord-est a accepté de fermer temporairement cinq zones de haute mer - quatre
zones de monts sous-marins et une partie de la dorsale médio-atlantique - à toute pêche de fond
jusqu'en 2007 et d'interdire provisoirement la pêche au filet maillant de fond en haute mer.
En 2006, la CPANE a par ailleurs décidé de fermer plusieurs zones le long des bancs Hatton et
Rockall Banks afin de protéger des zones connues de coraux d'eau froide, même si le CIEM et la
Commission OSPAR avaient conseillé à la CPANE de fermer des zones supplémentaires au
niveau de ces deux bancs.42
En 2005, la Commission générale des pêches pour la Méditerranée a interdit le chalutage de
fond en-dessous de 1000 mètres et, en 2006, elle a fermé trois zones supplémentaires à ce type
de pêche – un mont sous-marin à l'est de la Méditerranée, un suintement froid au large des côtes
d'Égypte et un récif corallien d'eau froide au large des côtes italiennes.43
En 2006, l'Organisation des pêches de l'Atlantique du Nord-ouest et l'Organisation des pêches
de l'Atlantique du Sud-est ont respectivement fermé temporairement quatre et dix zones de
monts sous-marins, ces zones restant toutefois ouvertes, dans les deux cas, à la pêche
«exploratoire».44
40
Résolution 59/25 de l'Assemblée générale des Nations unies. La viabilité des pêches, notamment grâce à
l'Accord de 1995 aux fins de l'application des dispositions de la Convention des Nations unies sur le droit de la
mer du 10 décembre 1982 relatives à la conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacements
s'effectuent tant à l'intérieur qu'au-delà de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de
poissons grands migrateurs, et des instruments connexes. Paragraphes 66-67.
http://www.un.org/Depts/los/general_assembly/general_assembly_resolutions.htm
41
http://www.fao.org/newsroom/en/news/2006/1000360/index.html
42
http://www.neafc.org/measures/index.html
43
Pour les recommandations adoptées en 2005:
ftp://ftp.fao.org/FI/DOCUMENT/gfcm/web/GFCM_Recommendations2005.pdf
Pour les recommandations adoptées en 2006:
ftp://ftp.fao.org/FI/DOCUMENT/gfcm/web/GFCM_Recommendations2006.pdf
44
Conservation and Management Measures adopted by NAFO. Article 12 – Area and Time Restrictions.
http://www.nafo.int/fisheries/frames/regulations.html. Conservation Measures 06/06 on the Management of
Vulnerable Deep Water Habitats and Ecosystems in the SEAFO Convention Area. http://www.seafo.org/
99
PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
Concernant les captures d'espèces d'eau profonde visées par la pêche démersale de haute mer, la
CPANE, l'OPASE et la CCAMLR ont pris une série de mesures pour limiter les captures et/ou
l'effort dans les pêcheries d'espèces d'eau profonde. Dans la zone OPANO, des quotas ont été
fixés pour le sébaste et le flétan noir. Des restrictions de l'effort sont par ailleurs en place pour la
pêche à la crevette nordique. Mais malgré tous ces efforts, la plupart des stocks de poissons
d'eau profonde relevant de leur compétence sont surexploités ou épuisés, ainsi qu'expliqué à la
section 5.
9.
RÉSOLUTION 61/105 DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE L'ONU
(2006)
En 2006, le Secrétaire général de l'ONU a été invité par l'Assemblée générale à rédiger un
rapport sur les mesures prises pour mettre en œuvre la résolution adoptée en 2004. Le rapport,
publié en juillet 2006, conclut que «certains États s'efforcent de protéger les zones d'habitat
halieutique relevant de leur juridiction nationale, notamment par la mise en place de zones
protégées. Ce n'est toujours pas le cas de la haute mer, alors même que les habitats des eaux
profondes de la haute mer sont extrêmement vulnérables et nécessitent une telle protection.»45
Sur la base du rapport du Secrétaire général et de négociations supplémentaires entre les États
concernés, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté la résolution 61/105 sur la viabilité des
pêches en décembre 2006. Celle-ci demande aux États d'agir immédiatement, individuellement
et par l'intermédiaire des organismes et accords régionaux de gestion des pêches, afin de gérer
durablement les stocks de poissons et de protéger les écosystèmes marins vulnérables,
notamment les monts sous-marins, les cheminées hydrothermales et les coraux d'eau froide, des
pratiques de pêche destructrices. Elle invite en outre les États, individuellement et par
l'intermédiaire des organismes et accords régionaux de gestion des pêches, à gérer les pêcheries
de fond en haute mer afin de prévenir les impacts négatifs sensibles sur les écosystèmes marins
vulnérables, tels que les coraux d’eau froide, les monts sous-marins et les cheminées
hydrothermales par le biais des mesures suivantes:
•
•
•
•
•
déterminer l'impact des activités de pêche de fond sur la haute mer;
gérer les pêcheries de fond en haute mer de manière à prévenir les effets négatifs
sensibles sur les écosystèmes marins vulnérables et, lorsque c'est impossible, interdire
aux navires de pêcher;
fermer à la pêche de fond les zones de haute mer où des écosystèmes marins vulnérables
ont été repérés ou pourraient exister ou jusqu'à ce que les pêcheries de ces zones
puissent être gérées de manière à empêcher tout impact vulnérable sensible sur ces
écosystèmes;
exiger des navires de pêche de fond qu'ils cessent leurs activités dans une zone où des
écosystèmes marins vulnérables ont été identifiés;
garantir la viabilité à long terme des stocks de poissons d'eau profonde.
