Imagerie des traumatismes du rachis cervico-dorsal M Chebil, M Ben Mansour, M Mhiri Souei, N Arifa Achour, K Mrad Dali, R Ben Hmida, K Tlili Graiess Service d’imagerie médicale Hôpital Sahloul Sousse TUNISIE INTRODUCTION Reconnaître une lésion vertébrale traumatique du rachis cervico-dorsal n’est pas toujours aisé du fait de la complexité anatomique de cette région. L’analyse d’une image en radio-traumatologie du rachis cervico-dorsal est d’autant plus délicate que les incidences conventionnelles sont difficiles à réaliser voire parfois impossibles du fait des attitudes antalgiques, des déplacements vertébraux ou des lésions associées. Pour cela, le recours à la T.D.M permet une meilleure analyse des traits de fracture et des déplacements des différents fragments l’IRM s’impose actuellement comme un examen de première intention en présence de signes neurologiques. La sévérité du traumatisme médullaire est le déterminant du pronostic neurologique ultérieur. Une cartographie lésionnelle initiale détaillée par IRM guide la prise en charge immédiate et prédit de l'évolution neurologique . Par ce travail, nous essayerons de mettre en evidence la place de l’imagerie dans l’exploration des lesions traumatiques du rachis cervico dorsal . Rappel anatomique Etude générale des vertèbres : Ce sont des os impairs, symétriques et rayonnés. Elles forment le squelette du rachis. On compte 32 vertèbres environ : 7 vertèbres cervicales, 12 vertèbres thoraciques , 5 vertèbres lombaires,5 vertèbres sacrées (sacrum), 3 à 4 vertèbres coccygiennes (coccyx). A l'exception des deux premières vertèbres cervicales et du sacrum, la vertèbre a des caractéristiques générales assez similaires. Elle est formée en avant d'un corps vertébral (spongieux) et d'un arc osseux postérieur. Les faces supérieures et inférieures du corps constituent les plateaux vertébraux. L'arc postérieur est formé de deux pédicules, de deux lames vertébrales, d'un processus (apophyse) épineux, de deux processus (apophyses) transverses et de quatre processus (apophyses) articulaires. Rappel anatomique La première vertèbre cervicale ou atlas se présente sous la forme d'un anneau constitué par deux colonnes latérales ou masses latérales réunies par deux arcs osseux, antérieur et postérieur. La deuxième vertèbre cervicale ou axis se rapproche plus de la vertèbre cervicale type mais présente la particularité de posséder une apophyse volumineuse ou dent (ou apophyse odontoïde) qui se détache de la face supérieure du corps vertébral et s'engage dans le foramen atloïdien pour s'articuler à la face postérieure de l'arc antérieur de C1. Rappel anatomique Le canal vertébral occupe toute la hauteur du rachis (à l'exception du coccyx) La morphologie du canal vertébral varie : prismatique triangulaire dans la région cervicale ; cylindrique dans la région thoracique et lombaire supérieure ; prismatique triangulaire dans les régions lombaire et sacrée. C'est au niveau de la première vertèbre cervicale (trou atloïdien) qu'il présente sa plus grande surface de section. Les dimensions canalaires sont liées à la mobilité du segment rachidien. L’espace épidural est un espace de glissement compris entre la duremère et les parois osseuses du canal vertébral. Il contient de la graisse, des vaisseaux, des nerfs et des ligaments Rappel anatomique Les foramen de conjugaison sont des orifices situés sur les parties latérales du rachis qui commencent en C2-C3. Chaque foramen livre passage au nerf spinal (et ganglion spinal), à des plexus veineux, à l'artère et aux veines radiculaires, au nerf sinuvertébral Elles s’articulent entre elles (les cervicales jusqu’aux lombaires) par l’intermédiaire d’un disque articulaire, inter corporéal et par l’intermédiaire des processus articulaires inférieurs et supérieurs. Les vertèbres thoraciques s’articulent