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Entreprendre autrement : pour une économie plurielle dans un ancrage territorial refondé - Cahier n°3 n
L’ancrage territorial prend un importance nouvelle dans les logiques industrielles ou sociales actuelles.
Confrontée à de multiples orientations stratégiques parfois convergentes parfois paradoxales
(mondialisation, réputation, rentabilité, innovation, partenariat public privé…) l’entreprise se rend
bien compte qu’elle ne peut agir seule et se doit de tisser des liens et des réseaux qui portent et
accompagnent son développement. Mais, en même temps, elle est obligée de prendre en compte
les diérents modes d’évaluation de sa rentabilité, de son efficience, de son activité.
L’évaluation financière et comptable du résultat économique est un facteur qui doit être complété
ou relativisé par l’évaluation environnementale du coût d’obtention de ce résultat économique, par
l’évaluation du coût social, du risque sociétal, de l’eet de sa stratégie sur la réputation ou l’image
de la marque, du produit ou de l’activité.
De fait, les frontières de l’entreprise et du territoire deviennent de plus en plus perméables. La
société civile, véritable juge de paix de toutes ces évaluations, ne peut plus, ne veut plus faire la
diérence entre la rentabilité purement comptable et l’impact environnemental ou sociétal. Le
concept d’acceptabilité sociale s’applique aussi bien au service public qu’au secteur marchand
privé. Certaines pratiques, certains bénéces, certains investissements sont devenus publiquement
inacceptables alors même qu’ils sont parfaitement conformes au droit et aux traditions établies.
Une nouvelle économie émerge avec des modèles multiples parfois immatures, parfois visionnaires,
du quaternaire au soft power en passant par les smartcities, smarthomes, smartsystemes. Il est clair
que l’avenir est ouvert à un nouvel ordre d’entreprendre : plus économique en ressources et en
énergies, plus universel en usage, plus intelligent en services rendus à l’usager. Mais ce qui semble
faire la diérence est aussi ce statut de l’usager qui, de simple consommateur «end user» devient
coproducteur associé le plus en amont possible à la chaîne de coconception du produit ou du service !
Le progrès n’est pas une n en soi et peut cacher beaucoup de sourances ou de coûts cachés,
particulièrement en termes d’emploi et d’employabilité, mais nul doute que seule l’innovation
socialement acceptable et la convergence des technologies permettront des réponses capables de
satisfaire les attentes et les besoins d’une société de plus en plus « gourmande » et responsable.
Plus que jamais une veille ouverte et « généreuse » sur les tendances émergentes, les ruptures,
les crises de valeurs dans la société qui nous entoure est indispensable pour repenser sa stratégie
de développement. Il se pourrait que le lancement actuel de la Silver Economie soit le levier tant
attendu pour faire converger les synergies et les diérences de modèles… un même but, de vraies
valeurs partagées au-delà des fractures politiques ou sociales, et une même obligation de faire :
c’est peut-être l’émergence de ce nouveau modèle économique.
Avant-propos
Jean-Philippe MOUSNIER
Président de l’Association scientique belge
de veille sociétale VVE2025
Directeur fondateur du Living Lab Aequolab Laval
Technologies et fragilité