L'Assemblée générale fixe la date butoir pour la mise en œuvre des dispositions de la résolution
relative à la pêche de fond en haute mer au 31 décembre 2008. Les États dont des navires
pêchent en haute mer dans des zones où il n'existe pas d'ORGP ayant compétence pour
réglementer la pêche de fond sont invités à mettre en œuvre la résolution avant le
31 décembre 2007 soit individuellement, soit, dans les zones où des négociations multilatérales
45
L'impact de la pêche sur les écosystèmes marins vulnérables: mesures prises par les États et les organisations et
arrangements régionaux de gestion des pêches pour donner effet aux dispositions des paragraphes 66 à 69 de la
résolution 59/25 de l'Assemblée générale sur la viabilité des pêches, concernant l'impact de la pêche sur les
écosystèmes marins vulnérables. Rapport du Secrétaire général A/61/154. 14 juillet 2006. Paragraphe 203.
http://www.un.org/Depts/los/general_assembly/general_assembly_reports.htm#Reports on fisheries issues
PE 389.606
100
Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
sont en cours pour créer une ORGP, par le biais de l'adoption de mesures provisoires de gestion
de la pêche de fond.
L'Assemblée générale de l'ONU demande en outre aux États de rendre publiques, par
l'intermédiaire de la FAO, une liste des navires battant leur pavillon autorisés à pratiquer la
pêche de fond dans des zones situées au-delà de leur juridiction nationale, ainsi que les mesures
qu'ils ont prises. Enfin, la résolution invite la FAO à renforcer la collecte et la diffusion de
données, à promouvoir l'échange d'informations et de connaissances sur les activités de pêche en
eaux profondes et à collecter et diffuser des informations sur les problèmes liés à la pêche, y
compris la protection des écosystèmes marins vulnérables contre les impacts de la pêche.46 [Voir
annexe 1]
L'approche présentée dans la résolution 61/105 de l'Assemblée générale de l'ONU reconnaît la
nécessité de faire preuve de prudence dans la gestion des pêcheries d'eau profonde en haute mer,
en particulier dans la mesure où la pêche de fond peut avoir des conséquences graves, durables
et potentiellement irréversibles sur les écosystèmes d'eau profonde. La résolution établit
principalement le principe de la charge inverse de la preuve, en vertu duquel les États et les
ORGP ne doivent autoriser la poursuite de la pêche de fond en haute mer que sur la base d'une
évaluation préalable des impacts démontrant que la pêche n'aura pas d'effets négatifs sur les
coraux d'eau froide, les monts sous-marins, les champs d'éponges et d'autres espèces et
écosystèmes d'eau profonde vulnérables. La résolution opérationnalise en outre l'approche de
précaution en demandant la fermeture à la pêche de fond des zones de haute mer où des
écosystèmes marins vulnérables ont été repérés ou pourraient exister à moins que ou jusqu'à ce
que la pêche de fond dans ces zones puisse être gérée sans dommage pour les écosystèmes.
Les dispositions de la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU sont dans une large mesure
conformes aux principes et obligations généralement admis pour la gestion des pêcheries en
haute mer, et plus particulièrement ceux figurant dans l'Accord de l'ONU de 1995 sur les stocks
de poissons. Parmi les dispositions les plus pertinentes de l'Accord de l'ONU sur les stocks de
pêche, il convient de citer les article 5 et 6 qui demandent, entre autres, aux États d'empêcher la
surpêche; d'évaluer l'impact de la pêche sur les espèces associées ou dépendantes ou qui
appartiennent au même écosystème; de minimiser l'impact de la pêche sur les espèces associées
ou dépendantes et de garantir la conservation de ces espèces; de protéger les habitats
particulièrement préoccupants; d'appliquer largement l'approche de précaution pour protéger et
préserver l'environnement marin; d'être particulièrement prudents lorsque les données sont peu
nombreuses; et de ne pas autoriser les parties prenantes à invoquer le manque de données
scientifiques adéquates pour ne pas prendre de mesures de conservation et de gestion ou pour en
différer l'adoption.47 La mise en œuvre de la résolution 61/105 de l'Assemblée générale de
l'ONU, en supposant qu'elle se fasse, permettrait de faire un pas considérable en avant en vue de
garantir la conformité des pêcheries d'eau profonde en haute mer avec l'Accord de l'ONU sur les
stocks de pêche.
46
47
Résolution 61/105 de l'Assemblée générale des Nations unies. La viabilité des pêches, notamment grâce à
l'Accord de 1995 aux fins de l'application des dispositions de la Convention des Nations unies sur le droit de la
mer du 10 décembre 1982 relatives à la conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacements
s'effectuent tant à l'intérieur qu'au-delà de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de
poissons grands migrateurs, et des instruments connexes. Paragraphes 80-91. Voir en particulier le
paragraphe 83a-d.
http://www.un.org/Depts/los/convention_agreements/convention_overview_fish_stocks.htm
Accord de 1995 aux fins de l'application des dispositions de la Convention des Nations unies sur le droit de la
mer du 10 décembre 1982 relatives à la conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacements
s'effectuent tant à l'intérieur qu'au-delà de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de
poissons grands migrateurs.
101
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
10. MESURES ADOPTÉES EN 2007 EN VUE DE METTRE EN ŒUVRE
LA RÉSOLUTION 61/105 DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE L'ONU
10.1. Pacifique du Nord-Ouest: février 2007
La deuxième réunion de négociations pour la création d'une ORGP pour les pêcheries d'eau
profonde du Pacifique du Nord-Ouest s'est tenue à Busan, en Corée, du 31 janvier au
2 février 2007. Les quatre États participants - le Japon, la Corée, la Russie et les États-Unis - ont
adopté un paquet de «mesures provisoires» afin de réglementer la pêche de fond dans la région.