également avec les côtes par les facettes costales. Les vertèbres sacrées et coccygiennes sont soudées. D’après anatomie Gérard Outrequin www.anatomie-humaine.com D’après anatomie Gérard Outrequin www.anatomie-humaine.com D’après anatomie Gérard Outrequin www.anatomie-humaine.com Etude radio-anatomique ETUDE RADIOLOGIQUE Radiographie standard Rachis cervical Peut être suffisant pour permettre de poser les indications thérapeutiques Réalisé généralement chez les patients non polytraumatisés +++ Les incidences courantes: De face : permet d’analyser le rachis cervical de C3 à C7 et jusqu’à D1-D2 De profil : permet d’analyser également les charnière cervico-occipitale et cervico-dorsale. Bouche ouverte: permet d’explorer le rachis cervical supérieur C1-C2. Clichés dynamiques: Peuvent être réalisés secondairement (10-15 jours ) et avec prudence Rachis dorsal De face De profil Parfois complétés par des clichés centrés RADIOGRAPHIE DU RACHIS CERVICAL DE FACE MASSIF DES ARTICULAIRES ET DES TRANSVERSES DISQUE INTERVERTÉBRAL UNCUS CORPS VERTÉBRAL APOPHYSE ÉPINEUSE PÉDICULE RACHIS CERVICAL DE PROFIL APOPHYSE ARTICULAIRE SUPÉRIEUR APOPHYSE ARTICULAIRE INFÉRIEUR APOPHYSE ÉPINEUSE ARC ANTÉRIEUR DE C1 APOPHYSE ODONTOÏDE CORPS VERTÉBRAL DISQUE INTERVERTÉBRAL PARTIES MOLLES RÉTROPHARYNGEÉS RACHIS CERVICAL DE PROFIL Ligne des articulaires supérieure Ligne des articulaires inférieure La ligne des épineuses Ligne spino-laminaire Ligne pédiculaire Ligne vertébrale antérieure Ligne vertébrale postérieure RACHIS THORACIQUE DE FACE APOPHYSE ÉPINEUSE PÉDICULE CORPS VERTÉBRAL DISQUE INTERVERTÉBRAL LIGNE PARAVERTÉBRALE APOPHYSE ARTICULAIRE SUPÉRIEUR? APOPHYSE ARTICULAIRE INFÉRIEUR? ARTICULATION COSTOVERTÉBRALE RACHIS THORACIQUE DE PROFIL CORPS VERTÉBRAL TROUS DE CONJUGAISON PÉDICULE DISQUE INTERVERTÉBRAL Tomodensitométrie La TDM devient le moyen le plus approprié dans le bilan initial particulièrement, du polytraumatisé. Elle permet de faire un bilan osseux complet et plus précis que les clichés standards, de préciser l'état du canal rachidien (rétrécissement, contenu anormal) et d'étudier facilement la charnière cervico-occipitale et les trous de conjugaison. La reconstruction logicielle en trois dimensions après acquisition hélicoïdale en multi-détecteurs permet de mieux visualiser dans l'espace les fractures mal visibles et de mieux analyser les déplacements. La TDM peut être intégrée dans le bilan des lésions associées traumatiques (traumatismes thoraciques, lésions d'organes intraabdominaux, etc). Imagerie par résonance magnétique Elle est sans équivalent dans l’étude des lésions neurologiques et les lésions disco-ligamentaires et cartilagineuses. Le recours à l’IRM en urgence est de plus en plus indiqué dans les traumatismes cervicaux associant des signes neurologiques surtout en l’absence de lésions osseuses pouvant expliquer le tableau clinique. Elle permet la mise en évidence des contusions médullaires, oedémateuses ou hémorragiques ou de très rares sections médullaires. Elle permettra également de visualiser un hématome épidural, une hernie discale, des lésions vasculaires associées particulièrement des artères vertébrales et carotides. L'IRM, conditionne la prise en charge du traumatisé médullaire aigu en mettant en évidence une lésion compressive qui peut être levée chirurgicalement. Imagerie par résonance magnétique Les séquences sagittales pT1 permettent une étude anatomique alors que celles pT2 mettent en évidence les anomalies du signal de la moelle en rapport avec les lésions hémorragiques et/ou œdémateuses. Les séquences en EG sont plus sensibles dans la détection des hémorragies intra médullaire ; Les séquences STIR détectent les contusions osseuses sans discontinuité corticale. L'injection de Gadolinium ne semble pas utile dans le contexte traumatique médullaire. Imagerie