Université de Caen LMNO Entropie et désordre en thermodynamique ∗ C. LONGUEMARE 3 janvier 2017 ∗. une introduction classique Plan 1. La thermodynamique classique 2. La thermodynamique statistique 3. L’équation de Boltzmann 0-a Historique La thermodynamique classique est une science du XIXième siècle qui s’est transformée au XXième siècle en une autre discipline : la physique statistique en même temps que d’autres secteurs de la physique connaissaient une profonde mutation, relativiste et quantique. Nom s’intéresse à : il définit Carnot ( 1776-1832) chaleur ↔ travail ? S↑ Joules ( 1818-1889) l’énergie interne Q, W, U Helmholtz ( 1822-1882) le potentiel thermodynamique F Gibbs( 1839-1903) le formalisme de la thermo G Nernst ( 1864-1941) entropie à 0 K S0 1 W S (P,V) Cp − Cv Q-W F S H kT G (PV,V) S(Ω) S0 Watt Carnot Clapeyron Mayer Joules Helmholtz Clausius Thomson Maxwell Gibbs Amagat Boltzmann Nernst Ecossais Français Français Prussien Anglais Prussien Prussien Anglais Ecossais Américain Français Autrichien Prussien 1736-1819 1796-1832 1799-1864 1814-1878 1818-1889 1822-1882 1822-1882 1824-1892 1831-1879 1839-1903 1841-1915 1844-1906 1864-1941 Introduction Glossaire • Système thermodynamique (fermé ou ouvert) • Variables thermodynamiques (intensives, extensives) :X, x • Paroi diatherme ou adiabatique • Source de chaleur , de travail : Q, W Q, W sont positifs si l’énergie est reçue par le système • Capacité calorifique Ci = ( dQ dT )i • Energie interne U • Température thermodynamique T 2 Introduction Exemples de systèmes • une mole de gaz parfait ou de gaz réel • un cristal de moments magnétiques • un solide macroscopique • un four chaud ∼ gaz de photons • un pile électrique réversible • un corde tendue • le coeur d’une étoile • tout système macroscopique qui varie avec la température thermodynamique T 3 Notations et constantes thermodynamiques U S v P T N ∼N W Q C Energie interne Entropie volume pression Température Nombre de constituants Chaleur et travail Capacité calorifique N kB R = kB N nombre d’Avogadro cte Boltzmann cte des gaz parfaits 6, 022 1023 8, 617 10−5 8, 314 mol−1 eV.K−1 J.K−1.mol−1 4 Equilibre, Transformation et Cycles — Equilibre macroscopique : caractérisé par des mesures macroscopiques — Hypothèse ergodique : La moyenne statistique = moyenne temporelle — Transformations et cycles pour les cycles ∑ Qi + W = 0 i 5 Un monde physique et un monde magique — L’inégalité de Clausius pour les cycles "réels" ∑ Qi i Ti ≤0 — Applications aux cycles 1. monotherme réels Q < 0 ⇒ W = −Q > 0 T 2. ditherme réels Q Q1 + 2 < 0 avec − W = Q1 + Q2 T1 T2 3. cycles réversibles I dQ )rev = 0 ( T — Définition classique de la fonction Entropie ∗ ∆S = SB − SA = ∫ dQ ( )rev T AB ∗. à une constante près 6 Croissance universelle de l’entropie — transformation réelle multitherme A → B ∆S = SB − SA ∑ −Qi i Ti + SB − SA ≥ 0 — Applications aux transformations monotherme réelles ∆U = W + Q −Q + T ∆S ≥ 0 W ≥ ∆(U − T S) = Wrev Les transformations réversibles sont les plus "efficaces" W > Wrev ou − W < −Wrev 7 La statistique de Boltzmann 1 — Hypothèse ergodique : les probabilités ∼ moyennes temporelles — Etats microscopiques sont dénombrables i — Niveaux d’énergie macroscopique ϵj , "dégénérescence" gj — N constituants discernables sans principe d’exclusion quantique — L’hypothèse de Boltzmann S = kB Ln(Ω) Ω nombre de "complexions" ! — A l’équilibre , l’entropie est maximum pour un système isolé Smax Ωmax à U et N fixés 8 La statistique de Boltzmann 2 Dénombrement • calcul de Ω(..nj ...) Ω = N! n n g1 1 g2 2 ... n1!n2!... • Maximisation par la méthode de Lagrange à U et N constants ∗ F (..nj ..) = Ln(Ω) + αN − βU • Conclusion : le facteur de Boltzmann nj ∝ gj exp(−βϵj ) • Le lien avec la thermodynamique classique : on montre que 1 β = kB T ∗. avec l’utilisation de la formule de Stirling 9 La statistique de Boltzmann 3 travail, chaleur et information • l’entropie S à l’équilibre par la formule de Stirling ∑ nj nj Ln( Smax = −kB ) N g j j • introduisons la "probabilité" de l’état i du niveau ϵj ∑ nj alors pij Ln(pij ) S = −kB N pij = N gj ij • Avec U = ∑ j nj ϵj on montre ∑ ∑ dU = ϵj dnj + nj dϵj = dQ + dW 10 La statistique de Boltzmann 4 le gaz parfait de Maxwell-Boltzmann • les états des N constituants de masse m dans le volume v dans le volume v : (i, j) = (⃗ x, p ⃗) p2 ϵ = énergie cinétique 2m • la somme sur les niveaux j et le facteur de Boltzmann ∑ ≡ j ∫ d3 x d 3 p p2 exp(− ) 2mkB T • la distribution de probabilité en p ⃗ ∝ p2 ) p2dp dΩp exp(− 2mkB T • la distribution de probabilité en ⃗ x : uniforme dans v ∝ d3x si ⃗ x∈v 11 Mécanique statistique - L’équation de Boltzmann C. LONGUEMARE 30 novembre 2010 " Le livre de M. Boltzmann sur les Principes de la Mécanique nous incite à établir et à discuter du point de vue mathématique d’une manière complète et rigoureuse les méthodes basées sur l’idée de passage à la limite, et qui de la conception atomique nous conduisent aux lois du mouvement des continua." David Hilbert (1900). ∗ ∗. http ://fr.wikipedia.org/wiki/equation de Boltzmann Plan 1. La mécanique : statistique 2. L’équation de Boltzmann : f1(x, t) 3. Théorème H de Boltzmann : Ṡ ≥ 0 0-a La mécanique statistique 1 • Système de la mécanique statistique 1 N constituants microscopiques sous agitation thermique N ∼ 1023 >> 1 • Etat microscopique Classiquement , l’état de tous les constituants peut être déterminé à l’instant t dans l’espace de phase x̃. x̃ = (xi ) = (Xi , pi )i = 1,...N soit 6N dimensions • La densité de probabilité dans l’espace de phase , symètrique par rapport aux permutations, est normalisée à N ! ∫ D(x̃) = D(x1 , ...xN ) D(x̃) dτ = N ! avec dτ = dx1 ...dxN • Hypothèse ergodique La mesure macroscopique de A est la moyenne sur un "ensemble" d’états microscopiques du système. ∫ 1 1 D(x̃) A(x̃) D(x̃) dτ soit P(x̃) = <A> = N! N! 1 La mécanique statistique 2 • fonctions de distribution à une et deux particules ∫∑ ∫ 1 f1 (x) = N1! D(x̃) dx2 ...dxN δ(x − x )D(x̃) dτ = i i N −1 ! f2 (x, x′ ) = = 1 N −2 ! ∫ D(x̃) dx3 ...dxN ∫ f1 (x) est la densité de constituants en x avec f1 (x) dx = N • Les fonctions de corrélation à deux particules sont par définition g2 (x, x′ ) g2 (x, x′ ) = f2 (x, x′ ) − f1 (x)f1 (x′ ) • pour les systèmes