Les mesures provisoires incluent un accord visant à «geler la superficie» de la pêche de fond et à
autoriser uniquement l'extension des pêcheries dans les zones du Pacifique du Nord-Ouest, où il
n'existe actuellement aucune pêcherie de ce type, une fois que les normes et les critères des
évaluations d'impact auront été établis et que des évaluations auront été réalisées afin de
s'assurer de l'absence d'impact négatif majeur sur les écosystèmes marins vulnérables. Dans
l'accord de Busan, les États pavillons s'engagent en outre à interdire la pêche de fond dans des
zones où des écosystèmes marins vulnérables ont été repérés ou pourraient exister d'ici le
31 décembre 2008, à moins que des mesures de conservation et de gestion n'aient été prises pour
empêcher tout impact négatif majeur sur ces écosystèmes, conformément aux dispositions en la
matière de la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU de 2006. L'accord invite en outre les
États à exiger des navires de pêche de fond qu'ils cessent leurs activités dans une zone où
existent des écosystèmes marins vulnérables.48
10.2. Pacifique Sud: mai 2007
La Communauté européenne ainsi que vingt pays ont participé au troisième round de
négociations en vue de créer une ORGP pour le Pacifique Sud (Renaca, au Chili, du 30 avril au
4 mai 2007). Les États et entités participants étaient l'Australie, le Canada, le Chili, la Chine, le
Pérou, la Colombie, l'Équateur, la Communauté européenne, les îles Féroé, les États fédérés de
Micronésie, la France (représentant ses territoires d'outre-mer), le Japon, la Nouvelle-Zélande,
Nioué, Palau, la Papouasie Nouvelle-Guinée, la Russie, la Corée du Sud, l'Ukraine, les ÉtatsUnis et Vanuatu.
La réunion a notamment permis de dégager un accord sur l'adoption de mesures provisoires pour
les pêcheries de fond de haute mer dans le Pacifique Sud. Les principales dispositions de cet
accord sont les suivantes:
* Décide le gel de toute expansion future de la pêche de fond dans les hautes mers du Pacifique
Sud jusqu'en 2010 en limitant la pêche de fond en haute mer au niveau actuel de l'effort de
pêche et aux zones exploitées au cours de la période 2002-2006. Après 2010, un État pavillon ne
pourra autoriser la pêche dans une nouvelle zone qu'après avoir effectué une évaluation
d'impact, qui sera ensuite examinée par le comité scientifique (Science Working Group)
composé des pays ayant pris part aux négociations du Pacifique Sud, et à condition que le pays
ait mis en place des règlements pour empêcher tout «impact négatif majeur» sur les écosystèmes
marins vulnérables, tels que les monts sous-marins, les coraux d'eau froide, les cheminées
hydrothermales et les champs d'éponges.
* Concernant les pêcheries existantes, exige la fermeture à la pêche de fond de toutes les zones
de haute mer du Pacifique Sud où des écosystèmes marins vulnérables ont été repérés ou
48
Establishment of new mechanisms for protection of vulnerable marine ecosystems and sustainable management
of high seas bottom fisheries in the North Western Pacific Ocean. Document SP/03/Inf2
http://www.southpacificrfmo.org/event.third-meeting/?operation=documents.
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
pourraient exister avant le 30 septembre 2007, à moins que ou jusqu'à ce que les pays intéressés
par la poursuite de cette pêche après cette date aient effectué des évaluations d'impact, qui
auront ensuite été soumises au Science Working Group. Si une évaluation détermine que des
activités de pêche de fond auront un impact négatif significatif sur les EMV, cette pêche ne sera
autorisée que si elle peut être gérée de manière à empêcher ces impacts.
* Exige la présence d'observateurs à bord de tous les chalutiers de fond en haute mer et des
niveaux «appropriés» d'observation sur les navires de pêche de fond utilisant d'autres types
d'engins. Demande aux navires de cesser toute opération de pêche dans un rayon de 5 miles
nautiques autour d'une zone où des écosystèmes marins vulnérables sont découverts (coraux
ramenés dans les filets, par exemple). À cet égard, la présence d'un observateur à bord des
navires est essentielle.
* Demande aux pays de prendre des mesures de conservation et de gestion pour «empêcher tout
impact négatif majeur» sur la viabilité à long terme des stocks de poissons d'eau profonde et de
coopérer à la cartographie des sites dans lesquels existent des EMV.49 [Voir Annexe 2]
10.3. OPANO: septembre 2007
La réunion annuelle de l'OPANO a eu lieu en septembre 2007. À cette occasion, il a été décidé
de fermer une zone à la pêche de fond le long du talus austral des Grands Bancs entre 800 et
2000 mètres de profondeur. La Commission européenne et le Canada ont tous deux présenté des
propositions pour la mise en œuvre de la résolution 61/105 de l'Assemblée générale de l'ONU.
Bien que les parties contractantes à l'OPANO aient reconnu la nécessité de mettre en œuvre
cette résolution, l'OPANO a reporté l'examen de la question à une réunion «extraordinaire»
programmée début mai 2008.
10.4. OPASE: octobre 2007
L'Organisation des pêches de l'Atlantique du Sud-Est s'est réunie en octobre 2007. L’OPASE a
décidé d'interdire la pêche exploratoire dans les dix monts sous-marins fermés en 2006 jusqu'à
ce que les écosystèmes marins vulnérables (y compris les monts sous-marins, les cheminées
hydrothermales et les coraux d'eau froide) de la zone aient été identifiés et cartographiés et
qu'une évaluation d'impact de la reprise de la pêche sur ces écosystèmes ait été réalisée.50
L’OPASE n'a par contre pas encore accepté de fermer d'autres zones, malgré une
recommandation faite à l'occasion de la réunion du comité scientifique de l’OPASE en 2007
l'invitant à interdire temporairement toute pêche au chalut de fond ou au filet maillant de fond
dans la zone couverte par la convention OPASE, conformément à la résolution 61/105 de
l'Assemblée générale de l'ONU, au vu des préoccupations soulevées quant à l'impact potentiel
de ces techniques de pêche sur les écosystèmes marins vulnérables.
