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Le bâtonnier n’est pas le conseil de l’Ordre
le 10 juin 2015
AVOCAT | Organisation de la profession
La cour d’appel de Paris a rejeté un recours formé par un avocat contre une décision émanant de la
commission « Publicité » du barreau de Paris, lui enjoignant de cesser d’utiliser le nom de domaine
fiscalite.com. L’avocat aurait dû diriger son recours contre le bâtonnier et non contre le conseil de
l’Ordre.
Paris, 28 mai 2015, n° 14/18741
Un avocat inscrit au barreau de Paris utilise le nom de domaine fiscalite.com. La commission «
Publicité » du barreau de Paris lui a demandé, par courrier, sur le fondement des dispositions de
l’article 10.5 du Règlement intérieur national (RIN) [et non 10.6 comme mentionné dans l’arrêt,
ndlr] de cesser d’utiliser ce nom de domaine. Ces dispositions prohibent en effet l’utilisation d’un
nom évoquant un domaine du droit. Tel était manifestement le cas en l’espèce. Cependant, l’avocat
concerné a refusé d’obtempérer à la demande de la commission, qui a, elle, maintenu sa demande
en lui donnant un délai. L’avocat concerné a formé une réclamation amiable devant le bâtonnier,
qui n’a pas répondu à sa demande. Il a également demandé au président du Conseil national des
barreaux (CNB) d’abroger les alinéas 2 et 3 de l’article 10.5 du RIN. Le président du CNB a refusé et
l’avocat a saisi le Conseil d’État d’un recours contre la décision de refus.
Recours contre la décision de refus implicite du bâtonnier
L’avocat a, par lettre recommandée, formé un recours auprès de la cour d’appel contre la décision
implicite de refus du bâtonnier. Le recours était dirigé contre le conseil de l’Ordre des avocats de
Paris. Ce dernier a soulevé divers moyens d’irrecevabilité que la cour d’appel a décidé d’examiner,
malgré la demande de sursis à statuer, déposée par l’avocat, dans l’attente de la décision rendue
par le Conseil d’État.
Une décision faisant grief
Le conseil de l’Ordre concluait en premier lieu à l’irrecevabilité du recours, dans la mesure où la
décision querellée n’était qu’un simple avis, sans existence juridique, et n’était ni une décision ni
une délibération du conseil de l’Ordre, seules concernées par le recours visé à l’article 19 de la loi
du 31 décembre 1991. La cour a jugé au contraire que les deux courriers adressés à l’avocat par la
commission « Publicité » n’étaient pas de simples avis, mais des « injonctions », qui portaient grief
aux intérêts professionnels de l’avocat. Par ailleurs, l’avocat n’a pas formé de recours contre ces
injonctions elles-mêmes, mais contre le refus implicite du bâtonnier de statuer sur sa réclamation
amiable. Le recours est donc recevable de ce chef.
L’Ordre, le conseil de l’Ordre, le barreau et le bâtonnier
Le conseil de l’Ordre soulevait aussi l’irrecevabilité du recours en ce qu’il était dirigé contre le
conseil de l’Ordre, alors que la décision de refus implicite avait été rendue par le bâtonnier. La cour
a relevé que l’avocat avait formé un recours contre l’Ordre des avocats et que c’est le conseil de
l’Ordre qui est intervenu à l’instance. Elle a souligné que les injonctions en cause émanaient de la
commission « Publicité », laquelle, même en l’absence de délégation formelle, agit pour le compte
du bâtonnier. Le recours devait en conséquence être dirigé vers ce dernier. Elle rejette
l’argumentation du demandeur qui, aux termes d’un raisonnement un peu nébuleux, soutenait que
les notions d’ « Ordre » et de « barreau » se confondent. Selon lui l’Ordre dispose de la personnalité
morale et le conseil de l’Ordre et le bâtonnier en sont les organes d’administration. La cour d’appel
a rappelé que même s’il peut être admis que le vocable « Ordre » est employé à la place de celui
de « barreau » ou en combinaison avec ce dernier, la loi de 1971 distingue deux organes au sein de
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l’établissement public qui regroupe les avocats réunis auprès d’un même tribunal d’instance, à
savoir le bâtonnier et le conseil de l’Ordre. Chacun de ces deux organes est doté de pouvoirs
propres. En conséquence, il appartenait au requérant de désigner contre lequel de ces deux
organes il souhaitait agir. En l’occurrence, l’avocat demandeur n’a pas agi contre le bâtonnier et
son recours est donc irrecevable.
par Anne Portmann
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