par résonance magnétique Les anomalies morphologiques qui peuvent être visualisées seront à type de moelle sectionnée, comprimée et/ou élargie. Les anomalies de signal focales à type d’hypo signal T1 et hyper signal T2 seraient en rapport avec de l’œdème . L'hémorragie, à cette phase aigue, sera visualisée sous forme d’iso signal en ES pT1 et pT2 mais en hypo signal très net en EG. Les lésions mixtes œdémato-hémorragiques auront un aspect plus ou moins hétérogène en T1 et en T2. La mise en évidence des lésions en hypo signal T1 et hypo signal T2 au niveau de la moelle serait une caractéristique péjorative signant la présence des lésions sévères. Classification radio-anatomique Rachis cervical Les lésions du rachis cervical sont les plus graves et les plus morbides et mortelles.En effet elles s’accompagnent fréquemment par une atteinte médullaire. On distingue anatomiquement le rachis cervical supérieur comprenant C1 et C2 et le rachis cervical inférieur de C3 à C7. Rachis cervical supérieur mécanisme Lésions anatomique exploration -TDM : elle montre le trait, l’étendue, un hématome épidural,hernie discale… -lésion qui élargi le canal rachidien Fracture divergente des Masses latérales de C1 Fx de Jefferson Compression axiale Fracture de l’arc antérieur et de l’arc postérieure de C1 Entorse grave C1-C2 hyperflexion Lésion du ligament -TDM confirme une rupture ligamentaire pure ou fracture transverse de l’attache osseuse. -IRM++ Le risque de compression est important. Fracture bipédiculaire C2 hyperextension Fracture biisthmique de C2 TDM:donne une image plus nette des traits. Fractures de l’Odontoïde Hyperextension+tor sion (trauma violent) Fracture:Apex Col base TDM:montre le trait de fracture et le degré de déplacement. IRM+ Rachis cervical inférieur(C3-C7) mécanisme Lésion anatomique exploration Entorse cervicale hyperflexion Lésion partielle du segment mobile(distension déchirure ligamentaire) Rx STD dynamique: écart interépineux avec baillement des articulaires postérieures TDM Dite maligne si atteinte du disque intervertebral.pince ment discal + antélisthésis du corps sus-jacent Luxation cervicale Hyperflexion + distraction Atteinte sévère du segment mobile avec décoaptation des articulaires postérieures Rx STD:image typique d’antélisthésis avec accrochage des articulaires TDM:permet l’étude du canal rachidien et montre les fractures associées. IRM+ Hyperflexion+rota tion/translation Atteinte du segment mobile + fracture des massifs articulaires Subluxation + fracture articulaire TDM:lésions associées. IRM++ :atteinte radiculaire Flexion + compression Fracture du mur antérieure avec respect du mur postérieur RX STD TDM:la reconstruction est d’un grand apport. Fracture luxation Fracture tassement cunéiforme mécanisme lésion exploration Fracture communitive compression Fracture de tous le corps vertébral avec atteinte du mur postérieur Rx STD:image typique en Francisque TDM:permet un bilan des fractures, montre le recul et le degré de déplacement des fragments osseux IRM++ Fracture en tear drop Compression translation Atteinte complète du segment mobile avec fracture communitive vertébrale Rx STD:écart interépineux,affaissem ent du disque, Subluxation TDM:montre le décalage vertébral,bilan des fractures, hématome. IRM++++ Hernie discale post traumatique Flexion compression Tassement et saillie du disque RX STD TDM:confirme l’absence de lésion ostéoligamentaire IRM++ Traumatisme médullaire sur cervicarthrose Quelque soit le mécanisme Lésions dues aux ostéophytes et aggravent un deficit ancien Rx STD discarthrose IRM++ Rachis dorsal Au niveau dorsal(D1 à D10) les articulations avec les cotes forment la cage thoracique et confère a cette région peu de mobilité, d’où la rareté des lésions à ce niveau. Cependant les lésion à ce niveau obéissent à la loi de tout ou