10.5. Projet de règlement de la CE: octobre 2007
Le 17 octobre 2007, la Commission européenne a publié une proposition de règlement pour la
mise en œuvre de la résolution 61/105 de l'Assemblée générale de l'ONU pour les navires
européens pratiquant la pêche de fond dans des zones de haute mer où aucune ORGP n'existe ou
n'est en cours de négociation. Ce règlement calque pour l'essentiel le plan de la résolution. À ce
jour, parmi tous les États pavillons dont des navires pratiquent la pêche de fond, seule la
Communauté européenne semble avoir élaboré des règlements pour la mise en œuvre de la
résolution de l'Assemblée générale pour les navires opérant en haute mer où aucune ORGP
49
50
www.southpacificrfmo.org/assets/Third%20International%20Meeting/SPRFMO%20Interim%20Measures_
Mesure de conservation 12/07. Adoptée lors de la réunion de l’OPASE des 9-13 octobre 2007.
103
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
n'existe ou n'est en cours de négociation.51 Ce règlement devrait être rapidement avalisé par le
Parlement européen, puis adopté par le Conseil.
Outre la proposition de règlement, la Commission a publié une communication présentant une
série d'initiatives politiques visant à promouvoir la mise en œuvre de la résolution de
l'Assemblée générale de l'ONU. Ceux-ci devront également être avalisés par le Parlement
européen et le Conseil afin de s'assurer que l'Union européenne respecte les engagements pris
dans le cadre des négociations de l'Assemblée générale de l'ONU.52
10.6
CCAMLR: octobre 2007
Ces dernières années, la CCAMLR a instauré une interdiction de facto du chalutage de fond à
l'échelle commerciale dans la zone couverte par la convention. En 2006, la CCAMLR a
approuvé une interdiction de la pêche au filet maillant de fond et, en 2007, elle a décidé que tout
pays désireux de pratiquer la pêche de fond dans la zone CCAMLR après 2008 devra soumettre
au minimum une évaluation «préliminaire» des impacts anticipés de la pêche de fond sur les
écosystèmes benthiques marins vulnérables et proposé la prise de mesures de protection par la
partie contractante pour empêcher les effets négatifs.
10.7. CPANE: novembre 2007
Lors de sa réunion annuelle de novembre 2007, la CPANE a décidé de prolonger la fermeture
des quatre zones de monts sous-marins et d'une partie de la dorsale de Reykjanes (initialement
fermées en 2004 pour une période de trois ans) d'une année supplémentaire et de fermer de
nouvelles zones à la pêche de fond sur les bancs Rockall et Hatton, afin de protéger les
concentrations de coraux d'eau froide. La CPANE ne s'est par contre pas penchée sur la mise en
œuvre de la résolution 61/105 de l'Assemblée générale de l'ONU et a décidé de reporter
l'examen de cette question à 2008.
11. INITIATIVES DE LA FAO
Diverses préoccupations concernant les pêcheries d'eau profonde de haute mer ont été soulevées
et examinées lors de réunions du Comité des pêches (COFI) de la FAO. La 26e session du COFI
organisée en 2005 a appelé les États qui pratiquent des activités de pêche hauturière en eaux
profondes à faire face aux effets négatifs sur les écosystèmes marins vulnérables et à gérer de
façon durable les ressources halieutiques exploitées, notamment au moyen de contrôles ou de
restrictions appliquées aux nouvelles pêcheries et aux pêches exploratoires, ainsi qu'à appliquer
de façon prioritaire la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU de 2004. Le Comité a par
ailleurs demandé à la FAO de collecter et regrouper les informations concernant les activités de
pêche en eaux profondes passées et présentes et de préparer un inventaire des stocks d'eau
profonde, ainsi qu'une évaluation des effets des pêches sur les populations des poissons d'eau
profonde et leurs écosystèmes. Le COFI a demandé aux nations pratiquant la pêche en haute
mer de communiquer à la FAO des informations sur les prises de poissons d'eaux profondes par
espèce, par structure de taille et par effort de pêche, en notant que les rapports établis devraient
porter sur une échelle spatiale relativement petite pour prendre en compte des corrélations entre
51
52
Proposition de règlement du Conseil relatif à la protection des écosystèmes marins vulnérables de haute mer
contre les effets néfastes de l'utilisation des engins de pêche de fond. COM/2007/605 final. 17.10.2007
http://ec.europa.eu/fisheries/legislation/proposals/conservation_en.htm
Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social
européen et au Comité des régions relative aux pratiques de pêche destructrices en haute mer et à la protection
des écosystèmes vulnérables d'eaux profondes. Bruxelles, 17.10.07 COM(2007) 604 final.
PE 389.606
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
opérations de pêche et écosystèmes marins vulnérables, ainsi que des informations sur les
mesures de conservation et de gestion mises en place pour le type de pêche concerné.53
La 27e session du COFI a été organisée en mars 2007 et a convenu de demander à la FAO
d'organiser une consultation d'experts sur les pêcheries d'eau profonde et leurs impacts sur les
écosystèmes marins vulnérables en 2007, ainsi qu'une consultation technique début 2008 afin
d'élaborer un projet de directives internationales sur la pêche en eau profonde afin d'aider les
États et les ORGP à mettre en œuvre la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU. La FAO
s'est également vu confier la tâche de créer et de gérer, en collaboration avec d'autres
organisations (UICN, CDB, par exemple), une base de données des écosystèmes marins
vulnérables accessibles par l'ensemble des États et des ORGP, ainsi que de dresser une liste de
tous les navires autorisés à pêcher en eau profonde en haute mer.54
La FAO a organisé deux consultations d'experts sur les pêcheries d'eau profonde, la première en
novembre 2006 et la seconde (consultation d'experts sur les directives internationales concernant
la gestion de la pêche hauturière en eaux profondes) en septembre 2007. La consultation de
septembre a réuni une série de décideurs politiques, de scientifiques de la pêche, de biologistes
des eaux profondes et de représentants de l'industrie afin d'élaborer un projet de directives
internationales destiné à servir de base de négociation lors de la consultation technique sur les
directives internationales pour la gestion de la pêche hauturière en eaux profondes de la FAO
prévue en 2008.55 De nombreuses ORGP et parties aux négociations de création d'ORGP ont
indiqué qu'elles s'appuieraient sur les directives de la FAO dans leurs efforts en cours pour
mettre en œuvre la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU dans le courant de
l'année 2008.