dilués V → ∞ et N >> 1 g2 (x, x′ ) → 0 • Par exemple, la densité de probabilité à t D(x̃ = x1 , ...xN ) = permutations ∑ δ(xi1 − x1 (t))... δ(xiN − xN (t)) ∀ i1 ,...iN 2 La mécanique statistique 3 (la dynamique classique) • le crochet de Poisson {A, B} à N constituants {A(x̃), B(x̃)} = ∑ ( 3N ∂A ∂B ∂A ∂B − ) ∂X ∂p ∂p ∂X • évolution de la fonction A(x̃, t) du système de N constituants Ȧ = −{H, A} = Λ ◦ A ⇒ A(x̃, t) = exp(Λ t) ◦ A(x̃, 0) avec Λ = ∑ ∑ exemples A ≡ i Xi ou A ≡ i pi ∑ 3N [ ∂H ∂p ∂ ∂X − ∂H ∂ ] ∂X ∂p • On montre (réf Akhiezer & al éditions MIR 1977) ∂ D(x̃, t) = −{H(x̃), D(x̃, t)} ∂t 3 • On montre les équations de BBGYK ∗ ∂ fn (x1 ...xn , t) = ...(fn ) + (fn+1)... ∂t n≤N • Si l’hamiltonien ne comprend que des termes à 1 ou 2 constituants ∑ ∑ H = H(i) + V(ij) = H(1) + H(2) i (ij) • Avec n = 1, BBGYK devient : ∂ f1 (x1 , t) = −{H(1), f1 (x1 , t)} − ∂t ∗. Bogolioubov-Born-Green-Yvon-Kirkwood ∫ dx2 {V(1, 2), f2 (x1 , x2 , t)} La mécanique statistique 4 Un modèle explicite à 2 corps • Précisons les hamiltoniens à un ou deux constituants p21 + U (X1 ) H(1) = 2m V(1, 2) = V (X1 − X2 ) • Calcul des crochets de Poisson {H(1), f1 (x1 , t)} = p1 ∂f1 m ∂X1 {V(1, 2), f2 (x1 , x2 , t)} = + F1 ∂f1 ∂p1 ∂f2 − F1,2 ( ∂p 1 ∂U F1 = − ∂X 1 ∂f2 ) ∂p2 ∂V F1,2 = − ∂X 1 • Equation d’évolution de f1 p1 ∂f1 ∂f1 ∂ f1 (x1 , t) + + F1 = − ∂t m ∂X1 ∂p1 ∫ dx2 {V(12), f2 (x1 , x2 , t)} Tous les termes de l’équation ci-dessus sont de dimension f t • Si le système est dilué (sans corrélations) f2 (x1 , x2 , t)} = f1 (x1 , t)f1 (x2 , t) + 0. 4 L’équation de Boltzmann 1 Les hypothèses 1. Les particles interagissent selon des collisions binaires ; le gaz est suffisamment dilué pour pouvoir négliger les corrélations. f2 (x1 , x2 , t)} = f1 (x1 , t)f1 (x2 , t) 2. Les collisions sont localisées dans l’ espace et donc dans le temps. A la limite , on doit pouvoir poser V (X1 − X2 ) = a δ(X1 − X2 ) 3. Les collisions sont élastiques, c’est-à-dire que l’impulsion et l’énergie sont préservés lors d’une collision. Le vecteur ⃗e (figure 2) sur la demi-sphère unité détermine l’état final ⃗r .⃗e) ⃗e ⃗1 + q⃗ = p ⃗1 + (mV p ⃗′1 = p ⃗r .⃗e) ⃗e p ⃗′ = p ⃗ − q⃗ = p ⃗ − (mV (⃗e est la direction du transfert d’impulsion, voir l’annexe ) 4. Les constituants sont des sphères dures. La section différentielle s’écrit dσ = s2 cos(α) dΩα = R2 dΩθ ⇒ σtot = 4πR2 (annexe : s = 2R) 5. Equation cinétique de Boltzmann s’écrit ∂ ∂t f (x, t) + L(2) (x, f ) p ∂f m ∂X = ∫ + F ⃗r | |V ∂f ∂p dσ dΩθ = L(2) (x, f ) = intégrale de collision (f1′ f ′ − f1 f ) d3 p1 dΩθ f1′ = f (X, p′1 ) f ′ = f (X, p′ ) f1 = f (X, p1 ) f = f (X, p) Les termes de l’équation sont de dimension f t 5 L’équation de Boltzmann 2 Espace de phase et intégrale de collision 6 L’équation de Boltzmann 3 et l’entropie Les hypothèses 1. Sans corrélations la distribution de probabilité du système s’écrit ∫ ∏ D(x̃) = f (xi ) avec f (x) telle que f (x) dx = 1 P(x̃) = N! i 2. La définiton de l’entropie conduit à ∫ ∫ S = −k P(x̃) Ln(P(x̃)) dτ = −kN f (x) Ln(f (x)) dx Cette relation définit l’entropie à une constante près car si f → a f et x → x/a S → S − kN Ln(a) 