rien soit strictement bénignes (le plus souvent) ou grave (atteinte médullaire). La charnière dorsolombaire est le siège le plus fréquent des lésions vu sa grande mobilité(véritable pivot autour du quel se déplace la cage thoracique). Lésion anatomique / mécanisme Fractures bénignes Processus épineux Processus transversaire Coin antéro supérieur ou inférieur Fracture lamaire isolée exploration Rx STD:montre les traits de fracture. TDM non indiquée Fracture tassement cunéiforme La plus fréquente due à une flexion-compression Rx STD: enfoncement du tiers antérieur du corps vertébral TDM:faite si doute sur l’atteinte du mur postérieur Fracture communitive Éclatement du corps vertébral avec risque de recul du mur post RX STD: fracture corporéale, recul du mur post TDM++:montre un recul du mur post, des fragments intra canalaire IRM+++ Fracture luxation Luxation pure des articulaires ou associée a une fracture de celles-ci par translation antérieure Rx STD: montre un antélisthésis , accrochage articulaire TDM :peut montrer un hématome compressif. IRM+++ QUIZ fracture tear drop de C5. écart inter-épineux,affaissement du disque, Subluxation Entorse grave écart interépineux avec baillement des articulaires postérieures Avec subluxation. TDM:Fracture communitive du corps vertebral associée A des fractures pédiculaire et lamaire très déplacée Avec fragments intra canalaire. L’atteinte médullaire est certaine. Fracture tassement cuneiforme de D4 Fracture tassement cunéiforme et recul du mur postérieur TDM: fracture tassement de C4 avec important recul du mur postérieur. TDM :coupe axiale et reconstruction sagittale:fracture luxation C7 avec cisaillement medullaire. IRM coupe coronale T2 :Hernie discale post traumatique IRM coupe sagittale T2 :Recul du mur post de D7 avec hypersignal medullaire en regard. a b IRM. Coupe sagittale médiale pT2 (a), coupe sagittale médiale pondérée en STIR (b) foyer de contusion oedémateuse centro médullaire en regard de C3-C4 Notez le foyer de contusion oedemateuse de l’os spongieux au niveau de C3 sur la séquence STIR a b IRM. Coupe pT1 (a) et coupe pT2 (b) : Contusion oedémateuse de la moelle épinière au niveau de C6-C7 ; tuméfaction de la moelle en discret hyposignal T1 (flèche) avec zone peu étendue en hypersignal T2 (tête du flèche). a b IRM médullaire. Coupe sagittale médiale pT1 (a) et coupe sagittale médiale pT2 (b) : contusion hémorragique étendue sur 2.5 cm (flèche) en regard d'une hernie discale C6-C7 migrée vers le haut (tête du flèche). Conduite à tenir Si signes neurologiques : IRM en urgence de première intension Contusion médullaire Hématome épidural Hernie discale +++ Vaisseaux : artère vertébrale, artère carotide Spectroscopie + diffusion = avenir Si douleurs sans signe neurologique : Rx standard & TDM Fracture osseuse Articulaire postérieure Disque Instabilité Devant un polytraumatisé: TDM ++ (association fréquente de lésion cervicales aggravant le pronostic) Conclusion Les traumatismes du rachis cervico-dorsal constituent un problème diagnostique majeur vu leur fréquence et la grande mortalité et morbidité qui en découlent. La radiographie standard garde une valeur d’orientation diagnostique, la TDM de deuxième intention pour un bilan lésionnel précis qui est aujourd'hui l’examen le plus fiable pour le bilan lésionnel osseux et du segment mobile rachidien et ce après l’avènement du scanner hélicoïdal et multibarette et les possibilités de reconstruction dans les différents plans de l’espace. Cependant il ne faut jamais hésiter à opter pour la TDM de première intension dans l’exploration d’un polytraumatisé. Par ailleurs au moindre doute clinique ou tomodensitométrique d’atteinte médullaire, l’IRM constitue actuellement un examen incontournable pour objectiver les lésions neurologiques aussi bien médullaire que radiculaire.