Réunions à venir 2008-2009
Les résultats de la consultation technique sur les pêcheries d'eau profonde de la FAO en
février 2008 seront soumis à la vingt-huitième session du Comité des pêches de la FAO (qui se
réunira début 2009) pour adoption. Concernant les ORGP, la CPANE et l'OPANO organiseront
toutes deux des réunions extraordinaires au cours du premier semestre 2008 afin de négocier
plus spécialement les mesures pour la mise en œuvre de la résolution 61/105 de l'Assemblée
générale de l'ONU. La CGPM et l’OPASE pourraient également envisager des mesures
supplémentaires pour la mise en œuvre de la résolution lors de leurs réunions annuelles de 2008.
Les parties aux négociations de l'Accord sur les pêches dans le sud de l'océan Indien n'ont pas
encore programmé de négociations pour 2007 en vue d'adopter des mesures provisoires pour la
pêche de fond en haute mer dans l'océan Indien, malgré le fait que la résolution de l'Assemblée
générale de l'ONU demande l'arrêt de la pêche de fond en haute mer dans cette région après le
31 décembre 2007 si aucune mesure n'a été adoptée et mise en œuvre. Reste à savoir si les États
dont les navires participent à la pêche de fond dans les hautes mers de l'océan Indien accepteront
des mesures provisoires ayant pour but d'appliquer la résolution. Enfin, et surtout, l'Assemblée
générale de l'ONU a décidé d'examiner la mise en œuvre de la résolution 61/105 en 2009 et
d'envisager d'autres recommandations à l'adresse des États pavillons et des ORGP sur la base
d'une évaluation des progrès faits par les États pratiquant la pêche en haute mer par rapport à
l'application des mesures adoptées par l'Assemblé générale de l'ONU en 2006. Ces
53
54
55
Rapport de la vingt-sixième session du Comité des pêches. Rome, 7-11 mars 2005. FAO, Rapport sur les
pêches n° 780. Rome, FAO. 2005. 88p. Paragraphes 83-95.
http://www.fao.org/docrep/008/a0008f/a0008f00.htm
Rapport de la vingt-septième session du Comité des pêches. Rome, 5-9 mars 2007. FAO, Rapport sur les
pêches n° 830. Rome, FAO. 2007. 74p. Paragraphes 77-81.
http://www.fao.org/docrep/010/a1160f/a1160f00.htm
Liste provisoire de documents de la réunion présentée sur le site ftp://ftp.fao.org/FI/DOCUMENT/tcdsf/2008/Default.htm
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PE 389.606
Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
recommandations pourraient inclure un appel à un moratoire, ou des interdictions provisoires,
dans les zones ou les cas où les États ou les ORGP n'ont pas mis en œuvre de mesures efficaces.
12. CONCLUSION
Les pêcheries d'eau profonde de haute mer visent des espèces à croissance lente et à longue
durée de vie qui sont extrêmement vulnérables à l'épuisement. On ignore l'état de la plupart des
espèces et stocks d'eau profonde pêchés en haute mer, mais ceux-ci seraient surexploités ou
épuisés dans la majorité des cas. Il semble que peu de pêches hauturières à grande échelle visant
des espèces d'eau profonde, voire aucune, puissent être gérées de manière viable et être
économiquement viables sans subvention. La gestion de la pêche hauturière en eau profonde est
en outre compliquée par les importantes prises accessoires d'autres espèces d'eau profonde dans
la plupart des pêcheries de fond et le risque de dommages graves et potentiellement irréversibles
pour les écosystèmes marins vulnérables tels que les coraux d'eau froide, les monts sous-marins
et les champs d'éponges. Tous ces problèmes constituent autant de préoccupations pour les
scientifiques, les ONG et de nombreux gouvernements.
En réponse à ces préoccupations, l'Assemblée générale de l'ONU de 2006 a réclamé une action
de toute urgence de la part des États et des organisations régionales de gestion des pêches
(ORGP) afin d'éviter que la pêche de fond n'ait un impact négatif sur les écosystèmes d'eau
profonde et de garantir la viabilité à long terme des stocks de poissons d'eau profonde. La
résolution reconnaît la nécessité de faire preuve de prudence dans la gestion des pêcheries d'eau
profonde en haute mer dans la mesure où la pêche de fond peut avoir des effets négatifs graves,
durables et potentiellement irréversibles sur les écosystèmes d'eau profonde. Elle invite en outre
les États et les ORGP à prendre des mesures spécifiques pour rendre l'approche de précaution
opérationnelle et appliquer le principe de la charge inverse de la preuve. La poursuite de la
pêche de fond en haute mer doit uniquement être autorisée sur la base d'une évaluation préalable
des impacts démontrant que la pêche peut être exploitée sans effet négatif. Les zones de haute
mer où des écosystèmes marins vulnérables ont été repérés ou pourraient exister doivent être
fermées à la pêche de fond à moins que les États pavillons et les ORGP ne puissent garantir que
cette pêche peut y être gérée sans dommage pour les écosystèmes.