3. La variation de l’entropie dans tout l’espace ∫ ∂f (x) Ṡ = −k N Ln(f (x)) dx avec dx = d3 X d3 p ∂t 7 4. La variation de l’entropie ne dépend que de l’intégrale de collison (Annexe 2) donc ∫ ⃗r | dσ (f ′ f ′ − f1 f ) Ln(f ) d3 p1 d3 p dΩθ d3 X Ṡ = −kN |V 1 dΩθ ⃗r | est invariant dans ces 5. Puis on symétrise et on inverse la collision ; | V transformations, idem pour l’élément d’intégration, ∫ dσ f1′ f ′ 1 ⃗ kN | Vr | ) (f1′ f ′ − f1 f ) d3 p1 d3 p dΩθ d3 X Ln( Ṡ = + 4 dΩθ f f1 6. Conclusion f1′ f ′ ∀ u= f f1 ⇒ Ln(u)(u − 1) ≥ 0 ⇒ Ṡ ≥ 0 ⃗ 7. A l’équilibre f (x) est évidemment indépendant de X il reste à démontrer que la distribution de Maxwell satisfait à Ṡ = 0 (ci-après) 8. Les deux termes intervenant dans Ṡ peuvent être interprétés comme des gains et des pertes entropiques ⃗r |→∼ 0 et Ṡ → 0. 9. A la limite T → 0 , | V La statistique classique de Maxwell • La distribution de Maxwell à un constituant (avec β = f (x) dx ∝ p2 ) exp(−β 2 m 1 ) kT d3 X d3 p • Vérifions que l’entropie est stable pour cette distribution ′2 2 2 f1′ f ′ p′2 1 + p − p1 − p ) = 1 = exp(−β f f1 2 m à cause de la conservation de l’énergie dans la collision élémentaire a + b → a′ + b ′ • Conclusion : dans les conditions de la distribution de Maxwell, Ṡ réalisé = 0 et l’équilibre est L(2) (x, f ) = 0 et Ṡ = 0 8 Annexe 1 soit à décrire une collision à deux corps sans changement des constituants : a + b → a ′ + b′ (p) + (p1 ) = (p′ ) + (p′1 ) cons de (p) — Le transfert d’impulsion q⃗ q⃗ = p ⃗ − p ⃗′ = −⃗ p1 + p ⃗′1 — L’impulsion totale du système a + b p ⃗tot = p ⃗ + p ⃗1 = p ⃗′ + p ⃗′1 — La vitesse relative des constituants ⃗r = ⃗v − ⃗v1 V si ma = mb = m q⃗ = ⃗ ′ = ⃗v ′ − ⃗v ′ V r 1 m ⃗ ⃗ ′) (Vr − V r 2 9 1. Dans le laboratoire • Conservation de l’énergie avec ma = mb = m 2 2 p′2 + p′2 1 = p + p1 • Conséquence (⃗ p−p ⃗1 ) q⃗ = q⃗ 2 Soit ⃗e dans la direction q⃗ : ⃗r .⃗e) ⃗e q⃗ = m (V Le vecteur ⃗e sur la demi-sphère unité détermine l’état final ⃗r .⃗e) ⃗e p ⃗′ = p ⃗ − q⃗ = p ⃗ − m (V ⃗r .⃗e) ⃗e ⃗1 + q⃗ = p ⃗1 + m (V p ⃗′1 = p - 2. Collision de sphères dures dans le référentiel du centre de masse 3. La section efficace dans centre de masse — La distance d’interaction s = 2R et le paramètre d’impact b b = s sin(α) 0 ≤ α ≤ π/2 L’angle de diffusion θ θ + 2α = π La section efficace σ dσ = 2πb db = s2 sin(α)cos(α) dα dϕ 0≤b≤s — La section différentielle s2 dΩθ ⇒ σtot = 4πR2 dσ = s cos(α) dΩα = 4 — Le nombre de collisions par unité de temps dans dΩ 2 dn = F × dσ avec F = densité × Vr Annexe 2 ⃗ p rappel x = (X, ⃗) Soit à démontrer que la variation de l’entropie ne dépend que l’intégrale de collision L(2) (x, f ) • 1. La variation de l’entropie dans tout l’espace est : ∫ ( ∂f (x) ) Ṡ = −k N Lnf (x) dx ∂t ∂f (x,t) ∂t p = −m ∂f ∂X − F ∂f ∂p + L(2) (x, f ) équation de Boltzmann • 2. en remplaçant ... Ṡ = −k N ∫ ( p ∂f ∂f − − F + L(2) (x, f ) m ∂X ∂p ) Lnf (x) dx • 3. Les deux premiers termes correspondent à l’intégrale d’une divergence : ∫ Ṡ = −k N { div(J(x)) + L(2) (x, f ) Lnf (x)} dx J(x) = f (x)(1 − Lnf (x)) ( p m ) F (X) • 4. donc Ṡ ne dépend que de L(2) (x, f ) ∫ Ṡ = −k N L(2) (x, f ) Lnf (x) dx 10