INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE DE L`ESPRIT Cours III

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Cours: Introduction à la philosophie de l’esprit, et lecture de textes
Université de Fribourg, semestre d’été 2003
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Vendredi : 13-17hrs
INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE DE L’ESPRIT
Cours III (11 avril 2003) : La théorie de l’identité de l’esprit et du cerveau (Mind-Brain
Identity Theory) comme tentative, à la lumière des faiblesses du behaviorisme, de
défendre le statut des phénomènes mentaux comme quelque chose d’intérieur
causalement responsable pour le comportement sans pour autant retomber dans le
dualisme (cartésien).
L’idée de base : Chaque état mental est en réalité identique avec un état du cerveau, un
processus neuronal ou un trait d’un processus dans le système nerveux central.
Exemples : Les douleurs (les rêves, les pensées...) ne sont en réalité rien d'autre que des
processus dans le cerveau.
Plausibilité prima facie :
- progrès dans les neurosciences
- explication parcimonieuse ou plus simple qu’une
explication dualiste
Quelques clarifications concernant le vocabulaire en usage :
Caractéristique mentale, état mental, événement mental, processus mental, processus
neuronal ; propriété mentale, propriété matérielle ou physique ; prédicat mental.
Un mot encore concernant la distinction entre propriétés et prédicats pour mieux apprécier la
signification des thèses concernant l’identité de propriété par la suite.
Théorie de l’identité (version 1) (voir Beckermann, p. 100)
Chaque propriété mentale ou chaque état mental est identique à une propriété physique
ou un état physique.
Théorie de l’identité (version 2) (voir Beckermann, p. 101)
Chaque prédicat mental désigne de fait une propriété physique ou un état physique ;
ou encore :
Pour chaque prédicat mental M il existe un prédicat physicaliste P tel que M et P
désignent la même propriété ou le même état.
Le concept d’identité : identité a priori (a=a) ; identité a posteriori (a=b).
(a) appliqué aux objets individuels :
John Le Carré
Mount Everest
L’étoile du matin
Hermann Broch
David Cornwell
Tschomolungma
l’étoile du soir
l’auteur de « La mort de Virgile »
(b) appliqué aux propriétés :
une propriété particulière, e.g., une couleur, peut être désignée
par des prédicats distincts :
« est rouge »
« est de la couleur de tomates mûries »
Eduard Marbach (Université de Berne): [email protected]
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Les « identités théoriques » : elles sont découvertes à l’aide des sciences qui explorent la
manière dont le monde est composé ; par exemple :
La foudre, on a découvert, est une décharge électrique
L’eau, on a découvert, est H2O
La température, on a découvert, est l’énergie kinétique moyenne de molécules
La liquidité, on a découvert, est une espèce particulière d’arrangement moléculaire
Un théoricien de l’identité en philosophie de l’esprit pense que l’on a de bonnes chances à
découvrir, en recherche neuroscientifique, que certaines propriétés que nous désignons
maintenant (encore) en utilisant des termes mentaux sont des propriétés du cerveau.
En général, la thèse de la théorie de l’identité des propriétés, dite identité des types :
Chaque propriété mentale est (en réalité) identique à une propriété physique
(‘physique’ au sens large).
Par exemple : La propriété de ressentir une douleur est identique à la propriété d'avoir un
cerveau qui se trouve dans un certain état neurophysiologique. Ici, l’expression ,,...ressent
une douleur" et l’expression ,, ... a un cerveau qui se trouve dans l'état neurophysiologique
E" ne sont pas synonymes, mais elles réfèrent à la même propriété.
Encore une fois : Une telle identité est dite être vraie a posteriori parce que la vérité ne peut
être constatée que sur la base de connaissances empiriques et non pas sur la base d'une
analyse du contenu des concepts mentaux ou de la signification des prédicats mentaux.
De la thèse de l'identité des types il faut distinguer la thèse de l'identité des token, selon
laquelle chaque événement mental concret est identique à un événement physique concret.
Problème: Que signifie ‘identité’ par rapport aux propriétés ?
La loi de Leibniz :
- L’indiscernabilité des identiques :
Si a et b sont identiques, ils ont toutes les propriétés en commun.
Symboliquement : a = b Æ ∀ F (Fa ↔ Fb)
- L’identité des indiscernables :
Si a et b ont toutes les propriétés en commun, alors ils sont identiques.
Symboliquement : ∀F (Fa ↔ Fb) → a = b.
Arguments en faveur de la théorie de l’identité :
- l’interaction causale
- la fermeture causale du monde physique
Arguments contre la théorie de l’identité
- une objection qui est basée sur une erreur intensionnelle :
Il est possible qu'une personne sache beaucoup de ses propres sensations mais ne sait
rien de l'existence des processus neurophysiologiques.
Eduard Marbach (Université de Berne): [email protected]
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Une formulation plus précise de cette objection:
(1) A sait qu'il ressent une douleur.
(2) A ne sait pas que son cerveau se trouve dans l'état neurophysiologique E.
Donc
(3) La propriété d'avoir des douleurs n'est pas identique à la propriété d'avoir un cerveau qui
se trouve dans l'état neurophysiologique E.
Contre-objection:
La substitution de termes coréférentiels dans un contexte intensionnel peut changer la valeur
de vérité de la phrase en question.
Voir l'argument suivant qui clairement n'est pas acceptable:
(1) Colomb sait qu'il y a de l'eau sur la terre.
(2) Colomb ne sait pas qu'il y a de l'eau sur la troisième planète du soleil.
Donc:
(3) La terre n'est pas identique à la troisième planète du soleil.
- une objection qui est basée sur des considérations phénoménologiques concernant les
structures des phénomènes mentaux conscients :
- analyse des propriétés mentales du point de vue de la 1e personne (réflexion)
- analyse des propriétés physiques, neuronales, du point de vue de la 3e personne
- éléments d’une analyse réflexive de structures de l’expérience consciente
- L'objection de la réalisabilité multiple
(objection prise au sérieux)
Il paraît plausible que les états mentaux peuvent être 'réalisés' de manières
différentes. Exemples : Animaux, robots, extraterrestres, plasticité du cerveau.
C'est à cause de cela qu'il ne faut pas (selon cette objection) identifier les types d'états
mentaux à des états physiologiques concrets.
Littérature :
The Mind/Brain Identity Theory. A collection of papers edited by C V Borst
The Macmillan Press, London and Basingstoke 1970
Materialism and the Mind-Body Problem, edited by David M. Rosenthal
Prentice-Hall, Englewood Cliffs, N.J. 1971.
Macdonald, Cynthia. Mind-Body Identity Theories. Routledge London and New York 1989.
Lecture recommandée: P. Engel 25-29, J. Kim 47-72, A. Beckermann 98-127.
Eduard Marbach (Université de Berne): [email protected]
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