Toutes les nations pratiquant la pêche hauturière se sont engagées à appliquer la résolution de
l'Assemblée générale de l'ONU de 2006. Cependant, malgré des progrès enregistrés dans
certaines régions de haute mer, on ignore si tous les États pavillons et ORGP seront en mesure
de s'y conformer d'ici le 31 décembre 2008. L'Assemblée générale a prévu un examen de la
gestion des pêches de fond de haute mer en 2009 et pourrait recommander d'autres actions, dont
des moratoires, dans les zones ou les cas où les États ou les ORGP n'ont pas instauré de mesures
efficaces pour la mise en œuvre de la résolution de 2006. L'UE a adopté une position de leader
dans les négociations de l'Assemblée générale de l'ONU et les initiatives politiques et
règlements proposés par la Commission européenne en octobre de cette année devraient être
adoptés et avalisés par le Conseil et le Parlement européen.
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
ANNEXES
Annexe 1.
RESOLUTION 61/105 DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES NATIONS UNIES. LA VIABILITE DES PECHES,
NOTAMMENT GRACE A L'ACCORD DE 1995 AUX FINS DE L'APPLICATION DES DISPOSITIONS DE LA
CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER DU 10 DECEMBRE 1982 RELATIVES A
LA CONSERVATION ET A LA GESTION DES STOCKS DE POISSONS DONT LES DEPLACEMENTS
S'EFFECTUENT TANT A L'INTERIEUR QU'AU-DELA DE ZONES ECONOMIQUES EXCLUSIVES (STOCKS
CHEVAUCHANTS) ET DES STOCKS DE POISSONS GRANDS MIGRATEURS, ET DES INSTRUMENTS
CONNEXES. PARAGRAPHES
80-91. (DECEMBRE 2006)
«L'Assemblée générale:
OP80. Demande aux États d'agir immédiatement, individuellement et par l'intermédiaire des
organismes et accords régionaux de gestion des pêches, et conformément au principe de
précaution et aux approches écosystémiques, afin de gérer durablement les stocks de poissons et
de protéger les écosystèmes marins vulnérables, notamment les monts sous-marins, les
cheminées hydrothermales et les coraux d'eau froide, des pratiques de pêche destructrices, vu
l'immense importance que revêtent les écosystèmes des grands fonds marins et la biodiversité
qu'ils contiennent;
OP81. Réaffirme l'importance qu'elle attache aux paragraphes 66 à 69 de sa résolution 59/25 qui
concerne les effets de la pêche sur les écosystèmes marins vulnérables;
OP82. Se félicite des progrès considérables accomplis par les États et les organismes ou
arrangements régionaux de gestion des pêches ayant compétence pour réglementer la pêche de
fond dans la mise en œuvre des paragraphes 66 à 69 de sa résolution 59/25, de façon à régler le
problème de l'impact de la pêche sur les écosystèmes marins vulnérables, y compris grâce à
l'ouverture de négociations visant à établir de nouveaux organismes ou arrangements régionaux
de gestion des pêches, mais, sur la base de l'examen recommandé au paragraphe 71 de cette
résolution, reconnaît que des mesures supplémentaires s'imposent de toute urgence;
OP83. Demande aux organismes ou accords régionaux de gestion des pêches ayant compétence
pour réglementer la pêche de fond d'adopter et de mettre en œuvre, conformément au principe
de précaution, à l'approche écosystémique et au droit international, pour leurs zones de
compétence respective, à titre prioritaire et dans tous les cas avant le 31 décembre 2008, les
mesures suivantes:
A. Déterminer, sur la base des meilleures informations scientifiques disponibles, si
certaines activités de pêche de fond risquent d'avoir un impact négatif sensible sur les
écosystèmes marins vulnérables et s'assurer, si tel est le cas, que ces activités sont
soit gérées de façon à prévenir ces effets négatifs, soit interdites;
B. Identifier les écosystèmes marins vulnérables et déterminer si la pêche de fond risque
d'avoir un impact négatif sensible sur de tels écosystèmes et sur la durabilité à long
terme des stocks de poissons en eaux profondes, notamment en améliorant la
recherche scientifique et la collecte et l'échange de données et grâce à des pêches
nouvelles et exploratoires;
C. En ce qui concerne les zones où des écosystèmes marins vulnérables, notamment des
monts sous-marins, des cheminées hydrothermales et des coraux d'eau froide ont été
repérés, ou pourraient exister compte tenu des meilleures informations scientifiques
disponibles, interdire ces zones à la pêche de fond et s'assurer que ces activités sont
interrompues tant que des mesures de conservation et de gestion n'auront pas été
107
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
établies pour prévenir un impact négatif sensible sur les écosystèmes marins
vulnérables;
D. Exiger des membres des organismes ou arrangements régionaux de gestion des
pêches qu'ils enjoignent à leurs navires battant leur pavillon de cesser leurs activités
de pêche de fond dans les zones où ils risquent de pêcher dans des écosystèmes
marins vulnérables, et que, si cela se produit, de le signaler de façon que des mesures
appropriées puissent être prises concernant le site touché;
OP84. Demande également aux organismes ou arrangements régionaux de gestion des pêches
ayant compétence pour réglementer la pêche de fond de rendre publiques les mesures adoptées
conformément au paragraphe 83 de la présente résolution;
OP85. Demande aux États participants à des négociations préalables à l'établissement d'un
organisme ou d'un arrangement régional de gestion des pêches compétent pour réglementer la
pêche de fond d'accélérer ces négociations et d'adopter et d'appliquer le 31 décembre 2007 au
plus tard, conformément au paragraphe 83 de la présente résolution, des mesures provisoires
qu'ils rendront publiques;
OP86. Demande aux États du pavillon soit d'adopter et d'appliquer des mesures conformément
au paragraphe 83 de la présente résolution, mutatis mutandis, soit de cesser d'autoriser les
navires de pêche battant leur pavillon à pratiquer la pêche de fond dans des zones situées au-delà
de leur juridiction nationale lorsqu'il n'existe pas d'organisme ou d'arrangement régional de
gestion des pêches ayant compétence pour réglementer ces pêches ou de mesures provisoires
prises conformément au paragraphe 85 de la présente résolution, dans l'attente de l'adoption de
telles mesures conformément au paragraphe 83 ou 85 de la présente résolution;
OP87. Demande aux États de rendre publiques, par l'intermédiaire de l'Organisation des Nations
Unies pour l'alimentation et l'agriculture, une liste des navires battant leur pavillon autorisés à
pratiquer la pêche de fond dans des zones situées au-delà de leur juridiction nationale, ainsi que
les mesures qu'ils ont prises conformément au paragraphe 86 de la présente résolution;
OP88. Souligne le rôle critique joué par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et
l'agriculture, qui fournit des conseils techniques spécialisés, facilite l'élaboration de politiques en
matière de pêche et de normes de gestion internationales, et collecte et diffuse des informations
sur les pêches, y compris la protection des écosystèmes marins vulnérables contre les effets de la
pêche;
OP89. Salue le travail accompli par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et
l'agriculture en ce qui concerne la gestion des pêches hauturières en eaux profondes, notamment
la consultation d'experts tenue à Bangkok du 21 au 23 novembre 2006, et invite cette
organisation à fixer à la prochaine session de son Comité des pêches un calendrier concernant le
travail à accomplir en matière de gestion des pêches hauturières en eaux profondes, qui inclut le
renforcement de la collecte et de la diffusion de données, la promotion de l'échange
d'informations et de connaissances sur les activités de pêche en eaux profondes, par exemple
grâce à l'organisation d'une réunion des États pratiquant ce type de pêche, l'élaboration de
normes et de critères à l'intention des États et des organismes ou arrangements régionaux de
gestion des pêches, qui leur serviraient à identifier les écosystèmes marins vulnérables et à
évaluer l'impact de la pêche sur ces écosystèmes, et l'établissement de normes pour la gestion
des pêches en eaux profondes, grâce à l'élaboration d'un plan d'action international;
OP90. Invite l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture à envisager de
créer une base de données mondiale sur les écosystèmes marins vulnérables situés dans des
zones hors juridiction nationale pour aider les États à évaluer l'impact des pêches de fond sur ces
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
écosystèmes, et invite les États et les organismes ou arrangements régionaux de gestion des
pêches à communiquer des informations à une telle base de données sur tous les écosystèmes
marins vulnérables identifiés conformément au paragraphe 83 de la présente résolution;
OP91. Prie le Secrétaire général, agissant en coopération avec l'Organisation des Nations Unies
pour l'alimentation et l'agriculture, d'inclure dans le rapport sur les pêches qu'il présentera à
l'Assemblée générale à sa soixante-quatrième session une section sur les mesures prises par les
États et les organismes et arrangements régionaux de gestion des pêches conformément aux
paragraphes 83 à 90 de la présente résolution, et décide de procéder à un nouvel examen de ces
mesures à cette même session, en 2009, en vue de formuler, le cas échéant, de nouvelles
recommandations;»
Annexe 2.
Mesures provisoires adoptées par les participants aux négociations visant à établir
l'Organisation régionale de gestion des pêches du Pacifique Sud (mai 2007)
Les participants aux négociations visant à établir l'Organisation régionale de gestion des pêches
du Pacifique Sud (SPRFMO) appliqueront les mesures provisoires suivantes conformément
aux lois et réglementations nationales, compte tenu d'une approche écosystémique de la gestion
des pêches et de l'approche de précaution, aux navires battant leur pavillon et pêchant des
espèces de poissons qui ne sont pas des grands migrateurs dans les hautes mers du Pacifique Sud
(la zone)56 en vue de garantir la gestion durable des stocks de poissons et la protection des
écosystèmes marins vulnérables de la zone.
Ces mesures provisoires sont volontaires et ne sont en aucun cas contraignantes au titre du droit
international.
Période d'application et examen
Les mesures provisoires entreront en vigueur le 30 septembre 2007 et seront d'application, sauf
spécification contraire, jusqu'à l'entrée en vigueur de l'accord en cours de négociation afin
d'établir la SPRFMO et l'adoption de mesures de conservation et de gestion conformément à cet
accord.
Les participants devront revoir les présentes mesures provisoires, le cas échéant, de manière à ce
qu'elles puissent être réexaminées lors de réunions futures.
Il est demandé au secrétariat provisoire de rendre publiques ces mesures provisoires.
Pêche de fond
Gestion de la pêche de fond
Concernant la pêche de fond, les participants s'engagent à:
56
La zone est en cours de négociation, mais couvrirait, aux fins de ces mesures provisoires, la zone de haute mer
au sud de l'Équateur, le nord de la zone de la convention CCAMLR, l'est de la zone de la convention SIOFA et
l'ouest des zones des juridictions de pêche des États d'Amérique du Sud.
109
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Atelier sur la gestion des stocks d’eau profonde
1. Limiter l'effort ou les captures de la pêche de fond dans la zone aux niveaux existants57 en
termes de nombre de navires de pêche et autres paramètres reflétant le niveau de prise,
l'effort de pêche et la capacité de pêche.
2. Ne pas étendre les activités de pêche de fond à de nouvelles régions de la zone où ce type de
pêche n'existe pas à l'heure actuelle.
3. Prendre, à partir de 2010 et avant l'ouverture de nouvelles régions de la zone ou l'extension
de l'effort de pêche ou des captures au-delà des niveaux existants, des mesures de
conservation et de gestion afin d'empêcher tout impact négatif sensible sur les écosystèmes
marins vulnérables58 et la viabilité à long terme des stocks de poissons d'eau profonde dû à
des activités de pêche de fond individuelles, ou d'établir que ces activités n'auront pas
d'impact négatif, sur la base d'une évaluation réalisée conformément aux dispositions des
paragraphes 11 et 12 ci-après.
4. Coopérer avec les États côtiers voisins de la zone, qui informeront le secrétariat provisoire
de leurs propres mesures de conservation et de gestion des stocks de poissons d'eau
profonde.
5. Développer la coopération afin d'identifier, sur la base des meilleures informations
scientifiques disponibles, les écosystèmes marins vulnérables et de cartographier les sites où
ces écosystèmes ont été localisés, ainsi que transmettre ces données et informations au
secrétariat provisoire afin qu'il les communique à l'ensemble des participants.
6. Fermer à la pêche de fond les zones où des écosystèmes marins vulnérables ont été repérés
ou pourraient exister, d'après les meilleures informations scientifiques disponibles, à moins
que des mesures de conservation et de gestion n'aient été mises en place pour empêcher tout
impact négatif sensible sur les écosystèmes marins vulnérables et la viabilité à long terme
des stocks de poissons d'eau profonde, ou qu'il n'ait été déterminé que cette pêche n'aura
aucun impact négatif sur ceux-ci, sur la base d'une évaluation réalisée conformément aux
dispositions des paragraphes 11 et 12.
7. Exiger des navires battant leur pavillon qu'ils cessent toute activité de pêche de fond dans un
rayon de cinq (5) miles nautiques par rapport à tout site de la zone où l'existence
d'écosystèmes marins vulnérables a été établie par des opérations de pêche, et signaler
l'existence de ce site, y compris sa localisation et le type d'écosystème concerné, au
secrétariat provisoire afin de lui permettre de prendre des mesures appropriées pour ce site.
Ces sites seront traités conformément au paragraphe 6 ci-dessus.
8. Nonobstant le paragraphe 2, entreprendre, si nécessaire, des activités de recherche
scientifique dans les régions de la zone où la pêche de fond n'est actuellement pas pratiquée,
afin d'évaluer les stocks dans des parties identifiées de ces régions ou uniquement d'après un
plan de recherche soumis au secrétariat provisoire, qui sera chargé de le transmettre au
groupe de travail scientifique provisoire et à l'ensemble des participants, de préférence
60 jours avant le début de cette activité. Les participants transmettront dans les plus brefs
délais un rapport sur les résultats de ces activités de recherche scientifique au secrétariat
provisoire, qui le communiquera à l'ensemble des parties contractantes.
57
58
On entend par «niveaux existants de l'effort de pêche ou des captures» les niveaux annuels moyens pour la
période allant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2006.
Dans le cadre de ces mesures provisoires, les «écosystèmes marins vulnérables» incluent les monts sousmarins, les cheminées hydrothermales, les coraux d'eau froide et les champs d'éponges.
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Atelier sur la gestion des stocks d'eau profonde
9. Nommer des observateurs à bord de chaque navire battant leur pavillon et menant ou
envisageant de mener des activités de chalutage de fond dans la zone et garantir un niveau
approprié d'observation à bord des navires battant leur pavillon et menant d'autres activités
de pêche de fond dans la zone.
10. En vue de renforcer le contrôle sur les navires de pêche de fond battant leur pavillon, chaque
participant veillera à ce que tous les navires opérant dans la zone soient équipés d'un
système de surveillance des navires opérationnel au plus tard le 31 décembre 2007, ou avant
si l'État pavillon le décide.
Évaluation de la pêche de fond
Les participants s'engagent à:
11. Déterminer, sur la base des meilleures informations scientifiques disponibles, si certaines
activités de pêche de fond risquent d'avoir un impact négatif sensible sur les écosystèmes
marins vulnérables et, le cas échéant, s'assurer que ces activités sont soit gérées de façon à
prévenir ces effets négatifs, soit interdites.
12. Appliquer les procédures suivantes dans le cadre de l'évaluation décrite au paragraphe 11:
a) Les participants doivent soumettre au groupe de travail scientifique provisoire les
évaluations précisant si les activités de pêche de fond envisagées auront ou non un
impact négatif sensible sur les écosystèmes marins vulnérables, ainsi que les mesures
de gestion proposées pour empêcher ces impacts, et rendre ces évaluations publiques.
b) Le groupe de travail scientifique provisoire examine les évaluations et les mesures de
gestion proposées et transmet ses commentaires au participant concerné. Aux fins de
cet examen, le groupe de travail scientifique provisoire définit des critères
provisoires préliminaires et met en place une procédure afin de s'assurer que les
commentaires sont transmis au participant concerné et à tous les autres participants
dans un délai de deux mois. Entretemps, le participant qui a soumis l'évaluation peut
appliquer les mesures de gestion proposées à titre provisoire.
c) Sur la base des évaluations soumises au titre du sous-paragraphe (a) et des
commentaires transmis au titre du sous-paragraphe (b), les participants peuvent
autoriser des navires battant leur pavillon à entamer des activités de pêche de fond
dans la région de la zone pour laquelle l'évaluation a été réalisée et demander à ces
navires d'appliquer des mesures de conservation et de gestion pour empêcher tout
impact négatif sensible.
d) Les participants sont tenus d'informer le secrétariat provisoire des mesures requises
au titre du sous-paragraphe (c) et de lui transmettre une liste des navires concernés
par les mesures, ainsi que de rendre ces informations publiques.
13. Prendre en compte, dans le cadre des évaluations décrites aux paragraphes 11 et 12, toute
directive technique internationale concernant les normes, les critères ou les spécifications
permettant d'identifier les écosystèmes marins vulnérables et l'impact des activités de pêche
sur ces écosystèmes qui pourrait avoir été prise.
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